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3.
DE L’ESPECE
ET
DE LA CLASSIFICATION EN ZOOLOGIE
DE L'ESPÈCE
DE LA CLASSIFICATION EN ZOOLOGHE
PAR
L. AGASSIZ
Traduction de l'anglais
Par FÉLIX VOGELI
ÉDITION REVUE ET AUGMENTÉE PAR L'AUTEUR
PARIS
GERMER BAILLIERE, LIBRAIRE-EDITEUR
Rue de I’Ecole-de-Médecine, 17.
New-York
Londres
Baillière brothers, 440, Broadway.
Hipp. Baillière, 349, Regent street. |
MADRID, C. BAILLY-BAILLIÈRE, PLAZA DE TOPBTE, 46.
4869
Tous droits réservés
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AVERTISSEMENT DE L’EDITEUR.
Le contenu de ce volume fut d’abord publié comme
Introduction à un ouvrage de longue haleine, les Contri-
butions to the Natural History of the United-States, dont
la première partie parut, à Boston, en 1857. Plus tard,
et sous le titre de Æssay on Classification, il en fut fait à
Londres une réimpression, et l’auteur se borna à y ajouter
un chapitre, celui des Catégories d'analogie. Dans une
courte préface, il informait le lecteur de ces circonstances
et le priait de ne point perdre de vue que son livre avait —
été écrit en Amérique et pour les Américains :
_ «Le public de ce pays, disait-il, n’est pas le même que
le public d'Europe, Il n’y a point, aux États-Unis, une
classe de lettrés séparée et distincte du reste de la nation.
Au contraire, le désir de l'instruction y est si général
que je dois m’attendre à être lu par des ouvriers, par des
pêcheurs, par des laboureurs, autant que par des étudiants
ou des naturalistes de profession. Le langage scientifique
doit donc y revêtir une forme accessible à tous. »
En changeant d’idiome, la forme de l’£ssai n’a point
AVERTISSEMENT DE L’EDITEUR.
été modifiée. Toutefois cette traduction diffère de l’ori-
ginal en ce sens que l’ouvrage, revu par l’auteur, a reçu
d'importantes additions. C’est du reste ce que M. Agassiz
a cru devoir constater lui-même par la déclaration sui-
vante :
« Tot après mon retour de Rio de Janeiro aux Etats—
Unis, M. Vogeli, dont j'avais fait la connaissance au Brésil,
m'a communiqué la traduction qu'il avait faite de mon
Essai sur la classification. Nous avons lu ensemble cet
ouvrage, et l'impression que j'en ai reçue, à la distance
où j'étais de sa première publication, m'a engagé à y faire
de nombreuses retouches et à y ajouter trois chapitres
nouveaux. L'édition française que j'offre aujourd’hui au
public est donc plus complète que celles faites aux États-
Unis en 4857, et en Angleterre en 4859, sans que, au
fond, aucun changement ait été apporté aux idées dont
ce livre est l’expression. »
DE L’ESPECE
ET DES CLASSIFICATIONS
CHAPITRE PREMIER.
DES RAPPORTS FONDAMENTAUX QUE LES ANIMAUX ONT ENTRE EUX
ET AVEC LE MONDE AMBIANT, CONSIDERES COMME BASES DU SYSTEME
NATUREL DE ZOOLOGIE,
Les traits principaux du système zoologique naturel
sont tous fondés dans la nature.
| Les classifications modernes des animaux et des plantes
«sont basées sur les particularités de leur structure. La struc-
ture, voilà, de l’avis général, le guide le plus fidèle, sinon le
seul sûr, auquel puisse s’abandonner quiconque tente de
… déterminer les rapports naturels existant entre les animaux.
Cette manière de voir me semble toutefois avoir pour résultat
… de circonscrire dans des limites trop étroites les bases du
… système naturel de la Zoologie ou de la Botanique. Elle exclut
… de nos considérations quelques-uns des caractères les plus
frappants des deux règnes organiques, et laisse en doute à
quel point l’arrangement ainsi obtenu est fondé en réalité,
ou n’est que la simple expression de l'importance accordée
par nous aux différences de structure. Voila pourquoi il
m'a paru opportun de faire ici, comme introduction à l’em-
_bryologie des Chéloniens (1), un des types de Vertébrés les
plus extraordinaires, un court exposé des faits fondamen-
taux du règne animal. Jaurai ainsi occasion d’établir un
(4) L’Essai sur la classification (titre primitif de ce livre) a d’abord paru,
- sous forme d’introduction, dans un ouvrage consacré à l'Histoire naturelle des
… Toriues de l'Amérique du Nord. (N. T.)
| AGASSIZ. 1
2 DE L’ESPECE.
terme de comparaison eritre les changements que subissent
les animaux durant l’accroissement et les caractères dé-
finitifs d'individus adultes d’un autre type. Peut-être par-
viendrai-je de cette manière à faire voir quels sont, en
dehors de la structure, les autres traits généraux dont il
y aurait avantage à tenir compte pour déterminer exactement
les nombreux rapports existant, soit d’animal à animal, soit
entre les animaux et le monde ambiant, sur lesquels le sys-
tème naturel doit être fondé.
Mais je ne saurais traiter de ces questions sans être amené
4 discuter quelqués-uns des problèmes auxquels donne lieu
l’origine des êtres organisés, et force me sera de toucher à
certains points sur lesquels les savants ne se sont pas encore
mis d'accord. Toutefois j'éviterai la controverse autant que
possible. Je veux simplement essayer de faire connaître les
résultats de mes propres études, de mes méditations particu-
lières, aussi clairement que je le puis dans le court espace
qu’il m'est permis de consäcret 4 ce sujet dans cet ouvrage.
Il n’y a pas, en histoire naturelle, de question sur laquelle
on ait entretenu des opinions plus diverses que sur celle dé
la classification. Ce n’est pas que les naturalistes ne soient
d'accord sur la nécessité d’un arrangement quelconque
. pour la description des plantes ét des animaux. Du premier
jour où la nature est devenue l’objet d’études spéciales,
le but universel de tous les naturalistes a été de ranger les
objets de leurs investigations dans l’ordre le plus naturel pos-
sible. Buffon lui-méme, après avoir, aux premiers volumes de
sa grande Histoire naturelle, nié qu’il existât dans la nature
rien qui ressemble à un système, terminait son otivrage en
groupant les oiseaux suivant certains caractères généraüt |
offerts en commun par plusieurs de ces étres. A la Vérité,
les auteurs ne s’entendent pas sur le degré d'importance.
propre aux caractères qui sont la basé de leurs arrangements. |
A la vérité encore, tous n’envisagént pas ces arrangements -
du même point de vue. Les uns reconnaissent pleinement le ~
_ caractère artificiel de leurs systèmes; les autres soutiennent, |
au contraire, que les leurs sont l’exacte expression des rap: |
Se ee ee ee ee Ÿ
SYSTEME ZOOLOGIQUE NATUREL. 3
ports établis par la nature entre les objets eux-mémes. Mais,
que les systèmes aient été présentés comme naturels ou artifi-
ciels, on les a constamment considérés jusqu’à ce jour comme
exprimant l’idée que l’homme se fait des choses de la nature,
"et non comme un plan conçu par l'intelligence suprême et
manifesté dans les choses (1).
Il n’y a, dans ces innombrables systèmes, qu’un seul point
sur lequel tous semblent s’accorder : c’est l’existence dans la
nature d'espèces distinctes persistant avec toutes leurs particu-
larités. Du moins il en a été longtemps ainsi ; mais l'immutabi-
lité des espèces a été elle-même mise en question (2). Au delà
de l'espèce, la foi dans la réalité des divisions généralement
admises par les créateurs de systèmes diminue grandement.
Ainsi, pour les genres, le nombre des naturalistes qui les
admettent comme division naturelle est très-petit ; bien peu
d'entre eux ont exprimé la croyance que les genres ont une
existence aussi distincte que les espèces. Quant aux familles,
aux ordres, aux classes, ou à toute autre division supérieure,
on les regarde universellement comme d’utiles artifices ima-
ginés pour rendre plus facile l'étude d objets innombrables
en les groupant de la manière la plus commode. L’indilfé-
rence avec laquelle cette partie de notre science est généra-
lement traitée devient injustifiable quand on songe aux pro-
grès que la Zoologie en général a faits dans ces derniers
temps. Ce n’est pas chose sans importance que, dans nos trai-
tés systématiques, les genres soient circonscrits dans telle ou
telle limite, que les familles embrassent un groupe plus lâche
(1) Les expressions si communément usitées quand il s’agit des genres, des
espèces ou des grandes divisions de nos systèmes : M. A... a fait de telle espèce
un genre; M. B... emploie telle ou telle espèce pour former son genre ; et
celles que beaucoup de naturalistes se permettent quand ils parlent de leur
‘4 espèce, leur genre, leur famille, leur système, mettent pleinement en lumière
cette conviction, que les groupes ainsi désignés sont la création propre dé celui
qui parle. Or, si les idées que j’exprimerai plus loin sont fondées, cette préten-
tion ne sé justifie qu’autant que ces groupes ne sont pas vrais dans la nature.
(2) J. B. de Lamarck, Philosophie zoologique; Paris, 1809, 2 vol, in-8.
2° édit., 1830. — The Rev. Baden Powell, Essays on the spirit of the Indue-
tive Philosophy, etc. London, 1855, 4 vol. in-8. — Cf. encore section xv,
ci-après.
h DE L’ESPECE.
ou plus resserré de genres, que tel ordre soit ou non compris
dans telle classe, que la classe finisse ici ou là, que les classes
soient rapprochées les unes des autres d’une maniére quel-
conque, et que tous ces groupes enfin soient considérés ou
non comme ayant leur fondement dans la nature méme.
Je ne veux pas me livrer ici à analyse des nombreux sys-
témes zoologiques. Le trait saillant de ces systémes est suffi-
samment sensible, pour l’objet que je me propose, dans ceux
de Linné et de Cuvier, avec lesquels quiconque étudie Vhis-
toire naturelle est nécessairement familier. Mais n’est-il pas
indispensable de se demander si véritablement le règne ani-
mal n'offre que les peu nombreuses subdivisions en ordres
et genres indiquées par Linné, ou si en effet il y a, entre
les classes même, les différences considérables que le système
de Cuvier suppose? Faut-il croire qu'en définitive cette
construction si compliquée de la classification est tout sim-
plement une ingénieuse invention humaine que chacun
peut refaire à son gré et à sa convenance ? Si l’on songe que
tous les travaux d’histoire naturelle admettent un système
quelconque ou quelque chose qui y ressemble, on convien-
dra que le naturaliste digne de ce nom a le devoir de
s'assurer de la valeur réelle de toutes ces divisions.
L’embryologie, d’ailleurs, nous impose à chaque pas l’obli-
gation de cette recherche. Il est impossible d’établir une
comparaison exacte entre les différents états d’accroissement
des jeunes d’un groupe supérieur et les caractères perma-
nents des adultes d’un autre type, sans avoir, au préalable,
déterminé la valeur des groupes auxquels on devra comparer
l'embryon. Ce n’est donc pas sans raison que j'ai introduit,
dans un ouvrage principalement consacré à l’embryologie,
une question à laquelle j'ai voué durant plusieurs années
l'attention la plus minutieuse, et pour l’éclaircissement de
laquelle j'ai fait des recherches spéciales. i
Avant d’aller plus loin, en effet, je veux soumettre un cas
a la considération du lecteur. Supposons que les innombra-
bles animaux articulés dont on connait des dizaines de mille,
que dis-je, des centaines de mille, n’aient jamais paru sur la
|
i
SYSTEME ZOOLOGIQUE NATUREL. 5
terre, à une seule exception près. Ainsi, notre Homard, par
exemple (Homarus americanus), est le seul représentant de
ce type si extraordinairement diversifié. A quel titre introdui-
rons-nous cet animal d’une nouvelle sorte dans nos systèmes ?
Sera-ce simplement comme un genre, ne comprenant qu'une
seule espèce, que nous placerons à côté de toutes les autres
classes composées d'ordres, de familles, etc. ; ou bien, en
formerons-nous une famille avec un genre et une espèce, ou
une classe avec un ordre et un genre, ou une classe avec une
famille et un genre? Devrons-nous admettre à l’occasion de
ce seul Homard, à côté des Vertébrés, des Mollusques, des
Rayonnés, un type nouveau, celui des Articulés ; ou sera-t-il
plus naturel de ne lui donner qu’un nom et de n’en fairequ’une
espéce, au contraire de Ce qui a eu lieu pour tous les autres
animaux? C’est la considération de ce cas supposé qui m’a
conduit à faire ’examen dont l'exposé va suivre; il fournira,
je l'espère, la solution définitive de ce problème en appa-
rence insoluble.
Le cas supposé, je dois d’avance le déclarer, ne pourra
être complétement apprécié qu'après qu’on aura lu, dans le
chapitre suivant, mes remarques sur les caractères des diffé-
rentes sortes de groupes adoptées dans nos classifications. Tou-
tefois il va de soi que notre Homard ne saurait être tel qu’il
est sous nos yeux qu’à la condition d’être bâti sur le même
plan de structure qu’il manifeste aujourd’hui; or, si je réussis
à prouver qu'il y a entre la conception idéale d’un plan et la
réelle exécution de ce plan une différence possible, sur la-
quelle sont fondées les classes par opposition avec le type (ou
embranchement) auquel elles appartiennent, nous pourrons
arriver à distinguer le type d’avec la classe par l'étude appro-
fondie de cet Articulé unique aussi bien que par celle de tous
les Articulés. Nous pourrons donc reconnaître son type et dé-
terminer les caractères de sa classe, aussi complétement que
si le type comprenait plusieurs classes et chacune de celles-ci
des milliers d'espèces. Puis, comme cet animal a une forme
qu’il n’est pas possible de méconnaitre, si la forme peut être
regardée comme caractéristique des familles, nous pourrons
6 DE L'ESPÈCE.
déterminer sa famille. De plus, après l’ensemble de la struc-
ture d’où dérivent les rapports fondamentaux de tous les sys-
tèmes d’organes entre eux, dans leur naturel développement,
notre étude peut porter sur les détails de cette structure dans
chaque partie prise à part, et nous voilà amenés à reconnaître
ce qui, partout, constitue les caractères du genre. Enfin,
comme ce Homard a avec le monde ambiant des rapports
définis, comme entre les individus vivant dans le même
temps il y a des rapports définis, comme les parties du corps
ont entre elles des proportions définies, comme la surface
du corps exhibe une ornementation spéciale, les caractères
de l'espèce peuvent être tracés aussi complétement que si un
certain nombre d’autres espèces étaient là pour nous servir
de terme de comparaison, et il est possible de représenter et
de décrire ces caractères avec une certitude suffisante pour
que nous distinguions 4 l'avenir cette espèce de toute série
d’espèces postérieurement découvertes, quelque étroitement
alliées que soient d’ailleurs ces nouvelles venues à la pre-
miére. Dans ce cas donc, nous aurons à reconnaître un em-
branchement distinct du règne animal, puis une classe, une
famille, un genre, avant d'introduire une espèce à la place
qui lui appartient dans le système des animaux. Mais la classe
‘n’aura pas d’ordres, pour peu que l’ordre marque un certain
rang déterminé par la complication de la structure. Là, en
effet, où il n’y a qu’un seul représentant du type, il n’y a pas
lieu de se demander s’il est supérieur ou inférieur à d'autres
dans les limites de la classe, et les ordres sont des groupes
subordonnés l’un à l’autre dans une même classe. Ainsi,
même dans ce cas, le problème du rang à assigner aux Arti-
culés, comme type, parmi les autres grands embranchements
du règne animal, s’imposerait à nos recherches. Seulement il
se présenterait sous un aspect autre que celui qu’il nous offre
aujourd’hui dans la réalité; en effet, la comparaison entre
les Articulés et les autres types serait alors bornée au seul
Homard, et nous serions conduits à un résultat tout différent
de celui auquel nous permet d’atteindre l'existence, dans ce
type, d’un nombre considérable de variations fort étendues
SYSTÈME ZOOLOGIQUE NATUREL. EU
et appartenant même à des classes diverses. De telles spécu-
lations sont loin d’être oiseuses, Cela doit être évident pour
tous ceux qui n’ignorent pas que, à chacune des périodes
. dont se compose l’histoire de notre globe dans les temps géo-
… logiques antérieurs, les rapports généraux entre les types
_ du règne animal, les proportions numériques, l'importance
_ relative de ces types, ont constamment changé jusqu’au jour
- où les rapports actuellement existants ont été établis (4).
Ainsi, les individus d’une espèce unique, observés pen-
’ P q P
_ dant la vie, présentent simultanément des caractères qu’il
… n’est possible d’exprimer tous, d’une manière satisfaisante
. et conforme aux manifestations de la nature, qu’à la con-
+ dition d’instituer non-seulement une espèce distincte,
mais encore un genre distinct, une famille distincte, une
classe distincte, un embranchement distinct. Un tel fait
n'est-il pas par lui-même la preuve que les genres, les
familles, les ordres, les classes, les embranchements, ont,
aussi bien que l'espèce, leur fondement dans la nature
même, et que les individus qui vivent dans le même temps
n’ont qu’une existence matérielle et sont seulement les sup-
ports (substrata), d'une part, de toutes ces catégories di-
verses de la structure sur lesquelles se fonde le systéme
naturel de la Zoologie, et, d’autre part, de tous les rapports
que les animaux entretiennent avec le monde ambiant?
N’est-il pas la preuve, enfin, que, en dépit de la croyance
(1) L’établissement d’une série de classifications zoologiques et botaniques,
dont chacune présenterait le système naturel des types ayant eu une existence
simultanée pendant plusieurs périodes successives, et la considération de ces
types pris dans leur ensemble particulier, indépendamment de leurs rapports
avec ceux des autres périodes, feraient clairement ressortir les relations di-
verses qui ont existé à chaque époque entre les classes, les ordres, les
familles, les genres même et les espèces. Alors apparaîtrait, de mahiére à
nous impressionner vivement, l'importance d’une exacte détermination J
rang à assigner à tous les animaux et à toutes les plantes. Ce n’est que par
déduction que nous pouvons établir ce rang, même en étudiant ceux des
ouvrages de paléontologie où les débris fossiles sont examinés au point de vue
de leur association dans les diverses formations géologiques, Dans tous ces
ouvrages, en effet, ces restes des anciens âges sont uniformément classés
d’après un système basé sur l'étude des animaux actuels, et la combinaison
particulière qu'ils formaient durant une période donnée nous frappe bien
moins.
8 DE L’ESPECE.
générale, l’espéce n’existe pas dans la nature d’une autre
maniére que les groupes supérieurs ?
Cette division en embranchements, classes, ordres,
familles, genres et espéces, expression du résultat de nos
recherches sur les rapports généraux du régne animal, pre-
_, miére question qu’offrent à notre examen les systèmes
«ww “scientifiques d'histoire naturelle, me semble digne d’exercer
, de les méditations de tout homme qui pense. Ces coupes sont-
xsi) welles naturelles ou artificielles ? Sont-elles une pure inven-
~~~" tion de l'esprit humain, cherchant à classer ét à disposer
ses connaissances de manière à en embrasser plus aisément
l’ensemble et à faciliter les recherches ultérieures; ou bien
ont-elles été inslituées par l'Intelligence divine comme les
catégories de sa pensée (1)? N’aurions-nous été, dans nos
essais d’explication de la nature, que les interprètes in-
, conscients d’une conception divine? Quand, orgueilleux
' philosophes, nous croyons inventer des systèmes scienti-
fiques et classer la création par la seule force de notre
raison, ne ferions-nous que suivre humblement, que repro-
duire, à l’aide d’expressions imparfaites, le plan dont les
fondements furent jetés à l’origine des choses? Sous l'effort
incessant de nos pénibles études, est-ce seulement le déve-
loppement de ce dessein original qui se découvre, alors
que, accumulant et coordonnant nos fragments de connais-
sances, nous nous imaginons mettre de l’ordre dans le
chaos? Cet ordre est-il le laborieux produit de l’habileté et
de l’ingéniosité humaines, ou bien est-il tellement inhérent
aux objets eux-mémes, que le naturaliste soit, sans en avoir
conscience, amené par l’étude du règne animal à établir-en
définitive les grandes divisions sous lesquelles il range les
animaux, et qui ne sont, dans la réalité, que les têtes de cha-
pitres du grand livre qu’il s'efforce de déchiffrer? Pour moi, il
_ (4) I ne faut pas perdre de vue qu’un système peut être naturel, c’est-à-dire
d'accord, à tous égards, avec les phénomènes de la nature, tout en étant re-
gardé par son auteur non comme la manifestation des pensées d’un Créateur,
mais simplement comme l'expression d’un fait existant dans la nature n’im-
porte comment, et que l’esprit humain parvient à définir et à représenter sous
une forme systématique de sa propre invention,
Em TT
don né mn re M do
es da his
SYSTÈME ZOOLOGIQUE NATUREL, 9
me paraît incontestable que cet ordre, cet arrangement, fruit
de nos études, sont basés sur les rapports naturels, sur les
relations primitives de la vie animale; que ces systèmes,
désignés par nous sous le nom des grands maîtres de la
science qui, les premiers, les proposèrent, ne sont en
vérité que la traduction dans la langue de l’homme des
pensées du Créateur. Si vraiment il en est ainsi, cette
faculté qu’a l'intelligence humaine de s’adapter aux faits
de la création (1), et en vertu de laquelle elle parvient in-
slinctivement, sans en avoir conscience, je le répète, à inter-
préter les pensées de Dieu, n’est-elle pas la preuve la plus
concluante de notre affinité avec le divin Esprit? Ce rapport
spirituel et intellectuel avec la Toute-Puissance ne doit-il
pas nous faire profondément réfléchir? S’il y a quelque
vérité dans la croyance que l’homme a été fait à l’image de
Dieu, rien n’est plus opportun pour le philosophe que de
s’efforcer, par l'étude des opérations de son propre esprit,
à se rapprocher des œuvres de la Raison divine! Qu'il ap-
prenne, en pénétrant la nature de sa propre intelligence, à
mieux comprendre l'intelligence infinie dont la sienne n’est
qu'une émanation! Une semblable recommandation peut,
à première vue, paraître irrespectueuse. Mais lequel est
véritablement humble? Celui qui, après avoir pénétré les
secrets de la création, les classe suivant une formule qu’il
appelle orgueilleusement son système scientifique, ou celui
qui, arrivé au même but, proclame sa glorieuse affinité avec
le Créateur, et, plein d’une reconnaissance ineffable pour
un don aussi sublime, s'efforce d’être l'interprète complet
de l’Intelligence divine, avec laquelle il lui est permis, bien
plus il lui est, de par les lois de son étre, ordonné d’entrer
en communion?
J'avoue que cette question de la nature et du fondement
(1) L’esprit humain est à l’unisson de la nature, et bien des choses semblent
le résultat des efforts de notre intelligence, qui sont seulement l'expression
naturelle de cette harmonie préétablie. D’un autre côté, l’univers entier peut
être considéré comme une école où l’homme apprend à connaître et lui-même
et ses rapports tant avec les autres êtres qu'avec la cause première de tout ce
qui est,
10 DE L'ESPÈCE.
de nos classifications scientifiques a, à mes yeux, une su-
préme importance, une importance de beaucoup supérieure
à celle que l’on y attache ordinairement. S'il est une fois
prouvé que l’homme n’a pas inventé, mais seulement repro-
duit cet arrangement systématique de la nature; que ces
rapports, ces proportions existant dans toutes les parties du
monde ‘organique ont leur lien intellectuel et idéal dans
l'esprit du Créateur ; que ce plan de création, devant lequel
s’abime notre sagesse la plus haute, n’est pas issu de l’action
nécessaire des lois physiques, mais a au contraire été li-
brement conçu par l’Intelligence toute-puissante, et muri
dans sa pensée avant d’être manifesté sous des formes exté-
rieures tangibles ; si, enfin, il est démontré que la prémé-
ditation a précédé l'acte de la création, nous en aurons fini,
une fois pour toutes, avec les théories désolantes qui nous
renvoient aux lois de la matière pour avoir l'explication de
toutes les merveilles de l’univers, et, bannissant Dieu, nous
laissent en présence de l’action monotone, invariable, de
forces physiques assujettissant toutes choses à une inévi-
table destinée (4).
(4) Je ne fais allusion ici qu'aux doctrines des matérialistes. Je erois cepen-
dant utile d’ajouter que certains physiciens, qu'on choquerait fort d’ailleurs en les
prenant pour des matérialistes, ne sont pas loin de croire tout expliqué, par cela
seul qu’ils ont reconnu les lois régulatrices du monde physique et proclamé
que ces lois ont été établies par Dieu. Les phénomènes du monde inorgaz
nique les préoccupent uniquement, comme si le monde ne contenait pas d’êtres
vivants, et comme si ces êtres vivants, ne différaient en rien des êtres inorga-
niques. Ces physiciens prennent pour un rapport de causalité le lien intellectuel
qu’on observe entre les phénomènes d’une même série; ils ne veulent pas
apercevoir une différence quelconque entre le désordre et l’action libre, indé-
pendante, maîtresse d’elle-même, d’une intelligence supréme. Pour eux, l'al-
lusion la plus légère à l’existence, chez les animaux, d’un principe immatériel
qu’ils reconnaissent d’ailleurs dans l’homme, est mysticisme pur (Powell’s
Essays, etc., pages 385, 466, 478). Je ferai remarquer encore que, en opposant
Yun à l’autre les mots de création et de reproduction, je veux simplement
exprimer la différence qu’il y a entre le cours régulier des phénomènes de la
nature et l’établissement de cet ordre de choses, sans essayer d’expliquer ces
deux faits. De quelque manière qu’ait été introduit sur la terre un ordre de
choses quelconque y ayant persisté durant un certain temps. il est évident, en
effet, que l'établissement de cet ordre de choses et son maintien durant une
période détermisée sont deux faits fort différents, quoique fréquemment on
puisse les regarder comme identiques. I] n’est pas moins évident que les lois
capables d’expliquer les phénomènes du monde matériel, envisagé à part du
Se ENE ONS ee oe tu ON ee Oe SES
SYSTEME ZOOLOGIQUE NATUREL. 44
_ Or, je crois la Zoologie parvenue aujourd’hui à un degré
d'avancement qui permet de tenter cette démonstration.
_ En général, c’est de la conformité des moyens avec les
fins qu’est tiré l'argument en preuve de l'existence de Dieu.
« C'est sur cet argument que sont basés, par exemple, les
_ Bridgewater Treatises (1). À mon avis, c’est là un moyen
… insuffisant. On conçoit, en effet, trés-bien que l’action natu-
- relle des objets les uns sur les autres se résolve en un
- concours final de toutes choses, et produise ainsi un tout
. harmonique. L’argument déduit du rapport entre l'organe
et la fonction ne me satisfait pas davantage. D'ailleurs, au
. delà d’une certaine limite il cesse d’être vrai. On trouve des
organes qui n’ont pas de fonctions : telles sont les dents de
monde organique, sont impuissantes à rendre compte de l’existence des êtres
vivants, encore bien que ceux-ci aient un corps matériel, à moins qu’il ne soit
positivement démontré que l’action de ces lois implique, de par leur nature
même, la production d'êtres de cette espèce. Jusqu'ici les expériences de
Cross sont les seules qu’on nous ait présentées comme donnant la preuve que
cette production a lieu. Signore ce qu’en pensent les physiciens, mais je sais
que pas un véritable zoologiste n’hésitera à voir dans ces expériences une
méprise complète. Méme lorsque la vie s’approprie le monde physique ayec
tous les phénomènes qui sont propres à celui-ci, elle montre encore quelque
chose d’un ordre particulier et supérieur qui ne peut pas s’expliquer par des
actions physiques, À la vérité, cette circonstance que la vie est profondément
implantée au sein de la nature inorganique fait irrésistiblement naître la ten- .
tation d'expliquer l’une par l’autre, mais on doit bien voir maintenant combien
vaines ont été les tentatives faites dans ce but.
(4) Traités « Bridgewater » sur la puissance, la sagesse et la bonté de Dieu
manifestées dans la création : — Thomas Chalmers, The Adaptation of Exter-
nal Nature to the Moral and Iniellectual Constitution of Man. Glasgow, 1839,
2 vol. in-8. — John Kidd, On the Adaptation of External Nature to the
Physical Condition of Man, London, 1833, 4 vol. in-8. — Will Whewell,
Astronomy and General Physics considered with Reference to Natural Theology.
London, 1839, 4 vol. in-8. —Charles Bell, The Hand, its Mechanism and Vital
Endowments, as evincing Design. London, 1833, 4 vol. in-8. — Peter Mark
Roget, Anumal and Vegetable Physiology considered with Reference to Natural
Theology. London, 1834, 2 vol. in-8, — Will Buckland, Geology and Minera-
logy considered with Reference to Natural Theology. London, 1836, 2 vol.
in-8; 4837, 2° édit, — Will Kirby, The Power, Wisdom and Goodness of
God, as manifested in the Creation of Animals and in their History, Habits, —
and Instincts. Loudon, 1835, 2 vol. in-8.— Will Prout, Chemistry, Meteorology
and the Function of Digestion considered with Reference to Natural Theology.
London, 1834, 4 vol. in-8. — Cf. encore Here. Strauss Durkheim, Théologie
de la nature. Paris, 4852, 3 vol. in-8. — Hugh Miller, Footprints of the Crea-
tor. Edinburgh, 1849, 4 vol. in-12. — C. Babbage, The Ninth Bridgewater
Treatise, a Fragment. London, 1838, 4 vol. in-8, 2° édit,
42 DE L’ESPECE,
la Baleine qui ne percent jamais les gencives, et les mamelles
chez tous les males des Mammiféres. Ces organes et d’autres
semblables n’ont été conservés que pour maintenir une cer-
taine uniformité dans la structure fondamentale ; vrais par
rapport à la formule originelle du groupe auquel appar-
tiennent les animaux qui les possèdent, ils ne sont pas
essentiels au mode d’existence de ces animaux. Leur pré-
sence n’a pas pour but l’accomplissement de la fonction,
mais l'observation d’un plan déterminé (1). Elle fait songer
à telle disposition fréquente dans nos édifices, où Parchitecte,
par exemple, reproduit extérieurement les mêmes combi-
naisons en vue de la symétrie et de l'harmonie des propor-
tions, mais sans aucun but pratique.
Je proteste que mon intention n’est pas d'introduire dans
cet ouvrage un argument étranger à mon sujet, ni d'avancer
des conclusions qui n’en découleraient pas immédiatement.
Mais je ne puis pas négliger et passer sous silence l’étroite
connexion qu'il y a entre les faits établis par les recherches
de la science et les discussions qui se sont récemment pro-
duites sur l’origine des êtres organisés. De l’avis de certaines
gens, je le sais, croire que la pensée n’est pas tant soit peu
inhérente à la matière n’est pas d’un savant; pour eux, il
“n’y a pas de différence essentielle entre les êtres inorgani-
ques et les êtres qui vivent et qui pensent. Mais ces préten-
tions d’une fausse philosophie ne m’empécheront pas d’expri-
mer la conviction où je suis que, jusqu’à ce qu’on parvienne
à prouver que la matière ou les forces physiques peuvent
véritablement raisonner, force nous est de considérer toute
manifestation de la pensée comme témoignant de lexis-
tence d’un être pensant, auteur de cette pensée ; force nous
est de regarder toute liaison intelligente et intelligible entre
les phénomènes comme une preuve directe de lexistence
(1) L'unité de structure des membres chez les animaux à sabot et les Pinni-
pèdes, dont les doigts ne se meuvent jamais, et chez les animaux où ces organes
ont les articulations les plus parfaites et les mouvements les plus libres, en
est la preuve évidente.
SYSTÈME ZOOLOGIQUE NATUREL. 43
d'un Dieu qui pense (1), aussi sûrement que l’homme ma-
nifeste la faculté de penser quand il reconnaît cette liaison
Eorelle des choses.
‘ Je ne veux pas écrire un traité didactique; je n’entrerai
“done dans le détail des faits relatifs aux différents objets que
je soumets à la considération du lecteur qu’autant que cela
sera nécessaire à la discussion. Je n’insisterai pas non plus
bien longuement sur les conclusions qui en résultent. Je ne
ferai que rappeler les principaux faits qui témoignent en
: faveur de ma thèse, et je supposerai, dans le cours de mon
argümentation, le lecteur familier avec toute la série de
données sur laquelle elle s'appuie ; soit qu’il s'agisse des
pure ou de la structure anatomique des animaux, de
- leurs mœurs ou de leur distribution géographique, soit que
: je traite de l’embryologie ou de la succession des êtres
- animés à travers les âges géologiques antérieurs, ou encore
des particularités que ces êtres ont présentées à chaque
. époque (2). A mon avis, les faits isolés et sans connexion
A A ek BAN ce e
5. a
(1) Je sais bien que les savants les plus éminents regardent la tâche de la
| science comme terminée dès que les rapports les plus généraux existant entre
les phénoménes ont été établis. A quelques-uns la recherche de la cause pre-
mière de notre existence semble chimérique, le but dépassant le pouvoir de
l’homme; tout au moins appartiendrait-elle à la philosophie et non à la phy-
sique. Pour d’autres, le nom de Dieu n’est pas à sa place dans un ouvrage
scientifique ; comme si la connaissance des causes secondes constituait seule
un objet digne de leurs investigations, et comme si la nature ne pouvait rien
révéler de son auteur. D’autres encore ont bien, à la vérité, la conviction
que le monde a été appelé à l'existence et est gouverné par un Dieu intelli-
gent, mais cette conviction ils n’osent pas l’exprimer : ceux-ci, de peur qu’on
ne suppose qu'ils partagent les préjugés du clergé ou des sectes ; ceux-là,
parce qu’il peut être dangereux pour eux de discuter librement de telles ques-
tions, sans s’astreindre en même temps à prendre l'Ancien Testament comme
règle de la validité de leurs conclusions. La science cependant ne peut prospérer
que lorsqu'elle se renferme dans sa sphère légitime, et rien ne peut nuire da-
vantage à sa dignité que des discussions pareilles à celles qui ont eu lieu à
Güttingen, au dernier congrès de l'Association allemande des naturalistes (*},
et à celles qui depuis lors se sont produites dans certains pamphlets où la bigo-
terie rivalise avec les personnalités et les invectives.
(2) Un grand nombre de questions qui n’ont été que peu étudiées jusqu'ici
par la plupart des naturalistes, mais auxquelles j’ai depuis longues années
consacré une attention particulière, sont présentées ici sous une forme aphoris-
(*) Écrit en 4857, (N. T.)
4h DE L’ESPECE.
sont de peu de valeur quand on contemple le plan d’ensemble
de la création ; et si l’on n’envisage pas dans leur ensemble
tous les faits fournis par l’étude des mœurs des animaux, de
leur anatomie, de leur embryologie, de leur histoire aux
anciens âges du globe, il est impossible d’arriver à la con-
naissance du système naturel de la zoologie.
Examinons donc quelques-uns de ces points d’une façon
plus particulière.
I]
Les types les plus diversifiés existent simultanément
dans des conditions identiques.
Il est un fait entiérement négligé, ce me semble, par ceux
qui admettent que l’action des causes physiques a pu aller
jusqu'à faire naître les êtres organisés : c’est que partout
on trouve les types d’animaux et de plantes les plus divers
dans des circonstances identiques. La plus petite nappe
d’eau douce, une parcelle de la plage marine, le moindre
coin de terre, contiennent une certaine variété d’animaux
et de plantes. Plus les limites qui peuvent être assignées à
l'habitat primitif de ces êtres divers sont resserrées, plus
nécessairement les conditions sous lesquelles ils sont supposés
s'être produits et organisés sont uniformes. Or, d’une telle
tique et comme des résultats bien établis par des recherches approfondies. Ces
recherches n’ont pas été publiées, mais la plupart d’entre elles seront exposées
complétement dans d’autres ouvrages (*), ou l’ont été dans un livré spécial sur
lé plan de la création (voy. L. Agassiz, On the Difference between Progres-
sive, Embryonic, and Prophetic Types in the Succession of organized
Beings, Proceed. 2d meeting Amer. Assoc. for the Advancement of Science,
held at Cambridge in 1849. Boston, 1850, 4 vol. in-8, p. 432). D'ailleurs je
rerivoie, dans des notes placées au bas des pages, aux ouvrages contenant les
matériaux dès aujourd’hui susceptibles de servir à l’élucidation de mon sujet,
alors méme que ces matériaux y sont présentés sous un jour différent. Seule-
ment on me pardonnera d’ajouter que, dans ces renvois, il ne me sera pas pos-
sible dé citer tous les auteurs qui ont écrit sur les différents points en considé-
ration ; je ne mentionnerai donc que-les plus éminents et les plus instructifs.
Je renverrai parfois aux traités élémentaires qui résument les faits, et parfois
aussi aux mémoires originaux.
(*) Voy. Contributions to the Nat. History of the United States par L, Agassiz, Boston, 4857
et suiv., in-4. Quatre volumes ont paru.
TYPES DIVERS DANS DES CONDITIONS IDENTIQUES. 15
» uniformité, il faudrait conclure que les mémes causes phy-
_ siques ont pu produire les effets les plus variés (4) ! Que si,
_ aucontraire, on accordait que ces organismes ont pu faire leur
» apparition première sur une vaste surface, on reconnaitrait
| par cela même que les influences physiques sous lesquelles
ils ont existé, à l’origine, n’avaient rien d’assez spécifique
pour justifier la supposition qu’elles ont été la cause de cette
apparition. De quelque manière donc qu’on envisage la pre-
mière apparition sur la terre des êtres organisés, soit qu’on
suppose qu’ils aient pris origine sur la plus petite surface,
soit qu'on admette qu’ils se sont montrés, dès le principe,
aux plus extrêmes limites des circonscriptions géographiques
naturellement occupées par eux dé nos jours, comme par-
tout les animaux et les plantes présentent la diversité la
(4) Pour apprécier toute la valeur dé cette objection, il suffit de se rappeler
combien complexes et en même temps combien localisées sont les conditions
sous lesquelles les animaux se multiplient. L’Œuf prend naissancé dans un
organe spécial, l'ovaire ; il y acquiert un certain degré d’accroissement ; après
quoi, pour détérmirier le développement ultérieur du germe, la fécondation
devient nécéssaire, c’est-à-dire l'influence d’un autre être vivant, ou tout au
moins célle du produit d’un autre organe, le Spermairé. A son tour, le germe
traverse successivement, dans des conditions très-divérsés pour des espèces
différentes, des phases nombreuses avant de se transformer en un nouvel être
parfait: Je le demande alors : ést-il probable que les circonstances au sein
desquelles animaux et plantés ont été origitiairement produits, fussent beau-
coup plus simples où mêmé aussi simples que celles nécéssaires à la seule
reproduction des êtres déjà créés ? Avant que les êtres animés parussent, il avait
dû être pourvu aux conditions qu’exige leur développement, et si, comme je le
crois, ils ont été créés à l’état d’œuf, ces conditions étaient conformes à celles
que réclament actuellement, à ce même état, les représentants vivants dés types
“produits à l’origine, Si l'on suppose que les êtres organisés ont été mis au
monde à un degré de vie plus avaticé, la difficulté devient plus grande encore.
Il ne faut qu'un instant de réflexion pour $’en convaincre, pour peu surtout
qu’on se souvienne du quelle structure compliquée étaient doués quelques-uns
des animaux connus pour avoir été ati nombre des premiers habitants du globe.
Quand on étudie ce problème de l'apparition première des animaux et des
plantes, il est très-important de ne tenir compté que des probabilités ou même,
plus simplement encore, des possibilités ; or, pour ce qui est des premiers-
nés au moins, la doctrine de la transmutation ne fournit aucune explication
de leur existence. ;
Pour chacune des espèces ayant fait partie de la premiére faune ou de la
première flore qui ont existé sur la terre, il a dû, par conséquent, être pourvu
aux rapports spéciaux, aux dispositions Spéciales. Ce qui edt alors convenu
pour l’une aurait été impropre à l’autre, si bien que, l'existence de la première
excluant celle de la seconde, elles ne peuvent pas avoir pris origine sur le
même point; et, sur une surface plus étendue, les agents physiques ont un
16 DE L'ESPÈCE.
plus extraordinairement étendue, il est bien évident que les
agents physiques au milieu desquels ils subsistent ne peuvent
pas logiquement étre regardés comme la cause de cette
variété. A ce point de vue comme à tout autre, quand nous
considérons quelles sont les relations que les animaux et les
plantes entretiennent, soit entre eux, soit avec les circon-
stances au milieu desquelles ils vivent, nous sommes inévi-
tablement conduits à chercher au delà des faits matériels
l'explication de leur existence. Ceux qui ont envisagé ce
sujet différemment ont pris l’action et la réaction qui par-
tout existent entre les êtres organisés et les influences phy-
siques au sein desquelles (4) ils vivent pour un rapport
génésique ou de causalité. Ils ont même poussé l'erreur
mode d’action trop uniforme pour avoir pu fonder des différences spécifiques
aussi nombreuses que celles qui ont existé parmi les premiers habitants de
notre globe.
Le terme de nos recherches, quant à la reproduction et à la multiplication
des animaux, c’est l’œuf incontestablement. Nous savons que jamais il ne se
forme d’œuf librement, mais que ce point de départ de tout être nouveau est
le produit d’un organisme spécial ; c’est-à-dire qu’il suppose l'existence d’un
parent. Notre science ne va pas au delà. C’est seulement dans les limites ainsi
posées que nous pouvons discuter la question de reproduction. Pour ce qui est
du mode d’origine des êtres organisés lors de leur apparition première, il est
évident que la science ne nous fournit encore aucune donnée précise, et si je
me suis aventuré à dire que le point de départ le plus simple me paraissait être
l'œuf, c’est par analogie avec ce qui a lieu lors de la reproduction. Il semble,
en effet, naturel que la condition préalable nécessaire à la reproduction d’un
nouvel être soit envisagée comme une des conditions préalables nécessaires à
sa première apparition; et lorsque nous voyons tous les nouveaux êtres orga-
nisés appartenant à des types existants commencer par un œuf, il semble légi-
time de supposer aussi que l'œuf a été le point de départ de l’espèce à son
origine. S’il est incontestable que, pour la reproduction, un parent soit néces-
saire à la production d’un œuf, jusqu'à ce qu’il ait été démontré que l’être pri-
mitif s’est formé autrement, je ne puis m'empêcher de m’arrêter, dans l’état
actuel de nos connaissances, à l’idée d’un œuf primitif ayant pour parent un
acte de création.
Ainsi voilà le cas le plus simple auquel nous puissions être conduits, si nous
nous en tenons scrupuleusement à l’étude des faits ! Or, même ce cas le plus
simple est fort complexe ; il a des dépendances nombreuses et étendues dont il
nous est impossible de concevoir qu’il soit isolé, Notre perplexité et notre em-
barras demeurent donc les mêmes. Que serait-ce si nous admettions, comme
le font certaines théories, des conditions bien plus nombreuses et bien plus
compliquées, des dépendances multiples, des agents inharmoniques, etc. ? Et
cependant les auteurs de ces théories n’en sont pas le moins du monde embar-
rassés.
(1) Voyez plus loin, section xvi,
À
3
k.
3
4
or
9
5
1
TYPES DIVERS DANS DES CONDITIONS IDENTIQUES. 17
assez loin pour affirmer que ces influences multiples pou-
waient réellement aller jusqu'à produire des organismes
vivants, sans s’apercevoir combien l'effet était hors de pro-
portion avec la cause, et sans songer que l’action elle-même
des agents physiques sur les êtres organisés suppose l’exis-
tence préalable de ceux-ci (1).
+ Il y a eu, tous les géologues le reconnaissent (2), dans
l'histoire de la terre, une certaine période à laquelle aucun
animal n'existait encore, bien que, dans ce temps-là, la con-
stitution matérielle de notre globe et les forces physiques
… (1) Un examen critique de ce point dissipera en grande partie la confusion
qui règne dans les discussions relatives à l’influence des causes physiques sur
des êtres.organisés. Qu’il existe des rapports définis entre les animaux, les
végétaux et les milieux dans lesquels ils vivent, aucun de ceux à qui les phé-
-nomènes du monde organique sont connus n’en peut douter. Que ces milieux
“et tous les agents physiques à l’œuvre dans la nature exercent une certaine
“influence sur les êtres organisés, c’est tout aussi évident. Mais avant qu’une
telle action pat avoir lieu et se faire sentir, il a fallu que les êtres organisés
“existassent. Le problème posé renferme donc deux questions : 4° l’influence
us agents physiques sur les animaux et les plantes déjà existant ; 2° l’origine
de ces êtres. Quand on a reconnu l'influence de ces agents.sur les êtres or-
“gaunisés aussi loin et aussi profondément qu’il est possible de la constater
voyez sect. XV1), il reste toujours la question d’origine, sur laquelle nul débat,
nulle observation n’a encore fait la lumière. Pour certaines personnes, les
organismes ont spontanément pris naissance sous l’action immédiate des forces
“physiques et se sont successivement et de plus en plus diversifiés, grâce aux
“changements graduellement produits en eux par ces mêmes forces. Selon d’au-
“tres, Dieu a institué, à l’origine des choses, les lois qui régissent la nature,
met de l’activité de ces lois sont résultés les êtres vivants. Pour d’autres encore,
“ces êtres doivent naissance à l'intervention immédiate d'un Créateur intelli-
gent. Les paragraphes suivants ont pour objet de démontrer qu’il n’y a pas, dans
la nature, de lois ou de forces connues des physiciens à l'influence et à l’action
- desquelles puisse être rapportée l'origine des êtres organisés ; qu’au contraire,
la véritable nature de ces êtres, leurs rapports, soit entre eux, soit avec le
‘monde ambiant, révèlent une pensée, et ne peuvent conséquemment être
“attribués qu’à l’action immédiate d’un être pensant, bien que la manière dont
ils ont été appelés à l’existence demeure, pour l’heure présente, un mystère.
… (2) Un petit nombre de géologues seulement inclinent encore à croire que
| les couches les plus inférieures où soient rencontrés les fossiles ne sont cepen-
dant pas les dépôts le plus anciennement formés depuis l'apparition des êtres
i
is
| organisés. Mais ceux-là même qui supposent qu'on pourra découvrir, au-des-
sous de ces dépôts fossilifères, d’autres couches fossilifères plus anciennes, ou
“qui croient à la destruction, par les agents plutoniques, des fossiles des ter-
rains inférieurs (Powell’s Essays, etc., p. 424) ; ceux-là mème, dis-je, doivent
reconnaître que, à la plus grande profondeur où les fossiles aient été trouvés, on
-à rencontré des organismes extrêmement divers (voyez section vil). De plus, il y
a entre les plus anciens fossiles découverts dans les différentes parties du globe
AGASSIZ, 2
18 DE L’ESPECE.
à l’action desquelles il est soumis fussent absolument les
mêmes qu'aujourd'hui (1). Ce seul fait suffirait à prouver
que les forces de la matière étaient impuissantes à produire
au jour un être vivant quelconque.
Les physiciens ont de ces forces une connaissance incon-
testablement plus complète que les naturalistes qui rappor-
tent aux agents physiques l’origine de l’organisation et de la
vie. Eh bien, demandons aux physiciens si la nature de ces
agents n’est pas spécifique, si leur mode d'action n’est pas
spécifique ? Tous répondront par l’affirmative. Demandons.
leur encore si, dans l’état actuel de nos connaissances, il es
admissible que les forces physiques aient produit, à une
époque quelconque, quelque chose qu’elles ne dussent pas
produire plus longtemps, et s’il est probable que ce quelque
chose ait été les êtres organisés? Ou je me trompe fort,
ou les maîtres dans cette branche de la science répondron
unanimement : Rien de cela n’est possible.
Non, la corrélation existant entre les êtres animés et les
circonstances ambiantes est de tel caractère qu’elle révèl
une pensée (2). Force nous est donc de regarder ces rap:
ports comme établis, déterminés, réglés par un être pensant
Ils ont dû être fixés, pour chaque espèce, dès l’origine, @
leur persistance à travers toutes les générations qui se son
succédé (3) est une preuve nouvelle que les relations de!
individus entre eux (4), celles de genre, celles de famille
celles enfin des degrés d’affinité supérieurs (5) n’ont pas ét
déterminées avec moins de rigueur que celles qui s’obser:
vent entre les animaux et le monde environnant. Ce n’es
une telle similitude de caractères, qu’on né peut plus douter, à mon avis, qu
nous n’ayons la connaissance positive des types primordiaux du règne animal
Cette conclusion me semble confirmée par cet autre fait, que partout, au-des
sous des couches fossilifères les plus anciennes, on trouve d’autres couche
stratifiées dans lesquelles il est impossible de découvrir même la trace d’être
organisés,
(1) Voyez ci-après, section xxi.
(2) Voyez ci-après, section xv1.
(3) Voyez ci-après, section xv.
(4) Voyez ci-après, section xvi.
(5) Voyez ci-après, section vi.
TYPES DIVERS DANS DES CONDITIONS IDENTIQUES. 19
jonc pas seulement dans ce dernier ordre de rapports que
a pensée éclate, mais d’autres pensées se manifestent en-
détails, chacun des caractères de chacune des espèces.
LA l'appui de cet argument on peut invoquer tous les faits
élatifs à la distribution géographique des animaux et des
lantes, et en particulier le caractère de toutes les faunes et
le toutes les flores répandues à la surface du globe. Il faut
ire les ouvrages spéciaux sur la botanique ou la zoologie de
ountrées différentes, ou les traités particuliers sur la distribu-
ion géographique des êtres animés, pour se faire une idée
le l'extrême variété des animaux et des plantes qui vivent
nsemble dans une même région (1). Je ne veux pas entrer
ans de plus longs détails sur ce sujet; il sera traité plus
wmplétement dans une des sections suivantes (2).
IMais, objectera-t-on peut-être, certains animaux qui
ivent dans des conditions exceptionnelles offrent des parti-
silarités de structure qui semblent Je résultat de ces condi-
ions : ainsi le Poisson aveugle, l'Écrevisse aveugle et les
nsectes aveugles (3) de la caverne du Mammouth, dans le
(entucky, fournissent un témoignage incontestable de l’in-
lence immédiate de conditions exceptionnelles sur l’organe
à. a) Schmarda, Die Geographische Verbreitung der Thiere, 3 vol. in-8°,
jen, 1853. — W. Swainson, A Treatise on the Geography and Classifica-
ion of Animals. London, 1835, in-12. — E. A. G. Zimmermann, Specimen
oologiw geographicæ, Quadrupedum domicilia et migrationes sislens, Lug-
uni Batavorum, 4777, in-4°, — Humboldt, Essai sur la géographie des
unies, in-4°. Paris, 1805; et Ansichlen der Natur, 3° édition, in-12.
hitigart et Tübingen, 14849. — Robert Brown, General Remarks on the
olany of Terra Australis. London, 1814. — Schouw, Grundzüge einer
igemeinen Pflanzengeographie, avec atlas in-folio, Berlin, 1823. — Alph. de
iadolle, Géographie botanique raisonnée, 2 vol. in-8°, Paris, 1855. — On
uvera plus loin, section 1x, des renvois aux ouvrages spéciaux.
(2) Voyez plus loin, section 1x.
(3) Jef. Wyman, Description of a blind Fish from a cave in Kentucky,
as Silliman’s Journal, 1843, vol. XLV, p. 94, et 1854, vol. XVII, p. 258.
- Th. G. Tellkampf, Ueber den blinden Fish der Mammuthhôhle des Ken-
icky, dans les Archives de. Müller, 4844, p. 381. — Th. G. Tellkampf,
eschreibung einiger neuer in der Mammuthhühle aufgefundener Gatiungen
i Gliederthieren, dans les Archives de Wiegmann, 1844, vol, I, p. 318. —
Agassiz, Observations on the blind Fish of the Mammoth cave, dans le
urnal de Silliman, 1854, vol. XI, p. 127.
+
20 DE L’ESPECE.
de la vision. S'il en est ainsi, dirai-je à mon tour, comment
se fait-il que ce poisson remarquable, l’ Amblyopsis spelaus,
ait des affinités même éloignées avec les autres poissons ?
La somme des influences qui sont intervenues dans la pro-
duction de ce poisson aveugle aurait-elle été capable d’ima-
giner cette combinaison de dispositions structurales com-
munes à ce poisson et à tous les autres et de particularités
le distinguant au contraire d’eux tous? L'existence d’un
œil rudimentaire, découvert par le docteur J. Wyman dans
le poisson aveugle, ne prouve-t-elle pas plutôt que cet ani-
mal, comme tous les autres, a été créé, avec tous ses carac-
tères particuliers, par le fiat du Tout-Puissant, et que ce
rudiment d’œil lui a été laissé comme réminiscence du plan
général de structure sur lequel est construit le grand type
auquel il appartient? Peut-être un de ces naturalistes qui
savent ainsi, mieux que les physiciens, ce que peuvent pro*
duire les forces physiques, qui savent ce qu’elles ont pro*
duit, qui savent qu’elles ont produit des êtres organisés,
nous expliquera-t-il pourquoi les grottes souterraines de
l'Amérique donnent naissance à des Poissons aveugles, des
Crustacés et des Insectes aveugles, tandis que celles de |’ Eu-
rope mettent au monde des Batraciens 4 peu prés aveugles?
Si aucune pensée n’a présidé à ces choses, pourquoi done
le Proteus anguinus, vrai batracien, forme-t-il, avec un cer=
tain nombre d’autres Batraciens du Nord-Amérique et du
Japon, une des séries les plus naturelles que l’on connaisse
dans le régne animal, et dans laquelle chaque membre
constitue un degré distinct de l'échelle (4)?
Nous voilà débarrassés de l’idée fausse qu'il puisse exis=
ter un rapport génésique quelconque entre les forces brutes
et les êtres organisés. Il nous reste maintenant à parcourir
un vaste champ pour déterminer entre les premières et les!
seconds, dans toute leur étendue et dans leurs limites vraies,
les relations véritables (2). Une simple allusion au mode de
(4) Voyez plus loin, section xi.
(2) Voyez plus loin, section Xvi.
TYPES IDENTIQUES DANS DES CONDITIONS DIVERSES. 24
‘respiration propre aux divers types d'animaux et aux or-
ranes locomoteurs, qui sont plus particulièrement affectés
par les circonstances de ce mode, suffira pour rappeler aux
naturalistes l'importance extrême qu’a pour la classification
structure de ces parties. Ils conviendront que l’on com-
prendrait mieux leurs explications, si les différences de struc-
re que présentent les organes étaient étudiées au point de
me strict de leur corrélation directe avec le monde au sein
luquel les animaux se meuvent et respirent. N’aurions-nous
as di cesser depuis longtemps d’appeler du même nom
d'ailes et de pattes des appendices locomoteurs aussi diffé-
Tents que ceux des Oiseaux et des Insectes? Continuerons-
nous à appeler poumons les cavités respiratoires des li-
maces, tout comme les voies aériennes des Mammifères, des
(Oiseaux et des Reptiles? Une grande réforme est indispen-
§ able dans cette partie de notre science, et aucune étude ne
ut mieux nous y préparer que la recherche des dépen-
io mutuelles de la structure des animaux et des condi-
tions dans lesquelles ils vivent.
à III
On retrouve des types identiques dans les circonstances
les plus différentes.
» Autant la diversité des animaux et des plantes qui vivent
dans des circonstances physiques identiques démontre que
les êtres organisés sont, quant à l’origine, indépendants —
du milieu dans lequel ils résident, autant cette indépen-
ance devient de nouveau évidente quand on considère
que des types identiques se rencontrent, partout, dans les
conditions les plus variées. Qu’on réunisse toutes ces in-
uences diverses, toutes les conditions d’ existence, sous l’ap-
pellation commune d’influences cosmiques, de causes phy-
iques ou de climats, dans la plus large acception du mot,
n découvrira toujours à cet égard des différences extrêmes
22 DE L’ESPECE.
ala surface du globe. Cependant on voit vivre ensemble
normalement, sous leur action, les types les plus semblables:
ou même des types identiques (je prends ici cette expression:
de ¢ypes dans toutes ses acceptions les plus variées). Il n’y a
aucune différence de structure entre les Harengs de la zone
arctique et ceux de la zone tempérée, ceux des tropiques €
ceux des régions antarctiques. Il n’y en a pas davantage
entre les Renards et les Loups des parties du globe le moin
voisines (1). Et d’ailleurs, quand il y en aurait une, quand!
on exagérerait l'importance des différences spécifiques qu’il
yaentre ces animaux, pourrait-on montrer entre ces dif
férences et les influences cosmiques un rapport quelconque!
qui rendit compte en même temps de l'indépendance de
leur conformation générale? En d’autres termes, comment
admettre que ces causes produisent des différences dans les-
péce, et en même temps déterminent l’identité dans le genre,
l'identité dans la famille, l'identité dans l’ordre, dans
classe, dans ’embranchement? Identité dans tout ce que la
structure animale a de réellement important, de dominant,
de compliqué, voilà d’une part ce qui résulterait de l’action:
des causes les plus diverses; diversité dans les choses d’un
ordre trés-secondaire, voila d’autre part ce qu’auraient dé-
terminé ces mémes causes physiques extrémement diverses
auxquelles les animaux devraient l'existence. Quelle logique!
Tout cela n’atteste-t-il pas au contraire que les êtres
organisés manifestent la plus surprenante indépendan¢ 8
à l'égard des forces physiques au milieu desquelles ils
vivent, une indépendance si entière, qu’il est impossible de
Pattribuer : à une autre cause qu'à une Puissance suprême,
gouvernant à la fois les forces physiques et l’existence de
animaux et des végétaux, et maintenant entre les unes et les
autres un rapport harmonique, par une adaptation réci-
proque dans laquelle on ne saurait voir ni une cause ni
un effet ? ù
_ (4) Je pourrais citer une infinité d’autres exemples que tous les naturaliste
de profession auront présents à l’esprit ; mais ceux que je viens de mentionne
suffisent,
UNITE DE PLAN DANS DES TYPES DIVERS. 23
Quand les naturalistes ont voulu déterminer quelle in-
fluence les causes physiques ont sur les êtres vivants, ils ont
constamment méconnu le fait, que les modifications prove-
nant de cette influence sont seulement d’une importance
secondaire pour la vie des animaux, et n’affectent ni le
plan général ni les complications diverses de la structure.
Ouse sont les parties du corps qui soient véritablement
affectées à un degré quelconque par les influences exté-
rieures ? Ce sont principalement celles qui sont en con-
‘tact immédiat avec le monde extérieur, comme la peau, et
ans la peau les couches superficielles, la coloration, l'épais-
eur de la fourrure, le pelage, les plumes, les écailles, ou
encore la taille et le volume du corps, en tant qu'ils dépen-
dent de la quantité et de la qualité de l'aliment, l'épaisseur du
test des Mollusques, suivant que ceux-ci vivent dans des eaux
ou sur un terrain plus ou moins riche en calcaire, etc. La
rapidité ou la lenteur de la croissance soni aussi influencées
dans une certaine mesure par les variations des saisons dans
_ des années différentes; de même la fécondité, la durée de la
d vie, etc. Mais tout cela n’a rien à voir avec les caractères
essentiels des animaux.
Il y aurait à écrire un volume sur l'indépendance où sont
les êtres organisés vis-à-vis des agents physiques. Presque
» tout ce qu’on attribue généralement à l'influence de ces der-
tiers doit être regardé comme une simple corrélation entre
eux et les animaux, résultant du plan général de la création.
IV
i: Unité de plan dans des types d’ailleurs profondément divers.
« Rien dans le règne organique n’est de nature à nous im-
c * pressionner autant que l'unité de plan qui apparaît dans la
» structure des types les plus divers. D’un pôle à l'autre
7 pôle, sous tous les méridiens, les Mammifères, les Oiseaux,
_ les Reptiles, les Poissons, révélent un seul et même plan de
2h DE L’ESPECE.
structure (4). Ce plan dénote des conceptions abstraites de
l'ordre le plus élevé; il dépasse de bien loin les plus vastes :
généralisations de l'esprit humain, et il a fallu les recherches :
les plus laborieuses pour que l’homme parvint seulement a
s’en faire une idée. D’autres plans non moins merveilleux se
découvrent dans les Articulés, les Mollusques, les Rayon-.
nés (2), et dans les divers types des plantes (3). Et cepen-,
dant ce rapport logique, cette admirable harmonie, cette
infinie variété dans Punité, voilà ce qu’on nous représente :
comme le résultat de forces à qui n’appartiennent ni la.
moindre parcelle d'intelligence, ni la faculté de penser, ni .
le pouvoir de combiner, ni la notion du temps et de les-,
pace! Si quelque chose peut placer, dans la nature, l’homme |
(1) Consultez sur ce point : Lor. Oken, Ueber die Bedeutung der Schädel —
Knochen, Francfort, 1807, brochure in-4°. — J. B. Spix, Cephalogenesis, —
sive capitis ossei structura, formatio et significatio. Munich, 1845, in-folio. — .
Et. Geoffroy Saint-Hilaire, Philosophie anatomique. Paris, 1818-1823, 2 vol.
in-8° ; et plusieurs mémoires dans les Annales des sciences naturelles et les
Mémoires du Muséum, etc. — C. G. Carus, Von den Ur.-Theilen des Knochen «
und Schalengerüstes. Leipzig, 1828, in-folio. — R. Owen, On the Archetype
and Homologies of the Vertebraie Skeleton. London, 1848, in-8°.
(2) Lor. Oken, Lehrbuch der Naturphilosophie. lena, 1809-1814, 3 vol.
in-8°, En anglais : Elements of Physio-philosophy (Ray Society, London,
4847, in-8°). — G. Cuvier, Sur un nouveau rapprochement à établir entre
. les classes qui composent le règne animal (Annales du Muséum, vol. XEX,
4812). — J. C. Savigny, Mémoires sur les animaux sans vertèbres. Paris, |
Luis
1816, in-8°. — C. E. von Baer, Ueber Entwickelungsgeschichte der Thiere. |
Kônigsberg, 1828, in-4°. — R. Leukardt, Ueber die Morphologie und die
Verwandtschaftsverhiilinisse der wirbellosen Thiere. Brunswick, 1848, in-8°.
— L. Agassiz, Twelve Lectures on comparative Embryology. Boston, —
4849, in-8°. — On Animal Morphology, dans Proc. Amer. Assoc. for the |
advanc. of Science. Boston, 1850, in-8°, p. 411. J’appelle particulièrement |
l'attention sur ce mémoire, qui se rapporte directement au sujet traité dans ce …
chapitre, — V. Carus, System der thierischen Morphologie. Leipzig, 1853,
in-8. — J. Müller, Ueber den Baw der Echinodermen, dans Akad. J. Wiss.
Berlin, 1854, in-4°.
(3) J. W. Güthe, Zur Naturwissenschaft überhaupt, besonders sur Mor-
phologie. Stuttgart, 1817-1824, 2 vol. in-8. En français : OEuvres d’his-
loire naturelle, comprenant divers mémoires d'anatomie comparée, de bota-
nique et de géologie, traduits et annotés par Ch. Fr. Martins. Paris, 1837,
in-8°, avec atlas in-folio. — A. P. de Candolle, Organographie végétale.
Paris, 1827, 2 vol. in-8°. — Al. Braun, Vergleichende Untersuchung über die
Ordnung der Schuppen an den Tannensapfen, als Linleitung zur Unter-
suchung der Blattstellung überhaupt, dans Acta nova Acad. nat. curios.,
vol. XV, 1829, — Das Individuum der Pflanze, dans Akad. d. Wiss. Berlin, |
4853, in-4°.
CONFORMITES DE STRUCTURE. 25
au-dessus des autres êtres, c’est précisément le fait qu’il
possède ces nobles attributs. Sans ces dons, portés à un très-
haut degré d'excellence et de perfection, aucun des traits
généraux d’affinité qui unissent les grands types du règne
animal ou du règne végétal ne pourrait être ni perçu ni
compris. Comment donc ces rapports auraient-ils pu étre
imaginés, si ce n’est à l’aide de facultés analogues? Si toutes
s relations dépassent la portée de la puissance intellec-
tuelle de l’homme, si l’homme lui-même n’est qu’une partie,
un fragment du système total, comment ce système aurait-il
été appelé à l'être, s’il n’y a pas une Intelligence suprême
: auteur de toutes choses?
V
Correspondance dans les détails de la structure chez des
animaux entre lesquels il n'existe d’ailleurs aucun lien.
Dans les dix premières années de ce siècle, les naturalistes
commencérent à étudier, chez les animaux, certains rapports
qui ‘avaient presque entièrement échappé à l'attention de
leurs prédécesseurs. Quoique Aristote eût déjà reconnu que
les écailles des Poissons correspondent aux plumes des
Oiseaux (1), c’est seulement de nos jours que les anatomistes
ont découvert la complète analogie qu’il y a entre toutes les
parties de tous les animaux appartenant à un même type,
quelque différentes que ces parties puissent paraître à pre-
miére vue. Non-seulement l'aile de l’Oiseau est, quant à la
structure, identique avec le bras de l’homme ou le membre
antérieur d’un quadrupède, et elle correspond rigoureuse-
ment à la nageoire de la Baleine et à la nageoire pectorale
d un Poisson, mais encore tous ces organes correspondent
(1) Aristote, Historia animalium, lib. I, cap. 1, sect, 1V : 6 yap ëv Gpvibe
mreov, ToU7o gv tyros éott Aemis. — Cf. encore les cael auxquels il est
renvoyé sect. Iv, notes 1 et 2, et les nombreux traités, notices et mémoires
auxquels leurs auteurs renvoient eux-mêmes. Le nombre en est trop considé-
rable pour qu’on les cite,
26 DE L’ESPECE.
de la même manière aux extrémités postérieures, Une con-
formité organique non moins remarquable s’observe entre
la boîte solide du crâne, les os immobiles de la face, la
mâchoire inférieure de l’homme et des autres Mammifères”
et la structure de la charpente osseuse de la tête chez les
Oiseaux, les Lézards, les Grenouilles et les Poissons. Mais
cette correspondance n’est pas limitée au squelette. Chacun:
des autres systèmes d'organes montre, chez ces animaux, la
même corrélation, la même identité, eu égard au plan de
structure, quelles que soient d’ailleurs les différences dans
la forme ou le nombre des parties et même dans leurs fonc-
tions. Cette conformité dans la structure des animaux est
ce qu’on appelle homologie; elle est plus ou moins grande,
suivant que les animaux dans lesquels on la cherche sont
plus ou moins voisins les uns des autres. 1
La même correspondance existe entre les différents sys-4
témes et leurs parties chez les Articulés, chez les Mollusques:
et chez les Rayonnés, à cela près que leur structure est
respectivement fondée sur des plans différents; mais dans”
ces trois nouveaux types, les homologies n'ont joint encore
été étudiées aussi minutieusement que chez les Vertébrés. Il
y a par conséquent, dans ces embranchements si curieux du
règne animal, un vaste champ ouvert aux recherches. Même
ainsi, de ce qui a été fait dans cette partie de la science, il
ressort bien évidemment que Videntité de structure nes
s’étend pas à l’ensemble des quatre embranchements du!
régne, et que, au contraire, chacun de ces grands types est
construit sur un plan distinct, tellement spécial, que les homo-
logies ne s'étendent pas d’un type à un autre et sont stricte
ment restreintes dans le cercle de chacun d’eux. Les plus!
lointaines ressemblances qu’on puisse établir entre les repré
sentants des embranchements différents sont fondées sur
l’analogie (4) et non sur l’affinité. Tandis, par exemple, que
la tête des Poissons présente l’homologie la plus frappant
(1) Voy. W. Swainson, On the Geography and Classification of Animals,
London, 1855, in-42, p. 129, où ce point est parfaitement discuté, :
: HOMOLOGIE ET ANALOGIE. 91
avec celle des Reptiles, celle des Oiseaux et celle des Mammi-
fères, aussi bien dans l’ensemble que dans les parties, la tête
des Articulés leur est seulement analogue, soit dans le tout,
‘soit dans les détails. Ge que l’on appelle communément la tête
chez les Insectes n’est pas une cavité distincte, destinée à
oger l’encéphale et séparée de celles qui, au-dessous du cou,
constituent le thorax et l'abdomen. L’enveloppe solide n’en est
pas formée par les parties d’un squelette intérieur recouvert
par les chairs; mais elle est composée d’anneaux extérieurs
semblables à ceux dont est fait le tronc et soudés ensemble.
Elle ne renferme qu’une seule cavité, qui contient 4 la fois
le ganglion céphalique, les organes buccaux et les muscles
de la tête. On en peut dire autant de la poitrine, des pattes,
des ailes, de ’abdomen et des parties qui y sont contenues.
‘Le ganglion céphalique n’est pas l’homologue du cerveau;
les organes des sens ne sont pas non plus les homologues de
ceux des Vertébrés, bien qu’ils remplissent les mêmes
fonctions. Le canal alimentaire ne se forme pas de la même
manière dans les embryons des deux types, non plus que les
organes respiratoires. En un mot, identifier ces appareils
serait forcer la nature, tout autant que si l’on s’obstinait à
regarder les branchies comme homologues aux poumons
depuis que l’embryologie nous a appris que, à différentes
phases du développement des Vertébrés, ces deux sortes d’or-
g'anes respiratoires existent simultanément chez ces êtres,
mais avec des connexions organiques tout à fait différentes.
Ce qui est vrai de l’embranchement des Articulés comparé
_à celui des Vertébrés est également vrai des Mollusques et
des Rayonnés comparés entre eux ou à l’un des deux types
précédents ; on peut aisément s'en convaincre par un examen
attentif des correspondances que présente leur structure dans
ces limites, Cette différence dans les caractères fondamen-
taux de la structure, chez les quatre embranchements du règne
. animal, fait ressortir la nécessité d’une réforme radicale dans
. la nomenclature de l’anatomie comparée (1). Quelques natu-
a
ü
(4) Voy. L, Agassiz, On the Structure and Homologies of radiated Animals,
28 DE L'ESPÈCE.
ralistes ont néanmoins déjà poussé le paralléle entre la struc-
ture des animaux bien au dela des limites assignées par la.
nature, et s’efforcent de démontrer que toutes les confor-.
mations sont susceptibles d’étre ramenées 4 une norme
unique. Ils soutiennent, par exemple, qu’il n’y a pas un os.
chez un Vertébré quelconque qui n’ait son équivalent dans
une autre espèce de ce type. Supposer une aussi grande con-
formité chez les animaux, c’est, en définitive, refuser au.
Créateur, dans l’expression de sa pensée, une liberté dont
jouit l’homme lui-même.
Sil est vrai que, comme on vient de le dire, tous les ani-.
maux soient construits sur quatre plans divers de structure, de —
telle sorte que toutes les différentes espèces d’animaux soient |
simplement autant d’expressions variées de ces formules
fondamentales, on peut comparer le règne animal tout en-
tier 4 un livre consacré au développement de quatre idées
mères. Entre ces quatre grandes idées le seul lien, le seul
rapport, c’est l’unité résultant de ce que toutes quatre com-
mencent par s’incorporer, sous une forme embryonnaire, .
dans un œuf à l’intérieur duquel se produisent les mani- .
festations les plus diverses; après cela, au terme de la.
série des transformations, apparaît enfin la merveilleuse
variété d’êtres animés indépendants qui peuplent notre
globe, ou qui l'ont habité depuis que la vie existe à sa sur-
face.
Toutefois le trait le plus surprenant du règne animal me .
paraît consister non dans la diversité, non dans la complica-
tion, aux degrés les plus variés, de la structure, non dans la
trés-grande affinité qui s’observe entre quelques-uns de ses :
représentants, tandis que d’autres sont au contraire tout à fait ©
différents, non encore dans les relations multiples que tous —
les animaux entretiennent, soit entre eux, soit avec le monde ~
ambiant, mais bien dans cette circonstance que des êtres .
doués d’attributs si diversifiés n’en constituent pas moins un
with reference to the systematic position of the hydroid Polypi (Proceed. of the
Amer. Assoc, for the advance. of Science for 1849, Boston, 1850, 4 vol. in-8°,
p. 389).
” ét
Pre
DEGRES ET CATEGORIES D’AFFINITES. 29
ensemble harmonique dont toutes les parties ont entre elles
un lien intelligible.
VI
On y a entre les animaux des affinités de degrés différents
et de sortes diverses.
_ Les degrés d'alliance existant entre animaux différents sont
-très-divers. Il n’y a pas alliance seulement entre les repré-
. sentants d’une même espèce offrant, comme tels, la plus en-
_tiére ressemblance les uns avec les autres ; des espèces diffé-
1 rentes sont alliées comme appartenant au mêmé genre ; les
représentants de genres différents peuvent faire partie de la
. même famille; des familles diverses peuvent ne constituer
qu'un ordre unique; plusieurs ordres se rangeront dans une
classe commune, et plusieurs classes formeront, en se réu-
nissant, un seul embranchement. L'existence de plusieurs
degrés divers d’affinités entre des animaux ou des plantes de
l'un à l’autre desquels il n’y a pas le plus faible enchaine-
ment généalogique, qui vivent dans les parties du monde les
plus éloignées, qui ont vécu à des périodes géologiques
(lepuis longtemps écoulées, est, au moins dans de certaines
limites, un fait hors de conteste et sur lequel les bons obser-
vateurs sont désormais d’accord. A quoi attribuer ces affi-
nités? Les forces physiques en activité sur le globe possé-
deraient-elles donc une telle ténacité de mémoire, que, un
type ayant été une fois réalisé au premier âge de la terre sui-
vant un certain modèle, ce modèle devint dès lors inhérent
à ces forces, et, quelques variations qu’éprouvassent celles-ci,
dût nécessairement servir, à une autre période, pour la repro-
duction d’un type semblable; et ainsi de suite à toutes les
époques jusqu’à la période où l’état de choses actuel s’est
établi (1)? Ce nombre infini de nouveaux animaux et de nou-
(1) Au fond, je ne l’'ignore pas, dans l’idée de ceux qui font découler l’in-
finie variété des animaux d’une époque postérieure de changements survenus
chez les êtres d’une époque antérieure, il ÿ a une supposition qui pourrait
30 DE L’ESPECE.
velles plantes qui couvrent aujourd’hui la surface du globe
furent ainsi coulés dans leurs quatre moules, de manière à
présenter toujours, malgré la complexité de leurs rapports:
avec le monde ambiant, toutes ces relations générales si pro=
fondément établies, d’où résultent les différents degrés d’af-
finités qu'il est facile de constater entre tous les représen-
tants d’un même type? A quoi cela ressemble-t-il davantage ?
Au travail de forces aveugles, ou à la création d’un esprit,
instituant, après réflexion et de propos délibéré, toutes les.
catégories d'existence qui se reconnaissent dans la nature, |
les combinant en cette admirable harmonie qui fait du tout
un systéme tellement parfait, qu’en déméler seulement l'or- |
donnance, même avec toutes les imperfections d’une inter-
prétation, nous semble encore l'acte le plus accompli du
oénie dans toute sa force ?
A mes yeux, rien ne démontre plus directement et plus |
absolument l’action d’un esprit réfléchi que toutes ces caté-.
gories sur lesquelles les espèces, les genres, les familles, les
ordres, les classes, les embranchements sont fondés dans la
nature; rien n'indique plus évidemment une longue consi-
dération du sujet que la manifestation réelle et matérielle hy
toutes ces choses par une succession d’individus dont la vie |
est limitée, dans le temps, à une durée relativement très- | |
courte. La grande merveille de toutes ces relations consiste —
dans le caractère fugitif de toutes les parties de cette har-
monie compliquée. Tandis que l’espèce persiste durant de
POSTE
longues périodes, les individus qui la représentent changent .
rendre compte de ces affinités, si cette supposition était autre chose qu’hypo- —
thèse pure. D’après leur théorie, ces ressemblances seraient le résultat de
Vhérédité, et tous les degrés d’affinités auraient pour cause l’hérédité incom-
plète accompagnée d’une modification. Mais aussi longtemps que les animaux
descendant les uns des autres reproduiront intégralement les caractères essen-
tiels de leurs parents ; aussi longtemps que le fait de la reproduction ne sera
pas accompagné de la perte de certains caractères ; aussi longtemps que sub-
sistera le fait géologique bien connu de tous les paléontologistes, à savoir que,
pendant de longues périodes, les êtres organisés d’une époque quelconque con-
servent tous leurs caractères et sont tout à coup suivis d’autres espèces ayant
. d’autres caractères ; — aussi longtemps que ces faits seront la base de nos
connaissances en zoologie, il sera interdit d’admettre comme source des affinités
une certaine hérédité transmutatrice.
DEGRES ET CATEGORIES D’AFFINITES. 34
constamment et meurent l’un aprés l’autre dans une rapide
succession. Les genres, il est vrai, peuvent se prolonger à tra-
vers des périodes plus longues, et les familles, les ordres,
les classes peuvent avoir existé à toutes les époques où il ya
“eu des animaux. Mais, quelle qu’ait été, pour chacun de ces
zroupes, la durée de l’existence, toujours les mêmes rapports
ont eu lieu entre eux et entre chacun d’eux et l’embran-
chement dont il fait partie; toujours ils ont été représentés
ur notre globe de la même manière, c’est-à-dire ‘par une
‘Succession d'individus passant rapidement et sans cesse
prouve
Comme le second chapitre de ce is est entièrement
consacré à l'examen des différentes sortes et des degrés
divers d’affinités existant entre les animaux, il serait su-
Bec d'entrer ici dans de plus longs détails à cet égard.
‘Il suffit de rappeler que, avec le temps, les observateurs
se sont de plus en plus mis d’accord sur l'importance à
‘attacher à ces rapports et en ont fait la base de systèmes
de plus en plus conformes les uns aux autres. Ce résultat
que l’histoire de la Zoologie (1) met en complète évidence
démontre, à lui seul, que la nature elle-même a son sys-
‘time propre à l'égard duquel les systèmes des auteurs ne
sont que des approximations successives, d’autant plus
grandes, que l'intelligence humaine comprend mieux la
nature. Cette concordance croissante entre nos systèmes et
celui de la nature prouve d’ailleurs que les opérations de
l'esprit de l’homme et celles de l'Esprit de Dieu sont iden-
tiques; on s’en convaincra davantage si l’on songe à quel
point extraordinaire certaines conceptions à priori de la
nature se sont, en définitive, trouvées conformes à la réalité
| (4) J. Spix, Geschichte und Beurtheilung aller Systeme in der Zoologie.
Nuremberg, 1811, in-8°. — G. Cuvier, Histoire du progres des sciences na-
-turelles. Paris, 1826, 4 vol, in-8°, — Histoire des sciences naturelles, etc.
Paris, 1841, 5 vol. in-8°. — H. de Blainville, Histoire des sciences de Vorga-
nisation et de leurs progrès. Paris, 1847, 3 vol. in-8°, — F. A. Pouchet,
Histoire des sciences naturelles au moyen âge. Paris, 1853, 4 vol, in-80, —
Cf, encore chap. Il ci-après.
32 DE L’ESPECE.
des choses, quoi qu’en aient pu dire d’abord les observa-
teurs empiriques.
ene
Vil
i ad
Existence simultanée, aux périodes géologiques les plus 4
reculées, de tous les types généraux de l’animalité. _
:
: À
Les géologues et les paléontologistes croyaient naguère:
encore que les animaux inférieurs avaient fait les pre-
miers apparition sur la terre, et qu'après eux s'étaient
successivement montrés des types de plus en plus élevés,
jusqu’à ce qu’enfin l’homme couronnat la série. Tout musée
de géologie capable de représenter l’état actuel de nos con-
naissances peut désormais fournir la preuve que les choses
se sont passées autrement. On reconnaît aujourd’hui que,
tout au contraire, il a existé simultanément, dans les forma-
tions géologiques les plus anciennes, des représentants de
nombreuses familles appartenant aux quatre grands em-
branchements du règne animal (4). Je me souviens pourtant
d’avoir entendu les grands géologues contemporains affir-
mer que les Goraux avaient été les premiers habitants du
globe, qu'après eux les Mollusques et les Articulés étaient
venus, et que les Vertébrés s’étaient montrés seulement bien
plus tard. Quel changement extraordinaire ont apporté ces
dernières années dans l’état de nos connaissances et dans
les doctrines généralement admises, relativement à l’exis-
tence des plantes et des animaux aux âges passés! Les
naturalistes peuvent bien différer encore d’opinion sur
(1) R. I. Murchison, The Silurian System. London, 1839, in-4°. —
Sir R. I. Murchison, Siluria, the History of the oldest known Rocks, contain-
ing Fossils. London, 1854, in-8°, — R. I, Murchison, Ed. de Verneuil
et comte Alexandre von Kaiserling, The Geology of Russia in Europe ana
the Urals Mountaixrs. London, 1845, 2 vol. in-4°. — James Hall. Palæonto-
logy of New-York. Albany, 1847-52, 2 vol. in-4°. — J. Barrande, Système
silurien du centre de la Bohéme. Prague et Paris, 1852, 2 vol. in-4°, —
A. Sedgwick et Fr. Mac Coy, British Paleozoic Rocks and Fossils. London,
18514, in-4°.
7 LES GRANDS TYPES SONT CONTEMPORAINS. 33
x
7
iy 9
origine, la gradation et les affinités des animaux, mais ils
‘savent tous aujourd’hui que ni lesRayonnés, ni les Mollusques,
ni les Articulés, n’ont eu, quant à la date de leur première
apparition, de priorité les uns sur les autres. Quelques au-
“teurs soutiennent bien encore que l’origine des Vertébrés est
de beaucoup postérieure, mais il est universellement admis
que des animaux de ce type existaient déjà vers la fin de la
“première grande époque de l’histoire de notre globe. Je
crois qu’il ne serait pas difficile de démontrer, par des con-
sidérations physiologiques, que la présence des Vertébrés
sur la terre date d’une époque aussi reculée que celle de
n'importe quel des trois autres grands types du rêgne. Les
Poissons, en effet, existent partout où les Rayonnés, les Mol-
Tusques et les Articulés ont été trouvés réunis, et les plans
de structure de ces quatre grands types constituent un sys-
ème intimement lié dans ce qu’il a d’essentiel. De plus,
‘dans ces vingt derniéres années, il n’est pas une étude ap-
profondie des roches fossiliféres les plus anciennes qui n’ait
fait reporter plus en arrière l'origine des Vertébrés. Quelle
que doive être, par conséquent, la solution définitive de cette
question, il est tout au moins établi par des faits innom-
brables que l’idée d’une succession graduelle des Rayonnés,
des Mollusques, des Articulés et des Vertébrés, est pour tou-
jours hors de cause. On a la preuve indubitable que les
Rayonnés, les Mollusques et les Articulés se rencontrent par-
tout ensemble dans les terrains les plus anciens, que les
plus précoces d’entre les Vertébrés leur sont associés, et que
tous ensemble se continuent à travers les âges géologiques,
jusqu’au temps actuel. Cela démontre que, dès les premiers
jours de l'existence de notre globe, alors que sa surface ne
présentait pas encore cette variété de traits généraux qu’elle
a revêtue à des périodes ultérieures et qu’elle a de nos
jours à un plus haut degré, des animaux de tous les grands
types aujourd’hui représentés sur la terre avaient été appe-
dés à la vie. Cela démontre en outre que, à moins que les
forces physiques alors en activité n’aient imaginé ces plans,
et ne les aient ensuite imprimés sur le monde matériel
AGASSIZ. 3
3h DE L’ESPECE.
comme un moule dans lequel la nature coulerait désormais
constamment tous les êtres, des relations générales comme
celles qui existent entre les animaux, à tous les âges géolo-
giques et à la période actuelle, n’auraient jamais pu avoir
lieu. |
Ce n’est pas tout: on sait que, à l'exception des Acaléphes (4)
et des Insectes, chacune des classes des Rayonnés, des Mol-
lusques et des Articulés a eu ses représentants dès les temps
primitifs. Ce ne sont donc pas seulement les plans de quatre
grands types qui ont dù être fixés dès lors, mais aussi les
modes d'exécution de chaque plan, le système des formes
dont la structure devait être revêtue, et les détails les plus
infimes de cette structure établissant des rapports entre deux
geures différents. Pareillement, le mode de différenciation
des espéces et la nature de leurs rapports avec le monde
ambiant ont dû aussi être déterminés, de sorte que le carac-
tére de la classe a été aussi bien défini, dès ce premier mo-
ment, que le caractère de chaque embranchement ; de même,
le caractère de la famille, celui du genre, celui de l'espèce. En
outre, entre les premiers représentants de chaque classe et
leurs successeurs aux périodes conséculives, il y a des rap-
ports définis; l’ordre de succession correspond à |’échelle
des complications de la structure, et forme une série natu-
relle d’un enchainement étroit; il faut donc que cette gra-
dation naturelle ait été, elle aussi, préméditée dès l’origine.
C'est là un fait incontestable, car l’homme, ce dernier venu,
clôt dans le cycle dont il fait partie une série dont la pro-
gression indique, dès l’origine, qu’elle aboutira à lui comme
terme dernier. L’anatomie pourrait, à mon avis, démontrer
(1) On a trouvé des Acalèphes dans le calcaire jurassique de Solenhofen,
Leur absence dans d’autres formations doit être attribuée à l'extraordinaire
mollesse de leur corps. Si le résultat de mes études sur les récifs de la Flo-
ride, — à savoir que les Millépores appartiennent à l'ordre des Hydroïdes, de
la classe des Acalèphes, — eutraîne comme conséquence l'identité de type de
_ tous les Corallaires tabulés, et si, avec eux, il faut reporter dans la classe des
Acalèphes les Corallaires rugueux, l'existence de cette classe des Acaléphes
remonte aussi loin dans la série des temps géologiques que celle d'aucune
autre du règne animal.
LES GRANDS TYPES SONT CONTEMPORAINS. 39
L
que l'homme n'est pas seulement le plus récent et le plus
. élevé des êtres vivants pour . la période actuelle, mais qu "il
est le dernier terme d’une série au dela de laquelle il n’y a
matériellement plus de progrès possible, dans le plan sur
“lequel le règne animal tout entier est construit. Le seul per-
fectionnement désormais réalisable sur la terre doit consis-
ter dans le développement des facultés intellectuelles et
. morales de l’homme (4).
… On a récemment soulevé la question de savoir jusqu’à
quel point les plus anciens fossiles connus peuvent être con-
- sidérés comme les restes des premiers habitants du globe.
Sans aucun doute, sur une immense étendue, les roches
| fossilifères ont été puissamment altérées par les agents plu-
toniques ; les débris organiques renfermés dans ces roches
ont été entièrement détruits, et les roches elles-mêmes ont
subi de telles métamorphoses, qu’elles ressemblent plus à
des formations éruptives qu'à des dépôts stratifiés. Des
altérations de ce genre ont eu lieu à plusieurs reprises,
à des époques relativement récentes, sur une trés-large
échelle. Mais il y a des continents entiers, l'Amérique du
Nord par exemple, où les roches paléozoïques n’ont pas
été ou n’ont été que fort peu altérées, et où les débris des
premiers représentants des deux régnes organiques sont
aussi bien conservés que ceux des formations postérieures.
La on peut se convaincre que, dès l’origine, il y a eu,
simultanément, une grande variété d'animaux appartenant
à des classes diverses de tous les grands embranchements
de la Zoologie. L'hypothèse de l'introduction successive de
ces types sur la terre est donc formellement contredite par
des faits bien établis et bien connus (2). Enfin, les fossiles
» découverts dans les plus anciens dépôts ont, en quelque lieu
ae on les trouve, la plus étroite alliance les uns avec les
(4): L. Agassiz, An Introduction to the Study of natural History. New-
York, 1847, in-8°, p. 57.
m (2) L. Agassiz, The primitive Diversity and Number of Animals in Geo-
ie times (Amer. Journ. of Science and Arts, 2° série, vol. XVII, 4854,
09
36 DE L'ESPÈCE, :
autres. En Russie, en Suéde, en Bohéme, dans plusieurs
autres contrées du globe où les formations primitives ont
été altérées sur une échelle plus ou moins vaste, aussi bien
que dans l'Amérique du Nord, où elles ont été peu ou point.
modifiées, les fossiles présentent le même caractère général; :
c’est-à-dire une correspondance parfaite dans la structure
et dans la combinaison des familles, preuve que les faunes .
auxquelles ils ont appartenu furent contemporaines. Il pa-—
raîtrait d’ailleurs que, là même où les roches métamor-®
phiques prédominent, les traces des premiers habitants du.
globe n’ont pas été entièrement effacées. 4
Les travaux les plus importants en géologie, ceux qui
ont le plus étendu le champ des recherches, sont précisément »
ceux qui, tant en Europe qu’en Amérique, ont fait ressortir.
la correspondance existant entre les premiers types d’ani-
maux apparus à la surface du globe, à l’origine de la vie.
animale. Les travaux de Murchison et de Barrande suffisent
à eux seuls pour démontrer combien est riche cette faune
du monde primitif, combien sont variés les types qui lui.
appartiennent, et quelle complication extraordinaire carac-
térise ces tvpes. Tant que nous devrons compter au nombre
des premiers habitants du globe des animaux du type des |
trilobites, il sera logique et conforme à l’état vrai de la.
science de repousser l'hypothèse d’une grande simplicité
chez les premiers êtres qui ont peuplé la surface de la terre. :
4
VIII
Gradation de structure parmi les animaux.
Il n’y a pas chez Jes animaux et les végétaux de la variété ©
seulement. Ils différent encore quant à la place, au rang; :
ils ont une supériorité ou une infériorité quand on les com- :
pare l'un à l’autre. Mais ce rang est difficile à déterminer;
car si, à certains égards, tous les animaux sont également :
parfaits, en ce sens que tous remplissent complétement le :
SEE SS gam
GRADATION DE STRUCTURE. 37
* rôle qui leur a été assigné dans l’économie générale de la
| nature (1), 4 un autre point de vue, il y a entre eux des dif-
| férences tellement remarquables, que leur conformité plus
ou moins exacte à certains traits généraux établit la supé-
» riorité.des uns et l’infériorité des autres.
Les choses étant ainsi, une question se pose tout d’abord,
. La totalité des animaux forme-t-elle, des inférieurs aux su-
périeurs, une série ininterrompue ? Avant que le règne
animal eût été étudié aussi complétement qu’il l’a été de nos
jours, des écrivains de talent ont cru réellement que la tota-
lité des animaux forme une série simple continue, et Bonnet
a fait des tentatives vraiment ingénieuses pour en déter-
miner la gradation (2). Plus tard Lamarck (3) s’efforga de
démontrer en outre que, par la complication de leur struc-
ture, toutes les classes du règne animal forment autant de
_ degrés successifs. Sa conviction à cet égard est si profonde,
que, dans l’ordre systématique où il les range, les classes
forment une série progressive et qu'il leur donne même
le nom de « degrés d’organisation ». De Blainville (4) a, au
fond, suivi l'exemple de Lamarck, bien qu’il n’admette
pas absolument une série aussi simple; il considère les
Mollusques et les Articulés comme deux branches ascen-
dantes qui partent, en divergeant, des Rayonnés, pour con-
verger ensuite et se réunir aux Vertébrés. Mais depuis
que l’on connaît, sauf quelques points douteux, les limites
dans lesquelles chacun des grands embranchements du
règne animal peut être circonscrit (5); depuis qu’on sait
(4) C. G. Ehrenberg; Das Naturreich des Menschen, oder das Reich der
willensfreien beseelten Naturkürper, in 29 Classen übersichtlich geordner,
Berlin, 4835, in-folio avec planche.
(2) Ch, Bonnet, Considérations sur les corps organisés. Amsterdam,
4762, 2 vol. in-8. — Contemplations de la nature. Amsterdam, 1764-65,
2 vol. in-8. — Palingénésie philosophique. Genève, 1769, 2 vol, in-8.
(3) J. B. de Lamarck, Philosophie zoologique. Paris, 1809, 2 vol. in-8.
(4) H. D. de Blainville, De Vorganisation des animaux. Paris, 1822,
4 vol. in-8,
(5) J. Fr. Blumenbach, Handbuch der vergleichenden Anatomie. Gœttin-
» gue, 1824, in-8. En anglais, par W, Lawrence. Londres, 4827, in-8. —
… G. Cuvier, Leçons d’anatomice comparée, recueillies et publiées par MM. Duméril
38 DE L’ESPECE.
comment les classes doivent étre caractérisées et quelle
est leur place relative; depuis que, chaque jour, les diver-
gences d’opinions qui pouvaient exister sur les détails de
la classification vont diminuant, la supposition que len-
semble des animaux constitue une série en progression
continue peut être démontrée contraire à la nature. Le plus
difficile dans cette recherche, c’est de déterminer exactement
le rang qui appartient à chacun des quatre grands embran-
chements du règne animal. Si évidente, en effet, que puisse
paraître l'infériorité des Rayonnés, quand on les compare à
l’ensemble des Mollusques ou des Articulés, et si cette infé-
riorité est plus sensible encore quand ce sont les Vertébrés
qu'on prend pour terme de comparaison, il ne faut pas
et Duvernoy. Paris, 1800-1805, 5 vol. in-8 ; 2° éd. revue par MM. F. Cuvier
et Laurillard, Paris, 1836-39, 10 vol. in-8. — Le Règne animal distribué
d’après son organisation. Paris, 1817, 4 vol. in-8 ; 2° édit., 1829-30,
5 vol. in-8; 3° édit. illustrée, 1836 et suiv. — J. F. Meckel, System der
vergleichenden Anatomie, Halle, 1821-31, 6 vol. in-8; traduit en français,
Paris, 1829-38, 10 vol. in-8. — G. R. Treviranus, Biologie, oder Philosophie
der lebenden Natur. Goettingue, 1802-16, 6 vol. in-8. — Die Erscheinungen
und: Gesetze des organischen Lebens. Bréme, 1831-37, 5 vol. in-8. — Delle
Chiaje, Instituzioni d'anatomia e fisiologia comparata. Napoli, 1832, in-8,
— C. G. Carus, Lehrbuch der vergleichenden Anatomie, Leipzig, 1834,
2 vol. in-4, figures, 2° édition. — Grundsütze der vergleichenden Anatomie.
Dresde, 1828, in-8. En anglais, par R. J. Gore. Bath, 1827, 2 vol. in-8,
atlas. — C. 6, Carus et A. W. Otto, Eriduterungstafeln zur vergleichen-
den Anatomie. Leipzig, 1826-40, in-folio. — R, Wagner, Lehrbuch der ver-
gleichenden Anatomie. Leipzig, 1834-35, 2 vol. in-8. En anglais, par
A. Tulk, Londres, 1844, in-8 ; 2° édition — Lehrbuch der Zootomie. Leipzig,
4843-44, 1 vol. in-8 ; le 2° volume par Frey et Leuckardt. — Icones analomicæ,
Leipzig, 1841, in-folio. — R. E. Grant, Outlines of comparative Anatomy.
Londres, 4835, in-folio, —Rymer Jones, A general Outline of the Animal
Kingdom. Londres, 1838-39, 1 vol. in-8, figures, 2° édition, 1854. —
L. Agassiz et A. A. Gould, Principles of Zoology. Boston, in-8, 2° édition,
4851. — R. Owen, Lectures on the Invertebrate Animals. Londres, 1843,
4 vol., figures, 2° édition, 1855. — Lectures on the comparative Anatomy
of the Vertebrate Animals, Fishes, Londres, 1846, in-8, figures. — C. Th.
v. Siebold et Herm. Stanius, Lehrbuch der vergleichenden Anatomie,
Berlin, 1845-46, 2 vol. in-8 ; 2° édition, 1855 ; en anglais, par W. J. Bur-
nett, Boston, 1854. — C. Bergmann et R. Leuckardt, Vergleichende Ana-
tomie und Physiologie. Stuttgart, 1852, 1 vol. in-8, figures. — R. B.
Todd, Cyclopedia of Anatomy and Physiology. Londres, 1835-52, 4 vol.
in-8, figures. — Van der F. Hoeven, Traité de zoologie (en hollandais), —
J. V. Carus, Icones zootomice mit Original-beiträgen von G, J, Allman,
C. Gegenbauer, Th. G. Hayley, Alb. Keelliker, H. Müller, M. S. Schultze,
€, Th. E. von Siebold und F, Stein. Leipzig, 4857, in-folio.
GRADATION DE STRUCTURE. 39
oublier que la structure de la plupart des Échinodermes est
pu eaucoup plus compliquée que celle d’un Bryozoaire ou d'un
es faits sont si bien pas que toute infériorité ou supérios
brité absolue d’un embranchement sur l’autre doit être niée
‘sans réserve. S'il ne s’agit que d’une infériorité ou d’une
Lsupériorité relative basée sur l’ensemble des faits, on doit
accorder que les Vertébrés ont la prééminence sur les trois
autres types. Mais la question du rang à assigner aux Mol-
-lusques et aux Articulés semble plutôt devoir être tranchée
par la diversité des tendances manifestées dans l’ensemble
de leur organisation que par une gradation réelle dans la
structure des deux types. La concentration, voilà le trait
saillant de la structure chez les Mollusques; au contraire,
les termes de « déploiement en dehors » (outward display)
conviendraient mieux pour exprimer ce qu’il y a de prédo-
minant chez les Articulés, A cela près, Mollusques et Articulés
paraissent placés à peu près sur le même niveau et autant
au-dessus des Rayonnés qu’au-dessous des Vertébrés. Seule-
‘ment les plans sur lesquels ils sont construits indiquent des
tendances différentes. Une appréciation plus précise de ces
rapports généraux entre les grands types du règne animal
exigerait un examen du caractère de leur plan de structure
plus approfondi que celui qui en a été fait jusqu'ici (1). Mais,
quelle que puisse être la place respective de ces groupes
primaires, qu’ils diffèrent par la tendance seule ou par le
plan de structure, ou par la hauteur à laquelle ils s'élèvent,
en admettant que leur base repose sur un même niveau ou
sur un niveau peu différent, toujours est-il que chaque type
‘possède des représentants chez lesquels la structure est ex-
(1) Je regrette de ne pouvoir pas rappeler ici le contenu d’une série de
lectures que j'ai faites, en 1852, sur ce sujet, à la « Smithsonian Institution ».
Cf. néanmoins mon mémoire «On the Differences between Progressive,
“Embryonic and Prophetic Types (Proceed. American Association for 4849,
“4
4 432).
40 DE L’ESPECE.
trémement compliquée et d’autres chez lesquels elle est tout
à fait simple. Or, le seul fait d’un aussi grand contraste, dans
les limites naturelles de chaque type, prouve que, de quelque
manière qu’on s’y prenne pour les ranger en une série
simple, les représentants les plus élevés du type placé au-
dessous viendront se joindre aux représentants les plus bas
du type placé au-dessus, et les formes les plus hétérogénes
seront nécessairement en contact (1). Il est done bien évi-
dent que, chaque fois qu’on prétendra former une série
simple de tous les animaux, plus, dans l’arrangement intérieur
de chaque grand type, on aboutira à un degré élevé de per-
fection, plus la différence s’exagérera entre les deux extré-
mités voisines de la série intermédiaire et de la série qui
précéde ou qui suit.
Je ne crois pas qu’aucun naturaliste ait, de nos jours, une
objection à faire contre arrangement suivant des Rayonnés :
les Polypes au bas de l'échelle, les Acaléphes au degré inter-
médiaire, les Échinodermes à l'échelon supérieur ; — ou con-
tre un groupement analogue des Mollusques : les Acéphales
au degré inférieur, les Gastéropodes au milieu et les Cépha-
lopodes au sommet ; — ou encore contre cette distribution :
chez les Articulés, les Vers, puis les Crustacés et enfin les
Insectes; chez les Vertébrés, au-dessus des Poissons les Rep-
tiles et les Oiseaux, au-dessus de ces derniers les Mammi-
fères, J'ai intentionnellement évité toute allusion aux points
controversés. Done, siles Mollusques devaient faire suite aux
Rayonnés dans une série simple, les Acéphales seraient en
continuité avec les Échinodermes ; si c’étaient les Articulés,
la chaine serait renouée par les Vers. Ainsi, ou les Céphalo-
podes ou les Insectes formeraient le terme le plus élevé de
la série commencée par les Rayonnés et prolongée, dans un
cas par les Mollusques, dans l’autre par les Articulés. Dans
le premier cas, les Céphalopodes seraient suivis des Vers;
dans le second, aux Insectes succéderaient les Acéphales.
Enfin, la liaison avec les Vertébrés aurait lieu par les Cépha-
4 (4) L.Agassiz, Animal Morphology (Proceed, Amer. Assoc. for 1849,
p. 415).
GRADATION DE STRUCTURE. ha
Jopodes si les Articulés étaient placés au-dessous des Mol-
Jusques, ou par les Insectes si les Mollusques étaient mis plus
bas que les Articulés. Qui ne voit, par conséquent, que, à
mesure que les vraies affinités des animaux nous sont mieux
> connues, des preuves de plus en plus convaincantes s’accu-
. mulent contre l’idée que le règne animal constitue une série
simple ?
Tl faut done se demander maintenant si le règne animal
: forme plusieurs séries, un nombre quelconque de séries
_ progressives? A mesure qu’on essaye de déterminer la valeur
q . comparative de groupes moins compréhensifs, les difficultés
… semblent diminuer graduellement. Il est déjà possible de
» marquer avec une suffisante précision le rang des classes,
_ bien qu'ici encore les mêmes rapports ne se retrouvent pas
_ dans tous les types. Parmi les Vertébrés, il n’y pas de doute
- que les Poissons ne soient inférieurs aux Reptiles, ceux-ci aux
- Oiseaux et tous aux Mammifères. Il semble aussi évident que,
pour tout ce qui est essentiel, les Insectes et les Crustacés
_ l’emportent sur les Vers, les Céphalopodes sur les Gastéro-
. podes et les Acéphales ; les Échinodermes sur les Acaléphes
» et les Polypes. Toutefois il y a de vrais Insectes dont la
. supériorité sur certains Crustacés ne serait que bien difficile-
_ ment prouvée; il est des Vers qui, à certains égards, parais-
- sent supérieurs à quelques Crustacés ; la structure des Acé-
phales les plus élevés semble plus parfaite que celle de
plusieurs Gastéropodes, et celle des Polypes alcyonoides
plus que celle de certains hydroides. Dans les classes, donc,
les caractères ne s’alignent pas d’une façon assez rigoureuse
pour justifier, entre elles et dans chaque type, une coordi-
nation sérielle. Mais quand on arrive aux ordres, on peut
_ difficilement mettre en doute que la gradation, dans chaque
classe, entre ces divisions naturelles ne soit véritablement
. l'essence de cette sorte de groupes. Comme un paragraphe
spécial du chapitre suivant est consacré à l’examen du carac-
tère des ordres (1), jé crois inutile d’insister ici davantage
(1) Voy. chap. II, sect. i.
42 DE L’ESPECE.
sur ce point. Il me suffira de faire remarquer dès mainte-
nant que les géologues, dans leurs tentatives pour établir
un paralléle entre le rang des différents types d’animaux et
l’ordre de succession de ces types aux diverses périodes.
géologiques, eussent rencontré des difficultés beaucoup
moindres, s'ils ne se fussent pas attendus à trouver une
gradation sérielle, non-seulement entre les classes d’un
même type, où cette gradation est imparfaite, mais encore
entre les types eux-mêmes, où il est impossible de létablir,
S'ils avaient limité leurs comparaisons aux ordres, qui sont
réellement fondés sur la gradation, le résultat eût été entié-
rement différent. Mais il eût fallu, pour cela, qu'ils fussent
plus familiarisés avec l'anatomie comparée, l’embryologie
et la zoologie elle-même, qu’on ne peut naturellement l'exi-
ger d'hommes dont les études sont principalement consacrées
à l'examen de la structure du globe.
Pour apprécier, comme il convient, l importance de cette
question de la gradation des animaux et embrasser toute
l'étendue des difficultés qu’elle renferme, ce n’est pas assez
d’une connaissance superficielle du problème embarrassant
que constitue l’ordre de succession des animaux à travers
les âges géologiques écoulés. D’un autre côté, après s'être
mis au courant de toutes les tentatives faites pour établir
une corrélation entre ces deux choses (gradation, succession)
et de toutes les théories indigestes publiées sur la matière,
on devrait perdre toute espérance d’arriver jamais, sur cette
question, à un résultat satisfaisant, s’il n’était pas visible
aujourd’hui que cette recherche doit être circonscrite dans
de certaines limites et maintenue sur le terrain qui lui est
propre. Les résultats auxquels je suis déjà parvenu, depuis
que j'ai découvert l'erreur dans laquelle les observateurs
sont demeurés jusqu'ici, à cet égard, m'ont pleinement
convaincu que le seul point de vue vrai est celui sous lequel
j'ai présenté le problème, et que, en définitive, la gradation
à laquelle les ordres doivent, dans chaque classe, leurs ca-
ractères présente aussi la corrélation la plus frappante avec
ce qu'il y a de caractéristique dans la succession de ces
DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DES ANIMAUX. 43
… mêmes groupes à travers la série des temps. La encore se
» découvre une nouvelle et accablante preuve de l’ordre et
» «le la gradation admirables qui ont été établis à l’origine et
maintenus à travers les âges, dans les degrés divers de com-
plication que révèle la structure des êtres animés.
IX
Distribution géographique des animaux.
La superficie de notre planète est formée en partie par
- l'eau, en partie par la terre ferme; et l’organisation de tous
les êtres vivants étant dans une étroite corrélation avec l’un
- ou l’autre de ces milieux, il est dans la nature des choses
- que pas une espèce, soit d'animaux, soit de plantes, ne puisse
. être uniformément distribuée sur toute la surface du globe.
Mais tandis que quelques types, dans l’un et l’autre règne,
sont uniformément répandus sur toute la surface des conti-
nents ou disséminés au sein de l'Océan sur l'étendue la plus
_ vaste, il en est d’autres qui, au contraire, sont circonscrits
dans les limites d’une mer ou d’un continent, ou même dans
celles d’une contrée particulière, d’un lac, plus encore
dans celles d’une petite localité (4). |
À ne considérer que les groupes primaires du règne ani-
mal, autant que la nature du milieu auquel les animaux
sont appropriés ne s’y oppose pas, on rencontre partout, à
côté les uns des autres, des représentants des quatre grands
embranchements. Des Rayonnés, des Mollusques, des Arti-
_ culés, des Mammifères vivent ensemble dans toutes les par-
ties de l’Océan, dans les régions arctiques aussi bien que
ie
eT oS Se ree ee
: (1) La race humaine fournit l’exemple de la large distribution d’un type ter-
restre; les familles du Hareng et du Maquereau celui de la large distribution
d’un type marin. Les Mammifères d’Australie font voir comment quelques
- familles peuvent être limitées à un continent; la famille des Poissons à bran-
chies labyrinthiques, comment des poissons peuvent ne pas franchir les bornes
d’une certaine mer ; celle des Goniodontes de l'Amérique du Sud, comment
d’autres ne sortent pas des eaux douces. Le Chaca du lac Baïkal ne se trouve
… nulle part ailleurs ; l’Amblyopsis ne se rencontre que dans la caverne du
… Mammouth, le Protée que dans les grottes souterraines de la Carinthie.
hh DE L’ESPECE.
sous l’équateur ou dans le voisinage du pôle sud. Si loin que «
l'homme ait pénétré, il a partout constaté ce fait. Il n’est —
pas une baie, pas un canal, pas un bas-fond qui ne soit
hanté par un mélange de ces êtres. Cette association est si
universelle, non-seulement de nos jours, mais à tous les âges
géologiques antérieurs, qu’elle constitue, à mes yeux, une
raison suffisante pour que les Poissons doivent être à la fin
découverts dans le petit nombre de couches fossiliféres du
système silurien où on ne les a pas encore rencontrés (1).
Sur terre, partout aussi nous trouvons des Vertébrés, des
Articulés, des Mollusques, mais non point des Rayonnés, car
cet embranchement tout entier est borné aux eaux. Aussi
loin que les animaux terrestres s'étendent, nous voyons des
représentants des trois premiers embranchements mélés
ensemble, comme nous avons vu ceux des quatre groupes
mêlés dans l'Océan. Les classes ont déjà un mode de distribu-
tion plus restreint. Parmi les Rayonnés, les Polypes, les
Acaléphes et les Échinodermes (2) ne sont pas seulement tous
aquatiques, ils sont encore tous marins (3), à une seule
exception près, celle du genre Hydre, qui habite les eaux
(1) Voy. ci-dessus, section vil.
(2) Sur la distribution géographique des Rayonnés, consultez : J. D. Dana.
Zoophytes, United States Exploring expedition under the command of
Ch. Wilkes U, S. N. Philadelphie, 1846, in-4, atlas in-folio. — Milne
Edwards et Jul. Haime, Recherches sur les Polypiers (Ann. des sciences na-
turelles, 3° série, vol. IX-XVIII, Paris, 1848-52, in-8). — Fr. Eschscholtz,
System der Acalephen. Berlin, 1829, in-4, figures. — R. Pr. Lesson, His-
toire naturelle des Zoophytes, Acaléphes. Paris, 1843, in-8, figures. — A. Kel-
liker, Die Schwimmpolypen und Siphonophoren von. Messina. Leipzig,
4853, 1 vol. in-folio, figures. — R. Leuckart, Zoologische Untersuchungen.
Giessen, 1853, 4to. — Zur nühern Kenntniss der Siphonophoren von Nizza
(Arch. f. Naturg., 1854). — Beitriige zur Kenniniss der Medusenfaune von
Nizza (Arch. f. Naturg., 1856). — C. Gegenbauer, Beitriige zur ndhern
Kenniniss der Schwimmpolypen (Zeitschr.f. wiss. Zool.,1853).—Versuch eines
Systems der Medusen, mit Beschreibung neuer oder wenig bekannier formen
(Zeilschr. f. wiss. Zool., 1856). — C. Vogt, Recherches sur les animaux infé-
rieurs de la Méditerranée. Genève, 1854, —- J. Müller et F. H. Troschel,
System der Asteriden. Brunswick, 1842, in-8, figures. — L. Agassiz, Cala-
logue raisonné des familles, des genres et des espéces de la classe des Echino-
dermes (Ann. des sciences naturelles, 3° série, vol. VI-VII, Paris, 1847, in-8).
(3) J'ai à peine besoin de dire, à cet égard, que les soi-disant Polypes d’eau
douce, l’Alcyonnelle, la Plumatelle, etc., sont des Bryozoaires, et non de vrais
Polypes,
DISTRIBUTION GEOGRAPHIQUE DES ANIMAUX. 45
douces. Chez les. Mollusques (1), les Acéphales, en partie
marins, en partie fluviatiles, sont tous aquatiques; les Gasté-
ropodes sont ou marins, ou fluviatiles, ou terrestres, et les
Céphalopodes sont tous marins. Parmi les Articulés (2), les
… Vers sont ou marins, ou fluviatiles, ou terrestres, ou même pa-
_ rasites intérieurs des cavités ou des organes d’autres ani-
- maux; les Crustacés sont en partie marins, en partie fluvia-
(4) Sur la distribution géographique des Mollusques, consultez : J. B. de
“ Lamarck, Histoire naturelle des animaux sans vertèbres. Paris, 1815-22,
. 7 vol. in-8 ; 2° édition augmentée de notes par MM. Deshayes et Milne Edwards,
: Paris, 1835-43, 40 vol. in-8. — J. B. L. de Férussac, Histoire naturelle des
… Mollusques terrestres et fluviatiles. Paris, 1819 et suiv., in-4, figures in-folio,
continuée par Deshayes. — Férussac et A. Sanderrang, Histoire naturelle des
_ Aplysiens. Paris, 1828, in-4, figures in-folio. — Férussac et A. d’Orbigny,
… Monographie des Céphalopodes crijptodibranches. Paris, 1834-43, in-folio. —
F.G. W. Martini et J. H. Chemnitz, Neues Systematisches Conchylien-Kabi-
net. Nuremberg, 1769-95, 11 vol. in-4, figures; nouvelle édition et suite par
Schubert et A. Wagner, complétée par H. C. Küster. Nuremberg, 11 vol. in-4,
figures. — L, G, Kiener, Species général et Iconographie des coquilles
vivantes. Paris, 1834 et suiv., in-8, figures. — Lowell Reeve, Concho:ogia
iconica, a complete Repertory of Species of Shells, Pictorial and Descriptive.
Londres, 1843 et suiv., in-4, figures. — L. Pfeiffer, Monographia Heliceo-
rum viventium. Leipzig, 1847-48, in-8. — L. Pfeiffer, Monographia Pneu-
monoporum viventium, Cassel, 1852, in-8. Et tous les traités spéciaux de con-
chyologie.
(2) Le mode de distribution des Vers libres ou parasites pourra être étudié
dans : A. Ed. Grube, Die Familien der Anneliden (Wiegmann’s Archiv,
4850). Je mentionne ce mémoire de préférence à tout autre travail, parce que
c’est la seule liste complète des Annélides. A la vérité, les localités ne sont pas
indiquées, mais on y peut suppléer à l’aide des renvois et notes. — K, A. Ru-
dolphi, Entozoorum sive Vermium intestinalium Historia naturalis. Amster-
dam, 1808-10, 3 vol. in-8, figures. — Entozoorum Synopsis. Berlin, 1849,
in-8, figures. — E. F. Gurlt, Verzeichniss der Thiere, bei welchen Ento-
zoen gefunden worden sind (Archives de Wiegmann, 1845, continué par Cre-
plin dans les numéros suivants). — Fél. Dujardin, Histoire naturelle des
Helminthes ou Vers intestinaux. Paris, 1844, in-8. — C. M. Diesing, Histo-
toria Vermium. Vienne, 1855, 2 vol. in-8. — Sur la distribution géogra-
phique des Crustacés, voyez : Milne Edwards, Histoire naturelle des Crustacés.
Paris, 1834, 3 vol. in-8, figures. — J. D. Dana, Crustacea, United States
exploring Expedition, under the command of Ch. Wilkes U. S. N., vol. XIV,
Philadelphie, 1852, 2 vol. in-4, atlas in-folio. — Pour Ja distribution géogra-
phique des Insectes, je renvoie aux traités généraux d’entomologie, car il me
faudrait des pages entières pour énumérer les seuls ouvrages classiques con-
sacrés aux différents ordres de celte classe ; ils sont d’ailleurs mentionnés
tous dans: Ach. R. Percheron, Bibliographie entomologique. Paris, 1837,
2 vol. in-8. — L. Agassiz, Bibliographia Zoologiæ et Geologie, a general
Catalogue of all Books, Tracts and Memoirs on Zoology and Geology, cor-
rected, enlarged, and edited by H. E. Strickland. Londres, 1848-54, 4 vol.
in-8 (Ray Society).
h6 DE L'ESPÈCE.
tiles; un petit nombre sont terrestres. Les Insectes sont
surtout terrestres ou plutôt aériens; quelques-uns sont
marins, d’autres fluviatiles, et un très-grand nombre d’entre
eux qui, à l’état parfait, vivent dans l'air, sont terrestres ou
aquatiques durant les premières phases de leur développe-
ment. Parmi les Vertébrés (1), les Poissons n’habitent que les
eaux, douces ou salées; les Reptiles sont aquatiques, amphi-
bies ou terrestres, et quelques-uns de ces derniers sont
aquatiques à la première période de leur vie. Les Oiseaux
sont tous aériens, mais les uns sont davantage terrestres, les
autres davantage aquatiques. Enfin, les Mammifères, quoique
tous aériens, vivent partie dans la mer, partie dans les eaux
douces, et le beaucoup plus grand nombre sur terre. En
poussant cette revue plus loin, on verrait que cette locali-
sation d’après la nature des éléments au sein desquels vit
l'animal est en corrélation directe avec des particularités de
structure d’une importance telle que, dans les limites de
la classe, la seule considération de l'habitat pourrait, en
beaucoup de cas, conduire à une classification naturelle (2).
Mais cela n’est vrai que dans les limites de la classe, et
(1) Consultez sur la distribution géographique des Poissons : G. Cuvier et
A, Valenciennes, Histoire naturelle des Poissons. Paris, 1828-49, 22 vol. in-8,
figures. — J. Müller et J. Henle, Systematische Beschreibung der Plagio-
stomen, Berlin, 1844, in-folio, figures. — Sir John Richardson, art. ICHTHYOLOGY
de l'Encyclopædia Britannica. Edimbourg, 1856, in-4. — A. M, CG. Duméril,
Ichthyologie analytique, ow Essai d’une classification naturelle des Poissons,
Paris, 1856, in-4, — Sur celle des Reptiles : A. M. C. Duméril et G, Bibron,
Erpétologie générale ou Histoire naturelle complète des Reptiles. Paris, 1834-55,
9 vol. in-8, figures. —J. J. Tschudi, Classification der Batrachier. Neufchatel,
1838, in-4 (Mém. de la Soc. de Neufchdtel, 2° vol.). —L. J. Fitzinger, Sys-
tema Reptilium. Vienne, 1843, in-8. — Sur celle des Oiseaux : G. R. Gray, The
genera of Birds, illustrated with about 350 plates, by D. W. Mitchell, Londres,
4844-49, 3 vol. imp. in-4. — C. L. Bonaparte, Conspectus generum Avium.
Leyde, 1850 et suiv., in-8, — Sur celle des Mammifères : A. Wagner, Die geo-
graphische Verbreitung der Süugthiere (Verhandl. der Akademie der Wissen-
schaft, Munich, vol. IV). -~ Herm. Pompper, Die Süugthiere, Vügel und Am-
phibien nach ihrer geographischen Verbreitung tabellarisch zusammengestelt.
Leipzig, 1841, in-4.— Voyez encore sect. 11, notes, et Archives de Wiegmann,
continuées par Troschell; Catalogues du British Muséum, du Jardin des
plantes, etc.
(2) L. Agassiz, The Natural Relations between Animals and the Elements
in which they live (Amer. Journ. of Science and Arts, 2° série, vol. IX, 1850,
in-8, p. 369).
cette circonstance que les représentants des types les plus variés sont partout
DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DES ANIMAUX. 47
encore n’est-ce pas absolument vrai. Dans quelques classes,
en effet, c’est seulement dans les ordres ou dans les familles
_ qu’on trouve cette corrélation intime avec les milieux. Il y
a même des groupes naturels dans lesquels elle ne se ma-
_nifeste plus au dela des genres, et un petit nombre de cas
_ où elle ne va pas plus loin que l’espéce. A quelque degré
… toutefois que cette correspondance se manifeste, on observe
… qu’en un lieu quelconque du globe elle apparaît simultané-
ment chez les représentants de classes diverses ou même
d’embranchements différents, soit du règne végétal, soit du
… règne animal. Cela prouve que, au moment où ils ont été
appelés à l'existence, les êtres si variés formant ce mélange
ont été appropriés dans tous leurs caractères, ceux du règne,
ceux de la classe, de l’ordre, de la famille, ceux du genre
_ et ceux de l’espèce, aux conditions de l’habitat qui leur
était assigné, et non pas qu’ils soient le produit des circon-
stances locales, ou de celles du milieu, ou enfin d’une cir-
constance physique quelconque (4). Soutenir le contraire,
reviendrait positivement à affirmer que partout où des êtres
organisés vivent dans un certain mélange, si varié soit-il
d’ailleurs, les forces physiques dominantes ont trouvé dans
leur mutuelle combinaison la puissance de produire la
grande variété de structure que présentent ces êtres, en
. dépit même de l’étroite corrélation qui existe entre ces forces
et les animaux ou les végétaux ; ou bien que, par leur inter-
vention, une corrélation intime a été établie entre elles-
mêmes et les organismes, bien qu'entre leur propre nature
et les caractères de ces derniers, il n’y eût aucun lien: En
d’autres termes, dans tous les animaux et dans toutes les
» plantes, il y a un certain côté de l’organisation qui est en
(1) Quand on étudie la distribution géographique des animaux et des
. plantes, et leurs rapports avec les milieux ambiants, on n’a pas assez égard à
associés, dans des aires définies, au milieu de conditions d’existence identi-
ques. Ces combinaisons de nombreux types fort hétérogènes, sous toutes les
variétés possibles de climats, me semblent devoir fournir lobjection la plus
irréfutable contre l’hypothèse que les êtres vivants, ainsi réunis et mélés, puissent
avoir pris spontanément origine et être l’œuvre d’une loi naturelle.
48 DE ©’ ESPECE.
rapport avec la nature des éléments au sein desquels ils
vivent, et un autre côté de l’organisation où ce rapport
n'existe pas; or, c’est précisément cette partie de l'être
“organisé, complétement indépendante des circonstances
extérieures, qui constitue le.caractère essentiel, le caractère
typique. Cela prouve, sans laisser place à la moindre objec-
tion, que les éléments au sein desquels vivent les animaux et
les plantes (et par éléments j'entends tout ce qu’on appelle
ordinairement causes physiques, agents physiques, etc.)
ne peuvent en aucune façon être considérés comme la cause
de ces êtres.
L'étude de la distribution géographique des êtres orga-
nisés n’a pas encore pris de forme scientifique par une
raison bien simple : c’est qu’elle s’est bornée jusqu’à présent
à considérer la répartition des animaux et des plantes à la
surface du globe, en tenant exclusivement compte des êtres
qui l’habitent aujourd’hui. Cependant cette distribution a
ses racines dans le passé. On ne comprendra bien l’état ac-
tuel des choses que du jour où on le rattachera à la distri-
bution des êtres organisés des âges géologiques antérieurs
au nôtre. Pour bien comprendre la liaison des êtres avec
le sol qu'ils habitent, il est indispensable d’envisager les
changements autrefois subis par la configuration des terres
et des mers dans leurs rapports avec la forme actuelle des
océans et des continents. On ne s’expliquera les ressem-
blances des animaux qui vivent dans l’Océan, sur les rivages
opposés d’un continent, que lorsqu’on aura mis en évidence
les communications directes ayant jadis existé entre des
mers que ce continent sépare aujourd’hui. On ne pourra
suivre les affinités des animaux qui sont disséminés sur les
versants opposés des hautes chaines de montagnes qu’en se
reportant aux époques où ces barrières n’existaient point
encore. Il ne s’agit donc pas seulement de saisir la liaison
qui existe entre les animaux des époques géologiques suc-
cessives, il faut encore embrasser d’un même coup d’ceil les
changements qui ont accompagné les modifications surve-
nues avec le temps dans les règnes organiques. Cette étude
Se do oué do oothterté dti ch
DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DES ANIMAUX. A9
est encore à faire dans son ensemble, malgré les travaux par-
_tiels qu’on possède déjà sur ce sujet.
7 Si les naturalistes des siécles précédents n’ont pas réussi
a perfectionner leurs systèmes en y introduisant des consi-
dérations tirées de l'habitat des animaux, c’est surtout
| parce qu'ils ont fait de l’habitat la base de leurs divisions pri-
maires. Mais, en la réduisant aux proportions qui lui con-
viennent, l'étude des rapports existant entre la structure et
la patrie naturelle des animaux ne peut manquer de produire
des résultats intéressants, et, entre autres, la conviction
croissante que ces rapports, loin d’être le fait des forces phy-
Lsiques, dérivent au contraire du plan conçu dés le principe.
Ce n’est certes pas là une conclusion sans importance.
_ Des aires inégales sont occupées à la surface du globe
par des groupes de valeur diverse, et les mélanges formés
par des familles distinctes de végétaux ou d'animaux dans
les différentes parties du globe présentent ainsi la plus
extraordinaire variété. Ges combinaisons sont réglées de
telle sorte. que chaque province naturelle emprunte aux
caractères de ses êtres organisés un cachet qui lui est
propre. On appelle fawne, l'association naturelle des êtres
qui vivent en commun sur une surface plus ou moins vaste,
quand on parle des animaux seulement; s'il s’agit des
plantes, on dit la fore. Il s’en faut que ies limites naturelles
des faunes et des flores aient été déjà déterminées avec pré-
cision. Comme les travaux de Schow et de Schmarda suffi-
sent à donner une idée approximative de ces circonscriptions
et de leur grandeur, j’y renvoie pour plus de détails (4),
et je veux me borner à faire ressortir l’inégale étendue
des faunes différentes, et la nécessité de leur assigner des
irnites spéciales suivant le point de vue sous lequel on les
envisage. Ou, pour mieux dire, je veux faire comprendre que
les groupes différents embrassant les uns moins, les autres
davantage, il est nécessaire, pour l'étude de leur mode d’as-
(4) Je renverrai aussi à une Esquisse sur les faunes, que j’ ai publiée dans :
lott et Gibson, Types of Mankind, Philadelphie, 1854, in-4, avec une carte et
illustrations.
AGASSIZ. 4
50 DE L’ESPECE.
sociation ou des faunes, de faire une distinction entre les
empires zoologiques, pour ainsi dire, et les provinces zoolo-
giques, les cantons zoologiques, les paroisses zoologiques,
c’est-à-dire entre des aires d’inégale étendue. La plus vaste
contiendra les types les plus répandus ; des divisions de plus
en plus petites présenteront des types de plus en plus res-
treints, Parfois ces circonscriptions se superposeront, par-
fois elles seront placées l’une à côté de l’autre, parfois encore
elles seront inscrites l'une dans l’autre; mais, toujours et
partout, un cachet spécial sera imprimé à chaque fraction
de l'aire la plus large et la fera différer de n'importe quelle.
autre partie, dans ses limites naturelles.
La variété des combinaisons qui peuvent se produire entre
des aires ou plus petites ou plus grandes, mais également:
bien définies par des types différents, a été cause que les
naturalistes ont émis les vues les plus disparates à l'égard
des limites naturelles des faunes. Mais, avec le progrès de
nos connaissances, ces divergences ne peuvent manquer de
disparaître. A la rigueur, chaque ile de l’océan Pacifique sur,
laquelle on rencontre une espèce animale distincte peut être.
considérée comme possédant une faune spéciale, bien que
plusieurs groupes de ces îles aient un caractère commun qui
en fait le domaine d’une seule faune plus compréhensive :
c’est le cas des îles Sandwich, par exemple, comparées aux
îles Fidji ou à la Nouvelle-Zélande. Ce qui est vrai Wiles
séparées ou de lacs isolés est également vrai des parties
reliées entre elles d’un continent ou d’une mer.
Comme il est maintenant bien connu que certains ani-
maux ne dépassent pas, dans leur distribution géogra-
phique, un cercle trés-étroit, il serait fort intéressant de
définir quelles sont les limites les plus resserrées dans les=
quelles des animaux de type différent puissent être circon-
scrits, On aurait ainsi une première donnée pour la recherch
. des conditions primitives dans lesquelles les animaux ont été
créés. Le temps n’est plus où la simple indication du conti
nent dans lequel un animal a été trouvé pouvait satisfaire
notre curiosité. Les naturalistes qui, ayant la possibilité de
DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DES ANIMAUX. 91
déterminer rigoureusement les circonstances particulières
de Vhabitat des animaux qu'ils décrivent, négligent de rela-
ter ces circonstances, manquent à ce qu’ils doivent à la
science. Sans les négligences de cette espèce, notre connais-
-sance de la distribution géographique des animaux serait
Aa la fois plus étendue et plus exacte. Chaque nouveau fait re-
“latif à la distribution géographique d’une espèce connue est
aussi important pour la science que la découverte d’une
espèce nouvelle. Si nous connaissions seulement la distribu-
- tion d’un seul animal aussi exactement qu Alph. de Candolle
a déterminé celle de quelques espèces végétales, une ère
nouvelle commencerait pour la Zoologie. Il est grandement
regrettable que, dans la plupart des travaux où sont consi-
. gnés les résultats scientifiques d’explorations lointaines, on
ne trouve rien de plus que la description des espèces nou-
velles. Une simple énumération des espèces déjà connues,
ajoutée à cette description, eût été un renseignement d’une
valeur inappréciable pour la connaissance de la géographie
zoologique. Le sans-façon avec lequel certains, naturalistes
instituent des espèces distinctes, simplement parce qu’ils en
_ ont trouvé les individus dans des contrées éloignées, et sans
même avoir le soin d'en garder des spécimens pour une com-
paraison ultérieure, est une source d’erreurs perpétuelle
donnant lieu, dans l’étude de la géographie des animaux,
aux conclusions les plus fausses. Non moins préjudiciable aux
progres de la science est la promptitude avec laquelle d’au-
tres observateurs considèrent comme identiques les animaux
ou les plantes qui ont entre eux une trés-grande ressem-
blance, sans se préoccuper le moins du monde de leur ori-
gine et sans même signaler les différences qui ont pu être
notées sur les spécimens tirés de différents points du globe.
L'identité parfaite d'animaux ou de plantes qui vivent en
des contrées du globe fort éloignées a été si souvent démon-
née, et, inversement, on connaît si bien à quel point des
“espèces vivant ensemble peuvent néanmoins différer sous
tous les rapports essentiels, qu’une telle légèreté dans l’ étude
t injustifiable.
52 DE L’ESPECE.
L’extréme ressemblance pouvant exister entre des ani-
maux ou des plantes qui vivent dans les contrées les plus
distantes est un fait du plus haut intérêt et dont l'étude est
fort importante au point de vue de ces deux questions:
l'unité d’origine des animaux, et l’influence des agents phy-
siques sur les étres organisés. Les faits établissent désor-
mais, d’une façon trés-nette, que les individus d’une même
espèce, nés dans des régions trés-éloignées, ne peuvent pas
avoir eu une origine commune, et qu’il y a la même indé-
pendance entre les espèces, d’ailleurs étroitement alliées, qui
sont les représentants les unes des autres dans des lieux du
globe trés-distants. Il me semble donc qu’un des arguments
lés plus puissants en faveur de la prétendue influence exer-
cée sur le règne organique par les agents physiques qui en
altéreraient les caractères est pour toujours écarté.
Ce sont, parmi les Mammifères, quelques espèces grandes |
et remarquables qui donnent la mesure des limites les plus
étroites où des Vertébrés puissent être circonscrits : l’Orang-
outan dans les îles de la Sonde, le Chimpanzé et le Gorille ©
_ sur la côte occidentale d'Afrique ; plusieurs espèces distinctes .
de Rhinocéros aux environs du cap de Bonne-Espérance, à
Java, à Sumatra ; le Tapir commun et le Tapir pinchaque dans
l'Amérique du Sud, le Tapir oriental à Sumatra; l'Éléphant !
des Indes orientales et l'Éléphant d'Afrique ; le Chameau de :
la Bactriane et le Dromadaire; les Llamas et les différentes |
espèces de Bœufs, de Chèvres et de Moutons sauvages, etc. |
Les exemples les plus frappants de localisation sont fournis : ©
chez les Oiseaux, par l’Autruche africaine, les deux Nandous —
de l'Amérique, l’'Émeu (Dromaius) de l'Australie et le Casoar #
(Casuarius galeatus) de l'archipel Indien, et plus encore par \
certaines espèces de Pigeons confinées dans des îles particu-
lières de l'océan Pacifique ; — chez les Reptiles, par le Pro-—
tée des grottes d’Adelsberg en Carinthie, et par la Tortue
Gopher (Testudo Polyphemus, Agass.) des États du Sud de
l'Union américaine ; — chez les Poissons, par le Poisson —
aveugle (Amblyopsis speleus) de la caverne du Mammouth. ~
L’embranchement des Articulés ne présente pas, à cet égard, ©
DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE DES ANIMAUX- 53
de faits aussi saillants ; toutefois l'Écrevisse aveugle de la ca-
_verne du Mammouth et les parasites qui ne vivent que sur
. le corps ou dans le corps d’autres animaux sont des exemples
de localisation très-remarquables. Parmi les Mollusques,
on remarquera certaines espèces de coquilles terrestres qui,
» suivant ce qu’assure le professeur Adams, entre toutes les An-
tilles, ne se trouvent qu’à la Jamaïque (1), et l'espèce, décrite
par le docteur Gould (2), qui a été trouvée dans les îles isolées
de l'océan Pacifique par la commission des États-Unis char-
gée d’un voyage de circumnavigation. Parmi les Rayonnés
. eux-mêmes on peut citer, aussi bien chez les Echinodermes
- que chez les Méduses ou les Polypes, quelques espèces
. qui ne sont connues que dans un petit nombre de localités ;
. mais, tant que ces animaux n’auront pas été collectionnésdans
. le but spécial d’en déterminer le mode de distribution géo-
_ graphique, les indications des voyageurs devront être accueil-
_ lies avec beaucoup de réserve, et toute généralisation quant
_& la grandeur de l’aire couverte par les espèces sera préma-
turée, jusqu’à ce que les contrées qu’elles habitent aient
été explorées sur une grande étendue (3).
À ces considérations relatives à la distribution dans l’éten-
due, il faut rattacher encore les connaissances que l’on pos-
_ sède déjà sur la distribution de certains types, limités à des
hauteurs déterminées du relief inégal de la terre ou à des
_ profondeurs diverses dans le sein des eaux. Malgré les faits
nombreux qui ont déjà été recueillis sur cette distribution,
dans les mers qui baignent l’Europe et au voisinage du
littoral américain, malgré aussi quelques données isolées
sur les grandes profondeurs auxquelles certaines espèces
animales ont été rencontrées, on peut dire sans exagération
(1) C. B, Adams, Contributions to Conchology. New-York, 1849-50, in-8,
série de mémoires pleins de renseignements originaux.
(2) A. A. Gould, Mollusks, United States exploring Eapedition under the
command of Ch. Wilkes U. S. N. 4 vol. in-4, Philadelphie, 1854.
(3) Pour ce qui est des Echinodermes et des Acaléphes, je suis en mesure
d'affirmer que les espèces du littoral atlantique de l'Amérique du Nord diffè-
rent entiérement, suivant qu’elles vivent sur les côtes des États septentrionaux
ou sur celles des États du Sud; à leur tour, ces dernières sont tout autres que
les espèces du golfe du Mexique,
54 DE L’ESPECE.
que la distribution géographique des animaux au sein a |
mers est presque entièrement inconnué.
Il n’en est pas moins vrai et établi sur de PTE
preuves que, dans des limites définies, tous les animaux qu’on
trouve dans des provinces zoologiques différentes sont spé-
cifiquement différents. Ce qui reste à déterminer d’une façon
plus précise, c’est la distribution de chaque espèce, ainsi que
les limites naturelles des différentes faunes. |
x
Structure identique de types largement disséminés. —
Ce n’est pas seulement en considérant combien, même
dans des aires fort petites, le règne animal présente de
variété, qu’on est conduit à admirer l’unité de plan mani-
festée par tant de types si divers; cette admiration devient
bien plus grande encore quand on voit dans ces types une
structure identique, bien qu’ils soient répandus sur une
vaste étendue superficielle, dans des régions qui n’ont pas
le moindre rapport entre elles. Pourquoi les animaux et les
végétaux du nord de l'Amérique ont-ils une si grande res-
semblance avec ceux de l'Europe et du nord del Asie, tandis
que ceux de l'Australie diffèrent complétement de ceux de
l'Afrique et de l’Amérique du Sud, à latitudes égales? Voila
certes un problème d’un grand intérêt, au point de vue de
l'influence exercée par les agents physiques sur les carac-
téres des êtres organisés, dans les différentes parties du
globe. Il n’y a certainement pas plus de ressemblance entre
l'Amérique du Nord et l’Europe ou l’Asie septentrionale
qu'entre certaines parties de l’Australie et certaines autres
de l'Afrique ou de l'Amérique du Sud. Et quand même on
devrait accorder qu'il ya entre celles-ci une différence plus
grande qu’entre celles-là, il n’y aurait aucune proportion
entre cette disparité, d’une part, et les dissemblances ou les
similitudes existant, d'autre part, entre les animaux de ces
STRUCTURE IDENTIQUE DE TYPES DISSEMINES. 55
_ contrées. Il serait rationnellement impossible de faire dé-
. pendre les unes des autres. Pourquoi l’identité entre les es-
_ péces prévaut-elle dans la zone arctique et cesse-t-elle de
_ zone, différentes d’ailleurs, autant de difficultés que pour
- démontrer l'identité de certaines espèces arctiques dans
_ les trois continents qui convergent vers le pôle ? Cependant
- il y a confusion, et sur une grande étendue, entre les espèces
. d’une zone et celles de l’autre, à leur commune limite.
Pourquoi les espèces antarctiques ne sont-elles pas iden-
| tiques avec celles des régions arctiques? Pourquoi, enfin, une
_ plus grande élévation de la température moyenre suffit-elle
pour introduire des types aussi complétement nouveaux,
. quand, d’ailleurs, il y a dans la région arctique, sur les diffé-
_ rents continents, des types d’une singularité si remarquable
(les Rhytina, par exemple), combinés avec d’autres qui par-
tout sont les mêmes dans toute l'étendue de la région (1) ?
A première vue, il semble tout naturel que les espèces
arctiques s'étendent sur les trois continents septentrionaux
qui convergent également vers le pôle. Là, en effet, il ne
peut pas y avoir de barrière insurmontable à la plus large
dissémination, sur toute la superficie de la région, d’ani-
maux qui vivent dans l'océan Glacial ou sur les parties des
trois continents, entre lesquelles la glace sert, pour ainsi dire,
de pont. Mais, plus on pénètre avant dans les détails, à la
recherche de cette identité, plus on demeure surpris de
la rencontrer, car dans la région arctique, comme partout
(1) Qu'on ne s’y méprenne point. Je n’impute pas à tous les naturalistes
l’idée de rapporter toutes les différences ou toutes les similitudes du monde orga-
nique aux influences climatologiques. Je veux seulement leur rappeler que leta-
… bleau, même le plus exact, des relations existant entre le climat et la distribution
géographique des êtres vivants, laisse intacte la question de l’origine de ces
êtres ; or, c’est cette origine qui est en cause. On a trop peu fait attention,
jusqu'ici, aux rapports que présentent les particularités de la structure et le
mode de distribution géographique des animaux. C’est une comparaison à
laquelle on ne pourra se livrer utilement qu'après que des observateurs nés
dans le pays auront, sous toutes les latitudes, étudié l'anatomie comparée des
animaux de chaque contrée,
56 DE L'ESPÈCE.
ailleurs, des représentants de types trés-divers vivent les uns |
à côté des autres. Les Mammiféres arctiques appartiennent
principalement aux familles des Baleines, des Phoques, des —
Ours, des Belettes, des Renards, des Ruminants et des Ron-
geurs. Ils ont, en tant que Mammifères, la même structure —
générale qu’ont les animaux de cette classe, dans n’importe —
quel lieu du globe. Il en est de même des Oiseaux arctiques,
des Poissons, des Articulés, des Mollusques, des Rayonnés
arctiques, comparés aux représentants du même type dans
une contrée quelconque. L'identité s'étend à tous les degrés
d’affinité, aussi bien chez ces animaux que chez les végétaux —
des mêmes latitudes. Ordres, familles, genres, aussi loin
qu’ils sont représentés, ont là, identiquement, les mêmes
caractères qui sont ailleurs propres à ces genres, à ces ordres,
à ces familles. Les Renards arctiques ont la même formule
dentaire, la même disposition des doigts et des ongles; en —
somme, toutes les particularités génériques qui caractérisent —
les Renards, qu’ils soient de la zone arctique, de la zone
tempérée ou de lazone tropicale; qu’ils habitent l'Amérique
ou l’Europe, l'Afrique ou l’Asie. La même chose est. vraie
pour les Baleines ou les Phoques; les mêmes détails de
Structure qui caractérisent le genre au pôle nord reparais-
sent chez les animaux de l'hémisphère sud, et dans l’espace
intermédiaire, aussi loin que s’étende leur distribution na-
turelle. Même chose encore pour les Oiseaux, pour les Pois-
sons, etc., etc. Et qu'on ne suppose pas que c’est là une
simple ressemblance générale. Tant s’en faut; l'identité de
structure va jusqu'aux plus petits détails des particularités
les plus infimes; dents, poils, écailles, plis du cerveau,
ramifications vasculaires, replis de la muqueuse intestinale,
complication des glandes, rien n’y échappe; et cela est
poussé si loin, que, seul, le naturaliste familier avec lobser-
vation microscopique peut se faire une idée de la précision
et de la permanence de ces caractères. Cette identité, pour
tout dire, est tellement complète, que si, après avoir été
mutilé de manière qu'aucun des caractères de l'espèce
ne put être reconnu, un animal quelconque était soumis à
*
STRUCTURE IDENTIQUE DE TYPES DISSEMINES, 57
Pexamen d’un anatomiste vraiment habile, non-seulement la
classe, non-seulement l’ordre et la famille auxquels appar-
tient cet animal, mais encore le genre lui-même pourraient
être déterminés avec autant de précision que si l'intégrité
des parties avait été respectée. Si un petit nombre de genres
seulement avaient le privilége d’une large dissémination sur
la terre ou dans l'Océan, on pourrait regarder cela comme
‘une chose extraordinaire; mais il n’est pas une classe d’ani-
Maux qui ne contienne plusieurs genres plus ou moins cos-
mopolites. Le nombre des animaux qui ont subi une dissé-
‘Mination profuse est même tellement grand, que, au moins
en ce qui concerne les genres, on peut sans crainte affirmer
que la majeure partie d’entre eux ont une distribution
géographique extrêmement large. Cela montre de la façon
Ja plus évidente que, si loin que s’étende la distribution
géographique de ces genres, les animaux dont la structure
est identique dans toute cette étendue échappent à l'influence
des agents physiques. Sinon il faudrait admettre que,
nonobstant leur extrême diversité dans les limites géogra-
phiques indiquées, ces agents ont le pouvoir de produire
des structures absolument identiques dans des types tout à
fait différents (1).
Il importe de se rappeler ici que certains genres de Ver-
(4) Un exemple rendra cet argument plus sensible à ceux qui ne sont point
familiers avec l’histoire naturelle. De l’océan Arctique au cap Horn, l'Amérique
érmbrasse une telle variété de climats et de sols, qu’on peut bien supposer que
toutes les causes naturelles capables de donner origine aux êtres organisés ont
été ou sont en activité sur ce continent. Or, il y a dans l'Amérique arctique
une espèce particulière de Renard ; il y en a d’autres dans la zone tempérée du
continent et d’autres encore sous les latitudes plus méridionales. A ces Renards
sont associés les animaux les plus divers de toutes les classes, parmi lesquels
il s’en trouve dont le domaine géographique est circonscrit dans les limites les
plus étroites, et d’autres en. grand nombre qui ont leurs représentants dans
d’autres parties du monde. Évidemment, il faut bien que les agents physiques
n'aient pas été la cause de l’existence de tous ces êtres ; à moins de dire que
ces agents ont opéré avec discernement, qu'ils ont produit sur tout le continent
ua certain genre de Mammifères partout le même, et placé à côté de lui d’au-
tres animaux des types les plus diversifiés, partaitement conformes d’ailleurs,
pour l'essentiel, avec d’autres êtres de ces mêmes types produits hors du con-
tinent américain, Mais alors c’est admettre en d’autres termes que cet acte est
l’œuvre d’un être intelligent,
58 DE L'ESPÈCE.
_tébrés, d’Articulés, de Mollusques et de Rayonnés, sont ré=
partis dans les mémes localités et sur une méme échelle.
Or, en tant que Vertébrés, Articulés, Mollusques, Rayonnés,
leurs représentants respectifs ont, sur toute cette aire
occupée en commun, une structure identique, mais en
méme temps ils sont construits sur des plans trés-diffé-
rents. J’estime que ce fait est, par lui-même, une démons:
tration complète de l’entiére indépendance de la struc-
ture des animaux à l’égard des agents physiques. Je puis
ajouter que le régne végétal offre une série de faits exac-
tement semblables. Cela prouve que tous les rapports d’ordre
supérieur, soit chez les animaux, soit chez les plantes, sont
l'effet d’une cause autre que les influences physiques.
Tandis que tous les représentants d’un méme genre ont
une structure (1) identique, les diverses espéces d’un genre
différent simplement quant à la grandeur, aux proportions
des parties, à l’ornementation, aux rapports avec le milieu
ambiant, ete. Le mode de distribution géographique des
espèces varie à un tel point, qu’il est impossible de trouver
dans ce seul fait un critérium, pour les distinguer les unes
des autres. D’ailleurs, paraît-il, tandis que certaines espèces
projetées sur une surface considérable occupent sur cette
surface des aires discontinues, il est d’autres espèces, si
étroitement alliées les unes aux autres, qu’on les nomme
espèces représentatives, dont chacune n’occupe qu’une de
ces aires partielles. La question est donc de savoir comment
ont été établies ces limites naturelles assignées. à chaque
espèce. La croyance générale est aujourd’hui que chacune
d'elles a eu originellement un point de départ d’où elle s’est
répandue ensuite sur toute l’étendue qu’elle occupe actuel-
lement. Ce point de départ serait même encore indiqué par
la prédominance ou la concentration plus grande de l’espèce,
en un certain point de son aire naturelle qu’on appelle, en
conséquence, le centre.de distribution ou le centre de créa-
tion. A la périphérie de son territoire, l'espèce serait plus
(1) Voy. ci-après, chap. II, sect. v.
STRUCTURE IDENTIQUE DE TYPES DISSEMINES. 59
: sparpillée, plus clair-semée pour ainsi dire, et quelquefois les
représentants en seraient trés-réduits.
La Zoologie a fait un grand pas le jour où, grâce à une
géographique des êtres organisés, les naturalistes durent se
convaincre que pas un animal ou une plante n’a pu prendre
origine sur un point unique de la surface du globe et s’é-
tendre ensuite de plus en plus j jusqu’ à ce que la terre fût
| péuplée. Ce fut réellement un progrès immense et qui affran-
à chit la science des entraves d’antiques préjugés. Maintenant,
en effet, que nous avons sous les yeux toutes les données de
a question, on a peine à concevoir que cette progressive
irradiation autour d’un centre primitif ait pu sembler une
explication suffisante de la diversité qui, partout, se montre
_ sur la terre. Car admettre des centres distincts de distribu-
tion pour chaque espèce dans ses limites naturelles, c’est
-véritablement couper les faits en deux. Il y a entre les ani-
maux et les plantes, que partout nous trouvons dans un
certain état de mélange, des rapports innombrables qu’il
est impossible de ne pas regarder comme primitifs et qui
ne peuvent pas être le résultat d’une adaptation successive.
Or, s’il en est ainsi, il s'ensuit forcément que tous les ani-
maux et les. plantes ont occupé, dès l’origine, ces circon-
scriptions naturelles dans lesquelles on les voit établis et
entretenant les uns avec les autres des rapports si profondé-
ment harmoniques (4). Donc, du jour même de leur appa-
rition, les pins ont été des forêts; les bruyéres, des landes;
les abeilles, des essaims; les harengs des bancs de harengs ;
les buffles, des troupeaux; les hommes, des nations (2)! Une
preuve frappante, pour moi, que les choses ont eu lieu ainsi,
c’est que des espèces représentatives, lesquelles, en tant
_ qu’espèces distinctes, ont dû avoir à l’origine une répartition
géographique différente et distincte, occupent fréquemment
(4) L. Agassiz, Geographical Distribution of Animals (Christian Exa-
- miner, Boston, 1850, in-8 ; mars).
(2) L. Agassiz, The Diversity of origin of the Human Races (Christian
_ Examiner, Boston, 1850, in-8, février).
60 DE L’ESPÈCE.
des sections de surface habitées en même temps par d’autres
espèces qui, dans toutes ces aires partielles, sont parfaitement
identiques. Pour en citer un exemple, je prendrai le Siffleur
d'Europe et le Siffleur d'Amérique (Anas mareca Penelope
et Anas americana), ou le Millouin commun et le Millouin à
tête rouge (A. ferina et A. erythrocephala), qui habitent
respectivement les parties septentrionales du nouveau con-
tinent et de l’ancien pendant l'été, et émigrent vers le sud de
ces continents pendant l’hiver, tandis que le Canard ordi~
naire (A. boschas) et le Millouineau (Anas marila) sont.
aussi communs dans l’Amérique du Nord qu’en Europe. .
Quelle est la signification de ce fait? Indique-t-il que tous
ces oiseaux ont été originairement mis au monde dans un.
seul et même lieu, où on ne les retrouve plus maintenant, ©
puis ont fini par aller se cantonner dans les circonscriptions —
qu’ils occupent actuellement? — ou qu’ils ont pris nais-.
sance, soit en Europe soit en Amérique, contrées qu’à la.
vérité tous n'habitent plus, mais où vit au moins une partie —
d’entre eux? — ou bien qu’ils sont réellement venus au —
monde dans les circonscriptions qu’ils occupent actuelle-
ment? Je suppose mon lecteur trop judicieux pour que j'aie .
besoin d’autre chose que de discuter les conclusions qui dé-
coulent de cette dernière hypothèse. Done, le Siffleur d’A-
mérique et le Millouin américain à tête rouge sont origi-
naires de l'Amérique; le Siffleur européen et le Millouin à
tête rouge européen sont nés en Europe. Mais le Canard
ordinaire et le Millouineau, qui sont communs aux deux con- .
tinents, sont-ils nés en Europe ou en Amérique ? Ou bien
ont-ils originellement paru à la fois dans les deux mondes?.. —
Je n’irai pas plus loin; j'ai simplement voulu mettre le lec- :
teur en face d’un cas bien précis, de manière à lui faire
parfaitement comprendre le caractère de cet argument qui —
we
s’applique au règne animal tout entier. Je dis que les faits
conduisent pas à pas à la conclusion que le Canard ordinaire —
et le Millouineau ont, originellement, pris naissance, à la .
fois et séparément, en Europe et en Amérique, et que tous .
les animaux ont certainement apparu en nombre immense ;
STRUCTURE SEMBLABLE D’UNE MÊME FAUNE. 61
chaque espèce sans doute au chiffre qui en est la moyenne
caractéristique et sur toute l'étendue de l'aire géographique
qui lui est propre, que la surface en soit continue ou inter-
rompue par la mer, des lacs, des rivières, des différences dans
Te niveau des eaux, etc. Les détails de la distribution géogra-
phique des animaux présentent quelque chose de beaucoup
trop judicieux pour qu'on puisse y voir, un seul moment,
effet du hasard, c’est-à-dire le résultat des migrations acci-
dentelles des animaux ou de la dispersion accidentelle des
semences des végétaux. Plus l’uniformité de la structure
est grande dans les organismes ainsi largement disséminés,
moinsil paraît probableque leur répartition soit l'effet du ha-
sard. J’ayoue que rien ne n’a jamais autant surpris que de
voir sous le microscope l'identité parfaite des détails les plus
délicats de la structure, chez des animaux ou des plantes
provenant des parties du monde les plus éloignées. C’est
cette remarquable identité de la structure, dans le méme
tvpe, cette indépendance absolue entre les caractères essen-
tiels des animaux ou des plantes et leur distribution sous les
climats les plus différents que nous connaissions sur la terre,
qui m’ont amené à mettre en doute la croyance, presque
universelle, que les étres organisés sont influencés par les
causes physiques 4 un degré susceptible de modifier essen-
tiellement leurs caractéres.
XI
Structure semblable d’animaux vivants dans une méme région.
Les premières recherches faites sur la faune de l’Austra-
lie eurent un résultat d’un très-grand intérêt : ce fut la
découverte d’un type d'animaux, les Marsupiaux, qui pré-
domine sur ce continent et est inconnu dans presque toutes
les autres contrées du globe. Il n’est pas d’étudiant en His-
loire naturelle qui ne sache aujourd’hui qu’il n’y a pas de
Quadrumanes à la Nouvelle-Hollande : ni Singes ni Makis ; —
62 DE L’ESPECE.
pas d’Insectivores : ni Musaraignes, ni Taupes, ni Hérissons;
— pas de vrais Carnivores (1): Ours, Belettes, Renards, Ci-
veltes, Hyénes, Chats sauvages ; — pas d’Edentés : Paresseux,
Tatous, Fourmiliers, Pangolins; — pas de Pachydermes :
Eléphants, Hippopotames, Pores, Rhinocéros, Tapirs, Chevaux
sauvages; — pas de Ruminants : Chameaux, Lamas, Cerfs,
Chèvres, Moutons, Bœufs, etc. Et cependant les Mammifères
de l’Australie sont presque aussi variés que ceux de tout
autre continent. D’après Waterhouse (2), qui a étudié ces
animaux avec un soin particulier, « les Marsupiaux présen-
tent une remarquable diversité de structure. Ils renferment
des espèces herbivores, carnivores et insectivores. On y
trouve positivement la représentation et l’analogue de beau-
coup d’autres ordres de Mammifères. Les Quadrumanes y
sont représentés par les Phalangers; les Carnivores, par les
Dasyures; les /nsectivores, par les petits Phascogales; les
Ruminants, par les Kangurous ; et les Edentés, par les Mono-
trémes. Les Chiroptères n’ont point de représentant connu
parmi les Marsupiaux, et les Rongeurs n’y sont représentés
que par une espèce seulement. Mais la lacune est comblée
par des espèces placentaires, car les Ghauves-Souris et les Ron-
geurs sont passablement nombreux en Australie, et, si l’on
-en excepte le Chien, qui, probablement, a été introduit par
l’homme, ce sont les seuls animaux placentaires qu'on ait
trouvés dans ce continent. » Quoi qu’il en soit, tous ces ani-
maux ont en commun quelques caractères anatomiques
extrêmement remarquables, qui les distinguent de tous les
autres Mammifères et leur donnent un cachet auquel ils doi-
vent de constituer un des groupes les plus naturels de leur
classe : tels sont le mode de reproduction, les rapports du
jeune avec la mère, la structure du poumon, etc. (3).
(1) On n’est pas bien fixé encore sur l’origine du Dingo, le seul animal de
proie de l'Australie.
(2) G. A. Waterhouse, Natural History of the Mammalia. Londres, 1848,
2 vol. in-8, t. I, p. 4.
. (3) Voy. R. Owen, Marsupialia, in Todd’s Cyclopedia of Anatomy and
Physiology (Londres, 1841, in-8) et plusieurs mémoires du même auteur et
de quelques autres, y mentionnés,
STRUCTURE SEMBLABLE D’UNE MÊME FAUNE. 63
… Or, l’idée que ce cachet si spécial ait pu être imprimé par
le s agents physiques est pour toujours écartée par cet autre
fait que ni les Oiseaux, ni les Reptiles, ni enfin aucun autre
animal de la Nouvelle-Hollande, ne se départent en rien
les caractères ordinaires qu’ont leurs représentants dans
d’autres parties du monde. A moins que cela ne prouve,
chez ces agents, le pouvoir de varier leurs effets et de pro-
‘duire à leur gré, toutes choses égales d’ailleurs, des êtres
tantôt conformes, tantôt non conformes à ceux des autres
“continents. Et je ne parle pas de l'existence simultanée, dans
ce même continent, d’autres types hétérogènes de Mammi-
féres, Chauves-Souris et Rongeurs, qui se rencontrent là aussi
bien qu’en un lieu quelconque des autres parties du globe.
D'ailleurs l'Australie n’est pas la seule partie du monde où l’on
‘trouve, circonscrits dans des aires déterminées, des animaux
ayant entre eux de grandes différences, et présentant toute-
fois un ensemble commun de caractères qui les distingue
des autres animaux du même type. Presque partout sur
la terre, on trouve quelque grand groupe, soit d'animaux,
soit de plantes ayant ce caractère, et toutes les classes d’êtres
organisés renferment ainsi quelque groupe naturel indi-
gène, d’ailleurs plus ou moins compréhensif, plus ou moins
-prédominant et renfermé dans des limites géographiques
particulières. On en pourrait donner comme exemple, parmi
les Mammifères encore, les Quadrumanes, dont les repré-
sentants, grandement diversifiés dans l’ancien monde et
dans le nouveau, tantôt différent les uns des autres, et
tantôt se ressemblent par des points importants de la struc-
ture. Citons encore les Édentés de l'Amérique méridionale.
Parmi les Oiseaux, les Oiseaux-mouches constituent une
famille vraiment naturelle, aussi nombreuse que jolie, et
_confinée en Amérique comme les Faisans le sont dans l’an-
cien monde (4). Parmi les Reptiles, que l’on compare les Cro-
codiles de l’ancien continent à ceux du nouveau. Dans la
q (4) Nos soi-disant Faisans d’Amérique ne sont même pas de la famille des
Faisans d’Europe. Les « Faisans » américains sont de véritables Gélinottes.
j
64 DE L’ESPECE.
classe des Poissons, la famille des Poissons 4 branchies
labyrinthiques ne sort pas de l’océan Indien et du Pacifique 5
celle des Goniodontes est confinée dans les eaux douces de
l'Amérique du Sud et celle des Cestraciontes dans le Paci-
fique. L’anatomie comparée des Insectes n’est pas assez
avancée pour fournir des exemples frappants; mais, parmi
les insectes remarquables par leur forme et qu on ne trouve
que dans certains pays, on peut citer le genre Mormolyce
de Java, le Pneumora du cap de Bonne-Espérance, le Bé-
lostome de l'Amérique du Nord, le Fulgore de la Chine, etc.
La géographie des Crustacés a été tracée d’une façon telle-
ment magistrale par Dana, dans son grand ouvrage sur les
Crustacés recueillis par la commission américaine du voyage
de circumnavigation (United States exploring Expedition,
vol. XIII, p. 1451), que je ne puis que renvoyer à ce livre
pour les nombreux exemples de localisation des types de
cette classe; c’est un modèle à suivre dans tout travail de
celte nature. Qu'il me soit permis cependant d’ajouter le
Macrocheira du Japon, qui n’a pas de représentant ailleurs.
Il faut mentionner, parmi les Vers, le Peripates de la
Guyane. Parmi les Céphalopodes, il y a à citer le Nautilus
d’Amboine; parmi les Gastéropodes, le genre Jo, des eaux
occidentales des États-Unis, et, parmi les Acéphales, le Fri-
gonia d'Australie, certaines Naïdes des États-Unis, l’Æthérie
du Nil. Chez les Échinodermes, le Pentacrinus des Indes
occidentales, le Culcita du Zanzibar, ? Amblypneustes du
Pacifique, le Temnopleurus de l'océan Indien, le Dendraster
de la côte occidentale de l'Amérique du Nord; chez les
Acaléphes, la Bérénice d'Australie; chez les Polypes, les
vrais Fongidés de l’océan Indien et de l’océan Pacifique, le
genre Rerlla de l'Atlantique, sont autant d’autres exemples.
Bien des faits analogues pourront être mis en avant, quand
on connaîtra d’une manière plus précise la géographie
des animaux inférieurs. Ceux qui précèdent suffisent, en
tout cas, à faire voir que, au haut comme au bas de
l'échelle, sur la terre ou dans l’eau, il y a des animaux,
remarquables par une structure particulière, qui sont ren-
LA STRUCTURE FORMANT LIEN SERIEL. 65
ice dans des aires bien définies. Cette localisation de
formes spéciales est l’éclatante confirmation de lopinion
déjà émise, à un autre point de vue; c’est-à-dire que l’or-
ganisation animale, quelle qu’elle soit, peut s adapter à des
conditions tantôt identiques, tantôt diverses, mais ne saurait,
en aucune façon, être regardée comme étant, originelle-
ment, le produit de ces conditions.
# on RAT
La structure forme un lien sériel entre des animaux
largement disséminés a la surface du globe.
Après avoir étudié avec attention les reptiles qui habitent
les différentes contrées du globe, je fus frappé d’un fait
trés-remarquable qu'aucun naturaliste, que je sache, n’avait
encore signalé et dont aucune autre classe ne fournit un
exemple aussi notable. Voici ce fait : parmi les Sauriens,
omme parmi les Batraciens, il y a des familles dont les
eprésentants, malgré leur dissémination sur le globe, for-
ment une série trés-naturellement enchainée et dont chaque
erme équivaut à un degré particulier de développement.
es Scincoides (1), de l’ordre des Sauriens, sont une de ces
ainilles, Elle contient environ cent espèces, rapportées par
uméril et Bibron à trente et un genres, et dans lesquelles
le développement des organes de la locomotion produit des
mbinaisons remarquables, exposées dans le diagramme
uivant.
Pour bien comprendre la signification de ce tableau, il
est nécessaire de se rappeler que les animaux appartenant
Ja famille des Scincoïdes y sont envisagés à deux points de
ue différents. En premier lieu, leurs rapports zoologiques
ont exprimés par les combinaisons variées de la structure
» (1) Pour les caractères de la famille, voy. Duméril et Bibron, Erpélologie
i érale, vol. V, p. 511. — Voyez au ssi Cocteau, Études sur les Scincoïdes.
is, 1836, in-4, figures.
AGASSIZ. 5
66 _ DE L’ESPECE.
des membres. Certains d'entre eux, et ce sont les plus
nombreux, ont quatre pattes; d’autres n'en ont que deux.
qui sont toujours celles de derrière ; d’autres enfin n'en on!
point du tout. Ces pattes peuvent n'avoir qu’un doigt, ou er
avoir deux, trois, quatre, cinq, et le nombre de ces appen:
dices peut varier dans les membres thoraciques et dans le
membres pelviens. La classification ici adoptée est basée
sur ces caractères. En second lieu, il est tenu compte de I
distribution géographique. Or, on aperçoit tout de suite que
l'habitat de ces animaux n’a aucun rapport, quel qu’il soit,
avec le système résultant des caractères zoologiques. Au
contraire, les genres les moins voisins peuvent se rencontrei
dans le même pays, et ceux qui ont entre eux les relations
les plus étroites peuvent bien se trouver à des distances tres:
grandes les uns des autres.
Genres qui ont quatre pattes,
Seineus. ,. ..., 1 — Afrique septentrionale €
Zropidophora. + + 4 espèce, Cochinchine.
[ occidentale, Syrie,
te.
Sphenops., .. +. 4 — syP
Diploglossus. . , , 6 — Indes occident, et Brésil.
Amphiglossus. . . 4 — Madagascar.
Gongylus, 7 sous-genres,
Gongylus. . . . espèces. Europe mérid., Egypte
Ténériffe, île de France
Eumeces..... 44. — Indes orientales et occ:
dentales, Amérique mé
ridion. , Vanikoro, Not
yelle-Irlande, Nouve
Guinée, îles du Pacil
Euprepes. .. . . 43 — Cote cecidentale a” ’Afriqu
cap de Bonne - Espé
rance, É pts Abyssi
Cinq doigts à chaque patte, , . . nie, 8
; gascar, tees Pe - Gu
née, Indes, i
îles de la Sonde,
nille,
Plestiodon. . . . 5 — Égypte, Alger, ru Ja
pon, -Uni
Lygosoma. . . . 19 — Nouvelle-Hollande, Nou
velle - Zélan de,” Savi
Nouy.- Guinée, Timo
Indes orientales, iles d
Pacifique, États-Unis,
Liolopisma . À — Maurice et Manille,
Tropidolopisma. 4 — Nouvelle-Hollande,
Cyclodus.. . . .. _ Nouvelle-Hollande, Jave
Trachysaurus. ». À — Nouvelle- Hollande,
| Ablepharus. . . & — Europe du sud-est, Not
: velle-Hollande, îles d
\ Pagilique.
LA STRUCTURE FORMANT LIEN SÉRIEL. 67
Oe open ees: | Campsodactytus. FW capita.” Bengaléi Speed
ke det le paki sntbdauje. Heteropus, .... 3 — Afrique, Nouvelle - Hol-
ing doigts à Ja patte postérienre. . ares 41 — fue ete decid eel
Tetradactylus. .. 4 — Nouvelle-Hollande.
luatre doigts à chaque patte. . . . 4 (Le La Chalcides, de la famille voisine des Chalcidioides,
RS Ey te offre un autre exemple de cette combinaison.)
art us re ph Il n’y a pas d'exemple connu de cette combinaison.
sae afd 2 a enemple conan,
a: Hemiergis. .... 4 espèce, Nonvelle-Hollande,
Be doigts à el pate, +. Seps. . + 426505 À — Europe méridionale, Afri-
que septentrionale,
Messia, ... , . ,. 1 — Origine inconnue,
Deux doigts à la patte antérieure, , | Heteromeles. . . . 41 espèce, Alger.
pois à la postérieure, , . . . . . . ÿ Lerista.. . . . . . À —- : Nouvelle-Hollande.
eux à chaque "LL ENFANCE | Chelomeles. . . . . 1 — Nouvelle-Hollande,
Jeux doigts à ieure. . ps
nano sien] géchymale «Am Philipines.
Un doigt à la patte antérieure. . id
de dt: Die Ae dE | Brachystopus. . +. 4 — Afrique méridionale.
Un doigtà chaque patte, , . . . . | Evesia, , .4 +s, 1 — Origine inconnue.
Genres qui ont seulement deux pattes.
+ Un n’en connaît auenn qui ait les pattes de devant, mais cette combinaison se rencontre dans
a famille voisine des Chalcidioides, Les genres qui n’ont que les pattes de derrière offrent les
combinaisons suivantes :
Deux doigts. . . : . . ere +] Scelotes , , ,..". 4 espèce. Cap de Bonne-Espérance,
à Propeditus..... À — Cap de Bonne-Espérance.
Ve Nouvelle-Hollande,
doi Ophiades. ; . . . . 4 — Amérique du Sud,
Pr tu da Hysteropus...., 4 = Nouvelle-Hollande,
ER es SA 1 — Nouvelle-Hollande, -
Dibamus. , ; 4— Nouvelle-Guinée,
ANUS, 5 6e . 4 espèce, Europe, Asie occidentale,
Afrique septentrionale,
Ophiomorus. ... À — Morée, Russie méridio=
nale, Alger,
Acontias,..,.. 4 — Afrique méridionale, cap
de Bonne-Espérance.
Typhlina,, . , .. 4 = Afrique méridionale, cap
de Bonne-Espérance,
Qui donc, en examinant ce tableau, n’y reconnaitrait les
combinaisons d’une Intelligence! Cela est si évident, que
68 DE L'ESPÈCE.
facilement on oublierait, en présence de ce diagramme
dressé à Paris pour classer des animaux conservés au Muséum
du Jardin des plantes, qu’il est bien réellement écrit dans.
la nature par les animaux eux-mêmes, et devient lisible dès
que ceux-ci ont été réunis et comparés un à un. Mais il.
contient un élément important pour notre discussion. La
série n’est pas établie à ses différents termes par des repré=«
sentants équivalents. ll y a quelques combinaisons très
richement dotées, il y en a d’autres réduites à un petit
nombre de genres ou même à un seul; il en est, enfin, qui
n’ont pas été du tout employées. Tant d’arbitraire indique
le choix et non l’action d’une loi nécessaire.
Mais détournons notre attention de cette série remarquable,
et reportons-la sur les indications relatives à la distributions
géographique de ces genres si parfaitement alignés. Il suffit.
d’un coup d'œil jeté sur la dernière colonne du tableau pour
voir que non-seulement les Scincoïdes sont disséminés dans
toutes les contrées du globe, mais encore qu’il n’y a pas le
moindre rapport entre les combinaisons résultant des carac-i
tères de la structure etles habitat respectifs des genres qui
les présentent. Le type sans pattes se trouve en Europe,
dans l'Asie occidentale, dans l'Afrique septentrionale et au
cap de Bonne-Espérance ; — les types avec pattes postérieures
seulement et un doigt unique au Cap, dans l'Amérique du
sud, l'Australie et la Nouvelle-Guinée ; ceux à deux doigts
au cap de Bonne- -Espérance. Parmi les types sales quatre:
pattes, l'origine de ceux qui ont un seul doigt à chaque patte
est inconnue ; ceux qui ont un doigt aux pattes de devant et
deux aux pattes de derrière sont de l'Afrique du Sud ; ceux
qui ont deux doigts au membre antérieur et un seul au
postérieur viennent des Philippines ; ceux qui ont deux doigts
à chaque patte sont de la Nouvelle- Hollande. Geux qui ont
trois doigts à la patte de derrière et deux à celle de devant
habitent Alger et l’Australie. On n’en connaît point qui aient
trois doigts a la première patte et deux à la seconde. — Les
genres ayant {rois doigts aux quatre pattes habitent l'Europe;
le nord de l'Afrique et Australie. Il n’y en a point qui aient
( LA STRUCTURE FORMANT LIEN SERIEL. 69
à la fois trois doigts à une patte et quatre doigts à autre.
Ceux qui ont quatre doigts aux quatre pattes habitent la
Nouvelle-Hollande ; ceux qui ont cinq doigts à la patte anté-
. rieure et quatre à la postérieure vivent au Bengale ; la combi-
» naison inverse se rencontre en Afrique, aux Indes orientales,
"au Brésil, et en Australie. — Les genres qui possèdent cing
» doigts aux quatre pattes sont le plus largement distribués, et
. cependant tellement disséminés, qu'aucune province zoolo-
_ gique isolée ne montre une série parfaite ou quelque chose
- d’approchant. Au contraire, le mélange, dans presque toutes
les faunes, de quelques représentants de la combinaison la
plus achevée avec ceux de la combinaison la plus simple, ex-
clut plus décidément encore toute idée d’une influence des
agents physiques sur le développement des organes.
Une autre série semblable et non moins remarquable peut
être tracée chez les Batraciens à queue. Je renvoie, pour
lus caractères de ces animaux, aux ouvrages de Holbrook,
Duméril et Bibron, Tschudi et Baird (4). A la vérité, ces
auteurs ne les ont point présentés sous ce point de vue, mais
Jes particularités génériques de ces animaux suggèrent
d’elles-mémes ce rapprochement; d’ailleurs de plus longs
détails 4 cet égard seraient, pour le but que je me propose,
d’autant plus oiseux, que j’ai déja discuté ailleurs Ja gradation
de cette série (2).
Des séries analogues, bien que moins remarquables et plus
limitées, pourraient étre tracées dans chaque classe du régne
animal, non-seulement parmi les types actuels, mais encore
parmi ceux des époques géologiques antérieures. L'intérêt
qui s'attache à l'étude de ces séries en devient plus grand;
car on voit alors que ces combinaisons sont non-seulement
développées dans l’espace, témoignant par là de l’omnipré-
sence, mais contiennent encore le temps comme élément, ce
(4) J. E. Holbrook, North American Erpetology. Philadelphie, 1862,
in-4, vol. V. — J. J, Tschudi, Classification der Batrachier. Neufchatel,
41838, in-4. — Sp. F. Baird, Revision of the North American tailed Ba-
_trachia (Journ. Acad, Nat. Sc, of Philadelphie, 2° série, vol. 1,1849, in-4.
« (2) L. Agassiz, Twelve Lectures on Comparative Embryology. Boston,
A849, in-8, p. 8.
70 DE L’BSPHCE.
qui dénote prescience. La série des Grinoides; celle des
Brachiopodes à travers tous les âges géologiques ; celle des
Nautiloïdes, des Ammonitoides, depuis le trias jusqu'au.
terrain crétacé inclusivement ; celle des Trilobites, depuis les
couches inférieures jusqu’à l’étage carbonifère ; celle des.
Ganoïdes à travers toutes les formations; enfin, parmi les.
animaux vivants : dans la classe des Mammifères, celle des
Singes de l’ancien monde spécialement; celle des Carnivores,
depuis les Phoques jusqu'aux Digitigrades, en passant par:
les Plantigrades; — dans la classe des Oiseaux, celle dés.
Échassiers et celle des Gallinacés ; — dans la classe des Pois=
sons, celle des Pleuronectides et celle des Gadoides, celle des
Raies et des Requins ; — dans la classe des Insectes, celle des:
Lépidoptères, depuis les Teignes jusqu’aux Papillons ; — dans
la classe des Crustacés, celle des Décapodes en particulier ;
— dans la classe des Vers, celle des Nudibranches et celle
des Dorsibranches spéctalement; — dans la classe des Gépha-
lopodes, celle des Sépioides; — dans la classe des Gastéro-
podes, celle des Nudibranches; — dans la classe des Acé-
phales, celle des Ascidiens et celle des Huîtres dans le sens
le plus large ; — dans la classe des Echinodermes, celle des
. Holothuries et des Astérioides; — dans la classe des Aca=
léphes, celle des Hydroïdes;— dans la classe des Polypes,
celle des Alcyonoïdes, des Astræoïdes, etc., ete., méritent
une attention spéciale, et pourraient étre étudiées avec beau-.
coup de fruit au point de vue où je les envisage. Car, partout,
nous y découvrons, dans les deux dimensions de l’espace et”
du temps, les combinaisons intelligentes et l'acte d’un esprit.
Mais il ne faut toutefois pas perdre de vue que, tandis que:
certains types déroulent une série d’un enchainement remar-
quable, il en est d’autres chez lesquels il ne paraît exister .
rien de semblable et dont la diversité donne lieu à des con-!
sidérations d’un autre ordre.
Ë
|
LE VOLUME ET LA STRUCTURE. 71
XIII
Der:
_ Rapport entre le volume des animaux et leur structure.
La relation pouvant exister entre le volume des animaux
3 et leur structure est chose dont les naturalistes ne se sont
| guère préoccupés. Cependant l’examen le plus superficiel
suffit à faire voir qu'il y a entre ces deux côtés de l’organi-
sation un rapport défini. Je suis loin de prétendre que le
volume et la structure forment deux séries parallèles, et
que tous les animaux d’un embranchemint ou même d’une
classe, d’un ordre, aient entre eux sous le rapport du volume,
un lien fort étroit. Cet élément de l’organisation n’est pas
renfermé dans de telles limites. Et pourtant, les Vertébrés
pris en masse sont plus volumineux que les trois autres em-
branchements : les Mammifères sont plus gros que les
Oiseaux ; les Crustacés plus que les Insectes ; les Cétacés sont
plus volumineux que les Herbivores, ceux-ci plus que les Car-
nivores, etc. Mais c’est dans les limites de la famille que le
volume acquiert, dans l’organisation animale, une impor-
tance réelle; c’est-à-dire, dans les limites de ce groupe
essentiellement distingué par la forme, comme si, en ce qui
concerne la structure de l’animal, la forme et la grandeur
étaient corrélatives. A cet égard, une étroite analogie appa-
rait entre les représentants des familles naturelles; les ex-
trêmes varient à peine de 1 à 40, et fréquemment la diffé-
rence entre eux est seulement de 4 à 2. C’est ce que vont
montrer quelques exemples choisis dans les familles les plus
naturelles.
Laissons de côté l’homme, à cause des objections qu'on
ne manquerait pas de faire contre l’idée que notre espèce se
compose de races originellement diverses. Considérons les
diverses familles dé Singes, de Chauves-Souris, d’Insectivores,
de Carnivores, de Rongeurs, de Pachydermes, de Rumi-
nants, etc. — Dans la classe des Oiseaux, voyons les Vautours,
les Aigles, les Faucons, les Chats-huants, les Hirondelles, les
72 | DE L’ESPECE.
Bouvreuils, les Passereaux, les Oiseaux-mouches, les Pigeons, :
les Roitelets, les Autruches, les Hérons, les Pluviers, les.
Mouettes, les Canards, les Pélicans. Passons en revue : parmi
les Reptiles, les Crocodiles, les familles diverses de Chélo-
niens, de Lézards, de Serpents, les Crapauds, les Grenouil-.
les, etc.; parmi les Poissons, les Raies et les Requins, les”
Harengs, les Morues, les Cyprinodontes, les Chétodontes, les 4
Lophobranches, les Ostraciontes, etc. ; parmi les Insectes, Les
Sphingoïdes ou les Tinéines, les Longicornes ou les Cocci-.
nelles, les Bomboides ou les Brachonides ; parmi les Crusta-
cés, les Cancroïdes ou les Pinnithéroides, les Limuloides ou.
les Cypridoïdes et les Rotiféres (1); parmi les Vers, les Dorsi-
branches ou les Naioides; parmi les Mollusques, les Strom-
boides ou les Buccinoides, les Hélicinoides ou les Limnéoides, —
les Chamadés ou les Cycladoides; parmi les Rayonnés, les
Astérioïdes et les Ophiuroides, les Hydroïdes et les Disco-.
phores, les Astræoïdes et les Actinioides. à
Voilà quelques faits qui montrent bien quelles sont les \
limites dans lesquelles le volume et la structure sont en cor-
rélation directe (2). On en inférera naturellement que, puis-
que le volume est un caractère de l'espèce assez important —
pour embrasser le cercle des connexions de la famille et u
_ même davantage, il est aussi peu permis de croire le volume
déterminé par les agents physiques que la structure elle-
même, à laquelle il est si intimement lié. L’un et l’autre, en
effet, ont avec ces agents une relation analogue.
(1) Dana, Crustacés, p. 1409 et 1411.
(2) Ces remarques, sur le volume moyen des animaux par rapport a-leur |
structure, ne peuvent manquer de soulever plusieurs objections. ll est bien —
connu, en effet, que, dans certaines circonstances, l’homme peut modifier la —
grandeur normale de beaucoup de plantes et d'animaux domestiques, et que,
même à l’état de nature, le hasard offre parmi les êtres vivants des exemples
de stature extraordinaire. Mais cela ne change pas la moyenne caractéristique,
et ces cas ne touchent d’ailleurs en rien la question d’origine, ou méme celle
de la permanence de certaines espéces. Cela n’intéresse que les individus, a
l’égard desquels je m’expliquerai plus -loin, section xvi. Enfin, il ne faut pas
oublier qu’il y a des limites 4 ces variations, et que, s il arrive aux animaux et
aux plantes de se trouver dans des conditions qui affectent leur volume en plus
ou en moins, c’est principalement grace à l'intervention de l’homme que ces
modifications parviennent à leur degré extrême (voyez plus loin, section Xv),
LE VOLUME ET LA STRUCTURE. +5
La vie suppose l'introduction, dans la structure de tout
être organisé, d’un élément quantitatif aussi rigoureuse-
‘ment fixé, aussi exactement pondéré que n’importe quelle
autre condition se rattachant surtout à la qualité des or-
-ganes ou de leurs parties. C’est là la preuve la plus claire
qu’il existe dans chaque sorte d'animaux et de plantes un
principe spécifique, immatériel; car tous les êtres commen-
cent leur existence à l’état d’ovule microscopique, et pour
tous la structure de cet ovule présente la similitude la plus
merveilleuse. Cependant cet ovule, d’abord physiquement
constitué d’une manière si identique chez tous les animaux,
ne produit jamais rien qui diffère des parents. Toujours,
après une succession de changements invariablement les
mêmes, il aboutit à la production d’un nouvel être identique
avec ses auteurs. Si donc les agents physiques, de par la toute-
puissance de leur influence, façonnent les caractères des
êtres organisés, comment se fait-il que nous n’observions
pas trace de cette influence dans les cas innombrables où
ces ovules sont abandonnés au sein des éléments dans les-
quels ils subiront leur développement ultérieur, juste à une
période à laquelle ils n’ont encore assumé aucun des carac-
téres définis qui, plus tard, distingueront l'animal adulte ou
la plante parfaite? Les physiciens connaissent-ils quelque
loi du monde matériel qui offre avec ces phénomènes une
analogie quelconque et puisse être regardée comme ayant
avec eux n’importe quel rapport?
A ce sujet, il faut se rappeler d’ailleurs que les cycles par-
courus, par les volumes caractéristiques de familles diffé-
rentes, sont entièrement divers pour des animaux de types
divers, bien que ces animaux vivent tous dans des condi-
tons identiques,
did
74 DE L’ ESPECE.
XIV
Rapport entre le volume des animaux et les milieux
dans lesquels ils vivent.
Je viens de faire remarquer que des animaux de type aie
férent, bien que vivant ensemble, ne présentent pas entre
la structure et le volume un même et unique ra port.
Cependant il y a entre la vie et les éléments ve une
combinaison tellement intime, que chaque type, dans les
limites qui lui sont propres, est, en ce qui concerne la taille,
décidément en connexion avec ces éléments (4). Pris dans
leur ensemble, les Mammifères aquatiques sont plus volu-
mineux que les Mammifères terrestres; il en est de même.
des Oiseaux aquatiques et des Reptiles d’eau. Dans les fa-
milles qui sont essentiellement terrestres, les espéces qui.
vont à l’eau sont plus grosses que celles qui ne quittent,
jamais la terre : par exemple, l'Ours polaire, le Castor, lé
Coypu etle Capybara. Ceux d’entre les Oiseaux que leurs:
habitudes attachent à la terre sont aussi plus petits que ceux
qui vivent dans l’eau d’une façon permanente. Le méme
rapport s "observe chez les Insectes dont les familles ont des!
espèces terrestres et d’autres aquatiques. Il est, de plus,
remarquable que, parmi les animaux aquatiques, les types.
habitant l’eau douce sont moins gros que ceux qui vivent.
dans les mers. Les Tortues marines sont plus grosses que
les plus grosses Tortues de nos rivières ou de nos étangs.
Les Tryonyx, plus aquatiques que les Emydes, sont aussi d’un.
plus fort volume, et, parmi ces derniéres, les Chélydres, plus
aquatiques que les vraies Emydes, les surpassent en grandeur;
(4) Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Recherches zoologiques et physiologiques \
sur les variations de la taille chez les animaux et dans les races humaines,
Paris, 4834, in-4. — Voyez aussi mon mémoire sur les Relations naturelles.
entre les animaux et les éléments, etc., ci-dessus, sect. 1x, note, et A. von
Befold, Untersuchungen über die Vertheilung von Wasser, organischer
Materie und anorganischen Verbindungen im Thierreiche (Zeitschrift fiir’
wiss. Zool., 1857, vol. VIII, p. 487).
LE VOLUME ET LES MILIEUX. 75
a leur tour, celles-ci l’emportent sur les Clemmys ou les
Cistudes, qui sont plus terrestres. C’est dans la mer que la
classe des Poissons a ses représentants les plus énormes ; les
Poissons d’eau douce sont de vrais nains en comparaison
de leurs représentants marins, et les plus gros d’entre eux,
“comme les Esturgeons et les Saumons, vont à la mer. Même
‘chose se voit chez les Crustacés; pour s’en convaincre, il
suffit de comparer l'Écrevisse au Homard, |’Apus à la ti
‘mule, etc. Chez les Vers, les Vers de terre et les Sangsues
fournissent encore un vaste champ de comparaison et con-
trastent avec les types marins. Les Gastéropodes et les Acé-
_phales n’offrent pas de moins nombreux exemples : les Am-
pullariées et les Anodontées les plus gigantesques sont petites
en comparaison de certains Fusus, Voluta, Tritonium, Cassis,
Strombus ou du Tridacne. Les Rayonnés eux-mêmes, qui
sont tous marins, à l’exception du seul genre Hydra, ne font
pas exception à la règle, car les Hydroïdes d’eau douce sont
au nombre des plus petits Acalèphes connus.
Cette coincidence, sur une échelle aussi considérable, sem-
ble devoir venir à l’appui de l'opinion qui attribue aux élé-
ments une influence modificatrice immédiate sur les animaux.
Malgré cela, je considere ce fait comme une des preuves les
plus frappantes qu’il n’y a entre les deux choses aucun rap-
port dé causalité. Pour que jeusse tort, il faudrait que les
représentants, terrestres OU aquatiques, d’une même famille
ne présentassent pas la très-grande similitude qu’ils ont tous
dans tous leurs caractères essentiels, lesquels n’ont véri-
tablement aucune connexion quelconque avec les éléments.
Ce qui de l Ours polaire fait un ours, ce n’est pas son appro-
priation à un genre de vie aquatique. Ce qui fail de la Ba-
leine un mammifère n’a aucun rapport avec la mer. Ce qui
réunit dans la même classe les Vers de terre, les Sangsues et
les Eunices n’a pas plus de lien avec leur habitat que n’en
ont les particularités de structure auxquelles l’homme, le
Singe, la Chauve-souris, le Lion, le Phoque, le Castor, le Rat
et la Baleine doivent de ne former qu’une seule classe. De
plus, entre des animaux de type différent qui vivent dans le
76 DE L’ESPECE.
même élément, il n’y a, quant à la grandeur, aucune analo=
gie. Les Insectes aquatiques, les Mollusques aquatiques se
trouvent, sous ce rapport, dans la moyenne de leur classe, |
aussi bien que les Reptiles, les Oiseaux ou les Mammifères
aquatiques. Il n’y a pas une moyenne commune, soit pour
les animaux terrestres, soit pour les animaux aquatiques, pris
ensemble, des différentes classes, et en cela réside la preuve,
que les êtres organisés sont indépendants des milieux dans.
lesquels ils vivent, pour ce qui concerne leur origine; quoi-.
qu'il soit d’ailleurs trés-clair que, au jour de la création, ils”
ont dû être adaptés à l’élément dans lequel ils étaient placés.
Pour moi, je vois dans ces faits que les phénomémes de la»
vie se manifestent au sein du monde physique, et non pas”
qu'ils en dépendent ou en émanent; que les êtres organisés
sont faits pour conquérir et s’assimiler les matériaux du
monde inorganique, et qu'ils conservent leurs caractères ori-_
ginels en dépit de l’action incessante des agents physiques"
sur eux. Et j’avoue que je ne peux pas comprendre comment:
des êtres entièrement indépendants de ces forces auraient.
pu être produits par elles.
XV
Fixité des particularités spécifiques dans tous les êtres
organisés.
La science fit un grand pas en avant le jour où elle s'as-«
sura que les espèces ont des caractères fixes et ne changent
point dans le cours du temps. Mais ce fait, dont on doit.
la démonstration à G. Cuvier (1), a acquis une impor-
tance plus grande encore depuis qu’il a été également établi”
que les changements, même les plus extraordinaires, dans le”
mode d’existence d’un animal et dans les conditions où il est"
placé, n’ont pas plus d’influence sur ses caractères essentiels
que le cours du temps.
3
(1) G. Cuvier, Recherches sur les ossements fossiles, etc., nouvelle édition, M
Paris, 1824, 5 vol. in-4, figures, vol. 1, sur I’Jbis, p. cXLI. ;
FIXITE DES PARTICULARITÉS SPECIFIOUES. 2
Les faits relatifs à ces deux propositions sont trop bien
connus pour qu’il soit nécessaire d’en faire un exposé spécial.
J'enrappellerai cependant quelques-uns pour qu’on ne puisse
pas se méprendre sur ce que je veux dire. Les animaux des
diverses périodes géologiques différent spécifiquement, en
masse, de ceux des formations qui précèdent ou qui suivent;
c'est là un fait suffisamment démontré. Entre deux pé-
riodes géologiques successives, des changements ont donc
eu lieu parmi les animaux et les plantes. Mais aucune de ces
formes primordiales de la vie, appelées espèces par les natu-
ralistes, n’a, que l’on sache, changé pendant la durée d’une
de ces périodes. A la vérité, quelques zoologistes supposent
que les espèces des périodes diverses consécutives dérivent
les unes des autres, les caractères distinctifs des plus récentes
découlant de modifications subies par celles des âges pré-
cédents. Mais c’est là une pure supposition, qui ne repose
ni sur le témoignage de la physiologie, ni sur celui de la
géologie, et l’assertion que les animaux et les plantes peu-
vent changer d’une semblable manière, pendant la durée
d’une seule et même période, est également gratuite. On sait,
au contraire, par les preuves que nous ont conservées les
monuments de l'Egypte et par la comparaison minutieuse
qu'on a pu faire des animaux trouvés dans les sépultures
égyptiennes avec les spécimens vivants de la même espèce
et du même pays, qu’il n’y a pas ombre de différence entre
les uns et les autres, au bout d’une période de cinq mille
ans. Cette comparaison, faite pour la première fois par
Cuvier, a prouvé que, aussi loin que nous puissions porter
nos recherches en arriére, nous ne découvrons pas méme
un léger indice pouvant porter à croire que les espèces se
modifient dans le cours des siècles, tant que nous bornons
nos comparaisons à une seule et même grande époque
cosmique. La géologie montre seulement que, à des pério-
des différentes (1), il a existé des espèces différentes; mais
.
(1) Personne ne se trompera sur le sens du mot période employé ici pour
désigner des ères différentes, des époques distinctes, d’une longue durée, dont
78 | DE L'ESPÈCE.
nulle part on n’a découvert d’intermédiaires entre celles d’une
époque et celles d’une autre époque consécutive. D'ailleurs
la question dont il s’agit n’est pas celle de l’origine des dif-
férences observées dans l’ensemble des espèces qui appar-
tiennent à deux périodes géologiques distinctes. La question
débattue dans ce paragraphe est uniquement celle de la fixité
ou non-fixité des espèces durant une seule et même époque,
une seule et même ère, une seule et même période de V’his-
toire du globe. Or, rien ne fournit même l’argument le plus
faible en faveur de la mutabilité. Au contraire toutes les
chacune est caractérisée par des animaux différents, Il faudrait une ignorance
complète des faits dont il s’agit pour considérer la diversité qui apparaît entre
ces animaux comme étant, par elle-même, la preuve que les espèces se modi-
fient. La véritable question est celle-ci : Une modification quelconque'ast-elle
eu lieu pendant la durée d’une ou de plusieurs de ces périodes ? On ne saurait
croire avec quelle légèreté certaines personnes auxquelles manque la con-
naissance des faits discutent ce point, tout en ayant l’air de raisonner logique-
ment, Un physicien distingué s’est récemment occupé de ce sujet de limmus
tabilité des espèces, et il a mis en doute la logique de ceux qui la tiennent
pour démontrée. Je vais résumer son argumentation aussi brièvement que
possible, et je montrerai, je l'espère, qu’il n’est pas à la question, « D'une
période géologique à l’autre, on observe des changements. Des espèces n'exis=
tant pas à une période antérieure se rencontrent à une période postérieure,
tandis que celles de la première époque ont disparu. Or, bien que chaque
espèce ait pu posséder, durant un certain laps de temps, des particularités in-
variables, le fait que, lorsqu'on embrasse des périodes assez étendues, toutes
les espèces d’une première époque sont, à une autre époque, remplacées par
des espèces nouvelles, prouve qu’en définitive l’espèce change pour peu qu’on
envisage une période suffisamment longue. » Les faits sont bien posés et je
n’ai pas d'objection à faire à cet égard ; mais je soutiens que la conclusion
n’est pas logique. Il est vrai que l’espèce est limitée à une période géologique
donnée ; il est également vrai que, dans toutes les formations géologiques,
les espèces des périodes successives diffèrent les unes des autres. Mais parce
qu’elles diffèrent, s’ensuit-il qu’elles se sont modifiées? N’ont-elles pas été sub-
stituées, remplacées par d’autres ? L'espace de temps nécessaire à l’opération ne
fait rien à la chose. Qu’on accorde, pour chaque période, des myriades d’an-
nées, que ce soit plus, que ce soit moins, la question reste toujours simple-
ment celle-ci : Quand un changement a eu lieu, a-t-il eu lieu spontanément,
sous l’action des forces physiques et suivant la loi de ces forces, ou bien a-t-il
été produit par l'intervention d’un agent dont l’activité, avant comme après,
ne s’exerçait point sur cet objet ? Une comparaison rendra ma pensée plus
clarie. Je suppose qu'un amateur de peinture visite un musée où les toiles sont
classées systématiquement et où les tableaux d'écoles différentes sont placés
dans l’ordre chronologique. En passant d’un salon à un autre, il observe des
changements aussi graffds que ceux notés par les paléontologistes quand ils
passent d'un système de roches à un autre. Mais parce que ces œuvres ont une
grande ressemblance, puisqu’elles appartiennent à telle ou telle école ou sont
FIXITE DES PARTIGULARITES SPECIFIQUES. 79
recherches modernes (1) n’ont fait que confirmer les résul-
ats obtenus d’abord par Cuvier, et les vues de ce grand
maître sur la fixité de l’espéce.
C'est quelque chose que de pouvoir démontrer, par le
témoignage des monuments et par la comparaison directe,
queles animaux etles plantes n’ont point changé dans l’espace
d'environ cing mille années (2). Ce résultat a eu la plus
heureuse influence sur les progrès de la science, spéciale-
ment. pour ce qui est des conséquences à tirer du fait que,
à chaque époque et dans toute la série des formations géolo-
| giques, on rencontre une variété d'êtres organisés aussi
considérable que celle dont nous sommes actuellement
témoins (3). C’est par là qu’on a été amené à la conviction,
aujourd hui universelle parmi les naturalistes dignes de ce
d’époques très-rapprochées, le critique aura-t-il raison de supposer que des
tableaux anciens se sont métamorphosés pour devenir tableaux modernes, et de
_ nier que les uns et les autres soient l'œuvre d’artistes qui vivaient et agissaient
au moment où ces toiles ont été peintes ? La question de l’immutabilité des
espèces est absolument la même que celle de ce cas supposé. Ce n’est pas
parce que les espèces ont eu une durée plus ou moins longue aux âges passés
que le naturaliste les considère comme immuables, C’est parce que, dans la
série tout entière des temps géologiques, et pendant la durée des siècles qui
se sont écoulés depuis l'introduction première en ce monde des animaux et des
plantes, il n'apparaît pas le plus petit indice qu’une espèce se soit transformée
en une autre. Nous savons seulement qu’une différence existe à des époques
differentes, ainsi qu'il arrive aux tableaux de différents siècles et d’écoles
diverses. Mais tant que nous n’aurons sur ce point que les données fournies de
nos jours par la géologie, il sera contre la philosophie et contre la logique de
supposer, à cause de ces différences, que les espèces changent ou ont changé,
se transforment ou se sont transformées. C’est tout comme si l'on supposait
que les tableaux se sont transformés dans le cours du temps. Nous ignorons
quelle a été l’origine des êtres organisés, cela est vrai, Pas un naturaliste ne
saurait rendre compte de leur apparition au commencement, pas plus que de
leur différence aux périodes différentes. Nous en savons assez toutefois pour
repousser l'hypothèse de la transmutation. Outre que cette hypothèse n’explique
pas les faits, elle rend d'avance inutile toute tentative ultérieure de recherches
à cet égard. (Voy. Baden Powell's Essays, ete., cité ci-dessus, p. 412 et suiv.,
| etle 8° Essai en général.)
(1) Kunth, Recherches sur les plantes trouvées dans les tombeaux égyp-
_hens (Annales des sciences naturelles, vol. VII, 4826, p. 414).
(2) H ne m'appartient pas de discuter jusqu'à quel point'est fondée en réa-
lité la chronologie égyptienne ; mais, quoi qu'il en soit, il reste toujours que
depuis l’époque la plus reculée qu'on connaisse, les animaux n’ont pas cessé
* d'être ce qu’ils sont de nos jours.
LE. (3) Voyez mon mémoire sur The primitive Diversity, ete,, cité plus haut,
| sect. Vil, note.
bt
80 DE L’ESPECE.
nom, que la terre existe depuis un nombre incalculable de
siècles, et que le laps de temps écoulé depuis l’apparition de
Ja vie à sa surface ne peut pas être évalué en années. La date
même de la période à laquelle nous appartenons est encore
un problème, en dépit de la précision avec laquelle certains
systèmes de chronologie prétendent fixer l’époque de la
création de l’homme (1). Plusieurs circonstances, en effet,
indiquent que les animaux actuellement vivants habitent.
la terre depuis un temps infiniment plus long qu'on ne le”
suppose généralement. Il a été possible de déterminer le
mode de formation des récifs de coraux, nommément de ceux
de la Floride (2), avec une rigueur qui permet d’affirmer que
huit mille ans environ sont nécessaires pour qu’un de ces
bancs s’éléve du fond de l'Océan au niveau de sa surface.
Or, la pointe la plus méridionale de la Floride est entourée:
par quatre de ces bancs, concentriquement disposés les uns
en dehors des autres et dont on peut démontrer que la for®
mation a été successive. Cela fait remonter l’origine pre-
miére de ces récifs à plus de trente mille ans, et cependant”
les coraux qui les ont construits sont partout de la même.
espèce identique. Voilà donc un fait qui fournit, aussi di-4
-rectement qu’on la puisse obtenir dans n'importe quelles
branche des recherches physiques, la preuve que quelques-"
unes, au moins, des espèces animales actuellement vivantes,
remontent à plus de trente mille ans (3), et n’ont pas dans tout.
le cours de cette période (4) subi la plus légère modificass
(4) Nott et Gliddon, Types of Mankind, p. 653.
(2) Voyez mon mémoire sur les Réci/s de la Floride, publié dans « Reports |
of the United States Coast Survey », et dont il a été d’abord publié des extraits
dans le rapport pour l’année 1851, p. 145. Un nouvel examen des récifs de lay
Floride m’a convaincu que cette estimation tombe au-dessous de la réalité. Le.
temps moyen du développement des coraux déterminé par l'observation directe
n’est pas de moitié aussi rapide que je l’avais supposé d’abord.
(3) Je suis maintenant convaincu qu’on peut, sans exagération, porter vâged 3
de ce récif à cent mille ans, tant sont lentes les opérations de la nature. 4
(4) A ceux qui seraient tentés d’attribuer à l’influence modificatrice des
agents physiques les différences qui existent entre les espèces de périodes géo="
logiques diverses ; à ceux-là aussi qui considèrent les changements qui se pro="
duisent actuellement parmi les êtres vivants comme une preuve de leur sys-—
tème ; à ceux pour lesquels les faits que je viens de mentionner ne seraient pas
FIXITE DES PARTICULARITÉS SPÉCIFIQUES. 81
ion. Et encore, ces quatre récifs concentriques sont seule-
nent les plus distincts de cette contrée; il y en a, un peu
lus au nord, d’autres moins bien étudiés jusqu'ici! De
ait, la presqu’ile tcut entière de la Floride est simplement
ormée de bancs de coraux agglomérés, réunis les uns aux
lütres dans le cours des siècles et qui ne contiennent que
les débris de coraux, de coquilles ou d’autres animaux,
é entiques avec ceux qui vivent actuellement sur les côtes de
sette Péninsule. En admettant donc qu’une étendue de cinq
milles géographiques soit le terme moyen du développement
Yun banc de coraux, dans les circonstances où l’on voit se
uecéder les récifs concentriques de la Floride, et que la
uccession régulière des bancs se prolonge jusqu’au lac
Jgeechobee, sur deux degrés de latitude, on aurait environ
eux cent mille ans pour la période de temps nécessaire à
aire émerger de l'Océan la partie de la péninsule de la
oride située au sud du lac Ogeechobee, dans ses limites
ctuelles ; et, durant cette immense période, aucune modi-
ication n'aurait eu lieu dans les caractères des animaux du
rolfe du Mexique (1).
C’est nuire aux intérêts les plus respectables de la science
jue de confondre des questions qui sont entièrement dif-
érentes, dans le seul but de justifier une théorie. C'est ce
u’on fait cependant toutes les fois qu’il s’agit de la fixité
es espèces. De plus longues observations sur ce point ne
eront donc pas déplacées ici.
Je ne veux pas entrer dans la question de savoir s’il n’y
pas quelque espèce qui se retrouve, identiquement la
néme, dans deux formations successives. J’ai déjà ample-
nent traité ce sujet dans d’autres ouvrages (2). D'ailleurs,
+
ne démonstration suffisante de l’immutabilité des espèces et qui croient que
à qui n’a pas pu se faire dans l’espace de trente mille ans se fera dans une
ériode plus longue, qu'il me soit permis de rappeler la charmante chanson de
hamisso, intitulée « Tragische Geschichte » qui commence ainsi : ’s war Liner
?s zu Herzen ging.
(A) Comme on l’a vu par une note précédente, c’est le double de ce temps
in moins qu’il faudrait dire.
® (2) L. Agassiz, Coquilles tertiaires répulées identiques avec les espèces
AGASSIZ. 6
82 DE L'ESPÈCE.
quand, en définitive, cela s’observerait une fois ou l’autre,
cela ne diminuerait en rien la valeur de ma thèse. Il est
évident, en effet, que si celte identité était démontrée, cele
prouyerait d’une manière encore plus concluante combien
tenaces sont les caractères de l’espéce, puisqu'ils peuyen
persister malgré tous les changements physiques qui on!
lieu d’une période géologique à celle qui la suit. De plus,
_cette identité une fois établie, il y aurait encore à mettre er
tre
a déjà un témoignage d'un grand poids en faveur de l'ori:
gine distincte de représentants d’une même espèce, qu
vivent dans des aires géographiques séparées et distantes (1)
Le cas d'espèces voisines mais différentes se rencontrant dan:
deux formations consécutives, chacune bornée d’ailleurs ¢
son étage respectif, est, dans le sens de la durée, le paral.
lele de celui qui, dans le sens de l’espace, nous montre des
espèces étroitement alliées — celles que j'appelle représen.
tatives — occupant des aires distinctes. Or, dans ce derniey
cas, il n’est pas un naturaliste judicieux qui fasse dériver le:
unes des autres. Il n’y a pas plus de raison pour suppose:
que des espèces alliées au même litre descendent les une:
des autres, parce qu’elles se sont succédé dans le temps. Tou
ce qui a élé dit, dans les paragraphes qui précèdent, tou:
chant les différences observées entre les espèces qu’on ren:
contre en des circonscriptions géographiques différentes,
s'applique avec une force égale aux espèces qui se son
succédé les unes aux autres dans le cours du temps. . |
Quand on met en ayant nos animaux domestiques et nos
plantes cultivées comme fournissant la preuve de la muta
bilité des espèces, il est une circonstance qu'on méconnai
vivantes (Nouv. Mém. de la Soc. helvétique des Sciences naturelles). Neu
châtel, 1845, vol. VII, in-4, figures. — Études critiques sur les Mol
fossiles. Neufchâtel, 1834-48, in-4, figures. — Monographies d'Échi
. vivants et fossiles. Neufchâtel, 1838-42, 4 numéros in-4, figures. — Rec
ches sur les poissons fossiles. Neufchâtel, 1833-44, 5 vol. in-4, atlas in
folio.
(4) Voyez section X, où l’on envisage le cas des espèces représentatives,
i FIXITE DES PARTICULARITES SPÉCIFIQUESs 83
Sonstamment ou qu'on passe sous silence. Pour autoriser
"argument qu'on en tire contre la fixité, un premier point
on effet devrait être établi : il faudrait démontrer que tous
es animaux que nous désignons par un même nom sont
ssus d’un tronc commun, Or, loin que ce soit le cas, c’est
hose nettement contredite par la connaissance positive où
jous sommes que les variétés de plusieurs d’entre eux, tout
lu moins, proviennent d’un mélange complet de différentes
spéces (1). Les monuments de l’Égypie font d’ailleurs voir
[ue plusieurs de ces soi-disant variétés, qu’on suppose être
& produit du temps, sont aussi anciennes que n'importe
uel autre animal contemporain des hommes ; en tous cas,
jus ne possédons ni tradition, ni monument de l'existence
w ils ont de nos jours (2). ll est done fort possible que les
ilférentes races d'animaux domestiques aient été originel-
pment des espèces distinctes, dont le mélange est, de nos
burs, plus ou moins complet comme celui des différentes races
uraaines, Enfin, ni les animaux domestiques, ni les plantes
ultivées, ni les races humaines, ne sont des objets sur lesquels
uisse porter l'étude de la fixité ou de la non-fixité de l'espèce.
à ne peut en effet les introduire dans le débat sans trancher
l'avance, dans les prémisses, ce qui est précisément en
uestion. D'ailleurs, à l'égard des différentes races de nos
nimaux domestiques que nous savons avoir été produites
2 main d'homme, aussi bien que pour certaines variétés
e plantes cultiyées, il imporie de les bien distinguer des
ces permanentes que rien ne nous autorise à ne pas con-
dérer comme primitives. Les premières sont le résultat des
bins constants de l'homme; soit! elles sont done le produit
l'influence bornée, du faible contrôle que Vesprit hu-
ain peut exercer sur les êtres organisés; elles ne sont pas
produit arbitraire de la pure activité des causes physiques.
( ) Nos volailles, par exemple.
(2) Now et Gliddon, Types of Mankind, p. 886.
8h . DE L’ESPECE.
Il est prouvé, par conséquent, que même les modification
les moins importantes qui puissent avoir lieu pendant I
durée d'une seule période cosmique, chez les animaux €
les plantes, sont déterminées par une puissance intelligent
et ne résultent pas de l’action immédiate des forces brutes
Ainsi donc, loin de manifester les effets des causes phy:
siques, les modifications quelconques ayant eu lieu, dans le
cours du temps, chez les êtres organisés, apparaissent comm:
le résultat de l’action d’une Puissance intelligente. Elle
donnent, par conséquent, une base matérielle au jugemer
qui, dans les différences observées chez ces êtres finis, voi
une institution de l’Intelligence suprême et non le prodw
des causes physiques. Ce jugement acquiert une force nou
velle quand on considère que les différences existant entr
nos diverses races d'animaux domestiques, ou entre no
plantes cultivées, et encore celles observées entre les race
humaines, persistent etse conservent sous les influence
climatériques les plus diverses. C’est là un fait dont les mi
grations si étendues des peuples civilisés fournissent chaqu
jour plus largement la preuve, et qui est en contradictio
directe avec la supposition que les influences dont il s’ ag
aient pu produire ces variétés.
Quand, du reste; on parle de la domestication des espèce
en particulier, on ne devrait pas oublier que chaque rac
d'hommes a ses espèces propres d'animaux domestiques «
de plantes cultivées, et que ces espèces sont d’autant plu
pauvres en variétés que la race qui les possède n’a eu qu
peu ou point de commerce avec d’autres races. C’est |
contraire pour les animaux domestiques des peuples qui
sont formés par le mélange de plusieurs tribus.
On affirme souvent que les philosophes de l'antiquité of
résolu, d’une façon satisfaisante, toutes les grandes question
qui intéressent l'humanité, et que les investigations des mi
dernes, tout en embrassant avec une vigueur nouvelle, to
en éclairant d’un jour nouveau les phénomènes de lord
matériel, n’ont cependant que peu ou point agrandi
champ du progrès intellectuel. Est-ce vrai? Il n’y a ba
|
|
À
: LES ÊTRES ORGANISÉS ET LEURS MOEURS. 85
une question d'un intérêt plus grand pour l’hommé que
celle de sa propre origine et de l’origine des choses. Et ce-
pendant | l'antiquité est restée là-dessus d’une ignorance
absolue. L’antiquité croyait que tout avait existé de toute
éternité ou que tout avait été créé à la fois. La science mo-
lerne, au contraire, peut prouver de la manière la plus
satisfaisante que tous les êtres finis ont fait apparition suc-
essivement et à de longs intervalles, que chaque espèce
d'êtres organisés ayant vécu aux époques antérieures n’a
xistent aujourd’hui ont une origine relativement récente.
in même temps, l’ordre dans lequel elles se sont succédé,
eur immutabilité dans le cours de chaque période cosmique,
qu lieu d'indiquer un lfen de causalité avec les forces phy-
iques et quelque chose qui rentre dans la sphère d'activité
aturelle de ces agents, témoignent au contraire de l’inter-
rention réitérée du Créateur. Il est vraiment singulier que
ette intervention admise par tout le monde, les seuls maté-
ialistes exceptés, dans l'établissement des lois qui gouver-
ent le monde inorganique, soit niée, malgré cela, par
quelques physiciens dès qu’il s'agit d'expliquer l’introduc-
ion des êtres organisés aux différentes périodes qui se sont
uccédé dans l’histoire de la terre. Au lieu d’être une
reuve que le monde organique est le produit de forces
rutes, cela ne dénoterait-il pas simplement que ces obser-
jateurs ont une connaissance fort imparfaite des conditions
lans lesquelles la vie se manifeste, et de la différence essen-
ielle existant entre les phénomènes du monde organique et
eux du monde physique?
XVI
Relation des êtres organisés avec le monde ambiant.
Tous les animaux, tous les végétaux, sont dans un certain
‘apport défini avec le monde ambiant. Quelques-uns d’entre
x, comme les animaux domestiques et les plantes cultivées,
86 bi L'ESPRGR.
sont à la vérité susceptibles dé s’adapter plus aisément qu
les autres à des conditiofis diverses ; mais cette flexibili
même est un trait caractéristique. Ce rapport est de la plus
haute importance, pour peu qu’on se place à un point de
vue systématique; ét mérite dé la part des naturalistes lat
tention la plus scrupuleuse. Or, la direction qu'ont pris
les études zoologiques depuis que l’anatomie comparée et
Pembryologie se sont jiresqué entiérernent emparées d
Pattention des observateurs, a été trés-défavorable aux fé=
cherchés sur les mœuÿs des animaux: C’est cependant pat
les mœurs que sé manifestent plus spécialément leurs rela:
tions entre eux et célles qu’ils ont avec les circonstantes at
sein desquelles ils vivent. Il faut aller chercher dans le
auteurs du siècle dernier (1) les notions vraiment inté-
ressantes sur les mœurs des animaux, car bién petit est le
nombre des écrivains modernes qui se sont occupés princi-
palement de ce sujet (2). On y attache de nos jours si peu
d'importance que les hommes qui étudient cette branche
de l’histoire naturelle sont difficilement réconnus comme
des égaux par les naturalistes leurs confrères, anatomistes,
physiologistes et classificateurs. Pourtant, sans une connais:
sance approfondie des mœurs des animaux il sera toujour
impossible de déterminer; avec un suffisant degré de préc
sion, les limites vraies de toutes ces espèces que la Zoologie
descriptive a admises de notre temps avec une si grande con:
a
(1) R. Añt. de Réaumuüt, Mémoires pour sérvir à l'histoire des Insectes
figures. 1
(2) J. J. Audubon, Ornithological Biography, or an account of th
habits of the Birds of the United States of America. Édimbourg, 1831-49
5 vol. in-4. — W. Kirby et W. Spence, An Introduction to Entomology,
Londres, 1818-26, 4 vol. in-8, figures. — H. 0. Lenz, Gemeinniitzige Nature
geschichte, Gotha, 1835, A vol. in-8. — J. Th. Ch, Ratzenburg, Die Fors j
Insekten. Berlin, 1837-44, 3 vol. in-4, figures et suppléments. — T. W
Harris, Report on the Insects injurious to vegetation. Cambridge, 1844
4 vol. in-8, l’ouvrage le plus important sur les insectes de l’Amérique, =
A Treatise on some of the Insecis of New-England which are injurious to Vege
tation. Boston, 1852, in-8.
LES ÊTRES ORGANISES ET LEURS MOEURS. 87
fianee en elle-même: En définitive, qu'importe A la sciencé
‘que mille espèces de plus où dé fois soient deerttes at
‘introduites dans nos systémes; si nous né savotis rien suF
leur compté ? Un défaut, trop comfiun dans tous les ouvrages
relatifs aux mœurs des animaux, a saris doute contribué à ef
diminuer la valeur ét à détourner l’atteñtion dans tine dirét:
tion autre; c’est le carattère purement anecdotique dé tous
ces travaux ou la Circohstante que, trop souvént, ils ont servi
‘de prétexte au récit d'aventures persohnelles. Néanmoins,
Timportatice de cette sorte d’études pourrait difficilement
être surfaite, et il est hautemerit à souhaiter qué lés natu-
ralistes rentrent dans cétte voie; aujourd’hui que anatomie
comparée, la physiologie et lembryologie peuvent leur sug:
gérer tant d’idées nouvelles et que les progrès de la géogra:
_phie physique fournissent une large base aux recherches de
cé genre. On pourräit alors savoir si, véritableméht, les
espèces décrites sur des spécirnens isolés sont fondées dans
la nature; ou si elles ne sont pas plutôt un certain degré de
développement d’autres espèces. On pourrait connaitre ce
qu'on connait encore si mal, jusqu'où va l’amplitude des
variations chez les animaux, quand On les observe à l'état
sauvage, ou plutôt ce qu’il y a d’individuel dahs tous les
êtres vivants et dans chacun en particulier: L’individualité
est, en effet; si prononcée dans certaines familles — et celle
des tortues en offre un exemple très-frappant — qu'une
description rigouréuse des espèces he peut guère être faite
sur dés spécimens isolés, et c’est pourtant cé qu’on essaye
toujours de faire: J'ai vu des centäines d'exemplaires de _
certains de nos Chéloniens sans en rencontrer deux d’abso-
Jumént identiques. A vrai dire; les limites de cette variabi-
. lité constituent tin dés plus importants caractéres de quelques
espèces. Sans une connaissance précise du point exact où
lle césse pour chaqué genre, il serait impossible d’ obteniir
jamais une base solide pour la distinction des espéces.
Quelques-unes des questions les plus indécises de la Zovlogie
et de la Paléontologie auraient pu être fixées depuis long-
j Byers, si l'on avait eu des notions précises sur ce point et
88 DE L’ESPECE.
si l’on savait mieux quelle inégalité présentent, à cet égard,
les différents groupes du règne animal, quand on les coms
pare les uns aux autres. Tandis que les individus de certaines
espèces semblent tous différents et pourraient être décrits
comme espèces distinctes, si on les voyait séparément ou Si
on les avait recueillis dans des contrées différentes, ceux
d’autres espèces paraissent avoir été coulés tous dans un
moule unique. On doit donc voir tout de suite combien divers,
peuvent être les résultats de la comparaison entre deux
faunes, pour peu que les espèces de l’une aient été l’objet
de longues et minutieuses études de la part des naturalistes,
du pays, et que celles de l’autre soient seulement connues
par des échantillons ramassés au hasard par des voyageurs, |
ou encore lorsque des fossiles, représentants de certaines
espèces à une période donnée, sont rapprochés des animaux
actuellement vivants, sans que les deux faunes aient été,
révisées d’abord d’après un type commun (1). 1
Une autre lacune dans la plupart des ouvrages relatifs,
aux mœurs des animaux, c’est l’absence de vues générales et.
de comparaisons. Is ne nous font pas connaître à quel degré.
des animaux rapprochés par leur structure se ressemblent.
par les habitudes, ni si les mœurs sont l'expression de la |
structure. Chaque espèce est décrite comme si elle était.
unique au monde; ses particularités sont le plus souvent
exagérées comme pour la faire ressortir davantage au milieu.
des autres. Quel intérêt cependant n’offrirait pas l’étude |
comparative de la manière de vivre d'espèces étroitement
alliées ! Combien serait instructive la peinture de la ressem-"
(4) A cet égard, je ferai remarquer que, dans la plupart des cas où Viden-_
tité spécifique a été affirmée entre des espèces fossiles et des espèces |
vivantes, ou bien entre des espèces fossiles de périodes diverses, les familles —
auxquelles ces cas sont empruntés offrent ou une très-grande similitude ou, au
contraire, une variabilité excessive, et, par conséquent, il est trés-difficile de
fixer les limites de l'espèce. Ces sortes de cas devraient être absolument lais-
sés de côté dans la discussion des questions générales où sont engagés des —
principes fondamentaux, comme on fait pour les observations qui ne méritent pas
créance dans les autres “branches de la science. Cf. d’ailleurs mon mémoire sur —
la diversité et le nombre des animaux, cité précédemment, et où ce point est ,
envisagé d’une manière spéciale.
LES ÊTRES ORGANISES ET LEURS MOEURS. 89
blance qu’offrent, sous ce rapport, des espèces du même
: genre ou de la méme famille ! Plus j’ étudie ce sujet et plus
je suis frappé de la similitude qui existe dans les mouve-
à ments, les habitudes générales et même l'intonation de voix
chez des animaux appartenant à une même famille, c’est-
à-dire chez des animaux qui ont, essentiellement, une
grande conformité de figure, de stature, de structure et de
‘mode de développement. Une étude minutieuse des mœurs,
des mouvements, de la voix des animaux, ne peut manquer,
par conséquent, de jeter plus de clarté sur leurs affinités
naturelles. ;
_ Hn même temps que je constate la trés-grande importance
de ce genre d’études, au point de vue de la coordination sys-
tématique des animaux, je ne puis m’empécher de regretter
profondément qu’on n’en comprenne pas mieux la valeur
au point de vue des notions que ces recherches peuvent
fournir sur les animaux eux-mêmes, toute question de sys-
tème écartée. Combien ne reste-t-il pas à apprendre sur
chaque espèce après qu’on l’a nommée et classée ! Personne
ne peut lire l’ Histoire Naturelle des Oiseaux de l'Allemagne,
par Naumann, sans faire la réflexion que l’histoire naturelle
serait bien plus avancée si les mœurs de tous les autres ani-
maux avaient été aussi soigneusement étudiées et aussi minu-
tieusement décrites. Et cependant, ce livre ne contient
presque rien qui ait de importance sous le rapport de la
distribution systématique des oiseaux. Nous ne possédons
que les données les plus élémentaires pour la discussion, sur
une base scientifique, de la question des instincts, ou en
général des facultés des animaux comparés soit entre eux,
soit avec l’homme (1). Cela tient non-seulement à ce que peu
d'animaux ont été étudiés à fond, mais à ce qu’un bien
plus petit nombre encore ont été observés durant les pre-
miéres phases de la vie, alors que les facultés commencent
(1) P. Scheitlin, Versuch einer vollstündigen Thierseelenkunde, Stutt-
gardt et Tübingen, 1840, 2 vol. in-8. — Fréd, Cuvier, Résumé analytique
des observations sur l'instinct et l'intelligence des animaux, par R. Flourens
(Annales des Sciences naturelles, 2° série, vol. XII).
90) DE L’ESPECE.
à se développer: Et pourtant combien il est attfayant, coms
bien il est instructif cet Agé du développement; dans tout
être qui vit! Qui pourrait, par exemple, continuer un in
stant de plus à croire que les mœurs des animaux sont, À
un degré queléonque; déterminées par les circonstances ot
lesquelles ils vivent, après avoir vu la petite tortue du ¢
Chelydra, encore enfermée dans l’œuf dont elle ma |
peine la partie moyenne, le sac du jaune; aussi volumineux
qu’elle, pendant sous la face inférieure du corps enveloppé
par l’ämnios et l’allantoïde, les yeux clos; happer avec au=
tant de force que si elle pouvait mordre sans se tuér elle”
même (1)? Qui a pu voit le «Sunfish» (Pomotis Ae )
se balangant sur sés œufs et les protégearit pendant des se
maines, ou le chat marin (Pimelodus Catus) se mettañt e
mouvement avec ses petits; comme une poule avec sés pous=
sins; sans deméurer convaincu que le sentimént qui les
guide dats ces actes est de même naturé que celui qui at=
tache la vache à son n6urrisson ou la ère à l’énfant? Quel
est l’obsérvateur qui; après avoir constaté cette analogie
entre certaines facultés de l’homme ét cértaiiies facultés des
animaux supérieurs; peut, dans l’état actuel de nos confai
_sances, se dire prêt à tracer la limite où cesse ce qu'il y ade
hätirelléten commun à l’un et aux autres? Assurément
pour parvenir à déterminer l’exact cafactère de toutes ees fa=
cultés il n’y a qu’une voie ouverte : c’est l'étude des mœurs:
des animaux et la Comparaison entre ces êtres et Pinotage )
aux premiérés phases de son développement: J’avoue a
je ne saurais dire en quoi les facultés mentales d’un eñfa
différent de celles d’un jeune chimparizé: :
Aujourd’hui que nous avons des cartés physiqués de prés=
que toutes les contrées du globe (2), indiquant la tempérd*
ture moyenne de l’année et celle de chaque saison sur " $
€
(1) Voy. L, Agassiz, Contributions to the Natural History of the United
States of America (4° monographie, t. II, partie Ill, consacrée à l'Embryo
: logie des Tortues). Boston, 1857, iñ-A, figures:
(2) Berghatis, Physikalischer Atias. Gotha, 1838 et Suiv., iti-folio. — Alexis
Keith Johnston, Physical Atias 7 pra Phenomena. Éditbourÿ, 1848, 1
in-folio.
LES ETRES ORGANISES ET LE MONDE AMBIANT. 94
continents et stir les mérs; aujourd’hui que Vélévation
_ moyerine dés terres au-dessus du niveau des océans et leurs
_ particularités caractéristiques, vallées, plaines, plateaux,
systèmes orographiques, sont suffisamment connues ; au-
jourd’hui que la distribution de l'humidité dans l’atmos-
| phère, les limites des bassins, la direction dominante des
vents, le $éïis des courants océaniques, sont non-seulement
| déterminés, mais encore figurés sur les cartes; même dans
_ les atlas des écoliers ; aujourd’hui que la structure géologi-
_ qüe de presque toutes les parties du globe a été établie avec
un degré passable de précision, les zvologistes ont devant
_etix 16 champ lé plus vaste, la base la plus exacte qu'ils
puissent souhaiter, pour la détermination de tous les rap-
_ ports éxistañt entre les animaux et le monde ambiant:
Nous nous sommes uniquement occupé jusqu'ici, de la
part qu’auraient pu avoir les forces physiques à la venue au
monde dés êtres organisés, et nous nous sommes convaincu
qu’elles ne sont point la cause de l'existence de ces êtres.
Il nous faut maintenant examiner plus particulièrement les
relations qui oft lieu entre le monde organique et le monde
physique, mais simplement comme fait existant, comme con-
ditions auxquelles, à l'heure de la création, plantes et ani-
maux furént assujettis, dans des limites définies d’action et
_de réaction réciproques: Si les êtres animés ne sont pas lé
produit dé activité du monde physique, il f’en est pas
moins vrai qu’ils Vivetit au sein dé cé monde; ils y sont nés,
ils s’y développent, ils s’y multiplient, ils se l’assihilent et
en nourrissent, ils exercent même sur lui une influence
modificatrice, dans cette même mesure où, de son côté, il
favorise lés manifestations dé la vie. La description de ces
rapports he peut done pas manquer d’être profondément in-
structive et intéréssante, mêmé en laissant de côté la ques:
tion dé savoir comment ils ont été établis. Or, c’est là la
Sphère d’investigation qu’embrasse l'étude dés mœurs des ani-
maux. La manière d’être de chaque espèce vis-A=vis de ses
_Co-existants et par rapport aux conditions dans lésquelles
elle vit, voilà un champ de recherches aussi vaste que riche
92 DE L'ESPÈCE.
en détails, et de l'intérêt le plus haut. En le cultivant pour —
lui-même, et sans sortir de la sphère qui imprime plus par- —
ticuliérement à chaque espèce animale ou végétale ses ca-
ractéres essentiels, on y trouvera vraisemblablement la
preuve la plus directe et la plus inattendue de lindépen-
dance mutuelle des forces physiques et des organismes; à
moins que je ne me trompe sur la valeur des faits que j'ai
moi-même pu recueillir. Que peut-il y avoir de plus caracté-
ristique pour les différentes espèces d'animaux que leurs
mouvements, leurs jeux, leurs affections, leurs amours, les
soins de leur progéniture, la dépendance des jeunes à l’é-
gard des parents, leurs instincts, etc., etc. ? Or, rien de tout
cela n’est subordonné, au plus petit degré, à la nature ou à
l'action des circonstances physiques dans lesquelles les ani-
maux vivent. Les fonctions organiques elles-mêmes sont
indépendantes, à un degré dont on n’a pas l’idée, de ces
circonstances, bien que ce soit là le côté de l’existence qui
montre les connexions les plus étroites avec le monde envi-
ronnant,
Trop longtemps les fonctions ont été considérées comme
le critérium du caractère des organes. C’ était presque deve-
“nu un axiome, en anatomie comparée et en physiologie, que
des fonctions identiques supposent des organes identiques .
La plupart de nos traités généraux d’Anatomie comparée
ont leurs divisions fondées sur ce principe. Or, jamais prin-
cipe plus faux et produisant des conséquences plus désas-
treuses n’a été aussi généralement admis. C’est chose sur-
prenante que les naturalistes ne l’aient pas depuis longtemps
répudié ; il n’est pas un d’entre eux qui ne doive s’apercevoir,
de plus en plus, combien il est mal fondé. Les organes de la
circulation et de la respiration chez les Poissons en sont un
exemple remarquable. Pendant combien de temps n’a-t-on
pas regardé les branchies de ces animaux comme les équi-
valents des poumons des Vertébrés supérieurs, simplement
parce qu’elles sont des organes respiratoires. Cependant les
branchies sont formées d’une tout autre manière que les
poumons; elles ont avec le système vasculaire des rapports
Soa Ris à
Se à da t-Douts D,
LES ÊTRES ORGANISES ET LE MONDE AMBIANT. 93
tout différents, et l’on sait aujourd’hui qu’elles peuvent exis-
ter en même temps que les poumons, comme cela se voit sur
quelques Batraciens adultes et, aux phases premières de la
vie embryonnaire, sur tous les Vertébrés. Il ne peut plus y
avoir aujourd’hui aucun doute que ce ne soient là des
organes essentiellement divers, dont les fonctions ne sont
point un indice certain de leur nature et ne fournissent
aucun argument en faveur de leur identité. On en peut dire
autant du système vasculaire des Poissons. Cuvier (1) fait du
cœur de ces animaux le représentant de l'oreillette et du
ventricule droits, par cette raison qu’il pousse dans les bran-
chies le sang qu’il contient, de la même manière que le ven-
tricule droit lance le sang dans les poumons des animaux à
sang chaud. Mais l'embryologie nous a appris que celte com-
paraison, basée sur les relations spéciales du cœur des pois-
sons, est injustifiable. Les sacs à air de certaines Araignées
ont aussi été considérés comme des poumons parce qu'ils
remplissent des fonctions respiratoires analogues; ce ne sont
toutefois que des trachées modifiées (2) construites sur un
plan si particulier et ayant, avec l'espèce de sang propre aux
Articulés (3) ,des rapports si différents, qu'aucune homologie
ne peut être signalée entre eux et les poumons des Vertébrés,
Ils n’en ont pas davantage avec les soi-disant poumons des
Mollusques à respiration aérienne, chez lesquels les cavités
respiratoires aériennes sont simplement une modification des
branchies, d’un genre spécial, qu’on trouve chez les autres
Mollusques. Il serait facile de multiplier les exemples. Je
me bornerai à indiquer encore le canal alimentaire des In-
sectes et des Crustacés avec ses appendices glandulaires, qui
est formé d’une tout autre façon que celui des Vertébrés, des
Mollusques ou des Rayonnés; de même les membres, les
(1) G. Cuvier, Règne animal, 2° édit., vol. II, p. 122.
(2) Leuckardt, Ueber den Bau und die Bedeutung des sogenannten Lungen
bei den Arachniden, dans Siebold et Külliker (Zeitschrift fiir wiss. Zoologie,
4849, 1, p. 246).
3) Em. Blanchard, De la circulation dans les insectes (Comptes rendus,
4847, vol. XXIV, p. 870). — L, Agassiz, Om the Circulation of the Fluids
in Insects (Proceeding of the American Associalion for 1849, p. 140).
94 DE L’ESPÈCE.
ailes, etc., etc. J’ ajouterai que ce qu’on appelle le pied shen!
les Mollusques n’a rien qui puisse permettre de conseryer
l'idée de l'analogie qu’implique ce nom, entre l'appareil w
locomoteur des Mollusques et celui des Vertébrés ou des Ar-4
ticulés. L'emploi de telles dénominations ne peut manquer w
de tromper les débutants, et cependant il y a encore des —
maitres qui ne savent pas s’allranchir de Vextravagance des .
comparaisons de ce genre, surtout quand il s’agit des parues ;
solides de la structure des animaux inférieurs (4). 1
On avait identifié les fonctions et les organes, par une con- |
séquence naturelle des idées qui prévalaient quant à la pré- 1
tendue influence exercée par les forces physiques sur les êtres —
organisés, Mais, dès qu’on a eu compris que des organes peu- .
vent être trés-dillérents tout en accomplissant les mêmes —
fonctions, l’organisation s’est trouvée placée vis-à-vis des —
agents physiques dans une situation telle qu’il est devenu |
impossible de persister à voir entre eux un lien génésique. —
Un Poisson, un Crabe, une Moule, qui vivent dans les mêmes «
eaux, respirent à la même source, devraient avoir les mêmes —
organes respiratoires, siles éléments dans lesquels ils vivent :
avaient quelque chose à voir avec les détails de leur orga- —
nisation. Je ne suppose personne d’assez borné pour ima- 4
giner que les mêmes puissances physiques, agissant sur des ©
animaux de type différent, doivent produire, pour chacun, :
des organes particuliers, sans s’apercevoir tout de suite !
qu’une semblable supposition implique l'existence préalable —
de ces animaux, indépendamment de l’action des puissances
physiques. Mais cette erreur est si constamment reproduite
dans les discussions sur ce sujet, ou sur des sujets sembla-
bles, que, à cause de sa fréquence même, il faut la réfuter (2).
Au contraire, si l’on reconnaît qu'une conception intellec-
1) C. G. Carus, Von den Ur-Fheilen des Knochen und Schalengerüstes.
waa LE 1828, 1 vol. in-foho, p. 64-89.
2) Le j pe n’est pas loin, je l'espère, où botanistes et zoologistes se défen-
dro eg a oi de partager les doctrines physicistes qui prévalent plus ou
moins, Ainallensag sur l’origine et l'existence des êtres organisés. Quand il
viendrait un moment où la Jutte que je soutiens aujourd’hui contre ces doc-
¢ RAPPORTS ENTRE LES INDIVIDUS. 95
uelle a été le point de départ de l’existence, non-seulement
* étres organisés mais de toutes les choses de la nature,
quoi de plus naturel que de trouver, en même temps, la va-
ridté introduite dans le plan, dans la complication, dans les
détails de la structure des animaux et la variété établie éga-
lement dans leurs rapports avec le monde ambiant en sorte
qu'une même fonction puisse être accomplie par des ap-
pareils très-différents!
XVII
Rapports entre les individus.
Les rapports entre individus de la même espèce ne sont
pas moins fixes et déterminés, chez les animaux, que ceux
des espèces avec les milieux ambiants, dont nous nous
sammes occupé jusqu'ici. Les rapports d’individu à indi-
yidu sont d’un caractère tel, qu'on aurait di y voir une
preuve suffisante de l'intervention directe d’un esprit ré-
fléchi ayant, à l'exclusion de toute autre cause, appelé les
êtres organisés à l'existence. On peut jusqu’à un certain point
concevoir que les agents physiques aient pu produire quelque
chose d’analogue au corps des animaux inférieurs au des
plantes les plus simples. Ils auraient pu aussi, toules cir-
constances demeurant égales, reproduire la méme chose
qu'ils avaient déjà produite et cela indéfiniment, par la
répétition des mêmes procédés. Mais ce que je suis inca-
pable de comprendre, c’est que, après une analyse plus pro-
fonde des possibilités que comporte un pareil cas, on n’a-
perçoive pas du premier coup combien il est choquant de
pousser la supposition plus loin, et d’admettre que ces agents
‘trines ferait l'effet d’une bataille contre des moulins à vent, je ne regrelterai
jamais d’avoir pris tant de peine pour maintenir mes compagnons de travail
dans la bonne direction. D'un autre côté, je proteste et je protesterai toujours
contre la bigoterie de certaines sectes qui voudraient imposer à la science des
trines né découlant point immédiatement de prémisses scientifiques, et en
entraver la marche et la liberté.
96 DE L’ESPECE.
ont pu déléguer le pouvoir de reproduire ce qu'ils venaient :
de mettre au monde aux objets mêmes de leur création; cela.
avec des limitations telles que ces objets ne pussent jamais
reproduire que des êtres en tout semblables à eux-mêmes!
On ne saurait non plus supposer que, partant de la struc-"
ture la plus simple, ce même mode d'activité ait pu s'élever
peu à peu à la production d’une structure plus parfaite ; car.
chaque degré intermédiaire implique l'introduction de nou-.
velles possibilités qui ne sont même pas contenues dans.
l'hypothèse originelle. Déléguer un pouvoir de cette nature.
ne peut être qu’un acte d'intelligence. En effet, entre la
production d’un nombre indéfini d’étres organisés comme.
résultat final de l’action des lois physiques et la reproduc-.
tion de ces mêmes êtres par eux-mêmes, il n’y a aucun lien
nécessaire. Les générations successives d’une plante ou d’un
animal ne peuvent avoir, en ce qui concerne leur origine,
aucun rapport de causalité avec les agents physiques, à moins.
que ceux-ci n’aient la faculté de déléguer leur propre activité,
avec la pleine et entière vertu qu’elle possédait lorsque cette |
plante ou cet animal ont été produits pour la première fois. |
C’est en effet une loi physique que la résultante est égale à la.
somme des forces appliquées dans le même sens. Si quelque ©
être nouveau avait jamais été le résultat de l’action des forces”
brutes, comment les générations successives. provenant de cet |
être pourraient-elles, à l'instant de leur naissance, se mettre, _
à l'égard de ces forces, dans les mêmes rapports où étaient.
leurs ancêtres, à moins d’avoir en elles-mêmes la faculté de :
maintenir leurs caractères en dépit des forces productrices ? _
Pourquoi, de plus, les animaux et les plantes commence-
raient-ils à se décomposer, dès que la vie cesse, sous lPac-
tion des forces mêmes qui furent nécessaires au maintien.
de la vie, si celle-ci avait été limitée ou déterminée par ces
agents physiques ?
Il existe entre individus de la même espèce des rapports.
beaucoup plus complexes que ceux auxquels il vient d’être
fait allusion. Ils établissent encore mieux l'impossibilité
d’une subordination causale des êtres organisés aux forces
is
Pere
RAPPORTS ENTRE LES INDIVIDUS. 97
physiques. Les rapports sur lesquels est fondée la conser-
ation de l’espéce résultent, dans tout le régne animal, de
Puniversel antagonisme des sexes, et leur infinie diversité
dans les différents types n’a réellement'rien à voir avec les
conditions extérieures de l’existence. Ce sont seulement des
apports d’individu à individu, en dehors des connexions
‘ont ces êtres avec le monde matériel dans lequel ils
vivent. Comment, donc, ces rapports pourraient-ils être un
produit des causes physiques, quand nous savons que les
agents de cette nature ont une sphère d’action spécifique
jui n’a rien de commun avec cette autre sphère de phéno-
ménes?
Il est hors de doute que les rapports d’individu à individu
ont, en trés-grande partie, de nature organique et doi-
ent étre, comme tels, examinés au méme point de vue que
out autre trait général de l’organisation ; mais il y a aussi
>n eux quelque chose qui participe du caractère psycholo-
zique, en prenant ce mot dans sa plus large acception.
Quand les animaux se battent, quand ils s’associent pour
in but commun, quand ils s’avertissent l’un l’autre du
langer, quand ils viennent au secours l’un de l’autre, quand
Is montrent de la tristesse ou de la joie, ils manifestent des
nouvements de même espèce que ceux qu'on met au
nombre des attributs moraux de l’homme. Leurs passions
ont aussi fortes et aussi nombreuses que celles de l’âme
lumaine, et il m'est impossible d’apercevoir une différence
le nature entre les unes et les autres, encore qu’elles puis-
ent différer beaucoup dans le degré et dans l’expression. La
rradation des facultés morales, dans les animaux supérieurs
t dans l’homme, est tellement imperceptible que, pour dé-
Mier aux premiers un certain sens de responsabilité et de
onscience, il faut exagérer outre mesure la différence qu’il
7 2 entre eux et l’homme. Il existe, en outre, chez les ani-
maux, dans la mesure de leurs capacités respectives, tout
utant d’individualité qu’il en existe chez l’homme. C’est
Aun fait dont peut témoigner tout chasseur, tout dompteur,
out éleveur ou tout fermier possédant une longue expé-
AGASSIZ. 7
98 DE L’ESPECE.
rience des animaux, soit sauvages, soit dressés ou domesti
qués (4). |
Cela dépose fortement en faveur de l'existence, dans tou
animal, d’un principe immatériel semblable à celui qui, pa
son excellence et la supériorité de ses dons, place l homme
fort au-dessus des animaux (2). Ce principe existe sans au
(1) Voy, divers ouvrages de J, E, Ridinger consacrés à la chasse, et qui o
paru sous différents titres, 4 Augsbourg, de 1729 4 1778. — Geoffroy Sain
Hilaire et Fr. Cuvier, Histoire naturelle des Mammifères. Paris, 1820-35
3 vol. in-folio, — H. O, Lenz, Gemeinniitzige Naturgeschichte, G
4835, 4 vol. in-8, — W. Bingley, Animal Biography. Londres, 180 3
3 vol. in-8. À
(2) Il est facile de démontrer que les opinions, généralement réçues,
exagèrent la différence existant entre le singe et l’homme, proviennent d
l'ignorance où étaient les anciens, et spécialement les Grecs auxquels nou
sommes redevables de notre culture intellectuelle, de l’existence des Orangs
Outans et de Chimpanzés. Les animaux les plus voisins de I’ homme que con
nussent les Grecs étaient le Patas, x#6oc; le Babouin, xuvoxéowhoc, et
Magot commun, miônxos. Une traduction moderne d’Aristote lui fait dire, il e
vrai, que les Singes forment la transition entre l’homme et les quadrupéde
(Aristoteles, Naturgeschichte der Thiere, trad. du docteur F. Strack, Franc
fort-sur-le-Mein, 1816, p. 65); mais l'original ne dit rien de semblable. Dan
l'Histoire des animaux, liv. II, chap. V, on lit simplement : ima dé tev Cow
émapporepiiet thy Qvaty Ta te Avbpome xat Trois rerpéreouw. Il y a une a
différence entre « participent à la fois de la nature de l’homme et de celle de
quadrupèdes », et «forment la transition entre l’homme et les quadrupèdes »
Le chapitre tout entier est consacré à l’énumération des analogies de mt
ture que ces trois singes présentent avec l’homme; mais l’idée d'une étroi
affinité n’est pas même exprimée, et moins encore celle d’une transitio
entre l’homme et les quadrupèdes. L'écrivain, au contraire, insiste ii
ment sur les différences marquées qu’il y a entre eux, et il sait, aussi parfai
ment que a ’importe quel anatomiste moderne, que les singes ont quatre main
eyet Os wat Boantovac, coamep dvbpeama¢,.. a. i tou DE robs modac eiat xe gi
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mrépvay.
Il est étrange que ces distinctions claires et précises fussent si complétem
tombées en oubli, au temps de Linné, que ce grand réformateur de I’ Hist
naturelle dit avouer, en 1746, qu’il ne connaissait pas de caractére par leq
on pit distinguer l'Homme du Singe (Fauna Suecica, præfatio, p. 2) : « N
lum characterem adhuc eruere potui, unde homo a simia internoscatur. » M
ce n’est pas seulement du point de vue des analogies et des différences de
structure que les rapports entre les animaux et l’homme doivent être envis
gés. L'histoire psychologique des animaux montre que, si l’homme se r.
proche d’eux par le plan de sa structure, à leur tour les animaux se rapproch
de l’homme par le caractère de leurs facultés ; seulement, chez l’homme, celles-
sont tellement transcendantes qu’elles indiquent d’abord la nécessité de reje
toute idée d’une parenté quelconque entre lui et le règne animal. L’Histoi
done nes tes >
L’AME DES BETES. 99
un doute; et qu’on l’appelle âme, raison ou instinct, il pré-
te dans toute la chaîne des êtres organisés une série de
énoménes étroitement liés les uns aux autres. Il est le
ondemeni non-seulement des plus hautes manifestations de
lesprit, mais encore de la permanence des différences spé-
ifiques qui caractérisent chaque organisme. La plupart des
jaturelle des animaux n’est done pas complète tant qu’on se borne à étudier,
ussi profondément que ce soit, la partie corporelle de leur nature. Il y a
sitivement en eux une individualité psychologique qu’on n’a guère étudiée
usqu’ici, mais qui n’en est pas moins le lien qui les rattache à l’homme.
Malgré cela, je ne partage pas l'opinion des auteurs qui voudraient séparer
pomplétement l'humanité du’ règne animal et instituer pour l’homme seul un
ègne distinct, comme l’a fait Ehrenberg (Das Naturreich des Menschen, Berlin,
1835, in-folio) et, après lui, Isidore Geoffroy Saint-Hilaire (Histoire naturelle
énérale. Paris, 1856, t. I, part. Il, p. 167). Cf., d’ailleurs, le chap. IT de ce
ivre où il est montré, pour chaque sorte de groupes du règne animal, que la
somme des différences, qu’il y a de l’un à l’autre, ne suffit pas pour autoriser à
n rejeter un seul dans une autre catégorie. Quiconque étudiera le chien avec
ttention pourra se convaincre que les impulsions auxquelles cède cet animal
sont analogues à celles qui meuvent l’homme. Elles sont réglées de manière à
meitre en évidence des facultés psychiques à tout égard de la même nature
que celles de l’homme. Le chien exprime par la voix ses émotions et ses
sentiments, avee une précision qui les rend aussi intelligibles à l’homme que le
angage articulé d’un de ses frères. Sa mémoire a une puissance rétentive qui
lépasse celle de la mémoire humaine. Sans doute, toutes ces facultés sont loin
le faire du chien un philosophe ; mais certainement elles le mettent au niveau
Vune portion considérable de la pauvre humanité. Que la voix des animaux
e fasse comprendre des uns aux autres et que toutes leurs actions se rappor-
ent à ces appels, c’est là encore un puissant argument en faveur de leurs
ultés de perception et de leur aptitude à agir, spontanément et logiquement,
l'après ces perceptions. Il y a un vaste champ ouvert à l’étude, dans les rela-
ons qui existent entre la voix et les actions des animaux. Un sujet de recher-
hes plus intéressantes encore est offert par ce qui ’il y a de commun dans les
ycles particuliers d’intonations que chaque espéce animale d’une méme
amille est capable d’émettre. Autant que jen puis juger, il y a entre ces
ycles les mémes rapports qu’entre ce qu’on appelle les différentes familles de
angues, — Fr. Schlegel, Ueber die Sprache und Weisheit der Indier. Heidel-
erg, 1808, 4 vol. in-8. — W. v. Humboldt, Ueber die Kawi-Sprache, auf
er Insel Java. Berlin, 1836-39, 3 vol. in-4 (Abh. Akad. d. Wissenschaft). —
1: Steinthal, Grammatik, Logik und Psychologie. Berlin, 4855, 4 vol. in-8,
— Tous les Canins aboient; le hurlement du loup, l’aboiement du chien, le
lapissement du renard, ne sont que différents modes de l’aboiement, compara-
es entre eux, sous le même rapport que peuvent l'être les monosyllabes, les
ly syllabes et les inflexions du langage humain, Les Félides miaulent ; le ru-
issement du lion n’est qu’une forme du miaulement de nos chats et des autres
spéces de la famille, Les Équins hennissent ou braient ; le cheval, l’hémione,
2 zébre, le dauw, ont une gamme peu différente, Notre bétail et les diverses
pèces de taureaux sauvages ont des intonations d’une très-grande analogie ;
beuglement n’est pas de nature diverse, mais seulement diversement
400 DE L’ESPÈCE,
arguments de la philosophie, en faveur de l'immortalité di
l’âme humaine, s'appliquent également à la persistance de
ce principe chez les autres êtres animés. Pourquoi n’ajou
terais-je pas qu’une vie future dans laquelle Phomm
serait privé de cette inépuisable source de plaisir et d
progrès moral et intellectuel, qu'il trouve dans la com
templation des harmonies du monde organique, serait tris:
tement amoindrie? Ne devons-nous pas regarder ce concer
spirituel que forme la combinaison des mondes el de tou
leurs habitants en présence du Créateur, comme la pl
haute conception possible d’un paradis ?
XVIII
Dualisme sexuel,
Les études les plus approfondies de la structure des anis
maux, celles qui constituent le triomphe de la science, nous
ont appris à reconnaître parini ces êtres certains traits
communs. C’est ce que l’on appelle des affinités si l'on coms
pare entre eux des animaux différant dans la totalité, et des
homologies si lon constate la correspondance des parties
entre elles, soit dans le même individu, soit chez deux indi-
vidus d’espéce différente. Il suffit de nommer ces deux
vastes domaines de la Zoologie pour présenter immédiate:
ment à l'esprit le tableau, plus complet chaque jour, de:
enchainements qui font du régne animal tout entier un sys
tème étroitement lié dans ses parties. Il faut ensuite rappe-
et avec le monde ambiant, comme caractère de l'espèce;
que l’on sait des rapports de structure, base de la distinction
des genres; il faut mettre en évidence ces diversités de ke
poussé. Les oiseaux, à cet égard, sont peut-être plus remarquables en ore
Quel est l’homme qui ne sait pas distinguer la note d’une grive, d’un oiseav
chanteur, d’un canard, d’un oiseau de basse-cour, etc., et même celle qui est
particulière à chacune de leurs espèces, si nombreuses soient-elles ? Qui pour
rait méconnaître les affinités de la voix de ces animaux ? Et tout cela n’indis
querait pas une analogie semblable entre leurs facultés mentales ?... |
DUALISME SEXUEL. 101
orme produisant la famille, énumérer ces complications de
ie d'où naissent le rang, l’ordre dans toutes les
lasses, retracer les plans nettement distincts et ces modes
‘exécution divers, point de départ des divisions les plus
énérales de nos systèmes ; il faut rappeler tout cela, pour
endre sensible à quel point l'esprit humain s’est identifié
vec la création, et combien de rapports, jadis inconnus, ont
é par lui saisis et exactement appréciés. Même ainsi l’im-
res sion serait incomplète, si à tout cela l’on ne joignait
ncore ce que l’on connaît de l’organisation intérieure des
nimaux, de leur mode de développement, de leur successive
pparition sur la terre à différentes époques, de leur distri-
ution actuelle à la surface du globe. Or, à cette infinie diver-
ité de rapports quelque chose s’ajoute qui ressort davan-
ge et avec plus d'indépendance, imprimant à tout le monde
rganisé une physionomie spéciale; ce sont les caractères
xuels.
Toutes les fois qu’il s’agit de pénétrer la signification de
hénoménes complexes, il est inutile, sinon dangereux, de
‘attacher minutieusement aux faits de détail. La simple
bservation de la tendance générale de l’ensemble conduit
ien plus directement à la vérité. Maintes fois, je me suis
emandé quelle était importance de cette différence pre-
ière, manifestée aussi bien par le règne végétal que par
règne animal, à laquelle on donne le nom de sexualité.
ai vainement cherché une interprétation plausible des faits
étudiant la série des différences et la série des ressem-
lances que l’on observe, chez les individus de sexe diffé-
nt, d’une part dans les traits extérieurs les plus généraux,
“autre part dans les particularités d'organisation des appa-
ils reproducteurs. Cette étude ne conduit guère qu’à la
nnaissance de voies et moyens plus ou moins compliqués
outissant tous constamment à un but unique, la perpé-
ation et la permanence de l’espéce.
Il y a cependant quelque chose de plus dans ces phéno-
iènes, quelque chose qui affecte également les deux régnes
la nature et partage en quelque sorte le monde orga-
402 DE L’ESPEGE.
nique en deux; si bien que, d’un côté, on pourrait placd
une moitié du régne animal et, de l’autre, lui opposer l’autr
moitié, sans avoir aucunement égard aux différences pré
cédemment analysées constituant les embranchements, le
classes, les ordres, etc. D’un côté se trouveraient les mâles
de l’autre les femelles, tant le dualisme de ce genre és
universel. Gar, bien qu’il y ait des hermaphrodites et qu
les sexes ne soient pas également répartis, il n’en est pa
moins vrai qué les différences sexuelles constituent um
distinction fondamentale, qui se retrouve partout et sembl
l'emporter sur toutes les autres catégories de l’organisation!
Ce trait de structure est bien plus considérable que les dif.
férences spécifiques. En effet, les individus d’une mém
espèce, bien que se ressemblant par tout ce qui constitut
les caractères spécifiques, présentent néanmoins des diffé
rences sexuelles plus ou moins saillantes, lesquelles vien
nent se surajouter, si l’on peut dire, à ces caractères, à une
époque plus ou moins avancée de la vie, Les individus d’ünt
même espèce ont déjà vécu une fraction plus ou moih
grande, parfois même la plus grande, de leur existent
lorsqu'ils atteignent à ce degré de maturité qui précède @
accompagne la reproduction, et c’est dans cette derniér
phase de la vie que s’accentuent les traits, souvent si mar
qués, qui forment les différences sexuelles, Ces traits lem
portent également sur les caractères de genre, de famille,
de classe, etc. En effet, à quelque degré de la coordinatiof
des caractères que l’on envisage la structure des animaux,
et si profonde que soit la valeur des systémes d’organe
dont les rapports servent de base 4 ces groupes de la classi
fication, toujours la sexualité marque son empreinte.
développement cérébral, la charpente solide, les masse
musculaires, l’amplitude de la respiration et de la circulation
l'énergie des appareils digestifs et sécréteurs, tout est mo:
difié par cette influence mystérieuse dominant tous lei
organismes et imprimant à chacun d’eux le type mâle ou le
type femelle. ‘4
Il est impossible de ne pas reconnaître, dans cette corré
. DUALISME SEXUEL. 103
lation entre la sexualité et les catégories de la structure des
animaux en général, quelque chose de hautement indépen-
dant des influences extérieures désignées sous le nom d’in-
fluences cosmiques ou physiques. Ici, il ne s’agit plus que
de relations d’individu à individu, de rapports indifférents
pour la vie individuelle, mais d’où résulte pour les deux
êtres réunis une vie commune. Pour peu qu'on médite sur
les conditions indispensables à l’établissement d’un pareil
ordre de choses, il est évident que cela suppose la prescience
de ces rapports, l’appréciation de leurs dépendances mu-
tuelles et la capacité de les mettre en harmonie avec l’en-
semble des circonstances extérieures ou étrangères. En au-
cune manière cela ne peut être le produit fatal de forces
brutes et inconscientes.
. De tout temps, en tout lieu, à toute heure, les animaux
de sexe différent se recherchent, et, dans leur rencontre,
mettent en pléine évidence les traits saillants de leur
être, manifestant en quelque sorte le pourquoi du dualisme
qui partage tout le monde organique. La nature entière
semble proclamer non-seulement que le but final de la
création a élé de placer au sommet de l’édifice un être su-
périeur, l'Homme; mais, en outre, que le seul fait capable,
dans le plan donné, d'assurer le maintien et là continuité
du Tout, ce sont justement ces rapports étroits d’individu à
individu qui, culminant dans l'union de l'Homme et de la
Femme, deviennent l’origine de la famille et le fondement
des sociétés humaines.
Il n’est pas hors de propos d'examiner les traits les plus
généraux de ces rapports d’individu à individu, dont le but
est le maintien de l'espèce. Tout ce qu’il y a de caractéris-
“tique dans l’organisation animale est alors mis en relief;
les détails de la symétrie du corps ressortent dans toute leur
beauté, et ce qu’il y a de plus intime, soit dans leur har-
-monie, soit dans leur contraste, s’accuse et se prononce.
invisagé indépendamment de l’idée de sexe et pris comme
“représentant du Règne animal tout entier, l'Homme nous
“montre ces particularités caractéristiques de la structure qui
4104 DE L’ESPECE.
font de la tête le centre de tout l'organisme et établissent
entre les deux extrémités de la colonne vertébrale une op*
position si remarquable; en lui se manifeste à un haut degré
l’antagonisme entre le côté droit et le côté gauche d’où ré:
sulte, par la convergence de parties identiques opposées
l’une à l’autre, une symétrie si parfaite; en lui éclatent
encore ces différences entre la région dorsale et la région
ventrale ;... mais ce serait écrire un traité d'anatomie phi-
losophique que de pousser plus loin ces considérations. Or,
comme représentant de la même espèce, la femme repro-
duit identiquement tous ces traits de la structure del homme.
Au contraire, lors du rapprochement de ces deux étres tout
est changé. 4
Déjà quand l’homme rencontre son semblable, il l'abordél
de front. Cet antagonisme absolu devient précisément le
point de départ du rapprochement le plus intime. L’homme
en présence de l’homme oppose face à face; les dos se
tournent à l’inverse; le côté droit se place vis-à-vis du
gauche; les mains qui se cherchent traversent obliquement
et à l’opposite le plan médian; tous les traits de la configu-
ration, qui, dans une comparaison homologique, présente 1
un parallélisme rigoureux, se trouvent ici ramenés à des
situations d’un antagonisme également absolu. Un mouve=«
ment d’assentiment ou d’antipathie, un salut, un coup de.
tête, décrivent un arc dont la courbe est, chez les deux indi-
vidus en présence, en sens inverse ; les regards se croisent,
les paroles arrivent aux oreilles sous des angles opposés}.
l'appel des deux voix amies se fait en direction contraire;
la flexion de toutes les articulations se produit avec une
obliquité inverse ; toutes les saillies du corps de l’un s’op-"
posent à celles de l’autre et sont contrastées; les genoux,
s’abaissent et se rapprochent, les talons se soulèvent et
s’éloignent, les pointes des pieds convergent; le sourire,
qui est toujours plus accentué à droite qu’à gauche, ses
dessine en sens contraire. Ces traits, qui s’annoncent conta
les indices des rapports généraux d’individu à individu, |
s’accentuent avec une intensité er rien n’égale dans la na-*
DUALISME SEXUEL. 105
ture lors du rapprochement des sexes. Ainsi, plus les rapports
de cet ordre acquièrent de supériorité, plus complète est
Pintimité de l’union qu’ils établissent, et plus aussi le con-
traste et l’antagonisme des individus de sexe différent se
prononcent et deviennent marqués ! |
Or, n’est-il pas singulier de voir tout cela annoncé dans
les temps géologiques les plus anciens, par la structure
même de certains représentants du type des Vertébrés dont
les débris sont parvenus jusqu’à nous ? Tous les Sélaciens,
dont l'existence remonte aux époques géologiques les plus
reculées, présentent cette sorte de différences sexuelles qui
fait du rapprochement face à face une nécessité de l’orga-
nisation. Le fait que des animaux de cette classe ainsi orga-
nisés sexuellement existaient dans les terrains siluriens, et
cet autre fait, déjà reconnu comme axiome scientifique par
Léonard de Vinci : Venerem supinam solim homini con-
venire, n’indiquent-ils pas que les rapports les plus intimes
de l’homme à la femme, le mode d'union de l’homme
avec sa compagne sont annoncés, dans l’histoire des temps,
dès la première apparition des Vertébrés. Ainsi, encore, de
toutes les manifestations de l’amour la plus élevée, la plus
noble et la plus pure, le baiser, par quoi l’union peut être par-
faite sans rien perdre de sa chasteté et de son innocence, se
trouve comme prévu, annoncé, préparé dès l’apparition sur
la terre de Vertébrés incomplets et dégradés, précurseurs
déjà de l’expression ultime à laquelle doit s’élever le type,
lors du couronnement de la série. D’autre part, ce qu’il y
a de plus haut, de plus immatériel et de plus grand dans
"homme, la liberté, la dignité, l’individualité, ce qui n’est
n définitive que l’opposition du mor humain à un autre Moi,
"exprime ainsi d’une manière purement physique, purement
atérielle, dans l'opposition de la structure à la structure,
e la forme à la forme.
Et ce n’est pas tout! Il n’est pas dans l'immense clavier de
a passion humaine une gamme, une note, un ton, qui ne se
trouvent exprimés, isolément et à la plus haute puissance,
dans la spécialité des rapports sexuels de quelque type en
106 DE L’ESPECE.
particulier. Seul un Goethe pourrait écrire avec toutes ses.
nuances ce chant de l'amour que l'ensemble de la création.
répète à toute heure ! 4
Il serait inutile d’entrer ici dans les détails relatifs aux
rapports sexuels des êtres qui composent les embranche-
ments inférieurs; mais il n’est pas hors de propos de rappe-"
ler que, même chez les Rayonnés et les Vers, on a observé
des manifestations de sentiment de la part de la mère pour
sa progéniture, bien que l’on n’ait encore constaté aucun
fait indiquant dans le rapprochement des sexes quelque
chose de plus que l’impulsion organique. Ges rapports de-
viennent déjà très-variés et souvent trés-intimes chez les
Crustacés et les Insectes ; et quiconque a eu l’occasion d’ob-
server les amours des lathaeoue ne saurait mettre en doute
la séduction déployée dans les mouvements et les allures
qui préparent et accomplissent le double embrassement des
ces Hermaphrodites. Parmi les Vertébrés, l'instinct qui rap-
proche les sexes peut être réduit à une poursuite lointaine,
n’aboutissant pas même à la présence simultanée du mâle
et de la femelle sur le lieu où les œufs sont déposés: Tel est
le cas de certains Poissons; d’autres se recherchent de plus
_ près, s’accostent, se heurtent même pour s’éloigner aussi+
tot l’un de l’autre, Il en est qui déploient toutes leurs”
grâces, tout l’éclat de leurs couleurs, toute l’énergie de leur!
empressement par les girations qu’ils accomplissent autour
de leur femelle; d’autres témoignent leur dévouement par
la vigilance avec laquelle ils rôdent autour d’elle pour écar=
ter tout rival. Le nombre des poissons proprement dits q
s’accouplent réellement est très-limité, ef le rapprochement
est superficiel et rapide comme chez les Oiseaux. Il serait
oiseux de passer en revue toutes les formes qu’affectent les
relations des sexes; mais l’homme intelligent ne saurait de-
meurer spectateur indifférent ou même insensible, en voyants
la douceur, la tendresse, le charme prévenant des atten-
tions de la colombe, ou la noble et fière expression, lim«
périeuse exigence, la violence furieuse et cependant pleiné
d’égards de l’étalon ; l'implacable férocité du chat qui lacére
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 407
et dévore sa femelle, la lourdeur stupide du pore qui s’en-
dort et s'appesantit; la luxure et l’ignoble lubricité du singe ;
la voracité traitresse de l’araignée, la brutale et impassible
_concupiscence des biches attendant froidement l’approche
d'un vainqueur, etc.
D'où tout cela vient-il? Qui donc affirmera que des ex-
pressions si diverses, des manifestations si richement variées
d'un sentiment unique et d’un instinct, au fond toujours le
même, résultent simplement d’un fait d'organisation phy-
sique, d’une spécialité de structure impossible d’ailleurs à
concevoir, si l'on écarte l’idée d’un plan méthodiquement
exécuté, prémédité à l’avance, où partout se révèle l’inten-
tion antérieure à la réalité.
XIX
Métamorphoses des animaux.
L'étude de l’embryologie ne date que de nos jours. Les
paturalistes du siècle passé, au lieu de scruter les phéno-
ménes qui accompagnent la formation et le développement
primitifs des animaux, se contentaient de vagues théories
sur la reproduction (1). Il est vrai que les métamorphoses
des Insectes étaient devenues de bonne heure le sujet des
observations les plus remarquables (2); mais on se doutait
si peu alors que tous les animaux, depuis la première phase
ile la vie jusqu’à parfait développement, eussent à subir des
changements considérables, qu’on fit de la métamorphose
un caractère distinctif des Insectes. Et comme il y a, à cet
cet égard, même entre les Insectes, des différences très-pro-
noncées, on établit une distinction entre ceux qui subissent
_ (4) G. L. Leclerc de Buffon, Discours sur la nature des animauæ. Genève,
. 1754, in-12, et aussi les OEuvres complètes. Paris, 1774-1804, 36 vol, in-4.
(2) J. Swammerdam, Biblia naturæ, sive Historia insectorum, etc. Leyde,
ï 1737-38, 3 vol. in-folio, figures. — R, Ant. de Réaumur, Mémoires pour
servir à l’histoire des Insectes, Paris, 1734-42, 6 vol. in-4, figures. — A, J.
ze pe von Rosenhof, Insectenbelustigungen. Nuremberg, 1746-64, 4 vol. in-4,
gures.
108 DE L’ESPECE.
une métamorphose complète, c’est-à-dire qui passent suc
cessivement par les trois formes de larve, de chrysalide et
d'animal parfait, et ceux chez lesquels la transformation est.
moins complète, c’est-à-dire dont la larve diffère peu de l’in="
secte parfait. Il est, du reste, quelques Insectes chez lesquelsw
ces changements vont si peu loin qu’ils y sont parfois beau-"
coup moindres que chez certains représentants d’autres.
classes. On est fondé, par conséquent, à employer expression
de «métamorphose» pour désigner tous les changements, —
grands ou petits, que les animaux éprouvent, en succession |
directe et immédiate (1), durant la croissance, pourvu qu ils.
soient convenablement déterminés pour chaque type.
L'étude de l’embryologie, d’abord limitée à la recherche
des changements que subit le poulet dans l'œuf, s’est gra-
duellement étendue à tous les types du règne animal. On y
a apporté un soin extrême et atteint à une grande perfection. —
En effet, le premier qui se hasarda à explorer largement
dans toutes ses parties ce nouveau terrain, C. E. von Baer,
parvint à présenter le sujet sous un jour si net, traça les .
conclusions avec une ampleur et un soin tels, que ceux —
qui ont depuis marché sur ses traces peuvent être regardés —
comme ayant simplement développé les faits signalés par lui —
dès le principe et les conséquences qu’il en avait déduites (2). M
(1) Je dis avec intention en succession directe et immédiate, car les phéno- —
mènes de la génération alternante ne sont pas compris dans la métamorphose,
et consistent surtout dans la production de nouveaux germes qui ont leurs mé-"
tamorphoses propres. La métamorphose proprement dite s’entend seulement des —
changements successifs d’un seul et même germe.
(2) Sans rappeler ici les ouvrages des anciens auteurs, tels que de Graaf, 4
Malpighi, Haller, Wolf, Meckel, Tiedemann, etc., qui sont tous énumérés avec «
quelques autres à l’article « Entwickelungsgeschichte » de Bischoff, dans le —
« Handwérterbuch der Physiologie » de Wagner, vol. I, p. 860, je mentionne
ci-dessous les travaux publiés depuis que, sous l'influence de Dillinger, lem-
bryologie a pris un nouveau ‘caractère : C. E. v. Baer, Ueber Entwickelungs-
geschichte der Thiere, Kænigsberg, 1728-37, 2 vol. in-4, figures, l'œuvre la
plus importante qu’on ait encore publiée, La préface est un modèle de candeur et
. de sincérité et fait ressortir le mérite de Déllinger sous un jour aussi vrai
qu'éclatant. Comme traités généraux, je citerai : POUF. Burdach, Die Phy-
siologie als Erfahrungswissenchaft, Leipzig, 1829-40, 6 vol. in-8 ; en fran- q
gais, Paris, 4837-41, 9 vol. in-8. — J. Müller, Handbuch der Physiologie
des Menschen, Coblentz, 1843, 2 vol. in-8, 4° édition; en français, Paris,
PERS PRE ee
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 409
Ce fut lui qui jeta les bases d’une généralisation plus com-
préhensive, à l'égard du mode de formation des animaux.
Ce fut lui, en effet, qui, le premier, en 1827, découvrit l'œuf
ovarien des Mammifères et, pour la première fois, démontra
qu'il n’y a, essentiellement, aucune différence entre les ani-
maux ovipares et les soi-disant vivipares, l’homme même se
développant de la même manière que les animaux. L’exis-
tence des œufs chez tous les animaux, universellement, et
l'unité de leur structure, qui fut presque aussitôt établie avec
certitude, voilà, dans mon opinion, la plus grande décou-
verte des temps modernes, dans les sciences naturelles (1).
Bt, vraiment, c'était faire un pas de géant que de démon-
trer une identité aussi remarquable dans le point de départ
matériel du développement chez tous les animaux, quand
déjà on savait que la structure anatomique des adultes
révèle des plans aussi radicalement divers. Dés lors, la ma-
nière dont le germe se forme d’abord dans l'œuf et dont
les organes sortent graduellement d’une masse homogène,
les changements, les complications, les rapports, les fonc-
tions qui s’établissent à chaque phase nouvelle, la façon dont,
finalement, le jeune animal revêt sa forme et sa structure
définitive et devient un être nouveau et indépendant, tout
4851, 2 vol. in-8 (plusieurs éditions depuis). — R, Wagner, Lehrbuch
der Physiologie, Leipzig. 1839-42, 2 vol. in-8, — G. Valentin, Handbuch
der Entwickelungsgeschichte, ete. Berlin, 1835, 1 vol. in-8. — Lehrbuch der
Physiologie des Menschen. Brunswick, 1843, 2 vol. in-8.— F, A. Longet,
Trailé de physiologie. Paris, 1850, 2 vol, in-8. — Alb. Külliker, Microsco-
pische Anatomie des Menschen. Leipzig, 1840-54, 2 vol. in 8, figures. —
Voy. encore Owen’s Lectures, etc. ; Siebold et Stannius, Lehrbuch ; et Carus,
Morphologic, etc., cités aux pages 24 et 38 ci-dessus. Je pourrais ajouter
quelques ‘autres traités de physiologie ; mais la plupart d’entre eux sont si évi-
demment de pures compilations ne dénotant aucune connaissance personnelle
du sujet, que j’omets à dessein de mentionner davantage les ouvrages élémen-
taires,
(4) C. E. v. Baer, De ovi Mammalium et Hominis genesi. Künigsberg,
1827, in-4, figures, —J. E, Purkinje, Symbole ad ovi avium historiam
ante incubationem. Leipzig, 1830, in-4, figures. — R. Wagner, Prodromus
Historie generalionis Hominis atque Animalium, etc. Leipzig, 1836, 1 vol.
in-folio, figures. — Icones physiologicw. Leipzig, 1839, in-4, figures. —
_Moyez aussi A. Valenciennes et Fremy, Recherches sur la composition des œufs
dans la série des animaux (Comp. rend., 1854, vol. XXXIX, p. 469, 525 et
570). -
110 DE L’ESPECE.
cela devait être un sujet d’études des plus intéressants.
rents du règne animal, devint immédiatement le but prin :
cipal de tous les travaux sur l’embryologie. On peut di e
avec vérité que peu de sciences ont marché avec une rapidité
On n’a encore publié aucun traité général résumant les
observations les plus récentes sur les phases constantes du
mode de développement propre aux divers types du règn
animal. Il me faut donc renvoyer aux ouvrages spéciaux sur
ce sujet (1). Je suppose, d’ailleurs, qu'avant de former un
jugement définitif sur les comparaisons, que je vais faire
ci-après, entre les phases du développement des jeunes et
les gradations de la structure chez les adultes ou avec l’ordre:
de succession des fossiles qui caractérisent chaque période
géologique, je suppose, dis-je, que mes lecteurs auront ac-.
quis, sur ces changements, les lumières nécessaires et se
seront rendu familier tout ce qui se rattache à ces phéno-
mènes. à
L’embryologie des Polypes a été fort peu étudiée jusqu'ici"
tout récemment M. Lacaze-Duthiers a fait de forts beaux
(1) Le peu d'attention accordé, en Amérique, à à l'étude de l’embryologie m'a
engagé à énumérer les travaux relatifs à cette branche de la science plus com».
plétement que tous les autres. J'espère faire naître ainsi le goût de ce genre
de recherches. Il existe sur ce continent un grand nombre de types d'animaux
dont la connaissance, au point de vue de l’embryologie, ajouterait considéra-
blement aux richesses de la science; tels sont l'Opossum, les Batracien
ichthyoïdes, le Lépidostée, l’Amie, etc. Je ne parle pas des circonstances favo=
rables qu'un littoral de 1600 kilomètres, partout facilement accessible, offre”
aux investigations embryologiques, depuis le cercle polaire jusqu’au tropique
Inséparable de Vembryologie, la question de l’individualité se présente tout
naturellement. Voy. à cet égard: — Rud. Leuckardt, Ueber den Polymorphis-
mus der Individuen oder die Erscheinung der Arbeitstheilung in der Natur.
Giessen, 1854, in-4, — ©, B. Reichert, Die monogene Fortpflanzung.
Dorpat, 1852. -— Th. H. Huxley, Upon Animal Individuality (Ann. et Mag.
Nat. History, 2° série, 1852, IX, 507). — Ed. Forbes, On the supposed
analogy beiween the Life of an Individual and the Duration of a Species
(Ann. and Mag. Nat. History, 2° série, 1852, X, 59). — Al. Braun, Des
Individuum der Pflanse, cité ci-dessus, — Bertrachiungen über die Er TON
nung der Verjungung in der Natur. Fribourg, 1849, in-4, figures.
a ee ee Duniert E)
ki MÉTAMORPHOSES DES ANIMAUX. 441
‘travaux sur cette classe. Ce qu’on sait du développement
embryonnaire de ces animaux a trait principalement la fa-
‘mille des Actinoïdes (1). Immédiatement après l’éclosion, le
jeune a l'aspect d’un petit corps claviforme ou piriforme; il
ne tarde jpas à revêtir toute l’apparence d’un adulte et n’en
diffère alors que parce qu’il a un moins grand nombre de
tentacules. Quant au mode de ramification et à la multipli-
cation par bourgeons, ils ont été soigneusement et minu-
tieusement étudiés dans cette classe (2). Les Acaléphes pré-
sentent des phénomènes tellement particuliers que j'en
renvoie la discussion à plus tard, dans une section spéciale.
Tantôt leurs jeunes (3) sont semblables à des polypes, d’au-
;
_ (4) M. Sars, Beskrivelser og Jagttagelser over nogle maerkelige eller nye
À Havet ved den Bergenske Kyst levende Dyr, etc. Bergen, 1835, in-4. —
Fauna litioralis Norvegiæ. Christiania, 4846, in-fol., figures. — H. Rathke,
dans la Physiologie de Burdach, vol. II, 2° édition, p. 215. — Zur Morpho-
logis, Reisebemerkungen aus Taurien, Riga et Leipzig, 1837, in-4, figures.
— L. Agassiz, Twelve Lectures, etc., cité plus haut. — J. Haime, Mémoire
Sur le Lérianthe (Ann, sc. nat., 4° sér. 1854, I). — Note sur le développement
des Actinies (Comp. rend., 1854, XXXIX, 437, 595),
(2) Dana, Zoophytes ; Milne Edwards et Haime, Recherches, elc., cité plus
haut, etc., p. 44, note 2.
(3) C. Th. E. v, Siebold, Beitriige sur Naturgeschichte der wirbellosen
Thiere, Neueste Schriften der Naturforsch, Gesellschaft in Danzig. Dantzig,
1839, in-4, p. 1-35. — S, L. Loven, Beitrag zur Kenniniss der Gattungen
Campanularia und Syncoryne; Wiegman’s Archiv, 1837, p. 249, 321; en
français, Annales des sciences naturelles, 2° série, XV, 157, — M. Sars,
Beskrivelser, précédemment cité. — Fauna litioralis, id. — Einige Worte
über die Entwickelung der Medusen (Arch. f. Naturg., 4857, 1, 117). —
Al. v. Nordmann, Sur les changements que l'âge apporte dans la manière
d'étre des Campanulaires, C.-R., 1834, p. 709, — J. Steenstrup, Ueber
den Generations-Wechsel oder die Fortpflanzung und Entwickelung durch
abwechselnde Generationen, iibers. von Lorenzen. Copenhague, 41842,
in-8, fizures ; en anglais, par G. Busk (Ray Society), Londres, 1845, in-8.
— P. 4. Van Beneden, Mémoire sur les Campanulaires de la côte d’Os-
tende, etc. (Mémoires de l'Académie de Bruxelles, 1843, XVII, in-4, figures),
— Recherches sur l'embryogénie des tubulaires, ibid., 4844, — Fél. Dujardin.
Observations sur un nouveau genre de Médusaires (Cladonema) provenant de
la mélamorphose des Syncorynes (Annales des sciences naturelles, 2° série,
4843, XX, 370). — Mémoire sur le développement des Médusaires et des
Polypes hydraires (Annales des sciences naturelles, 3° série, 1845, TV, 257).
= J.G. Fr. Will, Hore tergestinæ. Leipzig, 1844, in-4, figures. — H.
Frey et R. Leuckardt, Beitriige zur Kenntniss wirbelloser Thiere, Bruns-
wick, 1847, in-4, figures. — Sir J. G, Dalyell, Rare and Remarkable
nimals of Scotland, etc,, Londres, 1847, in-4, figures, — Ed. Forbes,
Monography of the British Naked-eyed Medusæ. Londres, 1847, in-folio,
112 DE L’ESPECE.
tres fois ils ont avec le type de leur classe une ressemblance
plus immédiate. Pour un petit nombre seulement la multi
plication a lieu par développement direct et progressif. Quant
aux Échinodermes, ils ont pendant longtemps échappé
figures (Ray Society). — On the Morphology of the Reproduced System
of Sertulavian Zoophytes, etc. (Ann. and Mag. Nat. Hist., 1844, XIV, 385).
—F. Leydig, Einige Bemerkungen über den Bau der Hydren (Müller’ s Arch.,
1854, p. 270). — A. Ecker, Zur Lehre vom Bau und Leben der Kontraktilen
Substanz der niedersten Thiere. Bale, 1848, in-4 ; et dans Zeilschr. f. w. Zool.,
1849, vol. I, p. 218. — Rouget, Mémoires sur l’Hydre. — L. Agassiz,
Twelve Lectures, etc. — Ed. Desor, Lettre sur la génération médusipare
des polypes hydraires (Ann. sc. nat., 3° sér., 1849, vol. XII, p. 204).
A. Krohn, Bemerkungen über die Geschlechtsverhiiltnisse der Sertularinen
(Miiller’s Arch., 1843, p. 174). — Ueber die Brut des Cladodema radiatum und
deren Entwickelung zum Stauridium (Miiller’s Arch., 1853, p. 420).—Ueber
Podocoryne carnea, Sars und die Fortpflanzungsweise ihrer medusenartigen:
Sprüsslinge (Wiegm. Arch., 1851, I, p. 263), — Ueber einige niedere Thiere
(Miiller’s Arch., 1853, p. 137). — Ueber die fruhesten Entwickelungsstufen
der Pelagia noctiluca (Miiller’s Arch., 1855, p. 491). — A. Külliker, Die
Schwimmpolypen, etc., cité plus haut. — W. Busch, Beobachtungen über“
Anatomie und Entwickelungsgeschichte einige wirbelloser Seethiere. Berlin,
1851, in-4, fig. pp. 1, 25 et 30. — Gegenbauer, KGlliker und Müller, Berich
über einige im Herbsie 1852 in Messina angestellte anatomische Untersuch-
ungen (Zeitschr. f. wiss. Zool., vol. IV, p. 299). — C. Gegenbauer, Uebe
die Entwickelung von Doliolum, der Scheibenquallen und von Sagitta (Zeitschr.
f. wiss. Zool., 1853, p. 13). — Beiträge zu nühern Kenntniss der Schwimm~
polypen (Siphonophoren) (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1853, vol. V, p. 285). —
Ueber Diphyes. turgida, etc. (Zeitschr. f. wiss. Zoo!., 1853, vol. V, p. 442),
Ueber den Entwickelungscyclus von Doliolum, etc. (Zeitschr. f. wiss. Zool. 4
4855, vol. VII, p. 283). — Bemerkungen über die Randkürper der Medusen
(Müller s Arch., 1856, p. 230).— Studien über Organisation und Systemati
der Ctenophoren (Arch. f. Natz., 1856, 1, p. 163). — Al. v. Frantzius, Veber
die Jungen der Cephea (Zeitschr. f. wiss. Zool., vol. IV, p. 148). — J. Miiller,
Ueber eine eigenthiimliche Meduse des Mittelmeeres und ihren Jugendzustand
(Miiller’s Arch., 1851, p. 272). — M. Schultze, Ueber die mannlichen Ge
schleschtstheile der Campanularia geniculata (Miiller’s Arch., 1850, p. 53).
Th. Hincks, Notes on the Reproduction of the Campanulariadæ, ete. (Ann. a sa
Mag. Nat. ‘Hist., 2° sér., 4852, vol. X, p. 81). — Further Notes on British
Zoophytes (Ann. and Mag. Nat. Hist., 1853, vol. XV, p. 127). —G. J. Allman,
On Hydroids (Rep. Brit. Ass, Adv. Se. hs 1852, p. 50). — On the Structure of
Hydratiridis (Proc. Brit. Ass., 1853, p. 64). — A. Derbes, Note sur les
organes reproducteurs et l’embryogénie du Cyanea chrysaora (Ann. sc. nat.,
3° sér., 1850, vol. XIII, p. 377). —C. Vogt, Ueber die Siphonophoren (Zeilschr.
f. wiss. Zool., 1852, vol. Ill, p. 522). — Untersuchungen über Thierstaaten.
Frankfurt, 1854, in-8. — Siphonophores de Nice, cité plus haut, — Th. H.
Huxley, On the Anatomy and Affinities of the Family of the Medusæ (Philos.
Trans. Roy. Soc., 1849, Il, p. 413). — An Account of Researches into the
Anatomy of the Hydrostatic Acalephæ (Proc. Brit. Ass. Adv. Soc., 1854,
p. 78). — R. Leuckart, Zoologische Untersuchungen. Giessen, 1853-54,
in-4, fig., 1°" fase. — Zur niihern Kenniniss der Siphonophoren von Nizz@
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 113
attention des embryologistes ; mais enfin J. Müller publia
ur cette classe (1) une série d’études très-importantes, et
it connaître la merveilleuse diversité du mode de déve-
ppement, diversité qui existe non-seulement dans les or-
Wiegm. Arch., 1854, p. 249). — Medusen von Nizza, cité section IX. —
+ Stimpson, Synopsis of the Marine Invertebrata of Grand Manan (Smithson.
Contrib., 1853, in-4, fig.).—Jos. Leidy, Contributions towards a Knowledge
the Marine Invertebrate Fauna, etc. (Journ. Acad. Nat. Sc. Philad., 2° sér.,
1855, vol. Ill, in-4, fig.) — Voy. plus loin, sect. xx. — Th, H. Gosse, Natu-
ralist’s Rambles on the Devonshire coast. London, 1853, in-8. — A. de
Juatrefages, Mémoire sur l’organisation des Physales (Ann. sc. nat., 4° sér.,
854, vol. II). — Max. Schultze, Ueber der Baw der Gallertscheibe der Medusen
iiller’s Arch., 1856, p. 341). —J. M’Crady, Description of Oceania nu-
ula and the embryological History of a singular Medusan larva found in
@ cavity of ils bell (Proceed. Elliott Society, Charleston, S. C., 1857). —
S. Wright, On Hydractinia echinata (Edinb. new. Phil. Journ., nouv. sér.,
57). — Observations on British Zoophytes (ibid.). — Observations on
itish Zoophytes : Laomedea acuminata, Trichydra pudica, and Tubularia in
ivisa (Edinb. new Phil. Jowrn., nouv. sér., 1858). — On the Reproduction of
bydippe pomiformis (Edinb. new Philos. Journ. , nouv. sér., 1856, vol. IV,
». 85). — CG. W, Peach, Notice of a curious Metamorphosis in a Zoophyte-like
Animal (Edinb. new Philos. Journ., nouv sér., 1856, vol. IV, p. 162.
(1) Beskrivelser, etc., p. 37. — Ueber die Entwickelung der Seesterne
Wiegm. Arch., 1844, t.I, p. 169, fig.). — Fauna lilioralis, etc., p. 47.—
. Müller, Veber die Larven u, die Metamorphose der Ophiuren und Seeigel (Akad,
1. Wiss., Berlin, 1848).— Ueber die Larven u. die Metamorphose der Echino-
ler men (2° Abh., Akad. d, Wiss. Berlin, 1849). — Ueber die Larven und die
Metamorphose der Holothurien und Asterien (Akad. d. Wiss., Berlin, 1850). —
Veber die Larven u. die Melamorphose der Echinodermen (4° Abh., Ak. d. Wiss.,
Berlin, 1852).— Ueber die Ophiurenlarven des Adriatischen Meeres (Ak. d. wiss. ,
erlin, 1852), — Ueber den allgemeinen Plan in der Entwickelung der Echino-
ler men (Ak. d, Wiss., Berlin, 1853). — Ueber die Gattungen der Secigellarven
7° Abh., Akad. d. Wiss., 1855). — Ueber den Canal in den Eiern der Holo-
hurien (Miiller’s Arch., 1854, p. 60). — Fortsetzung der Beobachtungen
ber die Metamorphose der Echinodermen (Miiller’s Arch., 1855, p. 67). —
Des extraits, en langue française, en ont été publiés dans Ann. sc. nat.,
© sér., 1852-53, vol. XVII, XIX et XX; 4° sér., 1854, vol. I, par C. Dareste).
— Koren et Danielssen, Nyt Magazin for Naturvid., Christiania, 1847, vol. V,
). 253 (Ann. sc. nat., p. 347). — Voy. aussi Fauna littoralis Norvegiæ, liv. 11.
L. Agassiz, Twelve Lectures, etc., p. 13. — A. Derbés, Sur la formation
Pembryon chez l'Oursin comestible (Ann. se. nat., 3° sér., vol. VIII,
80). — W. Bush, Beobachtungen, etc., — Ueber die Larve der Coma-
fila (Muller’s Arch., 1849, p. 400). — A. Krohn, Ueber a Entwickelung
ler Seestern und Holothurien (Miiller’s Arch., "4853, p. 317). — Ueber
Bie Entwickelung einer lebendig gebiihrenden Ophiur (Miiller’s Arch. , 1854,
. 338). — Ueber die Larve des Echinus brevispinosus (Muller’s Arch., 1853,
@. 361). — Beobachtungen über Echinodermenlarven (Miiller’s Arch., 1854,
®. 208). — Ueber einen neuen Entwickelungsmodus der Ophiuren (Miiller’s
irch., 1857, p. 369), — M. Schultze, Ueber die Entwickelung von Ophiolepis
quamata (Miiller’s Arch., 1852, p. 37). —- R. H. Gosse, Tenby, a seaside
liday. London, 1856, in-8.
AGASSIZ. 8
Al DE L’ESPECE.
dres, mais encore dans les genres d’une même famiile. Le
larves de quelques-uns de ces Rayonnés ressemblent ét on
namment à des Cténophores très-petits, et pourraient étr
rapportées à ce type des Acalèphes. Tout récemment, le
recherches de mon fils ont dévoilé, entre tous ces iypes 4
classe. |
Comme j'aurai désormais à citer fréquemment les prin
cipales divisions du Règne animal, je dois bien établir i¢
que je n’adopte pas certains changements derniéremen
proposés dans la délimitation des classes, malgré la faveu
avec laquelle on les a presque partout accueillis. Le‘typ
indivis des Rayonnés me paraît constituer un des embran
chements les plus naturels du Règne, et je considére |;
division en Cœlentérés et Échinodermes comme une exa
gération des différences anatomiques observées parmi ce:
animaux (1). En ce qui concerne le plan, leur aril
ne différe en aucune fagon et elle est partout homologue
Je ne reconnais dans cet embranchement que trois classes
les Polypes, les Acaléphes et les Echinodermes. La diffé
rence entre les deux premières repose principalement su
ce que les cloisons rayonnées de la cavité principale de
Polypes supportent les organes reproducteurs. De plus, k
cavité digestive consiste, dans cette classe, en un refou
lement intérieur, par l’orifice externe, du sac qui forme À
masse du corps. Or, chez les Acalèphes, il ya, au moins.
l’état médusiforme, des tubes rayonnés qui s'étendent jus
qu’à la périphérie du corps où ils s’anastomosent et c'es
dans la masse gélatineuse de celui-ci qu’est creusée la cavil
digestive. C’est ce qui a lieu également chez les Hydroides
les Méduses propres et les Cténophores; mais rien de parel
ne se remarque chez les Polypes. Les Siphonophores, so
(4) Je ne vois pas sans surprise que J. Müller soit favorable à l’idée d’un
affinité étroite entre les Polypes et les Acalèphes, et surtout qu’il incline à ra
porter les Bryozoaires au type dés Rayonnés. ia
METAMORPHOSES DES ANIMAUX, 445
3!
ue leur lignée médusaire devienne libre ou non, et les
Hydroides ont cela de commun que, à l’état médusiforme,
ils possedent de simples tubes rayonnés réunis en un seul
cordon qui entoure le bord du disque campanulaire. Ces
deux groupes constituent ensemble un ordre naturel, par
pposition aux Méduses stécophthalmes, dont les tubes
ayonnés se ramifient vers le bord du corps et forment
un réseau compliqué d’anastomoses. Au point de vue mor-
phologique, les Acaléphes à l'état polypoide sont aussi
ien des Acaléphes que quand ils sont à l’état médusi-
rme (1); qu’ils se séparent ou restent unis, les rapports
ésultant de la structure sont toujours les mêmes. Une com-
jaraison de l'Hydractinie, qui est l’Hydrvide le plus commun
et le plus polymorphe, avec notre Physalie (Physalia) peut
du premier coup d’ceil faire apercevoir l’homologie des in-
d ividus les plus multiformes (2).
L’embryologie des Mollusques a été l’objet d’études trés-
étendues, et quelques-uns de ces animaux sont des mieux
onnus du Règne. Les limites naturelles de l’embranche-
ent paraissent encore, cependant, un peu indécises. Je
rois qu’elles doivent renfermer les Bryozoaires (3), qui
(1) Cela a été développé dans le 3° volume de mes Contributions à l’histoire
naturelle des États-Unis. — Voy. encore mon Mémoire sur la structure et les
omologies des Rayonnés, cité précédemment.
(2) Ainsi que je Vai déja établi plus haut, les Millépores ne sont pas de
rais Polypes, mais des Hydroïdes que leur structure et leur polymorphisme
approchent étroitement des Hydractinies.
(3) G. J. Allman, On the present State of our Knowledge of the fresh
vater Polyzoa (Proceed. Brit. Assoc. Adv. Sc., 20° meet., Edinburgh, 1850,
, 305).— Proceed. Irish Ac., 1850, vol. IV, p. 470. — Ibid., 1853, vol. V,
. 14. — Monograph of the fresh water Polyzoa (Ray Soc.). — P. J, van
eneden, Recherches sur l'anatomie, la physiologie et le développement des
Zryozoaires qui habilent la côte d’Ostende (Nouv. Mém. Acad. Bruæ., 1845,
rol. XVIII). — B. C, Dumortier et P. J. van Beneden, Histoire naturelle des
Polypes composés d'eau douce (Mém. Acad. Brux., 1850, vol. XVI, in-4, fig.).
— Th. Hincks, Noles on Brilish Zoophytes, with Descriptions of some new
Species (Ann. and Mag. Nat. Hist., 2° sér,, 1851, vol. VIII, p. 353),— €. G,
hrenberg, Die Infusionsthiere als vollkommene Organismen. Leipzig, 1838,
ol, in-fol., fig. — F, Stein, Infusionsthiere auf ihre Entwickelungsgeschichte
Btersutch. Leipzig, 1854, 1 vol. in-4, fig. — Al. v. Frantzius, Analecta ad
phrydii versatilis historiam naturalem, Breslau, 1849, — C, F. J, Lachmann,
Jeber die Organization der Infusorien, besonders der Vorticellen (Muller’s
Mrch., 1856, p. 340), et tous les travaux sur les Infusoires dans lesquels il est
juestion des Vorticellidés,
416 DE L’ESPECE.
mènent graduellement, en passant par les Brachiopodes (1)
aux Acéphales ordinaires. De plus, je me suis assuré qu’l
convient de réunir les Vorticellidés aux Bryozoaires. D’ur
autre côté, les Céphalopodes ne peuvent pas être sépa
des Mollusques propres comme embranchement distinct. L
segmentation partielle du jaune, chez ces animaux, n’esl
pas davantage un motif de les séparer des autres Mollusqu
que la segmentation totale du jaune chez les Mammifér
ne serait une raison de séparer ceux-ci des autres Vertébr
Enfin, les Géphalopodes sont, dans tous les détails de lew
structure, homologues avec les autres Mollusques. Le
Tuniciers sont particulièrement intéressants; d'autant qué
les Ascidiens simples ont des jeunes pédonculés qui offrent
la ressemblance la plus frappante avec les Bolténies, et for-
ment en méme temps un anneau de la chaine a laquelle
appartiennent les Ascidiens composés (2). Le développement
des Lamellibranches semble tout à fait uniforme ; toutefois
il y a dans la ponte de grandes différences. Les uns émetteni
leurs œufs avant que le germe soit formé; d’autres com
uA
tinuent à les porter sur leurs branchies, jusqu'à parfai
achèvement du jeune (3). C’est ce qui s’observe particu
(1) Je vois d’après une courte remarque de Leuchardt, Zeitschrift für wiss
Zoologie, vol. VII suppl., p. 445, qu'il a, lui aussi, aperçu l’étroite alliance des
Brachiopodes et des Bryozoaires. Voy. aussi Alb, Hancock, On the Organization
of the Brachiopoda (Proceed. Royal Society, London, 1857, p. 463).
(2) J.C. Savigny, Mémoires sur les animaux sans vertèbres, etc., op. cit.
Ad. v. Chamisso, De animalibus quibusdam e classe Vermium Linneeana, fasc
—De Salpa. Berlin, 4819, in-4, fig.— F. J. Meyen, Beiträge zur Zoologie, etc.,
4er Abth., Ueber Salpen (Nova ‘Acta nat. cur., 1832, vol. XVI). — H. Milne:
Edwards, Observations sur les Ascidies composées ‘des côtes de la Manche.
Paris, 1844, in-4, fig. — M. Sars, Beskrivelser, etc. —- Fauna litt., ete. —
P. J. van Beneden, Recherches sur Vembryogénie, Vanatomie et la physiologi
des Ascidies simples (Mém. Acad. Brux., 1847, vol. XX). — A. Krohn, Ueber
die Entwickelung der Ascidien (Miiller’s "Arche, 1852, p. 312).— A. Küllike
et Léwig, De la composition et de la structure des enveloppes des Tunicien
(Ann. sc. nat., 3° sér., vol. V, p. 193). — Th. H. Huxley, Observations por
the Anatomy and Physiology of Salpa and Pyrosoma (Philos. Trans. R. Soc: :
4851, t. IL, p. 567). — D. F. Eschricht, Anatomisk-physiologiske Udersügelse
over Salperne. Copenh., 1840, fig. —J. Steenstrup, Ueber den Generationsweel -
sel, op. cit. —C. Vogt, Bilder aus dem Thierleben. Francfort-s,-M., 1852, in-8
— H. Müller, Ueber Salpen (Zeitschr. f. wiss. Zool., vol. IV, p. 320),
R, Leuckart, Zoologische Untersuchungen. Giessen, 1853-54, in-4, fig., 2° fase,
—C. Gegenbauer, Ueber die Entwickelung von Doliolum, etc. > Op. Cit., Pe 10
(3) C. G, Carus, Entwickelungsgeschichle unserer Flussmuschel. Leip ig,
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 417
rement chez les Naïades, dont quelques-unes lâchent leurs
eufs de trés-bonne heure, tandis que d’autres les gardent
pendant plus ou moins longtemps, dans une poche spéciale
de la branchie externe, qui présente les formes les plus
riées dans les différents genres de cette famille. On
sait encore peu de chose sur le développement des Brachio-
podes. Les faits observés jusqu’à ce jour semblent mon-
rer, entre ce type et celui des Bryozoaires, plus d’affinité
“qu'entre lui et les Acéphales proprement dits, auxquels
es conchyologistes les ont réunis à cause de leur coquille
bivalve. Les Gastéropodes (1) présentent, à cet égard, une
832, in-4, fig. — Arm, de Quatrefages, Sur l'embryogénie des Tarets (Ann.
Peat, 3e sér., 1849, vol. I, p. 202). — Sur la vie interbranchiale des
“petites Anodontes (Ann. sc. nat., 2° sér., vol, V, p. 321).— S. L. Loven, Om
| Utwecklingen of Mollusca acephala (Overs. Vet. "Akad. Forhandl., Stockholm,
1849). — En allemand dans les Arch. de Müller, 1848, p. 531, et de Wiegmann,
4849, p. 312. — J. L. Prevost, Dela génération ches la Moule des peintres
‘(Mém. Soc. phys., Genève, 1825, vol. II, p. 121). — C. Vogt, Bilder aus
dem Thierleben. Frankfurt, 1852, ‘in-8, — 0. Schmidt, Veber die Entwicke-
tung von Cyclas calyculata (Drap.) (Muller’s Arch., 1854, p. 428). —F.
Leydig, Ueber Cyclas cornea ( Miiller’s Arch., 1855, p. 47). —H, Lacaze-Duthiers,
Recherches sur les organes génitaux des Acéphales lamellibranches (Ann. sc.
nal., 4° sér., 1854, vol. If). — Mémoire sur Vorgane de Bojanus des Acé-
phales lamellibranches (Ann. sc, nat, , 4° sér., 1855, vol. IV). - — Observations
sur Vhermaphrodisme des Anodontes (Ann. sc. nat., 4° sér., 1855, vol. IV).
— Mémoire sur le développement des branchies des Mollusques acéphales
tamellibranches (Ann. sc. nat., 4° sér., 1856, vol. V). — Histoire de Vorgani-
sation et du développement du Dentale (Ann. sc. nat., 4° sér., 1856, vol. VI).
—- Davaisne, Reproduction de ’ Huitre (Mém. de la Soc. de biol.).
(4) €. G. Carus, Von den äussern Lebensbedingungen der weiss-und kalt-
bliitigen Thiere. Leipzig, 1824, in-4, fig. — J. L. Prévost, De la génération
chez la Limnée (Mém. Soc. phys. Genêve, vol. V, p. 119). — M. Sars, Zur
Entwickelungsgeschichte der Mollusken und Zoophylen ( Wiegm. Arch., 1837,
‘t. I, p. 402; 4840, t. I, p. 196). — Zusütze zu der von mir gegebenen Dart-
stellung der Entwickelung der Nudibranchien (Wiegm. Arch., 1845, t. I,
‘Pp. 4). — Arm. de Quatrefages, Mémoire sur l'embryogénie des Planorbes et
des Limnées (Ann. sc. nat., 2° sér., vol. If, p. 407). — P. J. van Beneden,
Recherches sur le développement des Aplysies (Ann. sc. nat., 2° sér., vol. XV,
‘p. 123).— P. J. van Beneden et Ch. Windischman, Recherches sur Pembryo-
“génie des Limaces (Mém. Acad. Brux., 1841). — Em. Jacquemin, Sur le
: développement des Planorbes (Ann. sc. nat., vol. V, p. 117; Nova Acta nat.
“cur., vol. XVIII). — B. C. Dumortier, Mémoire sur les évolutions de l'embryon
‘dans les Mollusques gastéropodes (Mém. Acad. Brux., 1836, vol. X). —
J. L. M. Laurent, Observations sur le développement de l'œuf ‘des Limaces
(Ann. sc. nat., vol. IV, p. 248). — F. A. Pouchet, Sur le développement de
l'embryon des Limnées (Ann. sc. nat., 2° sér., vol. X, p. 63). — C. Vogt,
“Recherches sur Vembryologie de l'Actæon (Ann. sc. .nat., 3° sér., 1846,
vol. VI, p. 5). — Beitrag sur Entwickelungsgeschichte eines Cephalophoren
pea
448 DE L’ESPECE.
diversité beaucoup plus grande que les Lamellibranches.
Même parmi les Pulmonés, terrestres et aquatiques, il y &
des différences frappantes. Quelques Pectinibranches son
remarquables par ce fait curieux, que les œufs éclosent, et
que le jeune parvient à un degré avancé de croissance, avant
d’être mis bas. Le Pyrula et le Strombus sont les exemples
les plus extraordinaires de cette nidification organique.
(Zeitschr. f. wiss. Zool., 1855, vol. VII, p. 162). — M. Schultze, Ueber die
Entwickelung des Tergipes lacinulatus (Wiegm. Arch., 1849, vol. I, p. 268).
— N. A. Warneck, Ueber die Bildung und Entwickelung des Embryo bei
Gasleropoden (Bull. Soc. imp. Moscou, 1850, vol. XXIII, I, p. 90). —
0. Schmidt, Ueber die Entwickelung von Limax agrestis (Muller's Arch., 1854,
p. 278). — F. Leydig, Ueber Paludina vivipara, ein Beitrag zur nühern Kenn-
iniss dieses Thieres in embryologischer, anatomischer und histologischer
Beziehung (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1850, vol. IT, p. 125). — A. Kôlliker, op.
cit. (Zeilschr. f. wiss. Zool., vol. IV, p. 333-369). — J. Müller, Ueber vers-
chiedene Formen von Seethieren (Miiller’s Arch., 1854, p. 69). — Ueber
Synapta digitata und über die Erzeugung von Schnecken in Holothurien.
Berlin, 1852, in-4, fig. fly a, pour ce cas remarquable, une explication à la-
quelle Müller n’a pas songé. On sait que des Poissons (Ophidium) s’introduisen
dans le corps des Holothuries par l’orifice postérieur (De Bosset, Notice, etc., it
Mém. Soc. sc. nat. Neuch., 1839, vol. II, in-4).— J'ai observé le fait moi-même
dans la Floride. L’Entoconcha mirabilis ressemble beaucoup à la coquille em-
bryonnaire de plusieurs espèces de Littorines, entre autres à celle de la Lacunc
vincla, dont j’ai eu occasion d’étudier le développement. Il est fort possible qu
plusieurs espèces de cette famille, dans laquelle il y en a beaucoup de trés-
petites, fassent choix des Synapta pour y déposer leurs œufs et les y aban-
donner après la ponte. Les œufs auraient alors avec le Synapta une connexior
analogue à celle du Gui ou de l’Orobanche avec les plantes qui les supportent
— C. Gegenbauer, Beitrüge sur Entwickelungsgeschichte der Landgaste
ropoden (Zéitschr. f. wiss. Zool., 1852, vol. II, p. 371).— Untersuchun
gen über Pleropoden und Heteropoden. Leipzig, 1855, vol. I, in-4, fig. —
J. Koren et D. C, Danielssen, Bitrag til Pectinibranchiernes Udviklingshistorie
Bergen, 1854, in-4. (Ann. sc. nat., 1852, vol. XVIII, p. 257 et 1853, vol. XIX
p- 89; Wiegm. Arch., 1853, p. 173; voyez aussi Fauna littoralis Norvegiæ
liyr . II). — Al. V. Nordmann, Versuch einer Monographie von Tergipes Edwardsii
Saint-Petersbourg, 1844, in-4. — R. Leuckart, Zoologische Untersuchungen
Giessen, 1853-54, in-4, fig., 3° fase. — Th. H. Huxley, On the Morphology
of the Cephalous Mollusca, etc. (Phil. Trans. R. Soc., 1853, vol. I, p. 29)
— Jabez Hogg, On the Development and Growth of the Watersnail (Quart
Micr. Journ., 1854, p. 91). — J, Reid, On the Development of the Ova o
the Nudibranchiate Mollusca (Ann. and Mag. Nat. Hist., 1846, vol. XVII
p. 377); — W.B. Carpenter, On the Development of the Embryo of Purpur:
lapillus (Quarterly Micr. Journ., 1845, p. 17). — S. Lorenz, Ueber di
Entwickelung von Chiton (Arch. nat., 1856, vol. I, p. 206). — A, Krohn
Ueber einer neuen mit Wimpersegeln versehenen Gasteropoden (Arch. f. Nat.
1853, p 223). — Beobachtungen aus der Entwickelungsgeschichte der Plero
poden, Heteropoden, Echinodermen (Miiller’s Arch., 1856, p. 545, et 1857
P. 459). — J. D. Macdonald, Remarks on the Anatomy of Macgillivray:
pelagica and Cheletropis Haselzi (Trans. Roy. Soc., London, 1855, vol. I
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 4419
L’embryologie des Céphalopodes a été magistralement trai-
ée par Kolliker (4).
Les naturalistes ne sont pas non plus d’accord sur les li-
nites de l’embranchement des Articulés. Quelques-uns
d’entre eux inclinent à faire des Arthropodes et des Vers deux
embranchements distincts; d’autres, au contraire, les réu-
hissent en un seul. J’avoue que je ne vois pas de motif à une
séparation des deux types. L’état vermiforme, qui est celui
les larves de la majorité des Arthropodes, et l’homologie
parfaite de ces larves avec les véritables Vers, ne permettent
as de douter, ce me semble, que tous ces animaux ne
oient construits sur un seul et même plan, et n’appartien-
ent en conséquence a un seul embranchement. Celui-ci,
| les principes exposés dans le second chapitre de ce livre
ont exacts, ne doit renfermer que trois classes, celle des
Vers, celle des Crustacés, celle des Insectes. Quant aux
). 289). — Further Observations, etc., p. 295. — Ed. Claparède, Anatomie
md Entwickelungsgeschichte der Neritina fluviatilis (Miiller’s Arch., 1857,
). 109). — Beitrag für Anatomie des Cyclostoma elegans (Miiller’s Arch.,
1858, p. 1). — C. Semper, Beitrüge für Anatomie und Physiologie der Pul-
nonaten (Zeitschr. f. w. Zool., 1856, vol. VIII, p. 340).— A. Schneider, Veber
ie Entwickelung der Phyllirhoe bucephalum (Müller’s Arch., 1858, p. 35).
(4) Alb. Külliker, Entwickelungsgeschichte der Cephalopoden. Zurich, 1844,
n-4, fig.—P.J. van Beneden, Recherches sur l’embryogénie des Sépioles (Nouv.
Him. Acad. Bruæ., 1844, vol. XIV). — Z. Coldstream, On the Ova of Sepia
Lond. and Edinb. Phil. Mag., oct. 1833), — Ant. Dugés, Sur le développement
le l'embryon chez les Mollusques céphalopodes (Ann. sc. nat., vol. VIII, p. 107).
— H. Rathke, Perothis, ein neues genus der Cephalopoden (Mém. Akad. Saint-
élersbourg, 1834, vol. II, p. 149). C’est le jeune de quelque Céphalopode loli-
joide. —H. Milne-Edwards, Observations sur les spermatophores des Mollusques
Jéphalopodes, etc. (Ann. sc. nat., 2° sér., vol. Ill, p. 193). — A. Külliker,
lectocotylus Argonaute (Delle Chiaje), und H. Tremoctopodis (K.), die Männchen
on Argonauta Argo und Tremoctopus violaceus (Ber. Zool. Anst., Würzburg,
1849, p. 69). — H. Müller, Ueber das Münnchen von Argonauta Argo und die
dectocotylen (Zeitschr. f. wiss. Zool., vol. IV, p. 1). — J.B, Verany et C. Vogt,
Mimoire sur les Hectocotyles et les mâles de quelques Céphalopodes (Ann. sc.
al., 3° sér., 1852, vol. XVII, p. 147). — F. D. Roulin, De la connaissance
(u’ont eue les anciens du bras copulateur chez certains Céphalopodes (Ann, se.
wit., 3° sér., 1852, vol. XVII, p.188). — R. Leuckart, Zool. Unters., op. cit.
— J. Steenstrup, Die Hectocotylenbildung bei Argonauta und Tremoctopus, etc.
Arch. f. Nat., 1856, vol. I, p. 241). — F, H. Troschel, Bemerkungen über die
Daphalopoden von Messina (Arch.f. Nat., 1857, vol. 1, p. 41). — J. van der
loeven, Beitrag zur Anatomie von Nautilus Pompilius, L., besonders des Münn-
ithen Thieres (Arch. f. Nat., 1857, vol. I, p. 77).
120 DE L’ESPECE.
Protozoaires, je ne partage pas les idées généralement
admises sur leur nature. Je me suis assuré que les Col-
podes et les Paramécies sont les larves des Planaires, que
les Opalins sont celles des Distomes, et je ne vois pas
pourquoi les autres Infusoires dont Ehrenberg a fait sa
division des Entérodéles (1) ne seraient pas, de la méme
façon, les larves de quelques Vers inférieurs dont le mode
de développement nous aurait échappé jusqu’ici. En outre;
une comparaison des premières phases de l’évolution chez
les Entomostracés et chez les Rotiféres suffirait à faire voir
ce que Burmeister, Dana et Leydig ont prouvé d’une autre
manière, c’est-à-dire que les Rotiféres sont de vrais Crus-
tacés et non pas des Vers (2). Le caractére végétal des Anen-
térés est bien établi. Je n’ai pas encore pu arriver à un ré-
sultat définitif pour les Rhizopodes; mais ils pourraient
représenter, dans le type des Mollusques, la phase de seg-
mentation du jaune chez les Gastéropodes (3). De toutes ces
remarques on doit conclure que je ne considère pas les Pro:
tozoaires comme un embranchement distinct, pas plus que
les Infusoires comme une classe naturelle (A).
(1) Il a été déjà établi précédemment que les Vorticellidés sont des Bryo.
zoaires.
(2) Tout récemment l’histoire des Infusoires s’est enrichie de beaux travaux
dus à MM. Balbiani, Claparéde et Lachmann.
(3) Les travaux de Schultze et de Külliker sur ce type les présenten
sous un jour tout différent, — Voy. chap. III, section I.
(4) M. Schultze, Beiträge zur Naturgeschichte den Turbellarien. Greifs-
wald, 1851, in-4, fig. — Zoologische Skizzen (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1852,
vol. IV, p. 178). — J. Müller, Ueber eine eigenthiimliche Wurmlarve, etc.
(Archiv., 1850, p. 485). — E. Desor, On the Embryology of Nemertes, with
an Appendix on the embryonic Development of Polynoe (Boston Journ.
Nat. Hist., 1850, vol. VI, p. 1; Miiller’s Arch., 1848, p. 511). —L. Agassiz,
Colpoda and Paramecium are larve of Planariæ (Proceed. Ann. Assoc. Adv.
Sc. Cambridge, 4849, p. 439). — Ch. Girard, Embryonic Development of Pla-
nocera elliptica- (Journ. Acad. Nat. Sc. Phil., 2° sér., 1854, vol. IL, p. 307).
— C. G. Ehrenberg, Die Infusionsthierchen, ote, op. cit, — Microgeologie ; da:
Erder und Felsenschaffende Wirken des unsichtbaren kleinen selbststandiger
Lebens auf der Erde. Leipzig, 1854, in-folio. — Ueber den Grünsand une
seine Erlüuterung des organischen Lebens (Akad. d. Wiss., Berlin, 1855.
in-4). — F. T. Kiitzing, Ueber die Verwandlung der Infusorien in nisdere
Algenformen. Nordhausen, 1844, in-4, fig. — A. Külliker, Das Sonnenthier-
chen, Actinophrys sol (Zeitschr. f. FT Zool., 1849, t. I, p. 198). — Ed.
Claparéde, Ueber Actinophrys Eichomii (Miiller’s Arch., 1854, p. 398). —
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 121
- A prendre la classe des Vers dans sa plus large extension,
elle embrasserait les Helminthes, les Turbellariés et les
Annélides (1). L’embryologie de ces animaux a besoin d’être
encore étudiée avec soin, malgré les recherches nombreuses
¥ ils ont été l’objet. Les Vers intestinaux continuent
à dérouter les naturalistes, même aujourd’hui que les
C. Th. E. von Siebold, Ueber einzellige Pflanzen und Thiere (Zeitschr. wiss.
Zool., 1849, vol. i, p. 270). — C. Naegeli, Gattungen einzelliger Algen.
Zurich, 1849, in-4, fig. —A. Braun, Algarum unicellularium genera nova
ei minus cognila. Leipzig, 1845, in-4 fig. — Ueber Chitridium, eine Gattun-
gein Zellifer Schmarotzergeorächse auf Algen und Infusorien (Akad. d. wiss.,
Berlin, 4855). — F. Cohn, Untersuchungen über die Entwickelungsgeschichte
der microscopischen Algen (Nova Acta Acad. nat. cur., 1854, vol. XXIV,
p. 101). — Beiträge zur Entwickelungsgeschichte der Infusoren (Zeitschr. f.
4 Zool., 1851, vol. III, p. 257). — Beiträge zur Kenntniss der Infusorien
(Zeitschr. f. wiss. Zool., 1854, vol. V, p. 420). — Ueber Encystirung von
Amphileptus fasciola (ibid., p. 434), — Observation sur l'organisation et la
propagation des Volvocinées (Compt. rend., 1856, vol. XLIII, p. 1054). —
Ueber Fortpflanzung von Nassula elegans (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1857,
vol. IX, p. 143). — M. Schultze, Ueber den organismus der Polythalamien.
Leipzig, 1854, 1 vol., fig. — Beobachtungen über die Fortpflansuny der
Polythalamien (Miiller’s Arch., 1856, p. 165), — Vic. d’Archiac, et J. Haine,
Description des animaux fossiles du groupe nummulitique de l'Inde. Paris,
1853, in-4. —H. J. Carter, Description of some of the larger Forms of
fossilized Foraminifera in Scinde (Ann. and Mag. Nat. Hist., 1853,
p. 161). — W. B. Carpenter, Researches on the Foraminifera (Trans. Roy.
Soc., London, 1856, 1, p. 181; Il, p. 547). — Th. H. Huxley, Zoological
Notes and Observations made on board H. M. S. Rattlesnake, upon Thalassi-
cola, a new Zoophyte (Ann. and Mag. Nat. Hist., 2° sér., 1854, vol. VIII,
p. 433). — J. Müller, Ueber Sphærozoum und Thalassicola (Ber. Akad. d.
wiss., Berlin, 1855, p. 229), — Ueber die im Hafen von Messina beobachteten
Polycystimen (ibid., p. 671). —: Ueber die Thalassicolen, Polycystinen und
Acanthometren des Mittelmeeres (Ber. Akad. d. wiss., Berlin, 1856, p. 474).
— L. Auerbach, Ucber die Einselligleit der Amoeben (Zeilschr f. wiss. Zool.,
4855, vol. VII, p. 365). — Ueber Encystirung von Oxytricha pellionella
(Zeitschr. f. wis. Zool,, 1854, vol. V, p. 430). — Cienkowsky, Ueber cysten-
bildung bei Infusorien (Zeilschr. wiss. Zool., 1855, vol. VI, p. 301). —
N. Lieberkühn, Ueber Protozoen (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1856, vol. VIH,
p. 30). — Beitriige zur Entwickelungsgeschichte der Spongillen (Miiller’s
Arch., 1856, p. 1).— Zur Entwickelungsgeschichte der Spongillen, Nachtrog.
(Miiller’s Arch., 1856, p. 399), — Zusütze sur Entwickelungsgeschichte
der Spongillen (Miiller’s Arch., 1856, p. 496). — Beitriige sur Anatomie
der Spongien (Miiller’s Arch., 1857, p. 376). — Beitriige sur Anatomie der
Infusorien (Miiller’s Arch., 1856, p. 20).—A. Schneider, Beitriige zur Na-
lurgeschichte der Infusorien (Miiller’s Arch., 1854, p. 191). — Max, Perty,
Zur Kenntniss Kleinster Lebensformen, nach Bau, Function, Systematik.
Berne, 1852.
- (4) E. Blanchard, Recherches sur l’organisation des Vers. Paris, in-4. —
Voyage en Sicile, par Milne Edwards, de Quatrefages et Blanchard,
122 DE L’ESPECE.
traits généraux de leur développement sont déterminés. Les
Nématoides ont une évolution trés-simple, sans générations 1s
alternantes, et, comme quelques-uns sont vivipares, leurs
changements peuvent être facilement décrits (4). Les Ces.
toïdes et les Cystiques ont été longtemps considérés comme
des ordres d’Helminthes distincts, mais on sait maintenar
qu’il y a entre eux un rapport génésique direct, les Cysd
tiques n’étant qu’une forme provisoire des Cestoïdes (2). OS
(1) F. Stein, Beitr ‘âge sur Entwickelungsgeschichte der Eingeweidewiir-
mer (Zeitschr. für wiss. Zool., 1852, vol. IV, p. 196). — H. Nelson, On the
Reproduction of the Ascaris mystax (Philos. Trans. R. Soc., 1852, II, p. 563).
— Allen Thompson, Ueber die Samenkürperchen, die Hier und die Befrucht ng
der Ascaris mystax {Zeitschr. f. wiss. Zool., 1856, vol. VII, p. 425). —
E. Grube, Ueber einige Anguillulen und die Entwickelung von Gordius aquaticus
(Wiegmann’s Arch., 1849, 1, 358). — C. Th, E. von Siebold, Ueber die
Wanderung der Cotes ’(Uebers. d. Arb. und Ver. schles. Ges. f. vatert.
Kultur, 1850, p. 38). — G. Meissner, Beitrag zur Anatomie und Physio-
logie von Mermis albicans (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1853, vol. V, p. 2022 :
— Beobachtungen über das Eindringen der Saamenelemente in den Dotte
(Zeilschr. fiir. wiss. Zool., 1855, vol. VI, p. 208 et 272). — Beiträge +
Anatomie und Physiologie "der Gordiaceen (Zeitschr. für wiss. Zool., 1855;
vol. VII, p. 4). -- A. Külliker, Beitriige zur Entwickelungsgeschichte wir-
belloser Thiere (Miiller’s Arch., 1843, p. 68). — H. Bagge, Dissertatic
inaug. de evolutione Strongyli divicutavis et Ascaridis acuminate. Erlange
1841, in-4, fig. — Jos. Leidy, A Flora and Fauna within living Animals
(Smithson. ‘Conti ‘tb., 1853, in-4, fig.). — H. Luschka, Zur Naturgeschischte
der Trichina spiralis (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1854, vol. Ill, p. 69). — Th.
Bischoff, Ueber und Samenbildung und Befruchtung bei Ascaris mystax (Zeitschr.
f. wiss. Zool., 1865, vol. VI, p. 377). — Wiederlegung des von Dr K
bei den Najaden und Dr. Nelson bei den Ascariden behaupteten Eindringe
der Spermatozoiden in das Hi. Giessen, 1854, in-4, fig. — Bestütigung a
von Dr. Newport bei den Bairachiern und Dr. Barry bei den Kaninchen behaw,
teten Eindringens der Spermatozoiden in das Hi. Giessen, 1854, in-4.
C. Davaine, Sur la maladie du blé connue sous le nom de nielle, et sur les.
Helminthes qui occasionnent cette maladie (Compt. rend., 1855, vol. XLI,
p. 435). — Ed. Claparède, Ueber Eibildung und Befruchtung bei den Nema-
toden (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1857, vol. IX, p. 106). — G. Walter, Beis
irfige sur Anatomie und Physiologie von Organis ornata (Zeitschr. f. wiss.
Zool., 1856, vol. VIII, p. 163).—G. R. Wagner, Ueber Dicyema, Koll. (Müller's
Arch.. 1857, p. 354. — N. Lieberkühn, Beitriige zur Anatomie der Nemato-
den (Miiller’s Arch., 1855, p. 344). ‘4
2) P. J. van Beneden, Les Helminthes, Cestoides, elc. (Bull. Acad. Belg.,
vol. XVI et suiv..; Mém. Acad. Brux., 1850, vol. XVII et suiv.). — Sur les
Cœnures (Compt. rend, 1854, vol. XXXIX, p. 46). — A. Külliker, Beis
lriige, etc., op. cit., p. 81. — C. Th. E. von Siebold, Ueber den Generations-
wechsel der Cestoden, etc. (Zeitschr. wiss. Zool., 1850, vol. Il, p. 198). -
Ueber die Umwandlung von Blasenwiirmer in Bandwiirmer (Uebers. d. Arb.
und Ver. d. schles. Ges. f. vaterl. Kultur, 1852, p. 48). — Ueber die Ver-
i
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 123
observe chez les Trématodes les phénomènes de génération
lternante les plus compliqués ; mais, comme aucune espèce
ncore n’a été suivie à travers toutes les phases successives
ses transformations, il reste des doutes sur l’enchaine-
nent génésique de quelques-unes des formes qui paraissent
aire partie du même cycle organique (1). C’est, de même,
une question de savoir si les Grégarines et les Psorosper-
mies sont ou non des formes embryonnaires, quoique des
;
bandiung des Cysticercus pisiformis in Tenia serrata (Zettschr. f. wiss. Zool.,
1853, vol. IV, p. 400). — Ueber die Verwandlung der Echinococcus-Brut in
Tenien (ibid., 1853, p. 409). — Ueber die Band und Blasenwiirmer, nebst
siner Hinleitung über die Entstehung der Eingeweidewürmer. Leipzig, 1854,
n-8, fig. (traduit dans les Ann. sc. nat., 4° sér., 1855, vol. IV). — Th. H.
Huxley, On the Anatomy and Development of Echinococcus veterinorum (Ann.
and Mag. Nat. Hlist., 2° sér., vol. XIV, p. 379). — Fr. Kiicheinmeister,
leber die Umwandlung der Finnen (Cysticerci) in Bandwiirmer (læniæ)
(Prag. Vierteljahrsschr., 1852, p. 106). — Extrait d'une letire sur des eapé-
riences relatives à la transmission des Vers intestinaux chez l'espèce humaine
Ann, sc. nat., 4° sér., 1855, vol. III). — Cas de transformation de Cysti-
cerques cellulaires en Tenia solium dans l'organisme humain (Compt. rend.,
1854, vol. 39, p. 1180). — R. G. Wagener, Die Entwickelung der Cestoden.
Bonn, 1855, 4 vol. in-4, fig. — Helminthologische Bemerkungen (Zeitschr, f.
wiss. Zool., 1857, vol. IX, p. 73). — G. Meissner, Zur Entwickelungsges-
ehichie und Anatomie der Bandwiirmer (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1854, vol. V,
p. 380). — R. Leuckart, Erziehung des Cysticercus fasciolaris aus den Hiern
de; Tenia crassicollis (Zeitschr f. wiss. Zool., 1854, vol. VI, p. 439). —
Milne Edwards, Nouvelles expériences sur la transmission et les métamor-
bhoses de Vers intestinaux, et A. Valenciennes, Remarques au sujet de la
précédente communication (Compt. rend., 1855, vol. XL, p. 997). — Lettre
relative à de nouvelles expériences sur le développement des Vers intestinaux,
(Ann, sc. nat., 4° sér., 1855, vol. II). — Die Blasenbandwiirmer und ihre
Entwickelung (Zeitschr. im Beitrag. zur Kenntniss der Cysticercus leber.)
Giessen, 1856, in-4. — H. Aubert, Ueber Gryporhynchus pusillus, eine freie
Cestoden Amme (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1856, vol. VIII, p. 274).
| (1) AL von Nordmann, Micrographische Beitrüge zur Naturgeschischte der
wirbellosen Thiere. Berlin, 1832, in-4, fig. — L. Bojanus, Zerkarien und thr
Fundort (Isis, 1818, vol. IV, p. 729). — Enthelminthica (Isis, 1821, p. 162).
— Carus, Beobachtungen über einen merkwiirdigen Eingeweidewurm, Leuco-
ehioridium paradoxum (Nova Acta Acad. nat. cur., vol. XVII, p. 85). —
€. Th. E. von Siebold, Helminthologische Beitrage (Wiegman’s Arch., 1835,
vol. I, p. 45). —Ueber die Conjugation des Diplozoon paradoxum, etc. (Zeitschr.
f, wiss. Zool., 1851, vol. Ill, p. 62). — Gyrodactylus, ein ammendes Wesen
Zuüschr. f. wiss. Zool., 1849, vol. 1, p. 347). — J. Steenstrup, Generations-
Wechsel, etc., op. cit, —Th, Bilharz, Ein Beitrag sur Helminthographia humana
Zeitschr. f. wiss. Zool., 1852, vol. IV, p. 59). -- L. Agassiz, Zoological
Notes, etc. (Amer. Journ. Sc. and Arts, 1852, vol. XIII, p. 425). —K.E. von
baer, Beitrüge zur Kenntniss der niederen Thiere (Nova Acta nat. cur., 1827,
j. XIN). — H, Auber, Ueber das Wassergefass-system, die Geschlechisverhil-
42h DE L’ESPECE.
recherches récentes rendent probable l’affirmative (1). Le
développement des Annélides, tels qu’on les circonscrit de
nos jours, présente une grande variété (2). Quelques-uns,
dans leurs métamorphoses, ressemblent davantage aux Né-
matoïdes ; d’autres, au contraire, les Sangsues par exemple,
se rapprochent plus du type des Trématodes. Les Siponcu-
nisse, die Eibildung und die Entwickelung von Aspidogaster conchicola
(Zeitschrf.wiss. Zool., 1855, vol. VI, p. 349). — Jos. Leidy, Description of two
new Species of Distoma, with the partial History of one of them (Journ. Acad,
Nat. Sc. Phil., 1850, vol. I, p. 304, fig.). — A. de Lavalette, Symbolæ ad
Trematodum evolutionis historiam ‘(diss. inaug.) Berolini, 1855, in-4. —
Th. de Philippi, Mémoire pour servir à l’histoire génétique des Trématode ;
(Ann. sc. nat., 4° sér., 1854, vol. Il). — Quelques nouvelles observations
sur les larves des Trématodes (Ann. sc. nat., 4° sér., 1856, vol, VI), —
Ed. Claparéde, Ueber die Kalkkérperchen der Trematoden und die Gattung
Tetracotyle ( Zeitschr. f. wiss. Zool., 1857, vol. IX, p. 99).
(1) J. Müller, Ueber eine eigenthiimliche ‘krankhafte parasilische Bildung,
etc. (Miiller’s Arch, ., 1841, p. 477). — Ueber parasitische Bildungen, ete.
(Müller’s Arch., 1842, p. 193). — L. Dufeur, Note sur la Grégarine, etc.
(Ann. sc. nat, 1828, vol. XIII, p. 366, fig. ; — ibid., 2° sér., 1837, vol. Vil,
p. 10). — C. Th.#Ed. von Siebold, Beitrüge, etc., op. cil., 56-71. — C. Ed.
Hammerschmidt, Helminthologische Beiträge(lIsis,1838, p. 351). — À. Külliker,
Die Lehre von der thierischen Zelle, etc. (Zeitschr. wiss. Botanik, 1845, vol. 1,
p. 46 et 97). — Beitriige zur Kenntniss niederer Thiere (Zeitschr. f. wiss.
Zool., 14848, vol. I, p.1).—J. Henle (Ueber die Galtung Gregarina (Miiller’s
Arch., 1845, p. 369). — Al. v. Frantzius, Observationes quædam de Grega-
rinis. Berolini, 1846. — F. Stein, Ueber die Natur der Gregarinen (Miiller’s
Arch., 1848, p. 182, fig.). — C. Bruch, Einige Bemerkungen über die Gre-
garinen (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1850, vol. Il, p. 110). — F. Leydig, Ueber
Psorospermien und Gregarinen (Miiller’s Arch., 1851, p. 221).—Jos. Leidy,
On the Organization of the genus Gregarina (Trans. Amer. Phil. Soc., 1854,
vol. X, p. 233), — Some Observations on Nematoidea imperfecta and Descrip-
tions of three parasitic Infusoria (Trans. Amer. Phil. Soc., 1854, vol. X,
p. 241). — N. Lieberkühn Ueber die Psorospermien (Miiller’s Arch., 1854,
p. 4). — A. Schmidt, Beitrag zur Kenntniss der Gregarinen (Abh. Leuk,
Gesell., 1854). — Ueber parasitische Schliiuche auf einigen Insektenlarven
(Miiller’s Arch., 1856, p. 494. — Cump., note 1, p. 122).
(2) E. H. Weber, Ueber die Entwickelung von Hirudo medicinalis (Meckel’s
Arch., 1828, p. 366, fig.). — Fil. de Filippi, Sopra l’anatomia e lo sviluppo
delle Clepsine. Pavia, 1839, in-8, fig. — J. Loven, Beobachtungen über die
Metamorphose einer Annelide (K. Vet. Akad. Handl., 1840; — Wiegmann’s
Arch., 1842, vol. I, p. 302). — A. S. Oersted, Ueber die Entwickelung der
Jungen bei einer Annelide, etc. (Wiegmann’s Arch., 1845, vol. I, p. 20). —
M. Sars, Zur Entwickelung der Anneliden (Wiegmann’s Arch., 1845, vol. I,
p. 11). — A. Menge, Zur Roth- Wiirmer Gattung Euaxes (Wiegmann’s Arch.,
1845, vol. 1, p. 24). — A. E, Grube, Zur Anafomie und Entwickelung der
Kiemenwiirmer. Künigsberg,. 1838, in-4. — Actinien, Echinodermen und
Wiirmer, ete. Künigsberg, 1843, in-4, fig. — Untersuchungen über die
Entwickelung der Clepsine. Dorpat, 1844. — H, Milne Edwards, Observations
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 425
loides montrent des rapports bien plus étroits avec les Anné-
lides qu’avec les Holothuries (1).
_ La classe des Crustacés, au contraire de la précédente,
peut être regardée comme une des mieux connues, pour ce
qui est de ses caractères zoologiques et de l’évolution em-
bryonnaire. Le seul point qui soit encore en question, c’est
s’il faut y rattacher les Rotifères (2). Dans leur mode de dé-
sur le développement des Annélides (Ann. sc. nat., 3° sér., 1845, vol. Il,
p. 145). — H. Koch, Einige Worte zur Entwickelungsgeschichte der Eunice,
mit einem Nachworte von Külliker (N. Denkschr. Schw. Gesell., 1847, vol. VIII,
in-4, fig.). — A. de Quatrefages, Mémoire sur Vembryogénie des Annélides
(Annales sc. nat., 3° sér., 1848, vol. X, p. 153, fig.). — E. Desor, On the
Embryology, etc., déjà cité. — Jos. Leidy, Descriptions of some American
Annelida abranchia (Journ. Acad. Nat. Sc. Phil., 1850, vol. Il, p. 43, fig.).
Le Lumbricillus contenait plusieurs milliers de gros Leucophrys. — Le cas
rapporté par Leidy me semble indiquer l’éclosion d’Opalina sortant des ceufs ~
des Lumbricillus, plutôt que la présence de Leucophrys parasites. — M. Schultze,
Ueber die Fortpflanzung durch Theilung bei Nais proboscidea (Wiegmann’s
Arch., 1849, vol. 1, p. 293 ; — ibid, , 1852, vol. 1, p. 3). — Zoologische Skizzen,
Arenicola piscatorum (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1852, vol. IV, p. 192). — Abh.
nat. Gesellsch. zu Halle, vol. IV. — W. Busch, Beob. über Anat. und Eniw.,
déjà cité p. 55. — M. Müller, Observationes analomicæ de Vermibus quibusdam
maritimis. Berlin, 4852, in-4 (Miiller’s Arch., 1855, p. 523). — Ueber die
weitere Entwickelung von Mesotrocha sexoculata (Miiller’s Arch., 1855, p. 1).
—- Ueber Sacconereis helgolandica (Miiller’s Arch., 1855, p. 13). —A. Krohn,
Ueber die Erscheinungen bei der Foripflanzung von Syllis (Wiegmann’s
Arch., 1852, vol. I, p. 66). — Ueber die Sprüsslinge von Autolytus prolifer,
Gr. (Miiller’s Arch., 1855, p. 489). — R. Leuckart, Ueber die wngeschlecht-
liche Vermehrung bei Nais proboscidea (Wiegmann’s Arch., 1851, p. 134).
—- Ueber die Jugendzustiinde einiger Anneliden (Wiegmann’s Arch., 1855,
vol. I, p. 63). — A. de Quatrefages, Mémoire sur la génération allernante
des syllis (Ann. sc. nat., 4° sér., 1854, vol. Il). — Note sur le développement
des spermatozoïdes chez la Torrea vitrea (Ann. sc. nat., 4° sér., 1854, vol. II).
— Ew. Hering, Zur Anatomie und Physiologie der Generations-organe des
Regenswurms (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1856, vol. VIII, p. 400). — Ph. H.
Gosse, Tenby, déjà cité. —J. d’Udekem, Nouvelle classification des Annélides
Sétigènes abranches (Bull. Acad. Brua., 1855, vol. Il, p. 533).
(1) W. Peters, Ueber die Fortpflanzungsorgane des Sipunculus (Miiller’s
Arch., 1850, p. 382). — M. Müller, Veber eine den Sipuneuliden verwandte
Wurmlarve (Miiller’s Arch., 1850, p. 439). — A. Krohn, Ueber die Larve des
Sipunculus nudus, etc. (Miiller’s Arch., 1851, p. 368), — L. Schmarda, Zur
Naturgeschichte der Adria Bonellia viridis (Denkschr. Wien. Akad., 1852,
vol. IV, p. 117, fig.).
(2) €,J. Ehrenberg, Die Infusionsthierchen, etc., déjà cité. — J. Dalrymple,
Description of an Infusory Animalcule allied to the genus Notomma (Philos.
Trans., 1844, t. 1, p. 331). — H. Naegeli, Beitriige zur Entwickelungs-
geschichte der Rüäderthiere (dissert, inaug.). Zurich, 1852, in-8, fig. —
Fr. Leidig, Ueber den Bau und die systematische Stellung der Räderihiere
(Zeitschr. f. wiss. Zool., 1854, vol. VJ,p.1).—Zur Anatomie und Entwickelungs-
426 DE L’ESPECE.
veloppement, les Lernéens, les Entomostracés propres et les
Cirripédes sont les uns avec les autres en pleine confor-
mité, tandis qu’ils différent des Crustacés supérieurs. Cette
conformité (4) est un fait du plus haut intérêt, car la situa-
tion inférieure qu’occupent les Entomostracés, dans la classe
des Crustacés, est en concordance remarquable avec !’an-
tériorité de leur apparition dans les temps géologiques. Au
contraire, la forme des Cirripèdes adultes (2) et celle des
geschichte der Lacinularia socialis (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1852, vol. III, p. 452).
— Ueber Hydatina scata (Miiller’s Arch., 1857, p. 404). — F, Cohn, Ueber
die Fortpflanzung der Riiderthiere (Zeitschr. f. wiss, Zool., 1855, vol. VU,
p. 431).— Th. H. Huxley, Lacinularia socialis (Trans. M. Soc., Micr. Journ,,
1852, p. 12). — W. C. Williamson, On the Anatomy of Medicerta ringens
(Quart. Micr. Journ., 4852, p. 1). — H. Burmeister, Noch einige Worte über
die systematische Stellung der Rüderthiere (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1856,
vol. VIII, p. 452). — Th. H. Gosse, On the Structure, Functions and Homo- 7
logies of the manducatory Organs in the class Rotifera (Phil. Trans. Roy. Se,
London, 1856, t. II, p. 419).
(1) L. Jurine, Histoire des Monocles qui se trouvent aux environs de
Genève. Paris, 1806, in-4, fig. — H. Milne Edwards, dans Cuvier, Règne animal,
édition illustrée, CRUSTACÉS, figure du jeune Limulus. — E. G. Zaddach, De
Apodis cancriformis anatomia et historia evolutionis. Bonn, 4841, in-4, fig.
— Al. von Nordmann, Microgr. Beitr., déjà cité. — Fr. Leydig, Ueber Argu-
lus foliaceus, ein Beitrag zur Anbütônte., Histologie und Eniwichelungs-
geschichte dieses Thieres (Zeitschr. f. wiss. Zool,, 1850, vol. IE, p. 323). —
Ueber Artemia salina und Branchipus stagnalis (Zeitschr. i. wiss. Zool., 1854,
vol. II, p. 280). — P. J. Van Beneden, Recherches sur quelques Crustacés
inférieurs (Ann. sc. nat,, 3° sér., 1854, vol. XVI, p. 71). — Mémoire sur le
développement et l’organisation des Nicothoés (Ann. sc. nat., 3° sér., vol. XIII,
p. 354). — C. Gegenbauer, Ueber die Entwickelung der Sagitta (Abh. d. na-
turf. Gesells. zu Halle, 1856, in-4, vol. IV, p. 1). — A. Krohn, Anatomisch-
physiologische Beobachtungen über die Sagitta copunctata. Hambourg, 1844.
— Nachtragliche Bemerkungen, etc. (Miiller’s Arch., 1853, p. 266). —
Wilms, Observationes de Sagitta mare Germanicum circa insulam Helgoland
incolente. Berlin, 1846.— Th. H. Huxley, Observations on the genus Sagitta
(Rep. Brit. Ass., 4854, p. 77).— Ch. Darwin, Observations on the Structure and
Propagation of the genus Sagitta (Ann. and. Mag. Nat. Hist., 1844, vol. XUI,
p. 41). W. Busch, Beobachtungen, — déjà cité. — J. Barrande, Syst. sil., déjà
cité (contient les premières observations sur les transformations des Trilobites).
(2) W. V. Thompson, Zoological Researches and illustrations, or Natural
History of nondescript or imperfectly known Animals. Cork, 1828-34, in-8,
fig. — H. Burmeister, Beiträge zur Naturgeschichte der Rankenfiisser (Cir-
ripèdes). Berlin, 4834, 4 vol. in-4, fig. — J. Coldstream, art. CIRROPODA, in
Todd’s Cyclopedia. Londres, 1836, vol. I, p. 683. — H. D. S, Goodsir, On
the Sexes, Organs of Reproduction, and Development of Cirripeds (Edinb. new
Phil. Journ, 1843, No. 35, p. 88, fig.).—G.J. Martin Saint-Ange, Mémoire sur
Vorganisation des Cirripédes et sur leurs rapports naturels avec les animaua
articulés (Ann. sc. nat., 1834, p. 366, fig.). — Ch. Darwin, À Monograph 0]
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 127
Lernéens ne permettraient guére de soupconner leur proche
jarenté. Celle-ci a d’ailleurs été méconnue jusqu’à ce que
’embryologie eût révélé la véritable place de ces animaux
parmi les Crustacés. Le rang plus élevé des Crustacés supé-
ieurs (1) se manifeste pleinement dans leur développement;
st peu de types, dans leurs premières phases, montrent plus
jue les Brachyures une ressemblance directe avec les mem-
bres inférieurs de la classe.
Dans la classe des Insectes, je comprends les Myriopodes,
es Arachnoides et les vrais Insectes; car, suivant les vues
xprimées plus haut, ces groupes naturels ne sont que la
même combinaison de systèmes organiques, à des degrés di-
vers de complication. Ils doivent, par conséquent, être consi-
lérés comme les ordres naturels d’une seule et même classe.
Quoique parfaitement étudiée au point de vue zoologique et
anatomique, ainsi qu’à celui des mœurs de ses représentants,
cette classe a besoin d’être encore beaucoup et patiem-
ment observée. L'évolution embryonnaire y est en effet bien
moins connue que les métamorphoses ultérieures (2). Le
the sub class Cirripedia, with Figures of all the Species. Londres, 4854,
2 vol. in-8 (Ray Society). — Spence Bate, On the Development of the Cir-
ripedia (Ann. and Mag. Nat. Hist., 2° sér., vol. VIII, p. 324). — Th. H. Gosse,
Tenby, déjà cité.
(1) H. Rathke, Untersuchungen über die Bildung und Entwickelung des
Flusskrebses. Leipzig, 1829, 4 vol. in-fol., fig. — Beitrage zur Fauna Nor-
veyica (Nova Acta Acad, Leop. Cæs., vol. XX). — Beitriige zur vergleichenden
Anatomie und Physiologie, Reisebemerkungen aus Skandinavien, Dantzig ,1842,
in-4. — Zur Morphologie, Reisebemerkungen aus Tawrien, Riga et Leipzig,
1837, in-4, fig. — Ueber die Entwickelung der Decapoden (Miiller’s Arch.,
1836, p. 4187; Wiegmann’s Arch., 1840, t. 1, p. 241). — Beobachiungen
und Belrachtungen über die Entwickelung der Mysis vulgaris (Wiegmann’s
Arch., 1839, p. 195, fig.). — M. P. Erdl, Entwickelung des Hummereies.
Munich, 1843, in-4, fig. — H. Milne Edwards, Sur la génération des Crustacés
Ann. sc. nat., 1829). — Observations sur les changements de forme que
ivers Crustacés éprouvent dans le jeune âge (Ann. sc. nat., 2° sér., vol. IH,
p. 321). — L. Agassiz, Zoological Noles, etc. (Amer. Journ, Sc. and Arts,
4852, p. 426). — Recent Researches, etc. (Amer. Journ. Sc. and Arts, 1852,
vol, XVI, p. 136). — Sp. Bate, On the British Edriophihalma (Report hrit.
Assoc., 1855, p. 18). —Lereboullet, Résumé, etc. (Ann. sc. nat., 4° sér., 1854,
vol. 1. — Th. Grosse, Tenby, déja cité.
» (2) M. Herold, Entwickelungsgeschichte der Schmetterlinge, etc. Cassel et
Marbourg, 1815, in-4, fig. — Disquisitiones de animalium verlebris carentium
in ovo formatione. Francfort.s.-M., 1835, in-fol., fig.). — H. Rathke, Entwicke-
A
198 DE L’ESPECE.
type des Arachnoïdes comprend deux groupes : celui
Acares et celui des Arachnoïdes propres, qui, dans leur classe
correspondent respectivement aux Entomostracés et aux
Crustacés supérieurs. L’embryon des Acares ressemble ur
peu à celui des Entomostracés, tandis que celui des vraies
Araignées (1) rappelle la métamorphose des Crustacés supé:
lungsgeschichte der Blatta germanica (Meckel’s Arch,, 1832). — Zur Entwick
lungsgeschichte der Maulwurfsgrille (Gryllotalpa vulgaris) (Miiller’s Arch.,
4844, p. 27). — A. Külliker, Observationes de prima Insectorum genesi
Zurich, 1842, in-4, fig. — G. Zaddach, Die Eniwickelung des Phryganide:
Eies. Berlin, 1854,.4 vol. in-4. — R. Leuckart, Ueber die Micropyle und den
feinern Bau der Schalenhaut bei den Insekteneiern (Miiller’s Arch., 1855
p. 90). —G. Newport, On the Organs of Reproduction and the Developmen
of Myriapoda (Phil. Trans. R. Soc., 1842, t. Il, p. 99). — On the Anat
and Development of Meloe (Ann. and Mag. Nat. Hist., 1848, vol. I, p. 377;
vol. Il, p. 145). — Fr. Stein, Vergleichende Anatomie und Physiologie der
Insecten ; Iste Monogr., Die weiblichen Geschlechtsorgane der Kafer. Berlin,
1847, in-fol., fig.). — C. Th. E, von Siebold, Ueber die Fortpflanzung von
Psyche (Zeitschr. f. wiss. Zool., 4848, vol, I, p. 93). — Wahre Partheno-
genesis bei Schmellerlingen und "Bienen (Ein Beitrag zur Fortpflanzungsges-
chichte der Thiere). Leipzig, 1856, in-8; voy. aussi Ann. sc. nat., 4° sér.,
1856, vol. VI). — Fr. Leydig, Einige Bemerkungen über die Entwickelung
der Blatilüuse (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1850, vol. II, p. 62). — H. Meyer,
Ueber die Entwickelung des Fettkorpers, der Tracheen und der keimbereitenden
Geschlechtstheile bei den Lepidopleren (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1849, vol. I). —
W, I. Burnett Researches on the Development of viviparous Aphides (Amer.
Journ. Sc. and Arts, 1854, vol. XVII, p. 62 et 261). — Fabre, Recherche:
sur Vanalomie des organes reproducteurs et sur le développement des Myria-
podes (Ann. sc. nat., 4° sér., 1855, vol. Ill). — Étude sur Vinstinct et le:
métamorphoses des Sphégiens (Ann. se. nat., 4° sér., 1856, vol. VI). —
Henry de Saussure, Nouvelles Considérations sur la nidification des Guépe:
(Ann. sc. nat., 4° sér. , 1855, vol. II). — C. Semper, Ueber die Bildung de
Fliigel, Schuppen und Haare bei den Lepidopteren (Zeitschr, f. wiss. Zool.,
1856, vol. VIII, p. 326). — R. Leuckart, Die Fortpflanzung und Entwicke-
lung der Pupiparen (Abh. d. naturf. Gesellsch. su Halle, 1858, vol. IV, p. 145).
Voyez, pour les métamorphoses des Insectes après l’éclosion de la larve, les
travaux de Réaumur et de Reesel, et les traités généraux d’entomologie. Les
métamorphoses des Insectes des États-Unis sont minutieusement décrites
dans Harris’s Report, cité précédemment.
(1) M. Herold, De generatione Aranearum in ovo. Marburgi, 1824, in-fol.
fig. — H. Rathke, Ueber die Entwickelung des Scorpions (Zur Morphologie,
déjà cité), — P. J. van Beneden, Recherches sur l’histoire naturelle et le
développement de VAtax ypsilophora (Mém. Acad. Brux., 1850, vol. XXIV,
p. 444). — W. H. von Wittich, Observationes quedam de "Aranearum ex Ove
evolutione (diss. inaug.). Hale Saxonum, 1845. — Die Entstehung des Arach:
nideneies im Kierstock (Miiller’s Arch., 1849, p. 113). —J. V. Carus, Ueber
die Entwickelung des Spinneneies (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1850, vol. IL.
p. 97). — F. Dujardin, Mémoire sur des Acariens sans bouche, dont on ¢
fait le genre Hypopus, et qui sont le premier âge des Gamases (Ann, sc. nat.
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 429:
leurs. En se fondant sur cette analogie des jeunes, on a:
erniérement rapporté au groupe des Arachnoides quelques
nimaux qu’on considérait autrefois comme des Vers (1) ;
sais la limite entre les Mites aquatiques et les Pyenogonming
’a pas encore été bien définie, |
Toutes les classes de l’embranchement des Vertébrés ont
té largement étudiées, et, en ce qui concerne les types prin-
ipaux, les particularités générales du développement sont
ssez bien connues. Il reste encore beaucoup à faire, cepen-
ant, pour déterminer les moindres modifications qui puis-
ent caractériser des familles différentes. Il pourrait même
rriver que des investigations ultérieures modifiassent gran-
lement la classification générale de tout cet embranchement.
‘a classe des Poissons @) PEUX exiger une subdivision, car
849, vol. XII, p. 243 et 259). — E, Blanchard, Observations relatives à la
énération des Arachnides (Comples rendus, 1857, vol. XLIV, p. 741). —
; Scheuter, Einiges über Milben (Arch. f. Naturg. :4857, vol. I, p. 104).
(£) Jos. Kaufmann, Ueber die Entwickelung und zoologische Stellung der
l'ardigraden (Zeitschr.. f. wisss. Zool., 1851, vol. II, p. 220), — P, J. van
seneden, Recherches sur Porganisation et le développement des Linguatules
Pentastoma) (Mém. Acad. Brux., vol. XY, I, p..188). — T. D. Schubert,
Jeber Entwiekelung von Pentastomum tænioïdes (Zeilschr. f. wiss. Zool.,
852, vol. Il, p. 117). — E. Wilson, Researches into the Structure and Deve-
opment of a newly discovered Parasitic Animalcule of the Human Skin (Phil.
(rans. R. Soc. 1844, p. 305). — C. Semper, Zur Anatomie und Entwicke-
“Aider der Galtung Myzostoma (Zeitschr. [. wiss. Zool., 1857, vols
, D. 48).
- {2) G. Forchammer, De Blennii vivipari formatione et evolutione observa-
tones. Kiel, 1819, in-4. — J. L. Prévost, De la génération chez le Séchot
Cottus Gobio) (Mém. Soc. Phys. et Hist. Nat. Genève, vol. IV, 1828, in-4),—
. Rathke, Beiträge zur Geschichte der Thierwelt. Halle, 1820- 27, A vol.
fo, fig. — Abhandlungen zur Bildungs und Eniwickelungsgeschichte des
enschen und der Thiere. Leipzig, 1832-33, 2 vol. in-4, fig. — Ueber das
i einiger Lachsarten (Meckel. Archiv., 1832, p. 392). — K. E. v. Baer,
Untersuchungen über die Entwickelungsgeschichle der Fische. Leipzig, 1835,
-4.— Entw. der Thiere, déjà cité, vol. IE, — J. Davy, On the development
f the Torpedo (Philos. Trans. R. Soc., 1834). — Some observations on the
on the Salmon, in relation to the distribution of species (Trans. Roy. Soc,
ndon, 1856, I, p. 24). — Fil. de Filippi, Memoria sullo sviluppo del Gobius
luviatilis (Annal. medic., Milano, 1841, in-8, fig.). — M. Rusconi, Sopra
| fecondatione artificiale nei pesci (Giorn. delle sc. med,-chir, Pavia, vel, IX),
— Lettre! sur les changements que les œufs de Poissons éprouvent avant
qu'ils aient pris la forme d’embryon (Ann. sc, nat., 2° série, vol. V. —
1. Agassiz, Histoire naturelle des Poissons d’eau douce de l’Europe centrale,
. I. Embryologie des Salmonés, par C. Vogt. Neuchatel, 1842, in-8, atlas,
AGASSIZ, 9
430 DE L’ESPECE.
le développement des Plagiostomes différe grandement il
celui des poissons ordinaires; la différence qui distingu
les Ganoïdes de ces derniers me paraît être aussi d'un
ordre supérieur à celui qu’on lui a assigné jusqu’à présent.
Telle qu’elle est établie aujourd’hui dans nos systèmes,
la classe des Poissons est certainement la plus hétérogène
de tout l’embranchement. Les divergences des auteurs, quant
aux limites et à la valeur respective des ordres et des fa-
milles de cette classe, peuvent être attribuées, en partie, à ce
que la classe elle-même n'est pas naturellement circon-
in-fol. Ces recherches ayant été faites sous ma direction et ma surveillance,
comparez la préface de cet ouvrage avec la lettre publiée dans Zeitschr. f. wiss.
Zool., 1855, vol. VII, p. 328.— J. Müller, Ueber den glatten Hai des Arist
teles, und über die Verschiedenheiten unter den Haifischen und Rochen in da
Entwickelung des Eies. Berlin, 1842, in-fol., fig. —F.S, Leuckart, Untersuch-
ungen über die üussern Kiemen der Embryonen von Rochen und Haien.
Stuttgard, 1836, in-8, fig. — Fr, Leydig, Beitriige zur microscopischen Ana-
tomie und Entwickelungsgeschichte der Rochen und Haie. Leipzig, 1852
4 vol. in-8, fig.—C, G. Carus, Erliiuterungstafeln, etc., n° 3. Leipzig, 1834,
in-fol., fig.—J. Shaw, Account of some Experiments and Observations on the
Parr, etc. (Edinb. New Phil. Journ., vol. XXI, p. 99). — On the tra
ment and Growth of the Fry of the Salmon, etc., ibid., vol. XXIV, p. 165.
(Ann. Nat. Hist., 1, p. 75, et IV, p. 352.) — W. Yarrel, Growth of t
Salmon in Fresh Water (Ann. and Mag. Nat. Hist., IV, p. 334).—-G. L. Du-
vernoy, Observations pour servir à la connaissance du développement de la
Pécilie de Surinam (Ann. sc. nat., 1844, 3° sér., L., p. 343, fig.).—P. Coste,
Histoire générale et particulière du développement des corps organisés. Paris
4847-53, in-4., atl., 2° fasc., ÉPINOCRE. — Arm. de Quatrefages, Mémoir
sur les Embryons des Syngnathes (Ann. sc. nat., 2° sér., vol. XVIN, p. 193,
fig.). — Sur le développement embryonnaire des Blennies, etc. ic les
rendus, vol. XVII, p. 32). — A. Valenciennes, Anableps in Cuvier et Vale -
ciennes, Histoire naturelle des Poissons. Paris, 1846, vol. XVIII, p. 245. —
J. Wyman, Observations on the Development of Anableps Gronovii (Journ.
Bost. Nat. Hist., 1854, vol. VI, fig.).— On some peculiar modes of gestation
observed in certain animals of Guiana (Proc. Bost. Nat. Hist., 1857).
L. Agassiz, Extraordinary Fishes from California, constituting a new fami
(Amer. Journ. Sc. and 4., 1853, vol. XVI,p. 380).—Embryology of Lophi
Americanus (Proc. Am. Ac. 1855). — A. Lereboullet, Recherches sur V Ana-
tomie des organes génitaux des animaux vertébrés (N. Act. Ac. Nat. Cur.
vol. XXIII, p. 1). — Résumé d’un travail d’embryologie comparée sur le déve-
loppement du Brochet, de la Perche et de V’ Ecrevisse (Ann. sc. nat., 4° sér.
4854, vol. 1), —H. Aubert, Beitriige sur Entwickelungsgeschichte der Fisc
(Zeitschr. f. wiss. Zool., 1853, vol. V, p. 94, 1855, vol VII).— G. Valentin,
Zur Entwickelungsgeschichte der Fische (Zettschr. f. wiss. Zool, , 1850, vol. If
p. 267). — R. Leuckart, Ueber die allmahlige Bildung der Korpergestal
bei den Rochen (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1850, vol. 11, p. 258). — E, Haeckel
Ueber die Eier der Scomberesoces (Miiller’s Arch., 1855, p. 23), — A. Retzius
_ METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 134
crite (1). Depuis quelques années, je m’occupe d’une ma-
iére suivie des métamorphoses dés poissons, en vue de pré-
iser leurs affinités, et déjà j'ai recueilli sur ce sujet une
iasse considérable de faits. Mais , comme je ne les ai point
hcore pubties, je me borne ici 4 à mentionner un résultal
énéral : c’est que, comme certains Batraciens, les poissons
sseux subissent des métamorphoses très-considérables. Non-
eulement la forme et la disposition des nageoires se modi-
ent, mais aussi la forme générale du corps ét la Configuration
u crâne et des mâchoires, sans parler des transformations
es organes intérieurs. Quant aux Reptiles, il est dorénavant
értain que les Amphibies et les Reptiles propres, si long-
éber den grossen Fettropfen in den Eiern der Fische (Miiller’s A reh., 1855,
: 34), — C. Bruch, Ueber die Micropyle der Fische (Zeitschr. f. wiss. Zool.,
855, vol. VII, p. 479). —K. B. Reichert, Ueber die Micropyle der Fisch-
ele, (Miiller’s Arch., 1856, p. 83).— Ueber die Miiller-Wolffschen Kor :
er bei Fischembryonen, ele. (Miiller’s Arch., 1856, p. 125). — Der Narh-
ngsdolter des Hechleies eine contractile Substanz (Müller's Arch., 1857,
.46).—B. Dowler, Discovery of a Viviparous Fish in Louisiana ( Amer. Journ.
6. and Arts, 1855, vol. XIX, p. 133, remarques de L. Agassiz, p. 136). —
|. Schultze, Note sur le développement des Pétromyzons (Comptes rendus,
856, p. 336, Ann. and Mag. Nat. Hist, 2° sér., 1856, vol. XVII, p. 443).
=A, "Müller, Ueber die Entwickelung der Neunaugen (Miller? $s Arch. 1856,
. 303 ou dans Ann, sc, nat., 4° sér., 1856, vol. V. Les faits singuliers
gnalés dans ce mémoire portent à croire que Y Amphiowus représente l’état
imitif de quelque Cyclostome marin). — Du Fossé, De l’hermaphrodisme
hez certains vertébrés (Ann. sc, nat., 4° sér,, 1856, vol, V).
(1) Ce n’est pas dans la petitesse "des œufs et dans la connexion intime
bntractée avec la mère par l’embryon de quelques-uns d’entre eux, que
onsistent les particularités principales du développement des plagiostomes ;
est bien plutôt dans le mode de développement lui-même. Malgré l’absence
amnios et d’allantoide, ce mode est, dans les premières phases, très-analogue à
lui des vrais reptiles et des poissons, surtout en ce qui concerne la formation
a système vasculaire, la présence d’un sinus terminalis, etc. De plus, ilya
atre les plagiostomes et les poissons osseux les différences anatomiques les
us sensibles, et, enfin, il faut remarquer que, chez les raies et les requins, comme
ez les vertébrés supérieurs, l'ovaire est séparé de l’oviducte et les œufs sont
isis par une large trompe de Fallope. Il est donc difficile de regarder les
lagiostumes simplement comme un ordre de la classe des poissons; c'est ce
He prouve déjà le fait qu’ils ne forment point avec les autres espèces de cette
asse une série naturelle. Je propose, par conséquent, le nom de SÉLACIENS
ur une nouvelle classe distincte qui comprendra les Requins, les Raies et les
himéres. Des investigations récentes sur les cyclostomes montrent qu'eux aussi
fférent considérablement des poissons proprement dits et devraient en être
parés, comme formant une classe à part à laquelle conviendrait fort bien le
ym de MYZONTES,
432 DE L "ESPÈCE,
temps réunis en une classe unique, constituent positivement n
deux classes distinctes. Essentiellement, l’évolution des Rep
tiles vrais est en étroite conformité avec celle des Oiseaux ‘ly )
tandis que l’évolution des Amphibies ressemble davantage
celle des Poissons proprement dits (2). Dans aucune classe
des recherches embryologiques s’étendant 4 une certain
variété de familles ne sont plus nécessaires que dans la cha
(1) G. W. Volkmann, De Colubris natricis generatione. Lipsiæ, 1834, in-
—H. Rathke, Entwickelungsgeschichte der Natter (Coluber natrix), ane
4839, in-4, fig. — Untersuchungen über die Aortenwurfeln (Denkschr. Al
Wiss. Wien, 1857, vol. XIII). — D. Weinland, Ueber den Eizahn der Ri
matter (Wurt. Nat. Hist. Jahreshefte, 1855). — F. Tiedmann, Ueber dat}
und den Foetus der Schildkréte. Heidelberg, 1828, in-4, fig. —K. E. v. Baet
Beitriige zur Entwickelungsgeschichte der Schildkroten (Muller’s Archiv,
4834, p. 544). — H. Rathke, Ueber die Entwickelung der Schildkroter
Brunswick, 1848, in-4, fig.
(2) A. J. Rosel v. Rosenhof, Historia naturalis Ranarum nostratium, e à
Norimb., 1758, in-fol., fig. — A. F. Funk, De Salamandre terrestris vi
evolutione, formatione, etc. Berlin, 1826, in-fol. fig. — H. Rathke, Diss. de S
lamandrarum corporibus adiposis eorumque evolutione. Berlin, 1818.— Ueb
die Entstehung und Entwickelung der Geschlechistheile bei den Urodelen (À
Schr.Dantz Naturf. Ges.,1820).—L. Steinheim, Die Entwickelung der Frosch
Hambourg, 1820, in-8, fig. — J. Conr. van Hasselt, Dissert. exhibens Obse
vationes de metamorphosi guarumdam partium Rane temporariæ. Goettingy
1820, in-8. — J. L. Prévost et Lebert, Mémoire sur la formation des organ
de la circulation et du sang dans les Batraciens (Ann. sc. nat., 3° sér., vol.
p. 193). — M. Rusconi, Développement de la Grenouille commune, depuis
moment de sa naissance jusqu'à son élat parfait. Milan, 1828, in-4, fig.
Amour sdes Salamandres aquatiques et développement ds Tétard de ces Sal
mandres, etc. Milan, in-4, fig. —K. E. v. Baer, Die Metamorphose des E
der Batrachier vor ‘der Erscheinung des Embryo, etc. (Miiller’s Archi
1834, p. 481).—Entwickelungsgeschichte, etc., vol. Il, p. 280. —K. B. Re
chert, Das Entwickelungsleben im Wirbelthierreich. Berlin, 1840, in-4, fi
— Vergleichende Entwickelungsgeschichte des Kopfes der nackten Amg
bien, etc. Künigsberg, 1838, in-4, fig. — Ueber den Furchungsprocess \
Batrachier-Eier (Muller’s Archiv, 1841, p.523. —C. Vogt, Untersuchung
über die Entwickelungsgeschite der Geburshelferkrüte. Soleure, 1844, ins
fig. — Quelques observations sur Vembryologie des Batraciens (Ani. sc. |
3¢ sér., vol. II, p. 45).—R. Remak, Untersuchungen über die EntwickeW
der Wirbelthiere. Berlin, 1855, in-fol. — G. Newport, On the Impregnali
of the Ovium in the Amphibia (Philos. Trans. R. Soc. 1854, I, p. 169 ; 188
Il, p. 233; 1854, I, p. 229). — W. H. v. Wittich, Beitrtige zur morpl
logischen und histologischen Entwickelung der Harn und Geschlechtswerkzeu
der nackten Amphibien (Zeilschr. f. wiss. Zool., 1852, vol. IV, p- 195).
D. Weinland, Ueber den Beutelfrosch (Muller’s. Archiv, 1854, p. 449), -
J. Wyman, Observations on Pipa Americana(Am. Jour. Sc. and Arts, 2°s
1854, vol. XVII, p. 369). — A. Thomas, Note sur la génération du Pélod!
ponctué (Ann. sc. nat., 4° sér,, vol. I). q
j
4 MÉTAMORPHOSES DES ANIMAUX, 138
des Oiseaux, quoique l’évolution de ces animaux soit peut-
être mieux connue que celle d’aucun autre type (1). Il n’est
pas surprenant que les progrès récents de l’embryologie aient
suggéré des classifications, essentiellement basées sur I’ étude
phases du développement, dans lesquelles l’appréciation
des caractères de structure occupe une place subordonnée.
Il y a longtemps que j'ai fait remarquer comment, au point
de vue de leur développement, les Batraciens se rapprochent
des Poissons plus que des Reptiles écailleux. L'absence d’am-
nios et d’allantoide est le trait commun qui les réunit, comme
l'existence de ces enveloppes fœtales rapproche des Oiseaux les
Reptiles proprement dits. Assignant à cescaractères une valeur
classique, M. Huxley a divisé récemment le type des Vertébrés
en trois classes seulement : Mammifères, — Oiseaux et Rep-
tiles, — Batraciens et Poissons. La classe des Mammifères (2)
i (4) Chr. H. Pander, Diss. sistens historiam melamorphoseos quam ovum
incubatum prioribus quinque diebus subit. Wirceb., 1817, in-8. — Beilräge
zur Entwickelungsgeschichte des Huhnchens im Eie, Wurzb., 1817, in-fol.,
fig. — K. £. v. Baer, Entwickelungsgeschichte, etc., vol. 1, — H. Dutrochet,
Histoire de l'œuf des Oiseaux avant la ponte (Bull. Soc. philom., 1819,
p. 38). — John Hunter, Observations on Animal Development, edited, and
his Illustrations of that process in the Bird, described by R. Owen. London,
4841, in-fol., fig. — J. L. Prévost, Mémoire sur le développement du poulet
dans l'œuf (Ann. sc. nal., 1827, vol. XII,'p. 415). — J. L. Prévost et Lebert,
Mémoires sur la formation des organes de la circulation et du sang dans
l'embryon du poulet (Ann. sc. nat., 3° sér., t. I, p. 265 ; t. Il, p. 222, fig.;
t, HI, p. 96). — A. Baudrimont et G. J. Martin Saint-Ange, Recherches ana-
tomiques et physiologiques sur le développement du foetus. Paris, 1850, in-4.
—H. Meckel v. Hemsbach, Die Bildung der für partielle Furchung bestimmten
Kier der Vogel, etc. (Zeitschr. f. wiss. Zool., 1855, vol. Ill, p. 420). —
C. Dareste, Mémoire sur Vinfluence qu'exerce sur le développement du poulet
Vapplication partielle d'un vernis sur la coquille de l'œuf (Ann. sc. nat.,
Ke sér., 1855, vol. IV). — D. Weinland, On the Armature of the Lower Bill
of the Hatching Tringa Pusilla, Wils. (Proceed. Essex Institute, Salem, vol. 1},
p- 33). — H. Hoyer, Ueber die Eifollikel der Vügel (Muller’s Arch., 1857,
p- 52). — F. R. Horner, On some discoveries relative to the Chick in ovo,
and its liberation from the shell (Proceed. Brit. Assoc., 1853, p. 68).
- (2) Consultez, pour les mémoires relatifs aux enveloppes foetales et au pla-
centa, aux différents systèmes d’organes, à un organe spécial et en général a
l'embryologie humaine, l’article « Entwickelungsgeschichte », dans R. Wagner,
Handworlerbuch der Physiologie, p. 867, où tout ce qui a été publié sur ce
sujet avant 1843 est énuméré, Pour les recherches plus récentes, voy. Müller,
Archives, Wiegman, Archives, Siebold et Killiker, Zeitschrift für Zoologie, Milne
Edwards, Annales des Sciences naturelles, et les Revues d'histoire naturelle,
13h DE L'ESPÈCE.
a eu Hans Bischoff l'investigateur le plus heureux et le oil
complet (1). 4
Mais le but de l’embryologie n’est pas seulement de dés
crire le développement individuel des animaux, la constru Cs
tion graduelle du corps, la formation des organes et tous les
changements que subissent la structure et la forme. Elle doi
encore comparer ces formes et les phases successives d
toutes ces transformations dans tous les types du régne ani-
mal, de façon à pouvoir indiquer définilivement le rang à as
signer à chacun d’eux, leurs affinités et les corrélations de
organes et de toutes leurs parties. Les embryologistes on
jusqu'ici étudié trop exclusivement la métamorphose de leu
en un animal parfait; il leur reste encore un vaste champ À
parcourir. Il faut qu'ils déterminent les différents degré
d’analogie qui existent : — entre les formes successives que
revêt un animal avant de compléter sa croissance et les formes
diverses que présentent, à l’état adulte, les autres animau
du même type ; — entre les divers états de complication par où
(4) Th. L. W. Bischoff, Entwickelungsgeschichte des Kaninchen Eies. Bruns-
wick, 1842, in-4, fig. — Eniwickelungsgeschichte des Hunde- ies. Brunswick
4845, in 4, fig. — Entwickelungsgeschichte des Meerschweinchens. Giesse
4352, in-4, fig. — Eniwickelungsgeschichte des Rehes. Giessen, 1854, in-4,
fig. — J. L. Prévost et J. A. Dumas, De la génération chez les Mammifères, ete.
(Ann. sc. nat., 1824, vol. III, p. 113, fig.), — L. Bojanus, Observatio ana:
tomica de foelu canino 24 dierum, etc. (Act. Acad. Nat. Cur., vol. X, p. 43:
fig.). — P. Coste, Embryogénie comparée. Paris, 1837, in-8, atlas in-4.
Histoire particulière et générale du développement des corps organisés,
cité. — Recherches sur la génération des Mammifères et le développement di
la brebis (Ann. sc. nat., 1835, vol. II], p. 78). — Recherches sur la généra:
tion des Mammifères. Paris, 1834, in-4, fig. — C. A. Bernhardt, Symbole
ad Ovi Mammalium historiam ante pregnationem, Vratisl., in-4 (Müll
Arch., 1835, p. 228), — M. Barry, Researches in Embryology (Phil. Tra
Roy. Soc., 1838, p. 301 ; 1839, p. 307; 1840, p. 229; 1841, p. 195), —
K. E. v. Baer, déjà cité. — R. Owen, On the Ova of the Ornithorhyneh
paradoxus (Phil. Trans., 1834, p. 555). — On the Young of the Ornithorhya
chus paradoxus (Trans. Zool. Soc., vol. I, p. 221 ; Proceed. Zool. Soc., vol.
p. 43; Ann. sc. nat., 2° sér., vol. UH, p. 303; vol. Ill, p. 299). — On th
generation of the Marsupial Animals, etc. (Phil. Trans., 4824, p. 333). —
On the Placenta of the Elephant (Proceed. Roy. Soc., Londres, 1857, p. 474
— Ch. Meigs, Observations on the Reproductive Organs and on the Foetus «
Delphinus Nesarnak (Journ. Acad. Nat. Sc. Phil., nouv. sér., 1849, vo}.
P- 267). — J. Wyman, On the-conncciion between the Ulerus and the Chane
in Pigs (Proceed. Bost. Nat. Hist. Soc., 1858),
i eas die ts
METAMORPHOSES DES ANIMAUX. 435
passe la structure d’un être, et la structure définitive d’êtres
voisins ; — entre les phases suecessives de la formation de
toutes les parties et le plus ou moins de perfection acquis par
ces parties, en d’autres groupes ; — entre le cours normal
de l’entière évolution d’un type et ce même cours dans un
autre type; — enfin, entre les plus petites variations que,
dans la formation des tissus, présentent jusqu'à un certain
point tous les animaux. Sans doute, des matériaux importants
ont déjà été élaborés pour toutes ces parties de l’œuvre,
mais Je puis apprécier combien il reste à faire par le peu
que j ai pu recueillir moi-même, au moyen d’une recherche
systématique dans cette direction.
Je suis depuis longtemps convaincu que l’embryologie
fournit la mesure la plus exacte pour déterminer le rang
des animaux entre eux. Une comparaison attentive des
phases de l’évolution chez les Batraciens supérieurs donne,
peut-être, l'exemple le plus frappant de l'importance d’un
semblable examen. A l’état initial, les Tétards rappellent,
par la structure et par la forme, ces Ichthyoides, dépourvus
de membres ou n’en ayant que d’incomplets, qui tantôt
possèdent, tantôt ne possèdent pas de hranchies extérieures ;
bientôt ils revétent une forme qui fait songer davantage aux
Tritons et aux Salamandres, puis leur structure est finale-
ment celle des Grenouilles ou des Crapauds (1). La confron-
lation de ces deux dernières familles prouverait d’ailleurs
que les Crapauds sont supérieurs aux Grenouilles, non-
seulement parce qu’ils ont un genre de vie moins aquatique
(voy. section XVI), mais encore parce que la membrane em-
bryonnaire qui, dans une certaine étendue, persiste entre
les doigts des Grenouilles, disparaît entièrement chez les
Crapauds, et peut-être aussi à cause des glandes développées
dans l’intérieur de la peau de ceux-ci et qui n'existent pas
chez celles-là. Un examen analogue des changements que
subit une nouvelle Comatule, découverte dans la baie de
Charleston (Caroline du Sud) par le Pr. Holmes; m’a mon-
(1) L. Agassiz, Twelve Lectures, elc., p. 8
136 DE L’ESPECE.
tré quel rapport il y a entre ces états successifs et les types
divers de Crinoides des époques passées. J’ai trouvé Ja un
étalon de mesure pour la détermination du rang respectif de
ces derniers. On ne peut douter, en effet, que les premiéres
phases de l’évolution d’un animal ne présentent les condi
tions d’une infériorité relative, quand on les compare avec ce
que sera l'animal adulte après son entier développement et
avant qu’il ne soit entré dans cette autre phase, appelée le
vieil âge, où l’on observe chez certains parasites des méta:
morphoses rétrogrades fort curieuses. 1
Il existe chez la jeune Comatule une tige par laquelle le
petit animal adhère soit à des algues marines, soit aux cirres
de la mère. La tige est d’abord simple et dépourvue de cir.
res; elle supporte une téte globulaire sur laquelle ce qu’on
appelle les bras se développent bientôt et se complétent peu
à peu en se bifurquant. En même temps, sur la tige elles
même apparaissent quelques cirres et graduellement le
nombre en augmente, jusqu’à ce qu’ils forment une cou
ronne entre la tige et les bras. En dernier lieu, cette cou:
ronne ayant revêtu tous les caractères d’une Comatule de
petite dimension se détache, se sépare de la tige, et la Co»
matule devenue un animal indépendant se meut libre- -
ment (1).
La classe des Crustacés et celle des Insectes sont particu=
lièrement instructives à cet égard (2). Rathke et Fritz Mül-
ler ont décrit les transformations d’un si grand nombre de
Crustacés que je ne puis mieux faire que de renvoyer à leurs
nombreux mémoires sur ce sujet (3), pour le détail des
changements que subissent ces animaux durant les première s
phases de la croissance. J’ajouterai seulement que l'ems
a) Kébénitient Thomson et Carpenter ont publié des détails très-intéres-
sants sur les phases du développement des comatules d'Europe. Voyez aussi
E. Forbes, History of the British Starfishes,. p. 10, et le 3° volume de a
Contributions à l'histoire naturelle des Etats-Unis.
(2) L. Agassiz, Twelve Lectures, p. 62, et Classification of Insects, “|
cité plus haut. J'ai l'espoir que: l’embryologie fournira les moyens d’assigner
chaque famille sa place relative. i
(3) Voy. ci-dessus, p, 127, nete 1.
METAMORPHOSES DES ANIMAUX, 437
bryon des Crustacés tout à fait supérieurs, les Brachyures,
ressemble par la forme et la structure aux types inférieurs
de la classe, aux Entomostracés et aux Isopodes; après quoi,
il prend la forme de ceux d’un ordre plus élevé, l’ordre
des Macroures, et revêt enfin tous les caractères des Bra-
chyures.
- L’embryologie donne ainsi la mesure exacte des affinités
vraies existant entre les animaux. Je ne prétends pas dire que
Jes affinités ne peuvent être déterminées que par l’étude des
embryons; l’histoire de la Zoologie est là pour prouver, au
contraire, que, avant que l’étude de la formation et de l’évo-
lution des animaux fait devenue une branche spéciale de la
physiologie, les rapports généraux des animaux entre eux
avaient été, pour la plupart, fixés avec un degré remarauable
de certitude par le seul examen anatomique. Il n’est pas
moins vrai que, dans quelques cas curieux, la connaissance
des changements embryonnaires de certaines animaux a
seule mis sur la voie de leurs affinités véritables. Dans d’au-
tres cas, elle a très à propos fourni la confirmation d’une
parenté qui pouvait bien paraître probable, mais qui ne lais-
sait pas d'être fort problématique. Cuvier lui-même regar-
dait les Anatifes comme une classe distincte qu’il rangeait
parmi les Mollusques, sous le nom de Cirripèdes. Mais
Thomson (1) démontra, et bientôt Burmeister, Martin Saint-
Ange, d’autres encore, confirmèrent que le jeune Anatife est,
pour la forme et la structure, identique avec quelques-uns
des Entomostracés les plus communs. Dés lors, leur véritable
place dans le système des animaux put être marquée, et on
les reporta dans la classe des Crustacés, parmi les Articulés.
Méme chose est arrivée pour les Lernéens, que Cuvier pla-
gait à côté des Vers. Nordmann a prouvé, par le témoignage
de l’embryologie,qu’ils appartiennent aussi à la classe des
Crustacés (2), Lamarck associait les Crinoïdes aux Polypes,
» (4) Thomson, Zool. Researches, etc. — Burmeister, Beiträge, etc. —
Martin Saint-Ange, Mém. sur l'organisation, etc., cités plus haut, p. 126,
note 2.
(2) Nordmann, Micrographische Beiträge, déjà cité.
138 DE L’ESPECE.
et quoique Cuvier les eût reportés dans la classe des Échi-
nodermes, avant qu’on ne connût les métamorphoses de la
Comatule (1), la découverte des jeunes pédonculés a, seule,
fourni la preuve directe que c’était bien là leur véritable
place. q
L’embryologie donne en outre un critérium pour la dis-
tinction des analogies et des homologies. Elle fait voir qual
les vraies homologies ne franchissent pas les limites natu
relles des grands embranchements du régne animal. 4
La distinction entre les homologies et les analogies, sur
laquelle les naturalistes anglais insistérent les premiers (2), a
jeté une très-vive lumière sur les affinités réelles des animaux,
Il aurait été bien difficile auparavant de les apprécier d’une.
façon aussi nette. Grace à cette distinction, nous avons appris à:
discerner laffinité réelle, fondée sur la conformité de strucz
ture, de la similarité basée seulement sur la ressemblance ext =
rieure de la forme et des fonctions. Mais, même après que cett
confusion eut été bien clairement démélée, il restait à fixer r
dans quelles limites les homologies pouvaient être recher=
chées. Les œuvres d’Oken, de Spix, de Geoffroy, de Carus (3)
montrent à quelles comparaisons extravagantes pouvait en=
trainer le préjugé de l'unité. Il fallut que Baer prouvat que le
mode de développement dans les quatre embranchement
_ du règne animal est essentiellement différent, pour qu’on (4)
en vint à soupçonner que des organes accomplissant des”
fonctions identiques pouvaient différer beaucoup quant
leurs rapports essentiels, les uns à l'égard des autres. IA
fallut que Rathke (5) démontrât que, chez les Articulés, les
jaune communique avec la cavité principale, par une ouvers,
ture située à la face dorsale du corps, et non à la face ven-
trale comme chez les Vertébrés, pour qu’on sût enfin su ;
eit
(1) Thomson et Forbes, cités p. 126 et 127.
(2) Swainson, Geography and Classification, ete. — Voyez aussi section Ÿ. |
(3) Voy. ci-dessus, section IV, notes. 3
(4) Baer, Entwickelungsgeschichte, vol. I, p. 460 et 224, L’étendue du
savoir de Baer et le champ immense embrased par ses vues n "apparaissent
nulle part d’une façon plus remarquable que dans cet ouvrage. #4
(5) Rathke, Unters. über Bild, ete., cité p. 127, note 4.
METAMORPHOSES DES ANIMAUX, 439
quoi établir solidement les limites naturelles de l’homologie
véritable. A chaque pas fait par l’embryologie dans la voie
du progrés, il devient de plus en plus évident que les homa-
logies de la structure ne dépassent pas les bornes de chacun
des grands embranchements du règne, et que l’homologie
générale, rigoureusement démontrée, prouve l'identité d’em-
branchement, de même que l’homologie spéciale prouve
l'identité de classe. .
Les résultats de toutes les investigations modernes sur
l'embryologie s'accordent à prouver, sur une échelle de plus
en plus grande, que le développement des animaux est en-
tiérement indépendant des causes extérieures. L'identité des
métamorphoses, par lesquelles passent les animaux ovipares
ou vivipares appartenant au même type général, en est la
preuve la plus convaincante (1). On a supposé récemment
que l'embryon pouvait être affecté directement par les in-
fluences extérieures, à un point suffisant pour que les mon-
struosités, par exemple, fussent attribuables à ces actions
du dehors. L'observation directe a fait voir que ces accidents
sont dus à certaines particularités qui se produisent au cours
(1) C’est sans doute ici l’occasion la plus opportune de faire remarquer que
la distinction établie entre les animaux ovipares et les animaux vivipares est
mal fondée. Eu égard à l’origine première des animaux dans l’œuf, cette distine-
tion est insoutenable. Elle est, de plus, anti-physiologique si elle a pour but
@exprimer l'idée d’une certaine affinité ou analogie basée sur l’un ou l’autre
de ces modes de développement, Les poissons montrent, plus nettement que
toute autre classe, que des animaux dont l’évolution se fait d’une manière
identique, dans tous ses traits généraux, sont les uns vivipares ét les autres
ovipares. La différence résulte des connexions de l’œuf durant cette évolution
et non de la façon dont celle-ci a lieu. En outre, des animaux vivipares ou ovi-
pares ont, dans des classes différentes, un mode d’évolutivn très-divers ; il n’y
a de commun entre eux que ce seul point : la mise bas de petits vivants pour
les uns; la ponte d'œufs, pour les autres. Le seul trait éssentiel sur lequel
une généralisation de quelque valeur puisse être établie est uniquement le
mode d'évolution du germe. Sous ce rapport, on remarque que les Sélaciens,
dont les uns sont vivipares, les autres ovipares, ont entre eux une grande
conformité ; c’est aussi le cas des poissons osseux et des reptiles, qu’ils soient
_ovipares ou non. Entre les mammifères même, placentaires ou aplacentaires,
il y a conformité pour tout ce qui est essentiel dans leur mode de déve-
loppement. On a accordé jusqu'ici trop d'importance aux connexions qu'a
le germe durant son évolution, et trop peu aux traits généraux de son déve-
loppement.
140 DE L’ESPECE. -
de l’évolution embryonnaire (1). Tous les Mammifères ont
dans le sein de leur mère où ils subissent leurs premières
transformations, une couche si bien close et si parfaitement
protégée contre l'influence immédiate des agents extérieurs,
qu'il suffit de rappeler cette circonstance pour montre
combien, chez ces animaux, le développement est indépen-
dant des conditions dans lesquelles la mère est placée. Cela
est également vrai de tous les animaux vivipares, comm
certains Serpents, certains Squales et les Poissons vivipares.
Ajoutez que l’uniformité de la température dans les nids
des Oiseaux, les précautions prises, contre tout ce qui
pourrait atteindre les œufs ou les petits, dans les con-
structions si variées que les animaux établissent pour
protéger leur progéniture (2), montrent bien visiblement:
que l'instinct les pousse à tenir à l’écart les agents phy-
siques, ou à faire servir ces agents à leurs fins, comme
c’est le cas pour les Huitres. Les Reptiles et les Mollusques
terrestres enterrent leurs œufs pour les soustraire à toute
action variable, Les Poissons les déposent dans les endroits
où les circonstances sont le moins changeantes. Les Insectes:
ont mille manières de préserver les leurs. Beaucoup d’a-
nimaux marins qui vivent sous des climats extrêmes pon-
dent en hiver, quand les variations extérieures sont réduites.
à leur minimum. Partout on trouve la preuve que les phé-
noménes de la vie, manifestés au milieu des influences
physiques les plus diverses, en sont rendus indépendants
au plus haut degré. Les procédés les plus variés sont mis.
en œuvre par les animaux, soit pour se préserver eux-
mêmes, soit pour défendre leur progéniture de l’action des
causes physiques qui sont inutiles ou facheuses.
(1) Th. L. W. Bischoff; dans R. Wagner, « Handworterbuch der Physio-
logie », article Entwickelungsgeschichte, p. 885.
(2) Burdach, Physiologie, 2° éd., vol. Il, sect. 334-8, — Kibby, etc., déj
cité. — Spence, Introduction, elc., cité plus haut.
DUREE DE LA VIE. Ah
XX
Durée de la vie.
La durée moyenne de la vie présente chez les différentes
espèces d’animaux et de plantes l'inégalité la plus étonnante,
Il en est qui croissent, se reproduisent et meurent dans le
court espace d’une saison, d’un jour même ; il en est qui
semblent braver l’action du temps (1).
Qui donc a mesuré à chacun des êtres organisés sa part de
vie? Pour répondre à cette question, il faut d’abord exa-
miner les faits. En premier lieu, il n’y a point de rapport
entre la durée de la vie et la stature, la structure, ou l’habi-
tat des animaux. Bien plus, le système suivant lequel sont
réglés les changements qui se produisent durant chaque
période, diffère presque pour chaque espèce. C’est à peine
s'il y a un faible degré d’uniformité chez les représentants
des différentes classes, et cela dans certaines limites.
Pour beaucoup de Poissons et de Reptiles propres, par
exemple, l'accroissement est tout à fait graduel et uniforme,
et le développement se poursuit pendant toute la vie, si bien
que la taille croit d’une manière continue avec l’âge.
Chez d’autres animaux, les Oiseaux entre autres, l’accrois-
sement est rapide pendant une première époque ; après quoi
l'animal a atteint sa stature définitive et entre dans une
période d'équilibre qui dure plus ou moins, suivant les
espèces. D’autres encore acquièrent ainsi, dans une limite
définie, une grosseur définitive; tels sont les Mammifères.
L’accroissement est, chez eux, plus lent dans les premiers
temps et la maturité n’est atteinte, comme chez l'Homme,
qu’à un âge qui forme une fraction considérable de la durée
totale de la vie.
Pour les Insectes, au contraire, la période de maturité est .
(1) G. Schübler, Beobachtungen über jiihrliche periodische wiederkehrende
£rscheinungen im Thier-und-Pflanzenreich. Tübingen, 1834, in-8.— A. Qué-
telet, Phénomènes périodiques (Acad, de Brux.).
4h2 DE L'ESPÈCE,
généralement la plus courte. La croissance de la larve est
parfois très-lente, ou, au moins, la phase avant-dernière de
l’évolution dure beaucoup plus longtemps que la vie de
l'être parfait. Il n’y en a pas d'exemple plus frappant que le
mode particulier de croissance de la cigale de Actas ans.
(Cicada septima decima), si bien décrit par Miss M. H.
Morris (1).
Tandis que tous les animaux doués de longévité prolon-
gent, pour ainsi dire, leur existence à travers une série
d’années, sous l’action variable des saisons qui se succèdent,
il en est d’autres qui n’apparaissent que périodiquement.
C'est le cas de la plupart des Insectes (2), et les Méduses en
fournissent un exemple encore plus remarquable (3).
Mais rien n’est plus intéressant à cet égard que les chan-
gements de caractères qui ont lieu aux différentes phases de.
l'accroissement d’un seul et même animal. Ni les Vertébrés,!
ni les Mollusques, ni même les Rayonnés ne montrent, dans
les modifications diverses qu’un individu peut subir, quelque |
chose d’aussi étonnant que ce qui s’observe chez les Insectes; :
en particulier chez ceux qu’on appelle à métamorphose.
complète. Le jeune (la larve) est souvent un être actif, ver-
miforme, vorace, carnivore méme; al’ âge moyen (la chry-.
salide), il devient semblable à une momie; c’est une sorte de.
ver presque destitué de mouvement, incapable de prendre
aucune nourriture; à la fin de la vie, c’est un insecte actif.
et pourvu d'ailes. Quelquefois la larve est aquatique et très-.
vorace et l’insecte parfait est aérien et ne mange pas (4).
Y a-t-il, dans les lois qui réglent la durée de la vie des
animaux, rien qui puisse rappeler l’action des forces physi-
ques? Est-ce que, au contraire, ce fait que certains animaux.
sont périodiques et liés au retour des saisons, tandis que.
|
E
|
(1) V. Harris, Insects injurious, ete., 2° édit., p. 180.
(2) E. Herold, Teutscher Raupen-Kalender. Nordhausen, 1845.
(3) L. Agassiz, Acalephs of North- America, p. 228.
(4) Burmeister, Handbuch der Entomologie, ete. — Lacordaire, Introduc-
tion a l’entomologie, etc, — Kirby et Spence, Introd. to Entomology, déjà
cité, où sont décrites les mœurs des insectes pendant leurs métamorphoses,
GENERATION ALŸERNANTI, 4h3
autres traversent toutes les phases de l’année sans en dé-
vendre, n'indique pas bien que les uns et les autres sont
ndépendants de toutes ces influences désignées par l’expres-
ion commune de causes physiques? Cela n’est-il pas rendu
vident encore, et de la façon la plus remarquable, par les
hangements extraordinaires qu’on vient d'indiquer et que
ubit un même animal aux périodes diverses de sa vie?
est-ce pas la preuve directe de l'intervention immédiate
l'une puissance assez forte pour contrarier toutes les in-
luences extérieures, régler le cours de la vie de chaque
tre, l’établir sur une base immuable et tracer le cercle des
nétamorphoses de l’espèce, sans que l’action ininterrompue
les agents physiques puisse en rien déranger l’ordre régu-
ier de ces phases naturelles ?
Il y a, toutefois, une autre conclusion encore à tirer de
es faits. Ils révèlent une notion distincte du temps et de
espace, une appréciation de la valeur relative de laps de
ermps inégaux, une répartition inégale de périodes inégales,
es unes courtes, les autres longues, qui ne peuvent être que
attribut d’un Être Pensant.
; 4% |
Génération alternante.
Nombre d'animaux vont se développant graduellement,
epuis la formation première du germe jusqu’au terme natu-
el de leur vie, et mettent au monde, chaque génération après
autre, une progéniture qui, à son tour, reproduit avec une
avariable régularité les mêmes phénomènes. Mais il en est
’autres qui se multiplient par des procédés divers, tantôt
ar division ou bourgeonnement (1), tantôt par une série
(1) Les zoologistes pourraient très-utilement consulter le mémoire de Braun,
récédemment cité, sur le bourgeonnement des plantes. Hs ont trop souvent
onfondu le procédé de la multiplication par bourgeonnement ou par scission
vec celui de la reproduction sexuelle, et cette confusion a déjà été cause de
interprétation très-erronée de faits d’ailleurs bien connus.
Ahh DE L’ESPECE
étrange de générations dont chacune différe de la précédente,
et qui ne reviennent qu’indireclement au type initial.
Chamisso et Sars furent les premiers à observer les faits
qui ont conduit à la connaissance de ces phénomènes, au=
jourd’hui désignés sous le nom de « génération alternante » .
Après eux, Steenstrup en fit connaître, dans son célèbre
mémoire sur ce sujet (4), l’enchainement méthodique. Il
n’y a pas de traité de Physiologie qui n’en contienne au
moins un court résumé; je n’ai donc pas besoin de les
reproduire ici et je puis renvoyer tout simplement aux
observations originales, dans lesquelles on trouvera tous les
détails connus sur ce point (2). Voici ce qu’il y a à conclure
de ces faits : En premier lieu, tel individu né d’un œuf peut
différer de celui qui a pondu l’œuf et atteindre le terme de
son existence, sans s’étre modifié de manière à devenir
un être semblable à celui qui l’a engendré (3). En second
lieu, le produit issu d’un œuf peut croître et, en se mul-
tipliant, donner naissance à une troisième génération,
dont les individus sont tous semblables entre eux (Synco:
ryne), ou sont de deux sortes (Campanulaires), ou même de
plusieurs sortes et diffèrent tous considérablement l’un d
l’autre (Hydractinie), sans que, dans aucun de ces cas, la
(D
(1) J. Steenstrup, ouvrage cité p. 114, note 3.
(2) Voyez les ouvrages cités plus haut, p. 4114, note 3, et p. 113, note 1
voyez aussi, V. Carus, Zur niihern Kenntniss des Gencrationswechsels. Leipzig;
1849, in-8. — Einige Worte über Melamorphose und Generationswechse
(Zeitschr. f. wiss. Zool., 1854, vol. Ill, p. 359). — R. Owen, On Partheno-
genesis, or the Successive Production of Procreating Individuals from a singl
Ovum. London, 1849, in-8. — On Metamorphosis and Metagenesis (Ann.
and, Mag. Nat, Hist., 2° sér., vol. VIII, 1857, p. 59). — V. Prosch, On Par:
thenogenesis og Generalionsveæel et Bidrag til Generationsleren, Copenhague
1851. — R. Leuckart, Ueber Metamorphose, ungeschlechiliche Vermehrung,
Generationswechsel (Zeitschr. f. wiss. Zool., vol. IT, 1851). — J. D. Dana,
On the Analogy belween the Mode of Reproduction in Plants and the‘ Alter-
nation of Generations ’’ observed in some Radiata (Amer. Journ. Se. and Arts:
2° sér., vol. X, p. 341). — C. G. Ehrenberg, Ueber die Formenbestiindigket
und den Entwickelungskreis der organischen Formen (Monatsber. der Akad.
Berlin, 1852, in-8).
(3) Le polymorphisme chez des individus d’une méme espéce ne s’observe
pas seulement parmi les Acaléphes. Il se voit encore chez les Polypes vrais,
madrépores par exemple; chez les Bryozoaires, les Ascidiens, les Vers,
Crustacés (Lupea) et même chez les Insectes (abeilles).
—
GENERATION ALTERNANTE. 145
gnée nouvelle ressemble à l’auteur commun. Aucun de ces
idividus nouveaux n’a d'organes reproducteurs distincts,
as plus du reste que le produit, né d’un œuf, dont ils
érivent. Leur multiplication a lieu principalement par un
rocédé de bourgeonnement. Les bourgeons conservent, en
énéral, un lien avec le premier individu né d’un œuf, et for-
ient, en conséquence, des sociétés qui ressemblent à celles
e certains polypiers. A leur tour, et dans certaines saisons,
uelques-uns de ces bourgeons en produisent d’autres,
une espèce entièrement différente, qui généralement se
éparent de la souche mère, dès les premières phases de
eur développement (les Syncorynes, les Campanulaires, etc.,
. ex.). Ces derniers venus subissent une série de modifi-
ations, au bout de laquelle ils revêtent les caractères de
animal qui a originellement pondu l’œuf. Les organes de
a reproduction se développent, ou mâles, ou femelles. Dès
ors, parvenus à la maturité, ces êtres émettent de nouveaux
eufs. D’autres fois, les bourgeons de cette espèce (Hydrac-
inies) ne se séparent pas de leur souche, mais se flétrissent
ur elle après avoir accompli toutes leurs transformations et
roduit, en temps opportun, un certain nombre d'œufs (41).
Dans le cas des Méduses propres (2), le parent pond des
eufs, d’où sortent des individus qui ressemblent à des Po-
pes. Ceux-ci ne tardent pas à se diviser, par une série
'étranglements en travers, en un certain nombre de
isques, qui, après plusieurs changements successifs, fi-
issent par former autant d'individus nouveaux, identiques
ec le parent, sexués, mâles ou femelles, et capables à leur
ur de donner des œufs. Toutefois, les individus polypi-
rmes nés d’un œuf peuvent encore se multiplier par
es bourgeons, chez lesquels s’opérent les transformations
(1) J'ai observé plusieurs combinaisons d’un caractère analogue chez les
lroïdes médusaires et je les ai décrites ailleurs. Il m’est impossible d’en
er ici, car je ne pourrais le faire sans recourir au dessin. Le cas de l’hydrac-
lie n’est pas représenté avec une exactitude absolue dans les ouvrages où cet
imal a été décrit.Quant aux physalies et aux autres siphonophores, voyez les
vrages cités précédemment p. 114, note 3.
(2) Voyez Siebold et Sars, ouvrages cités, p.111, note 3,
AGASSIZ. 40
146 DE L'ESPÈCE.
qu'on vient de décrire. La souche elle-même ne meurl
point et peut, elle aussi, se développer et passer par la répé:
tition des mêmes phases. .
D’autres phénomènes du même genre et susceptibles de le
même explication ont été observés dans d’autres classes:
J. Müller (1) a trés-bien décrit la génération alternante de
Echinodermes; Chamisso, Steenstrup, Eschricht, Krohn
et Sars, celle des Salpes (2); Von Siebold, Steenstrup et
d’autres, celles de certains Vers intestinaux (3). Le travail
le plus important qui ait paru sur les métamorphoses de
Acalèphes est celui de Haekel, sur la famille des Géryonides.
Les monographies embryologiques publiées par mon fi
sur tous les ordres des Echinodermes ont jeté un jour tou
nouveau sur l’organisation et les affinités de ces animaux
J'en dirai autant de ses travaux et de ceux de Claparéde sur
les Annélides. 1
La génération alternante différe essentiellement de 1e
métamorphose, et c’est en vain que plusieurs auteurs 0
essayé d'identifier les deux choses. Dans la métamorphose
comme on l’observe chez les Insectes, l’être né d’un ceul
subit une transformation après l'autre, en succession direct
et immédiate, jusqu’à ce qu’il acquière la forme définitive :
mais, si différent qu’il se montre aux diverses époques de
sa vie, c'est toujours et constamment le même individu.
Dans la génération alternante, l’animal né de l'œuf, au liet
de parvenir par des changements successifs à revêtir le ca
ractère de son auteur, produit, au contraire, par bourgeon:
nement externe ou interne, ou bien par scission, un certaif
nombre, parfois même un grand nombre d'individus now:
veaux, et c’est cette seconde lignée, entre l’œuf et laquelle
il y a une génération, qui, en se développant, récupère le
caractères du producteur de l'œuf.
Il y a réellement une différence essentielle entre la repre
duction sexuelle propre au plus grand nombre des animaui
(1) J. Müller, Uber den allgemeinen Plax, etc., cité p. 113, note 4.
(2) Voyez les ouvrages cités p. 116, note 2.
(3) Voyez les ouvrages cités aux pages 122, note 2, et 123, note 4.
GENERATION ALTERNANTE. 447
| la multiplication des individus par d’autres procédés.
ans la reproduction sexuelle ordinaire, chaque étre nou-
sau sort d’un œuf et acquiert par une suite régulière
e modifications les caractères de ses parents. Mais, quoi-
ue toutes les espèces animales se reproduisent par des
ufs, et quoique dans chacune d’elles il y ait au moins un
artain nombre d'individus, sinon tous, qui soient issus
un œuf, ce mode de reproduction n’est pas le seul. Nous
enons de voir comment des individus nouveaux pouvaient
rovenir de bourgeons et produire à leur tour des êtres
xués ; nous avons vu encore comment, par scission, des
pimaux peuvent en produire d’autres qui diffèrent d’eux
ussi complétement que les êtres sexués dont il vient d’être
uestion différent des bourgeons qui en furent la souche.
è ne sont pas là les seules combinaisons qui existent. Dans
s Polypes, par exemple, chaque bourgeon, qu'il se soit ou
on détaché de la souche maternelle, se développe de suite
our devenir un nouvel individu sexué, et, chez quelques
spèces qui se multiplient par scission, chaque être ainsi pro-
uit acquiert directement les caractères de ceux qui provien-
ent immédiatement d’un œuf (1). Il y a, enfin, un mode de
production particulier à certains Insectes et suivant lequel!
lusieurs générations de femelles fécondes se succèdent l’une
l'autre avant que des mâles soient procréés (2).
‘A quelle étonnante ampleur de vues peuvent donc at-
indre les forces physiques ? Quelle puissance de combinai-
doivent-elles avoir pour être ainsi capables d’enter une
ssi grande complexité de modes de reproduction sur des
ructures déjà si compliquées elles-mêmes !... Mais laissons
| ces vaines imaginations et envisageons sous tous leurs
pects les phénomènes merveilleux dont il vient d’être
1) Milne Edwards, Rech. anat. et zool. faites pendant un voyage sur les
de Sicile, 3 vol. in-4, fig.
2) Ch. Bonnet, Traité d’Insectologie. Paris, 1745. — Owen, Partheno-
leris, déjà cité, et Siebold, Wahre Parthenogenesis, cité dans la section pré-
lente. — Les phénomènes parthénogénésiques ont été étudiés avec beaucoup
soin dans ces derniers temps. Les travaux les plus importants sont dus à
|. Siebold, Leuckart et Huxley.
448 DE L’ESPECE.
question. De quelle lumière n’éclairent-ils pas le problé
de Vinfluence des forces brutes sur les étres organisés
Voilà des animaux doués de la faculté de se multiplier pai
les moyens les plus extraordinaires; chaque espèce produi:
sant de nouveaux individus de sa propre espèce qui diffé-
rent au plus haut degré de leurs parents. Ne semblerait-i
pas, à première vue, que nous ayons sous les yeux une
représentation parfaite des procédés au moyen desquels le
diverses espèces d'animaux ont pu sortir les unes des autres
et accroître le nombre des types existant à l’origine ?..
Non, sous l'arbitraire apparent de ces transformations, qu
révèlent les faits en définitive ? Ceci : tous ces changements
sont les termes intermédiaires d’un cycle qui se clôt, finale
ment, à un instant précis, aussi rigoureusement que dans It
cas où le produit ressemble, de suite et pour toujours, à ses
parents, dans toutes les générations qui se succèdent. Ie
donc, comme partout dans le règne organique, ces variations
ne sont que les phases successives d’un cycle rigoureuse
ment déterminé et qui revient toujours au type d'où il es
parti.
XXII
Succession des animaux et des plantes dans les temps :
géologiques.
Il ne semble pas que les géologues apprécient bien e
dans toute leur étendue les rapports compliqués, existan
entre les animaux ou les plantes dont on retrouve les reste:
aux divers étages des formations géologiques. Loin de mo
la pensée de dire que les travaux consacrés à l’examen de:
caractères botaniques ou zoologiques de ces restes ne son
pas remarquables, par l'exactitude autant que par l'ingé:
niosité. Tant s’en faut; j'ai moi-même dévoué la meilleur!
partie de ma vie à l’étude des fossiles et J’ ai appris de bonné
heure, par la difficulté même inhérente à cette étude, à ap
précier hautement Vhabileté merveilleuse, les puissante
SERIE DANS LE TEMPS. 449
acultés intellectuelles et l’érudition vaste déployées par
uvier et ses continuateurs, dans leurs recherches sur les
iunes et les flores des temps passés (1). Je ne peux cepen-
ant pas cacher l’étonnement où me jette la puérilité des
iscussions auxquelles certains géologues se laissent encore
niraîner, en présence de cette immense collection de faits
ien établis que possède la science moderne. C’est à peine
ils ont appris à reconnaître qu’il existe, dans la succession
es espèces innombrables aujourd’hui éteintes, un ordre
éfini. Quant au reste, il semblerait en vérité qu’ils n’aient
mais oui dire un mot des rapports qu'il y a entre cette
radation et les autres traits généraux du règne animal, ni
e ce grand fait que le développement de la vie est le trait
roéminent de l’histoire de notre globe (2). Peut-être nen-
nt-ils que ce n’est là qu’une spéculation vague, plausible
eut-étre, à coup sûr peu digne de l'attention du savant qui
en tient à sa fonction.
Comme science, il est vrai, la Paléontologie date d’hier.
lle a eu à tracer sa voie en luttant contre l’opposition infa-
(1) G. Cuvier, Recherches sur les ossements fossiles des quadrupèdes, eic.
ris, 1812, 4 vol. in-4 ; nouv. édit., 1821-23, 5 vol. in-4; 4€ édit., 10 vol,
-8; etc., 2 vol., pl. in-4. — James Sowerby, The Mineral Conchology of
reut Britain, Londres, 1812-19, 6 vol. in-8, fig. — E. F. v. Schlottheim.
e Petrefactenkunde, etc. Gotha, 1820, in-8, fig. —J. B. de Lamarck,
émoires sur les fossiles des environs de Paris. Paris, 1823, in-4, fig. —
A. Goldfuss, Petrefacta Germania. Düsseldorf, 1826-33, in-fol., fig. —
ispar, M. Gr. v. Sternberf, Versuch einer geognostisch-botanischen Darstel-
ng der Flora der Vorwelt. Leipzig und Prag, 1820-38, in-fol., fig. —
|. Brongniart, Prodrome d’une histoire des végétaux fossiles. Paris, 1818,
vol. in-8. — Histoire des végétaux fossiles. Paris, 1828-43, 2 vol. in-4,
.-— J, Lindley and W. Hutton, The Fossil Flora of Great Britain. Londres,
31-37, 3 vol. in-8. — H. R. Gôppert, Systema Filicum fossilium. Vratisl.
Bonne, 1836, in-4, fig. — Die Gattungen der fossilen Pflanzen, verglichen
it denen der Jetztwelt, etc. Bonn, 1841-48, in-4, fig. — Monographie der
silen Coniferen. Düsseldorf, 1850, in-4, ‘fig. — Pour la description des
pèces, voyez H, G. Bronn, Index palæontologicus. Stutigart, 1848-49,
vol. in-8. — Chr. Keferstein, Geschichte und Literatur der Geognosie.
4 4840, 4 vol. in-8. — Vic. d’Archiac, Histoire des progrés de la géologie.
21847 et suiv., 4 vol. in-8 ; et les Bulletins, Revues, Mémoires des
cis géologiques de Londres, Paris, Berlin, Vienne, les journaux de
onhard, de Bronn, etc.
(2) L. Agassiz, Geological Times, déjà cité. — Dana, Adress to the Amer.
soc. for Adv, Sc., 8° réunion tenue à Providence, 1855.
450 DE L’ESPECE.
tigable et incessante de l'ignorance et des préjugés. Ce qui
a fallu de travail et de patience pour faire admettre ce seu
fait que les fossiles sont bien positivement les restes d’ani:
maux ou de plantes ayant réellement vécu autrefois (4)
sur la terre; ceux-là seuls le savent à qui l’histoire de ki
science est familière. Il fallut prouver ensuite que ce n’é
taient pas les ruines ou les débris laissés par le déluge di
Moïse, car pendant quelque temps cette opinion prévalt
parmi les savants eux-mêmes (2). Enfin Cuvier démontra, di
manière à ne laisser aucun doute, que ces débris provenaien
d'animaux depuis longtemps disparus. De ce jour-là, la Pe
léontologie acquit une base solide. Mais quel effrayant labew
fut ensuite nécessaire pour déterminer, sur des preuves di
rectes, soit le mode de distribution de ces restes dans l’épais
seur de l’écorce solide du globe, soit les différences qu’il
présentent dans des formations successives (3), ou leur dis
(1) Ag. Scilla, La vana speculazione dezingannata dal senso. Naples, 167
in-4, fig. Ne
(2) J.J. Scheuchzer, Homo diluvii testis et @sooxooc. Zurich, 1726, in-4.=
W. Buckland, Reliquiæ Diluvianæ, ou Observations on the organic Remain
attesting the Action of an Universal Deluge. Londres, 1826, in-4, fig. j
(3) Pour les fossiles des formations les plus anciennes, voyez les ouvragi
cités section vu, et F. Mc. Coy, Synopsis of the silurian Fossils of Irelan
Dublin, 1846, in-4, fig. — H. D. Geinitz, Die Versteinerungen der Grauwa
kenformation. Leipzig, 1850-53, in-4. — Pour les renseignements sur
géologie locale, voyez la liste complète des Mémoires sur la géologie de Unio
donnée par J. Marcou dans son Résumé explicalif d'une carte géologique a
États-Unis (Bull. Soc. géol. de France, Paris, 1855, 2° sér., vol. XII), -
Pour le système dévonien, voy. J. Phillips, Figures and Descriptions of t
Paleozoic Fossils of Cornwall, Devon, and West Somerset, etc. Londre
4844, in-8. — Vic. d’Archiac et Ed. de Verneuil, Memoires on the Fossils:
the Older Deposits in the Rhenish Provinces, Paris, 1842, in-4, fig. —G. et F
Sandberger, Systematische Beschreibung und Abbildung der Versleinerung
des Rheinischen Schichtensystems in Nassau. Wiesbaden, 1850-54,.in-4, fi
— Pour la période carbonifère : J. Phillips, Illustrations of the Geology
Yorkshire. Londres, 1836, 2 vol. in-4, fig. — L. de Koninck, Description ¢
animaux fossiles qui se trouvent dans le terrain houiller de la Belgigi
Liége, 1842, 2 vol. in-4, fig., suppl., etc. -— Fr. McKoy, Synodsis of
Carboniferous Fossils of Ireland. Dublin, 1844, in-4, fig. — E. Fr, Germi
Die Versteinerungen des Steinkonlengebirges. Halle, 1844-53, in-fol., fig.
H. B. Geinitz, Die Versteinerungen der Sleinkohlenformation. Leipzig, 185
in-fol., fig. — Pour le système permien : A. Quenstedt, Ueber die Ident
der Petrificate des Thüringischen und Englischen Zechsteins (Wiegmam
Arch., 1835, t. I, p. 75). — H.B. Geinitz et A. Gutbier, Die Versieinerung
SERIE DANS LE TEMPS. 451
SSS eer ee
«bees
tribution géographique; ceux-là seuls peuvent s’en faire
une idée exacte qui ont mis la main à œuvre (4)! Et
pourtant, aujourd’hui encore,’combien de questions restent
pes réponse |
les Zechstalogetirges, etc. Dresden, 1849, in-4, fig. — W. King, Monograph
the Permian Fossils of England {Palæont. Soc.). Londres, 1850, in-4, fig.
— J. C. Swalow et F. Hawn, The Rocks of Kansas, with Descriptions of ‘New
deu Fossi!s, par J. C. Swallow (Trans. Ac. Sc., Saint-Louis, 1858). —
our le trias : Fr. v. Alberti, Beitrag zur einer Monographie ‘des bunten
Sandsteins, Mushelkalks, und Keupers. Stuttgart et Tübingen, 1834, in-8. —
Pour le système jurassique : J. Phillips, {llustrations of the Geology ‘of York-
shire. York, 1829, vol. I, in-4, fig. — G. G. Pusch, Polens Palæontologie, etc.
Stuttgart, 1836, in-4, fig. — Fr. A. Rémer, Die Versteinerungen des Nord-
ulschen Oolithen Gebirges. Hanovre, 1836, in-4, fig. — C. H. v. Zieten, Die
Versteinerungen Wiirlembergs. Stuttgart, 1830-34, in-fol., fig. — Ale. d’Orbi-
y, Paléontologie française. Paris, 1840-53, in-8, fig. — J. Morris, et
|, Lycett, Mollusca from the Great Oolite (Palæont. Soc.). Londres, 4850-55,
-4, fig. — Pour la période crétacée : S. G. Morton, Synopsis of the Remains
of the Cretaceous Group of the United. States. Philadelphia, 1834, in-8, fig.
—- Alc. d’Orbigny, Paléontologie française. — H. Br. Geinitz, Charakteristil
der Schichten und Petrefakien des Kreidegebirges. Dresden, 1839-42, in-4
+ — F. J. Pictet et W. Roux, Description des fossiles qui se trouvent dans
les grés verts des environs de Genève (Mém. Soc. Phys., elc., Genève, 1847-52,
vol. XIL et XIII). — F. A. Rümer, Die Versteinerungen ‘des norddeutschen
Kreidegebirges. Hanovre, 4841, in-4, fig. — Die Kreidebildungen von Texas.
Bonn, 1852, in-4, fig. — A. E. Reuss, Die Versteinerungen der bühmischen
Kreideformation. Stuttgart, 1845-46, in-4, fig. — Jos. Müller, Monographie
der Petrefacten der Aachener Kreidejormation, Bonn, 1851, in-4, fig, —
D. Sharpe, Fossil Remains of Mollusca found in the Chalk of England (Pa-
l'ont, Soc.). Londres, 1854, in-4, fig. — James Hall et F. B. Meek, Descrip-
tions of New Species of fossils from the Cretaceous Formations of ‘Nebraska
(Mem. Amer. Akad., 1856, vol, V). — Pour le tertiaire : G. B. Brocchi,
Conchiologia fossile subappennina, ete. Milan, 1814,-43, 2 vol. in-4, fig. —
G. P. Deshayes, Description des coquilles fossiles des environs de Paris, 1824- 37,
3 vol, in-4, atl, — H. G. Bronn, Jtaliens Tertitirgebilde. Heidelberg, 1831,
in-8. — I. Lea, Contributions to Geology. Philadelphia, 1833, in-8, fig. —
T. A. Conrad, Fossil Shells of the Tertiary Forniations of North America.
Philadelphia, 1832-36, in-8, fig. — Dr. Grateloup, Conchyliologie fossile du
bassin de l Adour, etc. Bordeaux, 1838, in-8, fig. — Ph. Matheron, Catalogue
mélhodique et descriptif des corps erganisés fossiles, etc. Marseille, 1842, in-8.
—- G. C. Berendt, Organische Reste im Bernstein. Berlin, 1845-54, in’ -fol. ,
fig. —S.V. Wood, Monograph of the Crag Mollusks (Palwont. Soc.), 1848-50,
‘ip-4, fig. — F, E. Edwards, Eocene Mollusca (Palæont. Soc.). Londres,
4849-52, in-4, fig. —M. Hôrness, Die Fossilen Mollusken des Tertitir-Beckens
‘von Wien. Vienne, 1854, in-4, fig. — E. Beyrich, Die Conchylien des nord-
sulschen Tertitirgebirges. Berlin, 4854-57, in-8, fig. — M, Tuomey et
Fr. S. Holmes, Fossils of South Carolina, Charleston, 1855-57, in-4, fig.
: (4) L v. Buch, Pétrifications recueillies en Amérique, par M. Alex. de
‘Humboldt et par M. Ch. Degenhard. Berlin, 1838, in-fol., fig. — Ale. d’Orbi-
dw Voyage dans l'Amérique méridionale, etc. Paris, 1834-43, 7 vol, in-8
452 DE L’ ESPECE.
Un point, cependant, est irrévocablement acquis. A chaque
grande ère géologique (1), il a existé un certain ensemble
d’animaux et de plantes, et cet ensemble a présenté des dif-
férences essentielles à chaque période. Par période, j’en-
tends les plus petites subdivisions reconnaissables dans les
couches successives d’assises et de roches qui constituent
l'écorce stratifiée de notre globe; le nombre s'en accroil
chaque jour, à mesure que les investigations gagnent en
précision et en étendue (2). Ce qu’il reste à détermine
avec une rigueur de plus en plus grande, ce sont les affi-
nités vraies de ces êtres passés avec les plantes ou les ant
maux actuels et les rapports que ceux d’une période donné!
avaient, soit entre eux, soitavec ceux des époques contiguës!
ce sont les limites exactes de ces grandes éres du dévelop:
pement de la vie, le caractère des changements successifs
subis par le Règne animal, l’ordre spécial de succession de
représentants de chaque classe (3); c’est, enfin, leur coms
atl. in-4. — Vic. d’Archiac, et J. Haime, Description des animaux fossiles dt
groupe nummulilique de l'Inde. Paris, 1853, in-4, fig. — F. S, Leuckart,
Ueber die Verbreitung der übriggebliebenen Reste einer vorweltlichen Schüps
fung. Fribourg, 1835, in-4. +
(1) Traités de géologie : Sir H. T. De la Béche, Geological Manual. Londres
1833, 1 vol. in-8, trad. franc. par Brochant de Villers. — The Geological
Observer. London, 1854, in-8. — Sir C. Lyell, Manual of Elementary Geo-
logy. Londres, 1851, 4 vol. in-8. — Principes of Geology, etc. Londres,
1830, 2 vol. in-8 ; 8° édit., 4850, 4 vol. in-8. — C. Fr. Naumann, Lehrb
der Geognosie. Leipzig, 1850-54, 2 vol. in-8, atl. in-4. — C. Vogt, Lehrbuc
der Geologie und. Petrefaktenkunde. Braunschweig, 4854, in-8, 2 vol.,
2° édit. — Traités sur les fossiles : H. G. Bronn, Lethwa Geognostica. Stutt-
gart, 1835-37, 2 vol. in-8, atl. in-fol., 3° édit. avec Fr. Roemer, 1846. —
F. J. Pictet,* Traité élémentaire de paléontologie, etc. Paris, 4844-45, 4 vol,
in-8, fig; 2 édit., 1853, in-8, atlas in-4. — Alc. d’Orbigny, Cours élémen-
taire de paléontologie. Paris, 1859, 3 vol. in-42. — E, G. Giebel, Fauna der
Vorwelt. Leipzig, 1852, 2 vol. in-8. — Aligemeine Palceontologie. Leipzig.
1852, 4 vol. in-8. — F, A. Quenstedt, Handbuch der na
Tübingen, 1852, in-8, fig. 4
(2) On n’a d’abord distingué que trois grandes périodes : primaire, secon-
daire, tertiaire ; ensuite on en a reconnu six ou sept (De la Béche) ; pl
tard on en a admis dix ou douze. Aujourd’hui le nombre en est à peu près
indéfini ; il reste indéterminé dans l’état actuel de nos connaissances, et quels
ques géologues voudraient ne considérer que comme des subdivisions d'une
longue période ce que les paléontologistes tendent à regarder comme des pés
riodes distinctes. 4
_ (3) Les principales monographies relatives à des classes spéciales ou à des
SERIE DANS LE TEMPS. 453
binaison en faunes distinctes durant chaque période, sans
parler des causes ou tout au moins des circonstances sous
prsquelles ces changements ont pu se produire.
Ss iles sont les suivantes : Polypes et Infusoires, —H. Michelin, /conographie
zoophytologique, Paris, 1841-45, in-4, fig. — H. Milne Edwards et J. Haime,
Recherches, etc. — Polypiers fossiles des terrains paléozoiques (Arch. Mus.,
vol. V). — Monograph of the British Fossil Corals (Palæont. Soc., London,
4350-55, in-4, fig.). — W. Lonsdale, On the Corals from the Tertiary For-
‘mations of North “America (Journ. Geol. Soc., t. J, p. 4955 Sill. Journ.,
2° sér., t. IV., p. 357). — Fr. Me Coy, Contribulions to British Palæontology.
Cambridge, 1854, 4 vol. in-8, fig. —C. G. Ehrenberg, Mikrogeologie. Leipzig,
41854, in-fol. fig. — Échinodermes. — J.C. Miller, A Natural History of
the Crinoidea. Bristol, 1824, in-4, fig. — Ale. d’Orbigny, Histoire naturelle
générale et particulière des Crinoïdes vivants el fossiles. Paris, 1840, in-4, fig.
—- Th. and Th, Austin Jr., Monograph of Recent and Fossil Crinoidea. Bristol,
in-4, fig. (sans date). — J. Hall, Palæont. of New-York. — G. A. Goldfuss,
‘Petref. Germ., déjà cité. — L. De Koninck et H. Lehon, Recherches sur les
_Crinoïdes, etc. Bruxelles, 1854, in-4, fig. — D. D. Owen, and B. F. Shumard,
_ Description of new Species of Crinoidea (Journ. Ac, Nat. Sc., Philad., 1850,
in-4, fig.). — E. Sismonda, Monographia degli Echinidi fossili del Piemonte.
Torino, 1840, in-4, fig. EN Des Moulins, Études sur les Échinides. Bor-
deaux, 1835-37, in-8, fig. — L. Agassiz, Monogr. Echin., déjà cité. —
Catalogue raisonné, ete, déjà cité. — Je cite ce mémoire sous mon nom seul;
le nom de M. Desor, qui a été ajouté au mien, l’a été sans aucun droit. M. Desor
fit cette addition après que j'eus quitté l'Europe, non-seulement sans mon au-
torisation, mais même sans m'en prévenir, et je ne l’appris qu'une année après.
Les genres Goniocidaris, Mespilia, Beletia, Lenita, Gualteria, Lovenia, Brey-
nia, qui portent son nom, devraient porter le mien, car c’est moi quiles ai établis
el nommés pendant que M. Desor voyageait en Suède, I se les est appropriés,
suns le moindre droit, par un simple trait de plume, en portant mon manuscrit à
l'impression. Combien d'espèces il s’est attribuées de la même façon, c’est ce
que je ne puis dire. Comme l'ouvrage imprimé et un mémoire présenté par moi
à l’Académie des Sciences de Paris, en 1846, fournissent à quiconque est familier
avec la nomenclature zoclogique la preuve intrinsèque de ce que j’avance, — par
exemple, mon nom conservé comme autorité pour les espèces des genres Mespilia,
Lenila, Gualteria et Breynia, tandis que ces genres portent le nom de M. Desor,
…—- je n’ai pas besoin d’insister sur ce sujet. € est un des cas de plagiat le plus
extraordinaires que je connaisse. — E. Desor, Synopsis des Échinides fossiles.
atin, 1854-56, in-8, fig., en partie tiré de mon catalogue, avec additions et
figures). — L. v. Buch, Ueber die Cystideen. Berlin, 1844, in-A, fig. (Ak. d.
Wiss.). — J. Müller, Ueber den Bau der Echinodermen. Berlin, 1854, in-4,
fig. — F. Roemer, Ueber Stephanocrinus, etc. (Wiegm. Are., 1850, p. 365),
Monographie der fossilen Crinoidenfamilie der Blastoideen, etc. (Wiegm.
Arch., 1851, p. 323.— Ed. Forbes, Echinodermata of the British Terliaries
Waleont. Soc. 1852, in-4, fig.)..--- Mem. of the Geol. Surv. of the Unit.
Kingdom (London, 1849, in-8, fig. Dec. 1, 3, 4). — Mollusques.— G. P. Des
ayes, Traité élémentaire de Conchyliologie, elc. Paris, 1835-39. 2 vol., in-8,
iy;.— Description des coquilles caractéristiques des terrains, Paris, 1831, in-8
fig. — S. P. Woodward, A Manual of the Mollusca, etc. London, 1851- 5h,
in-i2, fig. — F. v. Hagenow, Die Bryozoen der Maastrichter Kreideforma-
454 DE L’ESPECE.
Avant de pouvoir établir une comparaison entre l’ordre
de succession des animaux des âges anciens et certains traits
lion. Cassel, 1854, in-4, fig.—C. Des Moulins, Essai sur les Sphérulites (Bull.
Soc. Lin,, Bordeaux, 1827). — 0. R. du Roquan, Description des Coquilles!
fossiles de la famille des Rudistes, etc. Carcassonne, 1841, in-4, fig.
Fr. W. Hoeningaus, Monographie der gattung Crania. Düsseldorf, 4828, in-4,
fig. — L. v. Buch, Ueber Terebraleln, etc. Berlin, 4834, in-4, fig. (Akad. d.
Wiss). — Ueber Productus und Leptæna. Berlin, 4842, in-4, fig. (Akad: d,
Wiss).— Th. Davidson, British Brachiopoda (Palæont. Soc., London, 4854-55,
in-4, fig.).— L. de Koninck, Recherches sur les animaux fossiles. Liége, 1847,
in-4, fig. — L, Agassiz, Etudes crit., déjà citées. — A, Favre, Observations st
les Diceratos. Genève, 1843, in-4, fig. — L. Bellardi et G.Michellolti, Saggic
orillografico sulla classe dei Gasteropodi fossili. Torino, 1840, in-4, fig. i
W.de Haan, Monographice Ammoniteorum et Goniatileorum Specimen (Lug-
duni Batav., 4825, in-8. — M. v. Buch, Ueber Ammoniten, über ihre Son-
derung in Familien, ete. Berlin, 1832, in-4, fig. (Ak. d. Wiss). — Ueber
Goniotiten und Clymenien in Schlesien. Berlin, 1839, in-4, fig. (Ak. d: Wiss).
—- Gr. v, Miinster, Ueber Goniatiten und Planuliten im Ueberganglalk, etc.
Baireuth, sis laces -4, fig. —Ph. L. Voltz, Observations sur les Bélemnites, Paris,
1830, in-4, fig. —F, nk Quenstedt, De Notis Nautilorum primariis, etc. Berlin
1834, in-8, = Crustacés : Al. Brongniart et A. G. Desmarest, Histoire natureli
des Trilobites, elc. Paris, 1822, id: fig.—J. W. Dalman, Ueber die Pa aden
' oder die sogenannten Trilobiten (a d. Schwed., Nürnberg, 1828, in-4, fig.
— J. Green, A Monograph of the Trilobites of North America, etc. Phila del-
phia, 1833, in-8, fig. — H. F. Emmerich, De Trilobitis. Berlin,i839, in-8,
fig. — Zur Naturgeschichte der Trilobiten. Meiningen, 1844, in-4. 4
H. Burmeister, Die Organisation der Trilobilen. Berlin, 1843, in-4, fig. (Ray.
Society), —E. Beyrich, Ueber einige bühmische Trilobiten, Berlin, 1845, in-4,
2° part., 4846, in-4. — A. J. C. Corda et Ig. Hawle, Prodrom einer Mono-
graphie der bohmischen Trilobiten. Prag., 1848, in-8. fig. — J. Barrand ey
Syst. Sil., déjà cité. — J. W. Salter, in Mem. Geol. Surv., etc., Dec. 2. —
Gr. G. v. Miinster, Beitriige zur Petrefakienkunde. Beyreuth, 1839, in-4,- 2
fasc., fig. — H. v. Meyer, Neue Gattungen fossiler Krebse, etc. Stuttgard,
1840, in-4, fig. — L. de Koninck, Mémoire sur les Crustacés fossiles de Bel-
gique. Liége, 1844, in-4, fig. — J. Cornuel, Description des Entomostra js
fossiles, ete. (Mém. Soc. géol. de France, 9e sér., vol. I, part. 2°, Paris,
1846, in-4, fig.). — Bosquet, Descriplion des Entomostracés fossiles de ta raie
de Maestrich (Mém. Soc. Roy. de Liége, 1847, in-8). — T. R. Jones, The
Entomosiraca of the Cretaceous Formation of England (Palæont. Soc., London:
1848, in-4, fig.). — Ch. Darwin, Fossil Cirripedia (Palæont. Soc.), Londres,
4851-54, in-4, fig. — Insectes : P. B. Brodie, History of the Fossil Inseets of
the Secondary Rocks of England. London, 1845, in-8.—0. Heer, Die Insekten-
fauna der Terliärgebilde von Oeningen und von Radeboy. Leipzig, 1853, in-4,
fig. — 0. Heer et A. Escher v. der Linth, Zwei geologische Vorträge, ete:
(N. Denk., Helv. Geselsch, Zürich, 1852, in-4). — Poissons : L. Agassiz,
Rech. S. les poiss, foss., déjà cité. — Sir “Phil. Egerton, A systematic and
Stratigraphical Catalogue of the Fossil Fishes, etc. London, 1837, in-4, 2° édit.
-— On some new Ganoid Fishes (Proc. Geol. Soc., London, IV, p. 183). -
On some New Species of Chimeroid Fishes (Ibid., p. 153 et 211), voyez aussi:
Trans. Geol. Soc. Lond. ; Journ. Geol. Soc. ; Ann, and Mag. Nat. Hist., €
Memoirs of the Geol Sur. of the United Kingdom). — F.4d, Pictet, Poissons
SERIE DANS LE TEMPS. 455
aillants du règne animal, j’ai, sur ce point, encore quelques
emarques à faire. Heureusement, je puis être court. Nous
ossiles du mont Liban. Genève, 1850, in-4, fig. — J. J. Heckel, Beitriige zur
Kenninis der fossilen Fische Oesterreichs, Wien, 1849, in-4, fig.—R. W. Gibbes,
Monograph of the Fossil Squalidæ of the United States (Journ. Acad. Nat.
_Sc., Philadelphia, 1848-49, in-4, fig.).— New Species of Myliobates (\bid.,
A849, p. 299. — F. McCoy, in Sedgwick and McCoy’s British Palæoz. Rocks,
| déjà cité. — J.S. Newberry, Fishes of the Carbonif. Deposits of Ohio (Proc.
Ac. Nat. Sc., Philadelphia, 1856), — Reptiles : G. Cuvier, Rech. Oss. foss.
— G. Fr. Jaeger, Ueber die fossilen Reptilien welche in Wurtemberg auf-
gefunden worden sind. Stuitgart, 1828, in-4, fig.—Et. Geoffroy Saint-Hilaire,
. Recherches sur les grands Sauriens, etc. Paris, 1831, in-4, fig. — Eud. Des-
Jongchamps, Mém. sur le Poecilopleuron Buckleendi, Caen, 1837, in-4, fig.—
__, G. Bronn und J.J. Kaup, Abhandlungen über die Gavialartigen Reptilien.
. Stuttgart, 1842, in-fol., fig. — A. Goldfuss, Der Schiidelbaw des Mosasaurus
. (N. Act. Ac. Nat. Cur., 1844, in-4. fig.). — E. d’Alton und H. Burmeister, Der
_ fossile Gavial von Boll. Halle, 1854, in-fol., fig. — H. Burmeister, Die
Labyrinthodonten, Berlin, 1850, in-4, fig. — A. Quenstedt, Die Mastodon-
saurier sind Balrachier. Tübingen, 1850, in-4, fig.—R. W. Gibbes, A Memoir
on. Mosasaurus and three new Genera, etc. Smithson, Contrib., 4851, in-4,
fig. —H. v. Meyer, Zur Fauna der Vorwelt. Die Saurier des Muschelkalkes, etc.
. Frankfurt a M., 1845-52, in-fol, — H. v. Meyer und Th. Plieninger, Beitrüge
sur Paleontologie Wurtembergs. Stuttgart, 1844, in-4, fig. — R. Owen,
Report on British Fossil Reptiles (Brit. Ass., 1839, p. 43; 1841, p. 60). —
Fossii Reptilia of the London Clay (Paleont, Soc., London, 1849, in-4, fig.).—
Fossil Reptilia of the Cretaceous Formation (Palwontol, Soc., London, 1851,
in-4, fig.).—Fossil Reptilia of the Wealden Formation (Palæont. Soc., London,
_ 1852-55, in-4, fig.). — I. Lea, On a Fossil Saurian of the New Red Sand-
stone, etc. Philadelphia, 1852, in-4, fig. — Jos. Leidy, Description of Extinct
Mammalia and Chelonia from Nebraska Territory, in D. D. Owen, Geol. Surv.
- of Wisconsin, Iowa, Minesota, etc. Philadelphia, 1852, in-4, fig. — On
Bathygnathus borealis, an extinct Saurian (Journ. Ac. Nat. Sc. Philad., 1854,
in-4, fig.).— Deséription of a New Species of Crocodile, etc. (Ibid., 1851). —
_ Jeffr. Wyman, On some remains of Batrachian Reptiles discovered in the Coal
- Formation of Ohio (Amer. Journ., 1858, vol. XXV, p. 158). — Oiseaux :
R. Owen, History of British fossil! Mammalia and Birds, London, 1844-46,
4 vol. in-8, fig. — Fossil Birds from the Wealden (Journ. Geol. Soc., Il,
» p. 96). — Memoir on the Dinornis (Trans. Zool. Soc., vol. Ill, p. 3, London,
1844, in-4, fig.). — Mammifères : G. Cuvier, Oss, foss. — W. Buckland, Rel.
… Diluv. —Duer. de Blainville, Ostéogr. ow Descr. iconographique comparée du
. squelelte, etc. Paris, 1841 el suiv., in-4, atlas in-fol. — J.J. Kaup,; Descrip-
_ tions d’ossements fossiles de Mammifères inconnus. Darmstadt, 1832-39, in-4,
fig. —R. Owen, Odontography, or a Treatise on the Comparative Anatomy
of the Teeth. London, 1840-41, 3 vol. in-8, fig. — Brit. foss. (Mam. and
Birds, déjà cité). — The Fossil Mammalia of the Voyage of H. M. S. Beagle.
London, 1838, in-4, fig. — Description of the Skeleton of an ewtinet gigantic
Sloth, Mylodon robustus. London, 1842, in-4, fig., et divers mémoires dans
_ les revues spéciales, — P. C. Schmerling, Recherches sur les ossements fossiles
des cavernes de Liége. Liége, 1833-36, 2 vol. in-4, fig. — Croizet et Jobert,
Recherches sur les ossements fossiles du département du Puy-de-Dôme. Paris,
1828, in-fol., fig. — H, v, Meyer, Zur Fauna, etc, — Die fossilen Zühne und
eens.
=f
Te Ft RATE
156 DE L’ESPECE.
possédons en effet un Traité de Paléontologie (1), disposé .
suivant l’ordre zoologique, et dans lequel on peut voir, d’un .
coup d’œil, comment les représentants de chaque classe du
règne animal sont distribués dans les formations géologiques :
qui se succèdent. Ce coup d’œil rapide suffit pour qu’on :
s’aperçoive que certains types dominent pendant quelques |
périodes et disparaissent entièrement dans d’autres. La dé-
limitation est remarquable et s'étend à des classes entières —
parmi les Vertébrés. Dans les autres embranchements, elle —
n’atteint guère que les ordres ou les familles, si même elle !
ne s'arrête pas aux genres et aux espèces. Mais quelle que «
soit l'étendue qu'ils embrassent. dans le temps, on doit.
reconnaître maintenant que, pour tous ces types, il y a un.
parallélisme trés-rigoureux entre leur ordre de succession —
et le rang relatif à assigner aux animaux du même type, —
actuellement vivants; — entre cet ordre et les phases du :
développement embryonnaire de ces mêmes types à l'heure «
présente; — et même entre cet ordre et le mode actuel de «
distribution à la surface du globe. Quelques exemples —
rendront les choses plus claires. Parmi les Echinodermes, —
les Crinoïdes sont, pendant une longue suite de périodes, —
les seuls représentants de leur classe ; après eux viennent «
les Astéries, puis les Oursins dont les plus anciens appartien- —
nent aux types Cidaris et Echinus; plus tard, les Clypeas- —
troides et les Spatangoides. On n’a pas encore trouvé la 4
preuve de lexistence des Holothuries. Pour la classe des —
Crustacés, on peut comparer l’admirable travail de Bar- —
Knochen, in der Gegend von Georgensgmünd. Francfurt a. M., 1834, in-4, —
fig. — G. F. Jaeger, Die fossilen Süugethiere Wuriembergs. Stuttgard, 1835- —
39, in-fol. fig.—H Falconer and P. T. Cautley, Fauna antiqua Sivalensis, etc. —
London, 1846, in-fol., fig. — P. Gervais, Zoologie et Paléontologie françaises, «
Paris, 1848-52, in-4, fig. — J. Müller, Ueber die fossilen Reste der Zeuglo- —
donten, etc. Berlin, 1849, in-fol., fig, — J. Leconte, On Platigonus compres- M
sus (Mem. Amer. Acad. Arts and Sc., 1848, in-4, fig.). — J. Wyman, Notice M
of the Geological Position of Castoroide Ohioensis, by J. Hall, and an Ana- —
tomical Description of the same (Boston, Journ, Nat. Hist., 1847, vol. V. —
p- 389, in-8, fig.), — J, C. Warren, Description of a Skeleton of the Mastodon —
giganteus. Boston, 1852, in-4, fol. — J. Leidy, The Ancient Fauna of Ne- —
braska (Smithson. Cont., Washington, 1852, in-4, fig.), — Voy. sec. 22.
(1) Le Traité élémentaire de Pictet, déjà cité.
SERIE DANS LE TEMPS. 457
-rande (1) sur le système Silurien de la Bohême avec le mé-
‘moire du comte Münster sur les Crustacés de Solenhofen (2)
el l'ouvrage de Desmarest sur les Crabes fossiles (3) ; on voit
immédiatement que les Trilobites sont les seuls crustacés
des roches paléozoïques les plus anciennes, tandis qu’il y a,
à la période jurassique, une faune carcinologique entiére-
ment composée de Macroures, à laquelle furent adjoints les
Brachyures, durant la période tertiaire. Les formations
intermédiaires entre les roches paléozoïques les plus an-
ciennes et le Jura contiennent des restes d’autres Ento-
mostracés, et les plus récentes celles de quelques Macroures
aussi. Dans ces deux classes, la succession des représentants
dans les périodes diverses est en conformité avec leur rang
respectif tel qu’il est déterminé par les gradations de la
structure, Gers
Parmi les Végétaux, les Fougères et les Lycopodiacées
prédominent à la période carbonifére (4); à la période tria-
sique, les Equisétacées (5) et les Coniféres prévalent. Ce
sont les Cycadées (6) et les Monocotylédonées qui l’empor-
tent, dans les dépôts jurassiques; plus tard seulement les
Dicotylédonées prennent le dessus. La représentation icono-
graphique de la végétation des anciens âges a, dans ces der-
niers temps, dépassé de beaucoup en exactitude toutes les
tentatives faites pour représenter les traits caractéristiques
du monde animal, aux différentes périodes géologiques (7). .
Sans qu’il soit nécessaire de donner ici les caractères de
(1) Barrande, Système silurien, déjà cité.
(2) G. v. Münster, Beitriige 3. Petrefact., cité plus haut.
(3) Desmarest et Brongniart, Hist. natur. des Trilobites et des Crustacés,
citée plus haut.
(4) Voyez ci-dessus page 149, note 1.
(5) P. W. Schimper et A. Mougeot, Monographie des plantes fossiles du grès
bigarré de la chaine des Vosges. Strasbourg et Paris, 1840-43, in-4, fig.
(6) W. Butland, On the Cycadeoidæ, a Family of Plants found in Oolile, etc.
(Trans. Geol. Soc. Lond., 2° sér., p. 395). — F. Unger, Chloris protogæa,
Beiiriige zur Flora der Vorwelt. Leipzig, 1841, in-4, fig. — 0. Heer, Flora
terliaria Helveliæ. Winterthur, 1855, in-fol, fig.
(7) Fr. Unger, dans Die Vorwelt in ihren verschiedenen Bildungsperiodén.—
Vienne, in-folio, sans date, — donne des paysages des différentes périodes géo-
logiques, Ce sont des représentations idéales de Ja végétation des âges passés,
:
458 DE L’ESPECE. :
l’ordre de succession géologique des êtres, on peut, dès.
maintenant, tirer des faits mentionnés la conclusion sui-"
vante : Tandis que le monde matériel est toujours le même,
à toutes les époques, dans toutes ses combinaisons et aussi
loin que nous puissions retrouver en arrière, par l'investi-
gation directe, les traces de son existence, au contraire,
les êtres organisés transforment sans cesse ces éléments tou-«
jours les mêmes en des formes nouvelles et en de nouvelles”
combinaisons. Le carbonate de chaux de n'importe quelle
époque n’est jamais que du carbonate de chaux; forme et.
composition, rien ne change, tant qu’il demeure soumis à la.
seule action des forces physiques. Mais que la vie soit intro- —
duite sur la terre, et de ce carbonate de chaux un Polype .
bâtira son corail; chaque famille, chaque genre, chaque
espèce en aura un. différent, qui variera encore à chaque
époque géologique nouvelle. Le Phosphate de chaux des
roches paléozoïques est le même que celui que l'homme «
prépare artificiellement; mais un Poisson en fait ses épines —
et chaque poisson fait les siennes à sa manière; la Tortue en.
construit sa carapace, l'Oiseau ses ailes, le Quadrupède ses —
membres, et l'Homme, semblable en cela à tous les Verté-
brés, l'entière charpente de son squelette. Et, 4 chaque pé*.
riode qui se suit dans l'histoire du globe, toutes ces con- ©
‘structions sont différentes pour des espéces différentes.
Où est l’analogie entre tous ces faits? Ne décélent-ils pas”
l’action de forces distincles et qui s’excluent l’une l’autre ?
Non, en vérité, la noble forme humaine ne doit pas son «
origine aux mêmes forces qui se combinent pour donner à —
un cristal sa figure définitive! Or, ce qui est vrai du carbo- 4
nate de chaux est également vrai de toutes les substances «
inorganiques ; toutes présentent, à tous les âges passés, les 1
mêmes caractères qu'elles possèdent de nos jours. 4
Envisageons ce même sujet à un autre point de vue et j
nous verrons qu'il en est de même quant à l’influence de. 7
toutes les causes physiques. Parmi ces agents, le plus puis- ;
sant est sans contredit l'électricité. C’est le seul d’entre tous —
auquel, bien qu’à tort, on n’ait pas craint d’atiribuer la for- «
TYPES SPECIAUX A DES LOCALITES PARTICULIERES. 459
mation directe d’étres vivants. Les effets que l'électricité
roduit de nos jours, elle les a produits de tout temps et
elle les produisait de la même manière. Elle a réduit les
composés métalliques et quelques minerais et les a précipités
sous forme cristalline, ou en filons, à toutes les périodes
géologiques ; ; elle a transporté telle ou telle substance d’un
point à un autre point, aux âges passés, comme elle le fait
aujourd’hui dans nos laboratoires, quand nous recourons à
elle. De même, l’évaporation qui a lieu à la surface de la
terre. Aux époques antérieures comme de nos jours, elle a
toujours produit dans l'atmosphère des nuages qui, après
s'être accumulés, se condensaient pour retomber en pluie.
Les empreintes de gouttes de pluie, dans les roches tria-
siques ou carbonifères, ont apporté jusqu’à nous le témoi-
gnage que les opérations des agents physiques étaient autre-
fois identiques avec ce qu’elles sont encore. Elles attestent
que ces agents font aujourd’hui ce qu'ils faisaient déjà aux
époques géologiques les plus reculées, et ce qu’ils ont fait
dans tous les temps. Cela bien constaté, comment imaginer
un rapport de causalité entre deux catégories de phénomènes
si dissemblables : les uns obéissant toujours aux mêmes lois,
tandis que les autres, à chaque période nouvelle, mettent en
évidence des relations et des combinaisons nouvelles, dont la
gradation toujours changeante aboutit, comme dernier
terme de la série, à apparition de Homme ? Qui ne voit au
contraire que l'identité constante, à n’importe quelle époque,
des produits de l’action des causes physiques témoigne éner-
giquement contre toute influence de leur part sur la forma-
tion d’êtres perpétuellement changés, et sur l'origine de ce
monde organique dont l’ensemble déroule à nos yeux, de la
façon la plus sensible, un enchaînement de pensées !
XXII
Localisation des types aux âges passés,
Ps ee - CUP one
. L'étude de la distribution géographique des animaux ac-
tuels nous a appris que chaque espèce, animale ou végétale,
460 DE L’ESPECE.
a un habitat déterminé, et même que certains types particu=
liers sont circonscrits dans des limites définies de la surface
du globe. Récemment, et depuis que les investigations des
géologues ont pu atteindre les parties de la terre les plus
éloignées, on a pu se convaincre que cette localisation spé
ciale avait eu également lieu aux âges passés.
Le premier, Lund, signala ce fait: ; il montra que, au Brésil 4
la faune (1), aujourd’ ef éteinte, de la dernière période des
anciens âges se composait de représentants différents des
mêmes types qui prédominent, à cette heure, dans cette
immense région. Owen a observé un rapport analogue entre
la faune éteinte de l'Australie (2) et les types qui vivent ac
tuellement sur ce continent.
S'il reste encore un naturaliste pour croire que la faune en
d’un continent puisse être venue d’une autre partie du globe,
l'étude de ces faits, sous toutes leurs faces, doit le convaincre
de son erreur.
On sait à quel point les Édentés caractérisent la faune
moderne du Brésil. Ce pays est la patrie des Paresseux
(Bradypus), des Tatous (Dasypus), des Fourmiliers (Myrme-
cophaga). Or, c’est aussi dans ce pays qu’on a trouvé les“
genres éteints, si extraordinaires, qui tous appartiennent à"
ce même ordre des Édentés : le Megatherium, le Mylodon, le
Megalonyx, le Glyptodon et quelques autres décrits par les
docteur Lund et le professeur Owen. Quelques-uns de ces”
genres éteints d'Édentés ont eu aussi, à la même période
géologique (3), des représentants dans l'Amérique du Nord;
ce qui montre que, tout en étant confinée dans le même ter-"
ritoire, la distribution de ce type a été différemment limitéen
à des époques différentes. oes
(4) D' Lund, Blik paa Braziliens Dyreverden fôr sidste Jordomvælining."
(K. Danske vidensk selsk. Afhandl Vill, Copenhague, 1841, in-4, p. 64, etc.). #
(2) R. Owen, On the geographical Distribution of extinct Mammalia (Ana. A
Mag. Nat. His, 1846, XVII, p. 197. 4
(3) Jos. Leidy, A Memoir on the extinct sloth tribe of North America (Smith=
son, Contrib., 1855, —J. Wyman, Notice on fossils Bones (Amer. Jour, Se. «
et Art., 2° sér., 1850, X). — R. Owen, On the Megatherium (Trans. R. Soc. 7
4855, il, p. 359 ; 1856, Il, p. 574).
TYPES SPÉCIAUX A DES LOCALITES PARTICULIÈRES. 164
. L'Australie, aujourd’hui le séjour presque exclusif des
larsupiaux, a fourni aussi un trés-grand nombre d’espèces
ion moins remarquables de ce type et deux genres éteints.
Les uns et les autres ont été décrits par Owen dans le
5ompte rendu adressé, en 1844, à l'Association Britannique
at dans les « Expéditions de Mitchell dans l'intérieur de
Australie ». Ces descriplions ont été complétées depuis.
_ Jusqu’à quel point des faits analogues peuvent-ils se ren-
sontrer dans d’autres classes, c’est ce qu’il reste à savoir.
Notre connaissance de la distribution des fossiles est encore
op fragmentaire pour qu’on en puisse tirer des données
plus complètes sur ce sujet. Il est toutefois digne de remarque
que plusieurs familles de poissons, représentées sur une
grande étendue dans le système dévonien de l’ancien conti-
nent, n’ont point été trouvées, en Amérique, parmi les fossiles
de cette période : les Céphalaspides, par exemple, les Dip-
tères, les Acanthodes. De plus, certains Reptiles gigantesques
de la période triasique et de l’oolithique ne se rencontrent
nulle part ailleurs qu’en Europe. Or, il n’est guère pos-
sible d’attribuer le fait à ce que ces formations sont plus
restreintes dans les autres parties du monde, puisque d’autres
fossiles de ces mémes formations ont été retrouvés dans les
autres continents. Il est plus vraisemblable que quelques-uns
de ces fossiles, au moins, étaient particuliers à une aire
limitée de la surface du globe; car, même en Europe, leur
distribution est très-circonscrite. Cependant, les types des
périodes géologiques les plus anciennes sont distribués sur
une étendue beaucoup plus grande que celle embrassée,
aujourd’hui, par des familles trés-récentes.
Sans donc insister sur un point qui peut prêter à la dis-
cussion, il demeure évident que certains types particuliers
d'animaux étaient déjà, avant l'établissement de l’état de
shoses actuel, renfermés dans des aires définies. Ils ont con-
inué à occuper le même terrain ou un territoire analogue, à
époque présente, encore bien qu’ aucun lien génésique ne
juisse être supposé entre les animaux des deux périodes
consécutives. En effet, les représentants de ces types, dans les
AGASSIZ. 11
462 DE L’ESPECE.
formations différentes, n’appartiennent pas nécessairemen
à un genre commun. De semblables faits sont en contradic
tion la plus directe avec toute hypothése qui, d’une maniér
quelconque, prétendrait en rapporter lorigine aux agen!
physiques. A première vue, la circonscription de ces animau
dans des aires géographiquement constantes paraît favorabl
à une interprétation de ce genre; mais il ne faut pas oublie
que les êtres ainsi localisés vivent ou ont vécu dans la so
ciété d’autres types occupant des surfaces beaucoup plu
considérables. Chose plus significative encore, ils appar
tiennent à des périodes géologiques différentes, de l’un
à l’autre desquelles de grands changements physiques ont e
lieu indubitablement. Ainsi donc ces faits indiquent précisé
ment le contraire de ce que suppose la théorie. Ils prouver
que la ressemblance se continue entre des êtres organisés
durant une suite de périodes géologiques, et en dépit de
changements considérables que les circonstances physique
prédominantes ont subis, à ces diverses époques, dans les pay
habités par ces êtres. Par quelque côté qu'on prenne la thét
rie qui attribue à l’influence des agents physiques l’origin
des êtres organisés, cette théorie ne supporte ni l’examen
ni la critique. Seule, l'intervention délibérée d’une Intell
gence, agissant continuellement suivant un plan unique
peut rendre compte des phénomènes de ce genre. |
XXIV_
Limitation de certaines espèces à des périodes op d
particuliéres. 1
Sans discuter ici dans quelles limites précises le fait ei
vrai, ilne peut plus faire doute que les espèces, — et nol
pas seulement les espèces, mais tous les autres groupes dé
régnes organiques, — ont, tout comme les individus (4)
une durée limitée. Le terme de la durée de l'espèce coïncid
(4) Voyez section xx.
ESPÈCES SPÉCIALES À DES PERIODES PARTICULIÈRES. 163
ne avec de grands changements dans les condi-
ons physiques de la surface du globe (1). Malgré cela, chose
étrange à dire, parmi les obébktaleuts qui prétendent rap-
porter l'origine de l’organisation à l'influence des forces
physiques, le plus grand nombre n’en soutient pas moins
que les espèces peuvent passer d’une période à l’autre; ce
qui implique cependant qu’elles ne sont pas affectées par
es modifications survenues dans les forces (2).
… Lorsqu'il s’agit de la limitation de certaines espèces à des
Périodes géologiques particulières, on peut, sans inconyé-
nient, négliger la question de savoir s’il y a eu simultanéité
entre l'apparition d’une faune et la disparition de la faune
précédente. Cela n’affecte en rien le résultat des recher-
Ches, puisqu'il est universellement admis qu'aucune espèce
connue, parmi les fossiles, n’a prolongé son existence à tra-
vers une suite indéfinie de formations. Du reste, le nombre
des espèces regardées comme demeurant identiques pendant
plusieurs périodes successives va en diminuant, à mesure
que la comparaison en est faite avec plus de rigueur et plus
dé soin. J'ai déjà prouvé, il y a longtemps, combien diffèrent
profondément des espèces actuelles (8) certaines espèces
jrs qu’on avait toujours réputées identiques avec les
animaux de nos jours. J'ai montré combien les espèces d'une
même famille peuvent se ressembler peu dans les subdivi-
Sions successives d’une même grande formation géolo-
ique (4). Hall est parvenu à la même conclusion par l’exa-
men des fossiles de l’état de New-York (5). Toute monogra-
phie nouvelle réduit le nombre de ces ressemblances dans
* (1) Elie de Beaumont, Recherches sur quelques-unes des révolutions de la
Surface du ar Paris, 1830, in-8.
(2) Voy. H. G. Bronn, Index palæontologicus. Stuttgardt, 1848-49, 3 vol.
1-8. — Alc. d'Orbigny, Prodrome de paléontologie straligraphique univer-
lle. Paris, 1850, 2 vol. in-12.—J. Morris, Catalogue of the British Fossils.
sondres, 1854, 2° édit., in-8.
> (3) L. Agassiz, Coquilles terliaires répulées identiques avec les espèces
van les. Neufchatel, 1847, in-4, fig.
| (4) L. Agassiz, Études critiques sur les mollusques fossiles, Neufchatel,
Pen 46, in-4, fig.
Ag J. Hall, ‘Pal@ontology of the State of New-York,
464 DE L’ESPECE.
chaque formation. Ainsi, Barrande, qui a consacré tant d’an-
nées aux plus minutieuses recherches sur les Trilobites de
la Bohême (1), est arrivé à la conclusion que leurs espèce
ne passent pas d’une formation à l’autre. D’Orbigny (2) @
Pictet (3) ont été conduits au même résultat pour les fos-
siles de toutes les classes. On peut bien le dire, à mesure
que les débris fossiles sont plus soigneusement étudiés al
point de vue zoologique, la prétendue identité des espéces
dans des formations géologiques différentes, s’évanouit gra
duellement et de plus en plus. Si bien que la limitation de
l'espèce dans le temps, déjà reconnue d’une manière géné
rale dès les premières recherches faites sur les fossiles de
formations successives, se resserre pas à pas dans des pé-
riodes moins longues, mieux définies et plus uniformes. L’es-
péce est véritablement bornée dans le temps comme elle est,
à la surface de la terre, bornée dans l’espace. Ce que révè
lent les faits, ce n’est pas la disparition graduelle d’un pe-
tit nombre d’espèces et l'introduction également graduelle
d’un nombre correspondant d'espèces nouvelles; c’est, au
contraire, la création simultanée et la destruction simultanéé
de faunes entières et la coïncidence entre ces révolutions du
monde organique et les grands changements physiques que
la terre a subis. Il serait toutefois prématuré de voulo
déterminer quelle étendue géographique a été comprise dans
ces changements, et l’on serait moins autorisé encore à affir=
mer le synchronisme de ceux-ci sur toute la surface du globe;
mers et continents. 7
Il faut étudier trés-attentivement les ouvrages d'Élie di
Beaumont (4), si l'on veut se faire une juste idée des grands
changements physiques qu’a éprouvés la surface du globe, di
la fréquence de ces modifications et de leur coïncidence ave
(1) Barrande, Système silurien. — L. Agassiz, Monographies d'Echino
dermes. |
(2) D’Orbigny, Paléontologie française.
(3) Pictet, Traité de paléontologie.
(4) Elie de Beaumont, Notice sur les sysièmes de montagnes. Paris, 1852
8 vol. in-12. — Léop. de Buch, Ueber die geognostischen Systeme von Deut
schland (Leonard's Taschenb., 1824, t. 11, p. 504).
ESPÈCES SPÉCIALES A DES PERIODES PARTICULIÈRES. 165
les mutations observées parmi les êtres organisés. Le pre-
mier, ce géologue a tenté de déterminer ‘âge relatif des
différents systèmes de montagnes; le premier encore, il a
fait voir que les perturbations physiques, occasionnées par
i. soulévements, coincident avec la disparition de faunes
entières et apparition de faunes nouvelles. Dans ses pre-
miers Mémoires i] admettait sept de ces convulsions du globe,
juis il en porta le nombre à douze, ensuite à quinze et
récemment il a fourni la preuve, plus ou moins complète,
lus ou moins définitive, qu'il y en a eu au moins soixante,
inon cent. Or, tandis que la genèse et la généalogie des
Montagnes étaient ainsi expliquées, les Paléontologistes
étendaient, avec un soin minutieux, aux couches succes-
ives d’une même grande formation géologique leurs com-
araisons entre les fossiles des formations diverses. Ils ob-
servaient, entre les espèces, des différences de plus en plus
marquées et acquéraient la conviction que les faunes, elles
tussi, ont été plus fréquemment renouvelées qu’on ne l'avait
supposé d’abord. De sorte que les résultats généraux de la
Géologie proprement dite et de la Paléontologie concourent
à fournir cette conclusion essentielle : A des intervalles
léitérés, fréquents même, bien que séparés les uns des
iutres par des périodes immensément longues, le globe a
té bouleversé et bouleversé encore jusqu’à ce qu’enfin il
varrélat à sa condition actuelle; de même, les animaux et
es plantes tour à tour se sont éteints et ont été remplacés
bar. des êtres nouveaux, jusqu’à ce que fussent enfin appelés
à l'existence ceux qui vivent de nos jours, et l’homme à
eur tête. Les observations ne sont pas toujours suffisam-
ment complètes pour démontrer que, partout, la rénova-
lion du monde organique ait coincidé avec les grandes
révolutions physiques qui ont altéré Vaspect général du
globe. Toutefois, elles portent déjà sur des faits assez
nombreux, pour montrer fréquemment le synchronisme et
la corrélation de ces deux ordres de phénomènes. On peut
donc s’y attendre, l'avenir fournira la preuve complète de
leur mutuelle dépendance, non pas comme cause et comme
466 DE L'ESPÈCE.
effet, mais comme degrés correspondants du développement
progressif d’un plan commun, qui embrasse, à la fois, le
monde physique et le monde organique. 4
Il importe de ne pas se méprendre sur la valeur des faits,
et de ne pas revenir à l’idée que les révolutions physiques
ont pu être la cause des différences observées entre les fos*
siles de différentes périodes. Qu’onle comprenne donc bien,
les êtres organisés présentent, à travers toutes les formations
géologiques, un ordre régulier de succession dont le carac=
tère sera indiqué ci-après; mais cette succession a été, ‘de
temps en temps, interrompue violemment par des pertur-
hations physiques, sans que Je caractère progressif de la
série en ait été le moindrement modifié. La, certes, ést la
preuve que le point essentiel, l'intérêt tout entier du grand
drame, c’est le développement de la Vie (4), à la réalisation
de laquelle le monde matériel ne fait que fournir des élé:
ments. La disparition simultanée de faunes entières, Pappas
rition simultanée qui s’ensuit d’autres faunes présentant,
dans toutes les formations, une grande variété de types (2);
Ja combinaison d’animaux et de végétaux en associations
naturelles que relient constamment des rapports définis;
voilà de nouvelles preuves que l’origine des êtres organisés
ne peut pas être attribuée à l’action bornée, monotone,
invariable des forces physiques. Ainsi donc encore, l'inters
vention d’un Créateur se manifeste d’une façon frappante, à
chaque page de l’histoire du monde. ‘
XXV
Parallélisme entre la succession géologique des animaux
et des plantes et le rang qu'ils occupent de nos jours. w
Les représentants les plus élevés du Règne animal man:
quent absolument dans les plus anciens dépôts qui fassen
(4) Dana, Adress, etc., cité plus haut, p. 149, note 2.
_ (2) Agassiz, Geological Times, etc., déjà cité,
SERIE CHRONOLOGIQUE ET SERIE ORDINALE. 167
partie de l'écorce terrestre. De là est née la croyance géné-
le que les animaux contemporains de ces premières
ériodes étaient inférieurs à ceux qui vivent de nos jours,
el qu "il existe une gradation naturelle, des animaux.les plus
ciens et les plus inférieurs aux animaux les plus élevés
À l'époque actuelle (1). Jusqu'à un certain point celte
pinion est fondée; mais, certainement, il n’est pas vrai
jue tous les animaux forment une série simple, depuis les
temps primitils, ou les types inférieurs étaient seuls re-
résentés, jusqu'à Ja dernière période, à laquelle l'Homme
} venu couronner la création animale (2). On à déjà fait
voir (Section va) que tous les grands types du Règne animal
Ont leurs représentants, dès les premiers jours de la création
ics êtres organisés. Ce n’est donc pas dans l'apparition
successive des grands embranchements qu’on peut s’at-
Dire à découvrir un parallélisme entre la succession des
animaux, à travers les âges géologiques, et le rang qu'ils
occupent entre eux, de nos jours. Il est tout aussi im-
possible de prendre pour terme de comparaison, l'ordre
d’apparition des classes, au moins en ce qui concerne les
Rayonnés, les Mollusques et les Articulés. Les classes de
ces embranchements semblent en effet avoir élé introduites
simultanément sur le globe, ala seule exception peut-étre
des Insectes, qu'on n’a pas retrouvés antérieurement à la
période Carbonifère. Toutefois on remarque, parmi les
Vertébrés, une certaine coïncidence, même dans la limite
des classes, entre le moment de leur introduction et le rang
assignable à leurs représentants. Je reviendrai sur ce point.
_ C’est seulement dans la limite des ordres de chaque classe
que le parallélisme s’accentue nettement, entre la succession
de leurs représentants aux âges passés et leur hiérarchie
à la période moderne. Mais si cela est vrai, on doit voir
iramédiatement combien la constatation de cette correspon-
dance dépend du degré de science où nous sommes quant
(4) Voyez les notes de la section xx11.
a (2) Agassiz, Twelve Lectures, etc., p. 68 et 128.
168 DE L’ESPECE.
aux véritables affinités et à la gradation naturelle des ani-
maux vivants. Jusqu'à ce que nos classifications soient
devenues lexpression exacte de ces rapports naturels, o
pourra fort bien ne pas apercevoir la coïncidence, même la
plus frappante, entre ces mêmes rapports et la succession!
des animaux aux époques écoulées. Il y aurait donc pré=
somption, de ma part, à vouloir, pour développer ma thèse
actuelle, embrasser dans mon argumentation le règne ani-
mal tout entier. Ce serait prétendre que j’en connais toutes
les relations et que, là où existe une discordance entre la
classification et l’ordre de succession des animaux, je puis
décider si la classification se trompe ou si, au contraire, les
rapports des fossiles ont été mal appréciés. Je dois me borner
à une comparaison générale. Elle pourra d’ailleurs suffire à
démontrer que les perfectionnements, introduits dans nos
systèmes par des motifs purement zoologiques, ont eu, en
outre, pour résultat, de faire ressortir davantage la coinci-
dence existant entre le rang hiérarchique des animaux
actuels et l’ordre de succession de leurs représentants dans
la série des âges passés. J’ai récemment essayé de faire voir
que, dans la classe des Polypes, l’ordre des Haleyonoïdes, est
supérieur à celui des Actinoïdes (1); que l'association et la
communauté y constituent un degré de développement
supérieur, si on les compare aux caractères et au mode
d’existence des polypes simples, tels que les Actinies; que le
bourgeonnement par l’extrémité est supérieur au bour-
geonnement latéral; et que le type des Madrépores, avec
leur partie supérieure animale ou au moins avec un nombre:
défini et limité de tentacules, est plus élevé que celui de
tous les autres Actinoides. Cela admis, la prédominance des
Actinoides dans les formations géologiques anciennes, :
l'exclusion des Halcyonoides; la prédominance des UE
noides simples sur les massifs de coraux composés; posté~
rieurement, celle des Astréoides et l'introduction trés-tardive
À
(4) Voyez les travaux de Dana, de Milne Edwards et Haime, cités précédem
ment, et Agassiz, Classification of Polyps (Proc. Ann. Acad. Sc. and Arts,
1856, p. 187).
4
SERIE CHRONOLOGIQUE ET SERIE ORDINALE. 169
des Madrépores dénoteraient déjà une corrélation entre le
rang des polypes vivants, et la succession des représentants
de la classe dans la série des âges. Cependant il est bien diffi-
cile de s'attendre à trouver une correspondance de ce genre,
“chez des animaux dont la structure est aussi simple. On ne
connaît encore qu’un petit nombre de Méduses, proprement
dites, à l’état fossile. Elles proviennent de couches juras-
‘siques; mais depuis que j'ai démontré les affinités halcyo-
noides des Millépores, il est digne de remarque que ces
Coraliaires tabulés, dont les Rugosa sont très-proches voisins,
constituent les plus nombreux représentants du type des
-Rayonnés dans les terrains les plus anciens (1).
_ La gradation est parfaitement évidente dans les ordres des
_Echinodermes. Au bas de l’échelle sont les Crinoïdes; après
viennent les Astérioïdes ; au-dessus les Echinoïdes, et, au
sommet, les Holothurioïdes. Depuis que cette classe a été
circonscrite dans ses limites naturelles, cette échelle a tou-
jours été regardée comme exprimant bien la hiérarchie
naturelle de ces êtres; les investigations modernes, sur leur
anatomie et leur embryologie, n’ont apporté ancun change-
rent important à cette classification, en ce qui concerne le
rang à assigner à chacun d'eux. Or, c’est là précisément
l'ordre dans lequel les représentants de cette classe ont été
successivement introduits sur la terre, aux âges géologiques
antérieurs. Les formations les plus anciennes ne recèlent
que des débris de Crinoïdes (2) pédonculés et cet ordre conti-
nue à prédominer durant une longue suite de périodes;
ensuite, ce sont les Crinoïdes libres et les Astérioïdes ; puis
les Echinoides (3), dont l'apparition successive, depuis le
Trias jusqu'à l'époque actuelle, s’accorde bien avec la grada-
(1) Voyez Milne Edwards et Haime, Op. cit, et les notes des sections VI,
p.34, et xix, p. 115,
(2) Müller, d’Orbigny,J. Hall, Austin, Op. cit.
(3) Voyez ouvrages cités p. 153 et encore J. Müller et F, H. Troschell,
System der Asteriden, Brunswick, 1842, in-4, fig. — J, Müller, Ueber den
Bau der Echinodermen. Berlin, 1854, in-4. — Fr. Tiedeman, Anatomie der
Réhren-Holothurie, des Seeigels, etc. Landshut, 1817, in-fol,, fig. — G. Valen-
tin, Anatomie du genre Échinus. Neufchâtel. 1842, in-4,
470 DE L’ESPECE.
tion des subdivisions déterminées d’après leur structure. Ge
n’est qu’à la période moderne que les Echinodermes supé-
rieurs, les Holothurioides, ont acquis la prédominance dans:
leur classe.
Le rang à assigner à chacun des représentants actuels des”
Acéphales ne soulève pas plus d’objections. Tous les zoolo-
gistes conviennent de. l’infériorité des Bryozoaires et des”
Brachiopodes (4) par rapport aux Lamellibranches; et parmi
ces derniers, l’infériorité des Monomyaires, relativement aux.
Dimyaires, serait difficilement niée. Or s'il y a, en Paléonto-.
logie, un fait bien établi, c’est l'apparition précoce et la“
prédominance des Bryozoaires et des Brachiopodes, dans les
formations géologiques les plus anciennes; c’est aussi leur
extraordinaire développement, durant une longue suite d’é-
poques, jusqu’à ce qu’enfin les Lamellibranches vinssent les”
reléguer à une importance secondaire et prissent lascen-
dant qu’ils conservent, de nos jours, sur la plus large échelle. .
On pourrait pousser la comparaison jusqu'aux familles de
ces ordres et montrer combien étroite est cette corrélation,
à toutes les époques. 4
Je n’ai rien à dire de spécial sur les Gastéropodes. Les.
paléontologistes ne l’ignorent pas, les restes de ces animaux |
n’ont donné lieu qu’à des observations plus incomplètes"
que celles dont les fossiles des autres classes ont été l’objet.
On sail cependant que les Pulmonés sont d’origine plus“
récente que les Branchifères et que, parmi ces derniers, les -
Siphonostomés ont paru plus tard que les Holostomés. Ce”
fait dénote déjà une coïncidence générale entre leur succes-«
sion dans le temps et leur rang dans l’ensemble.
(1) Ale. d’Orbigny, Bryozoaires (Ann. Sc. Nat., 3° sér., 1851, vol. XVI,
p. 292). — G. Busk, Catalogue of Marine Polyzoa in the collection of the
British museum. Londres, 1854. — G. Cuvier, Mém. sur l'animal de la Lingule \
(Ann. Mus., 1, p. 69). — C. Vogt, Anatomie der Lingula anatina (voyez
mém. Soc. Helv., 1843, VII, in-4, fig.).— R. Owen, On the Anatomy of the
Brachiopoda (Trans. Zool. Soc., 1, in-4, p. 145). — On the Anatomy of the
Terebratula, 1853, in-4 (Palwont. Soc.). — L. v. Buch, Ueber Terebrateln, «
cité plus haut. — Th. Davidson, Monographie, déjà citée. — X. Poli Testacea
utriusque Siciliæ, eorumque Historia et Anatomia. Parme, 1791-93, ouvrage «
continué par Delle Chiaje.
SÉRIE CHRONOLOGIQUE ET SERIE ORDINALE. 471
. Grâce aux beaux travaux dont la science est redevable à
Owen (1), on connaît parfaitement l'anatomie du Nautile, et
chacun peut se convaincre que, parmi les Céphalopodes, les
Dibranches l’emportent sur les Tétrabranches. Or, on peut
le dire sans exagération, un des premiers points que tout
cullectionneur de fossiles puisse affirmer, de lui-même, c’est
la prédominance des représentants du second de ces types
dans les formations anciennes et l'apparition postérieure,
vers le Moyen-Age géologique, des représentants du premier,
qui, de nos jours, est le plus largement répandu (2).
» Iln’y a rien d’important à dire sur les Vers, quant à l’ob-
jet de cette section; mais les Crustacés offrent un exemple
remarquable de la coïncidence que nous recherchons. Sans
descendre aux détails, il résulte de la classification de Milne
Edwards que les Décapodes, les Stomapodes, les Amphi-
podes et les Isopodes constituent les ordres les plus élevés de
Ja classe, tandis que les Branchiopodes, les Entomostracés,
les Trilobites et les types parasites en forment, avec les
Limules, les ordres inférieurs (3). Dans la classification de
Dana (4), le premier type comprend les Décapodes et les Sto-
mapodes, le second les Amphipodes et les Isopodes, le troi-
siéme les Entomostracés auxquels sont réunis les Branchio-
podes, le quatrième les Cirripèdes, et le cinquième les Roti-
féres. Les deux auteurs reconnaissent évidemment la même
gradation; toutefois ils différent beaucoup dans la manière
de combiner les groupes principaux; de plus, Milne Edwards
(1) R. Owen, Memoir on the Pearly Nautilus. Londres, 1832, in-4, fig. —
A. Valenciennes, Nouvelles Recherches anatomiques sur le Nautile, C. R. Paris,
4844, in-4. — J.D. Macdonald, On the Anatomy of Nautilus umbilicatus,
compared with that of Nautilus pompilius (Trans. Roy. So¢., Londres, 1855,
Ui, p. 277).—J. Van der Hoven, Beitrag zur Anatomie von Nautilus Pompilius,
L., Lésonders des Mannlichen Thieres (Arch. f. Nat., 1857, I, p. 77). —
G. Cuvier, Mém. pour servir aU Hist. et aV Anat. des Mollusques. Paris, 1817,
‘in-4. — H. Milne Edwards, Ar. de Quatrefages et Em. Blanchard, Voyage en
Sicile, Paris, 3 vol. in-4, sans date. |
(2) Quelques Ammonites et spécialement le magnifique Crioceras de Bogota,
décrit par Valenciennes, montrent en plein la combinaison des caractères qu’on
observe séparément dans le Nautile et dans l'Argonaute,
(3) Milne Edwards, Hist. Nat. des Crustacés, Paris, 1834-40, 3 vol. in-8.
(4) Dana, Op. cit.
472 DE L’ESPECE.
exclut quelques types, comme les Rotiféres, que Burmeister —
le premier, Dana ensuite et Leydig ont réuni, avec raison,
selon moi, aux Crustacés (1). Cette gradation offre la coïnci-
dence la plus parfaite avec l’ordre de succession des Crustacés
aux âges géologiques passés, même quand on descend aux.
subdivisions en groupes plus petits. Les Trilobites et les Ento-
mostracés sont les seuls représentants de la classe, dans les”
roches paléozoïques ; aux temps géologiques moyens, appa-«
rait une variété de Crevette, et les Décapodes Macroures pré-
dominent; plus tard seulement, prévalent les Brachyures qui, «
de nos jours, sont les plus nombreux.
Nous ne possédons sur les Insectes fossiles que des lam-
beaux de connaissances. Il faut donc renoncer à indiquer.
avec une précision suffisante les caractères de leur succession
à travers la série des terrains, encore bien qu’on ait déjà
recueilli des données importantes sur les faunes entomolo-"
giques de plusieurs périodes (2). 4
Chez les Vertébrés, l’ordre de succession présente des par-
ticularités qui le font, à certains égards, différer de celui des
Articulés, des Mollusques et des Rayonnés. On constate que les _
classes de ces trois embranchements ont apparu simultané-"
ment, aux périodes les plus anciennes de l’histoire du globe.
Il n’en a pas été de même pour les Vertébrés ; les Poissons"
seuls sont aussi anciens que n'importe quelle classe des.
autres embranchements ; mais les Reptiles, les Oiseaux et les”
Mammifères n’ont été introduits que les uns après les autres, «
et suivant l’ordre des rangs qu’ils occupent dans le groupe. |
En outre, les premiers représentants de ces classes ne parais- _
sent pas avoir été toujours les types inférieurs de chacune
d'elles. Au contraire, ce furent, dans une certaine mesure et”
dans un certain sens, les plus élevés. En effet, ils possèdent .
à la fois deux sortes de caractères. De ces caractères, les —
(1) Fr. Leydig, Räderthiere, etc. (Zeilschr. f. wiss. Zool., 1854, vol. VI,
p. 1). — Dana, Crustacea, etc. — Burmeister, Noch einige Worte über die x
systemalische Stlellung der Riiderthiere (Zeitschr. f. Wiss. Zool., 1856,
vol. VI). — Gosse, On the Structure of the class Rotifera. 7
(2)*Heer, Op. cit. — Brodie, Op. cit,
SERIE CHRONOLOGIQUE ET SERIE ORDINALE. 473
uns, 4 une période subséquente, apparaitront isolés, dans
des classes supérieures (voy. section xxvu), tandis que les
autres deviendront le cachet exclusif des classes inférieures.
Par exemple, les plus anciens poissons connus participent
des caractères qui, à une époque plus récente, sont exclusi-
yement propres aux Reptiles, et n’appartiennent plus aux
Poissons de notre temps. Peut-être faudrait-il dire que les
premiers Poissons sont les plus anciens représentants de
Yembranchement des Vertébrés, beaucoup plus que ceux de
la seule classe des Poissons. Cette classe semble n’acquérir
définitivement ses caractères spéciaux qu’aprés l’apparition
des Reptiles. Une relation analogue peut être signalée entre
les Reptiles et les classes des Oiseaux et des Mammifères
qu’ils ont précédées. Je me borne à rappeler l’analogie des
Ptérodactyles avec les Oiseaux, et celle des Ichthyosaures avec
certains Cétacés. Mais, à travers cet enchevêtrement, de rap-
ports, se fait jour une tendance à la production de types de
plus en plus élevés, jusqu'à ce qu'enfin l'Homme vienne
couronner la série. Contemplée de la distance où nous
sommes, qui permet à l'esprit d’en embrasser l’ensemble et
de saisir l’enchaînement des degrés successifs, sans se laisser
distraire par les détails, cette série apparaît comme le déve-
loppement d’une conception grandiose, exprimée avec une
telle harmonie de proportions, que chaque partie semble
nécessaire pour la complète intelligence du dessein général.
Et cependant, chaque partie est si indépendante et si parfaite
en elle-même, qu'on pourrait la prendre pour un tout com-
plet ; elle est si bien liée aux termes de la série qui précèdent
et qui suivent, qu’on pourrait la considérer comme produi-
sant les uns et dérivant des autres ! Tout ce qui, de l’aveu
universel, caractérise les conceptions du génie s’y trouve
déployé avec une plénitude, une richesse, une magnificence,
une ampleur, une perfection de détails, une complexité de
rapports, qui déconcertent notre savoir et laissent nos efforts
les plus tenaces impuissants à en apprécier les beautés. En
présence d’une série aussi étonnante, de celte coïncidence
remarquable sur une aussi vaste échelle, qui donc pourrait
17h DE WESPECE.
ne pas lire les manifestations successives d’une Intelligence,
exprimées en des temps divers par des formes toujours nous
velles, mais tendant continuellement à une même fin : la
venue de l’Homme, prophétisée déjà par l'apparition des
premiers poissons ! 1
. Le rang hiérarchique des Plantes a un caractère quelque
peu différent de celui des animaux. Les grands types du
régne végétal ne sont pas établis sur des plans de structure
aussi nettement distincts. Il y a, par conséquent, une gra-
dation plus uniforme des types inférieurs aux supérieurs.
Ceux-ci ne sont pas résumés et personnifiés dans une plante
unique, la plus élevée de toutes, comme lés types animaux
supérieurs le sont dans l'Homme. |
D’ailleurs, la Zoologie est plus avancée que la Botanique
quant 4 la limitation des groupes généraux le plus com-
préhensifs, tandis que la Botanique connail mieux les lis
mites et Jes caractéres de la famille et du genre. Les Bo-
tanistes s’entendent moins bien sur le nombre et le rang
des divisions primaires du régne végétal que les Zoolo-
gistes, relativement aux grands embranchements du régne
animal. La plupart des auteurs (1) s’accordent bien à: ads
mettre, sous un nom ou sous un aulre, ces trois groupes
primaires : Acotylédonées, Monocotylédonées, Dicotylédo-
nées (2); mais il en est d’autres qui voudraient séparer les
Gymnospermes des Dicotylédonées (3). 4
A mon avis, c’est là un point de la classification botanique
qui ne peut être bien éclairci qu’à l’aide d’une connaissance
parfaite des fossiles et de leur mode de distribution dans les
formations géologiques successives. Il y a là un exemple
trés-remarquable de l'influence que les classifications peu-
vent exercer, sur notre manière d'apprécier la gradation des
êtres organisés dans le temps. Lorsqu'on place les Gymno-
(1) Goppert, op. cit. j
(2) Dans cette classification, les Coniféres et les Cycadées, qui constituent:
l'embranchement des Gymnospermes, se trouvent réunies aux Dicotylédonters
et, par cela méme, placées au-dessus des Monocotylédonées.
(3) Brongniart, op, cit.
;
| SÉRIE CHRONOLOGIQUE ET SÉRIE EMBRYOLOGIQUE. 475
spermes parmi les Dicotylédonées, il est impossible de décou-
wrir une relation entre le rang hiérarchique des plantes
vivantes et l’ordre de succession de leurs représentants dans
les âges passés. Au contraire, si l’on apprécie à leur valeur
i: véritables affinités des Gymnospermes avec les Fou-
éres, les Equisétacées et, spécialement, avec les Lyco-
podinees, on voit immédiatement que les végétaux ont
été introduits sur la terre, suivant un ordre qui coincide
vec Je rang de leurs divisions primaires dans l'échelle des
complications de structure. Avec leur fleur imparfaite,
avec leurs carpelles nus supportant sur l'axe des graines
polyembryoniques, les Gymnospermes sont plus voisines
des Acrophytes ananthérés, aux spores innombrables, que
des Monocotylédonées ou des Dicotylédonées. Si donc, le
règne végétal forme une série graduelle, commençant aux
Cryptogames et se continuant par les Gymnospermes pour
nir aux Monocotylédonées et aux Dicotylédonées, cette série
m’offre- t-elle pas une coïncidence remarquable avec l'ordre
de succession suivant : les Cryptogames, dans les plus an-
ciennes formations, spécialement les Fougéres, les Equisé-
tacées et les Lycopodiacées de la période carbonifére; après
cela, les Gymnospermes, dans le Trias et les terrains juras-
siques; ensuite les Monocotylédonées de la même formation,
et enfin les Dicotylédonées qui se développent plus tard?
dei donc, comme partout, il y a un ordre, un plan dans la
nature.
XXVI
Bar eu à US
rss
Parallélisme entre la succession des animaux dans les âges
a géologiques et le développement embryonnaire de leurs
4 représentants actuels.
4
. Plusieurs auteurs ont déjà signalé la ressemblance qui
existe entre les jeunes de certains animaux actuels, el les
représentants fossiles des mêmes familles (1). Mais jusqu'ici
à
4 (1) L, Agassiz, op. cit. — Milne Edwards, Considérations sur quelques
4
en
476 DE I ESPECE.
ces comparaisons n’ont porté que sur des cas isolés. On n'est
pas encore complétement stir que le caractère de la succes-
sion des êtres organisés dans les âges passés soit de nature é
offrir, en général, une conformité remarquable avec le déve
loppement embryonnaire des animaux. C’est là, cependant,
une conclusion justifiée par l’état actuel de nos connaissances
en Embryologie et en Paléontologie. Déjà, dans le para-
graphe qui précéde, nous venons d’examiner, au point de
vue de la corrélation existant entre l’ordre de succession
des fossiles et le rang zoologique des animaux actuels, les
faits qui ont le plus d'importance pour ce nouveau parallèle
à établir. Dans l’examen suivant de la conformité offerte pai
la succession des êtres et les phases de l’évolution embryon-
naire des animaux vivants, nous pourrons done admettre
que le lecteur se représente assez bien l’ordre d’apparitior
des fossiles pour que cet ordre fournisse à notre compas
raison une base suffisante. L’embryologie des coraux n'a
pas été étudiée de manière à fournir à l’argumentation
secours de larges données; on sait fort bien, toutefois (4),
que le jeune polype est un animal simple, indépendant; qu'il
est ensuite enchassé dans un calice, sécrété par le pied de
l'embryon actinoïde et comparable à la paroi externe d’ut
coraliaire simple (2), et qu’il s'étend alors graduellemen
quoi, il bourgeonne ou se scinde. On sait aussi que, chez les
anciens coraux, la phase d’extension semble s’être prolongée
toute la vie, comme, par exemple, chez les Cyathophyl-
loïdes (3). Aucun de ces anciens coraux ne forme ces vastes
sociétés, composées de myriades d'individus réunis, qu
caractérisent si bien nos récifs corallaires. Le caractère d’iso-
principes relalifs à la classification naturelle-des animaux (Ann. sc. natur.,
3° série, 1844, p. 65). e.
(4) J’ai établi ces faits d’après l'observation de plusieurs Coraux des récifs
de la Floride, spécialement des genres Porites, Astræa et Manicina.
(2) Milne Edwards et Haime, op. cil.
(3) Depuis que je me suis assuré que les Tabulés sont des Hydroïdes et nom
des Polypes, j’ai eu des doutes sur les affinités réelles des Rugosa. La tendance
des cloisons à un arrangement quadriparlite dénote évidemment chez eux un
fi
SERIE CHRONOLOGIQUE ET SERIE EMBRYOLOGIQUE. 477
ment plus grand, d'indépendance plus complète, qui est
lui de l'individu chez les polypes des âges passés, offre une
Run frappante avec l'état d'isolement des jeunes
oraux de tous les types contemporains. Néanmoins, dans
ucune classe il ne reste autant à à apprendre que dans celle
s Polypes, avant qu’on puisse apprécier exactement la
orrélation des phases embryonnaires avec l’ordre de suc-
ession dans le temps. A cet égard, j'en dois faire la re-
narque, on observe rarement que, parmi les animaux infé-
urs, un type quelconque, même le plus élevé, représente,
ans ses métamorphoses, tous les degrés d’organisation
rcourus, soit dans leur évolution, soit dans l’ordre de
uccession, par les types placés au-dessous de lui. Fréquem-
vent, il faut connaître l’embryologie de plusieurs types
ccupant dans l’échelle une place différente, pour parvenir
| déterminer l’enchaînement de la série tout entière, soit
ans le premier sens, soit dans le second.
. Sur la corrélation des changements embryonnaires d’un
mimal avec l’ordre d'apparition des êtres qui le représen-
aient aux époques antérieures, aucune classe ne fournit
in témoignage plus complet et plus admirable que celle des
hinodermes. C’est aux vastes et patientes investigations de
|. Müller, sur les métamorphoses de ces animaux, que nous
m sommes redevables (1). Avant la publication de ses mé-
noires, on ne connaissait que les métamorphoses de la
Jomatule européenne (yoy. sect. xix, p. 113). On y trouvait
léjà la preuve que les premières phases du développement
le cet Échinoderme reproduisent le type des Crinoïdes pé-
lonculés des anciens âges. Les belles monographies de
ien plus étroit avec les Acaléphes qu’avec les Polypes. De plus, leurs parois
lorizontales étagées diffèrent des parois interseptales correspondantes des vrais
ypes, et ressemblent à celles des Tabulés, Il se peut donc que les Rugosa
at plutôt de l’affinité avec les Acalèphes qu'avec les Polypes, et que la famille
les Lucernaires soit le représentant actuel de ce type, mais sans parties dures,
Dans ce cas, la sécrétion du pied, chez les Actinoïdes, indiquerait seulement
ine ressemblance typique entre les Polypes et les Acalèphes, et ne prouverait
en quant à la place relative des deux types,
» (1) Müller, Mémoires cités, p, 113.
AGASSIZ, 49
478 DE L’ESPECE.
Thompson et de Carpenter sont venues compléter ces donnée
J'ai moi-même vu, plus tard, que les phases successives ¢
développement embryonnaire de la Comatule donnent,
quelque sorte, le type des principales formes de Crinoï
qui caractérisent les formations géologiques successive
D’abord, elle rappelle les Cistoides des roches paléozoique
et les représente par sa téte simple et sphéroidale; plus tat
elle rappelle les Platycrinoides à un petit nombre de plaqt
de la période carbonifère ; puis les Pentacrinoides du Li
et de l'Oolithe, avec leurs verticilles de cirres ; et, enfi
quand elle s’est affranchie de sa tige, c’est un Crinoide ¢
degré le plus élevé, du type proéminent de la famille, à M
poque actuelle. Les recherches de Müller, sur les larves [
toutes les farnilles d’Astérioides et d’Echinoides, nous pe
mettent d’étendre la comparaison, même aux Échinodermt
supérieurs. La première chose qui frappe observateur, da
les faits dénfontrés par Müller, c’est la ressemblance extrao
dinaire de tant de larves, de familles et d’ordres aussi diff
rents que le sont les Ophiuroides et les Astérioides, les Bch
noides proprement dits et les Spatangoides, Jes Holoth
rioides même, qui toutes, en somme, finissent par reprodui
les particularités de leur type spécial. Il est encore tré
remarquable que, à l’état le plus avancé, Ja larve des Ech
noides et celle des Spatangoides continuent à montrer ul
si grande ressemblance, qu’un jeune Amphidetus se distingt
avec peine d’un jeune Echinus (4). Enfin, car je ne vet
pas pousser mes remarques trop loin, ces jeunes Echinoid
(Spatange aussi bien qu’Echinus propre) ont, à cause (
leurs grosses épines, une physionomie générale plus sen
blable à celle des Cidaris qu’à celle des vrais Échinus. F
bien! ces faits sont en concordance rigoureuse avec ce qt
nous savons de l’ordre d'apparition des Échinoïdes aux ie
passés (2). Leurs représentants les plus anciens sont |
genres Diadema et Cidaris; après quoi viennent les Ech
noides, et, beaucoup plus tard, les Spatangoides. Quar
_ (4) Voyez Müller, Mémoires cités, page 113, planches HI-VII du premier mi
moire, et planches VI et VII du quatriéme, 4
(2) L. Agassiz, Twelve lectures, ete.
SÉRIE CHRONOLOGIQUE ET SERIE EMBRYOLOGIQUE. 479
Rr yologie des Clypeastroides sera connue, elle fournira
ns doute d’autres anneaux, qui rattacheront 4 la chaîne un
us grand nombre de membres de cette série.
Lembryologie imparfaitement connue des Acéphales, des
astéropodes, et des Céphalopodes ne fournit que peu ou
int de données pour la comparaison que nous voulons
re. Il est, néanmoins, digne de remarqüe que les jeunes
imellibranches, à à l'état d embryons, ressemblent, extérieu-
ment du moins, aux Brachiopodes (1) plus qu’à leurs
ypres parents, et que les jeunes coquilles de tous les Gas-
ropodes (2) dont on connaît l’état embryonnaire, bien que
ates holostomées , rappellent les types les plus anciens de
te classe. Malheureusement, nous ne savons rien de l’em-
yologie des Céphalopodes à coquille, les seuls qu’on ait
puvés dans les formations géologiques anciennes, et rien
on plus des changements que subit l’osselet des Dibranches.
n sorte qu'aucune comparaison ne peut être établie entre
ix et les Bélemnites, où d’autres représentants de cet ordre
ux périodes moyennes ou aux périodes plus récentes.
Ce que nous connaissons de l’embryologie des Vers nous
onnat-il un terme de comparaison assez sûr, nous sa-
ons trop peu de chose sur les Vers fossiles pour pouvoir
river à une conclusion. La classe des Crustacés, au con-
aire, est très-instructive sous ce rapport. Mais, pour pour-
livre le parallèle à travers toute la série, il est nécessaire
envisager simultanément l’évolution embryonnaire des En-
mostracés les plus élevés, tels que les Limules, et celle des
tres supérieurs de la classe (3). On voit alors que les pre-
iers rappellent au début de leur vie la forme et les carac-
res des Trilobites ; de même que le jeune Crabe, en passant
Te
ce ssivement par la forme des si ot et celle des Ma-
ë L. Agassiz, Twelve Lectures, etc,
480 ; DE L’ESPECE.
Crustacés, à travers les âges géologiques moyens et le
périodes tertiaires, jusqu’à nos jours. Le travail remarquabl
de F. Müller sur l'embryologie des Crustacés, bien que cong
à un point de vue opposé au mien, n’en offre pas moins le
données les plus précieuses pour la connaissance des rappor'
qui rattachent le développement de ces animaux à leur s
cession géologique. L’apparition des Scorpions, avant le
autres Insectes, à la période carbonifére, est probablement er
core un fait à signaler, si, comme j’ai tenté de le démontre
les Arachnidiens peuvent être considérés comme la repri
sentation de la phase chrysalidique de l’évolution des In
sectes (1); mais, pour les raisons déjà énoncées (sec. xxty
il est difficile de faire entrer les Insectes dans le débat qt
fait l’objet de ce paragraphe. 4
J'ai indiqué, à la fin de mes recherches sur les poissot
fossiles (2), le caractére embryonnaire des poissons prim
tifs; mais il reste beaucoup 4 faire dans cette direction. I
seul fait important que j'aie constaté depuis, c’est que lh
jeunes du Lepidosteus, longtemps après qu’ils sont sortis
l'œuf, présentent, dans la forme de la queue, des caractér
observés, jusqu'ici, dans les seuls poissons fossiles du system
devonien (3). Il faut espérer que l’embryologie des Cro
diles jettera quelque lumière sur l’ordre de succession di
reptiles gigantesques de l’époque géologique moyenne.
démontré (4) que l’embryologie des Tortues répand wi
certaine clarté sur les particularités offertes par les Chél
niens fossiles. Il est déjà certain que les changements er
bryonnaires des Batraciens présentent quelque coinciden
avec leur succession aux anciens âges, telle qu’on la co
naît (5). On sait trop peu de chose sur les Oiseaux fossiles
les Mammifères fossiles (6) ne s’étendent pas dans une ass
(1) Classif. of insects, cité page 136, note 2.
(2) Poissons fossiles, cité plus haut.
(3) L. Agassiz, Lake Superior, etc., p. 254. .
(4) Voyez Contributions, etc., déjà cité, p. 290, 303 et 386 du Ie vol
(5) Voyez la note 2 de la page 132. 4
(6) Cuvier, Ossements fossiles, — L, Agassiz, Zoological Character
Young Mammalia (Proc. Am, Ass. adv, Sc. Cambridge, 1849, p. 85).
SERIE CHRONOLOGIQUE ET SERIE EMBRYOLOGIQUE. 181
ngue série de formations, pour qu’on y puisse trouver des
rmes de comparaison bien frappants. Cependant, les
jarticularités caractéristiques des genres éteints indiquent
iniversellement, entre ces genres et les jeunes des animaux
i les représentent de nos jours, plus de ressemblance
qu'il n’y en a entre ceux-ci et leurs progéniteurs. C'est ce
que prouve fort bien un rapprochement fait avec soin du
eune éléphant avec le mastodonte, non-seulement quant
ux particularités des dents, mais méme quant aux propor-
ions des membres, des doigts, etc.
On peut donc regarder comme un fait général, de nature
i être établi de plus en plus solidement à mesure que les
cherches embrasseront un plus vaste terrain, que les
hases du développement embryogénique correspondent,
hez tous les animaux vivants, à l’ordre de succession des
tres qui furent leurs représentants aux époques géologiques
coulées. Aussi loin qu'on aille, les représentants primitifs
le chaque classe peuvent être regardés comme les types
mbryonnaires de leurs familles ou de leurs ordres respec-
ifs existant de nos jours. Les Crinoides pédonculés sont le
ype embryonnaire de Comatuloïdes ; les anciens Échinoïdes
ont les représentants embryonnaires des familles supé-
ieures vivant à l’époque actuelle; les Trilobites, le type em-
bryonnaire des Entomostracés; les Décapodes de l’Oolithe,
selui de nos Crabes; les Ganoides hétérocerques, celui des
Lépidostés ; l'Andrias Scheuchzeri est un prototype em-
yonnaire des Batraciens actuels; les Zeuglodontes sont des
psa embryonnaires; les Mastodontes, des Éléphants
embryonnaires, etc.
- Pour apprécier, toutefois, complétement et exactement,
us ces rapports, il est nécessaire de bien distinguer : 4° les
s embryonnaires en général, qui figurent, dans len-
semble de leur organisation, les degrés primitifs du déve-
loppement chez des représentants plus élevés du même type;
> les traits embryonnaires, qui prédominent, plus ou
10ins fortement, dans les caractères de genres trés-voisins,
le Mastodonte et ’Eléphant par exemple; et, 3° ce que j'ap-
182 DE L’ESPECE.
pellerai les éypes hyper-embr yonnaires, Dans ceux-ci, |
traits embryonnaires s’exagérent considérablement aux p
riodes ultérieures de l'accroissement. Ainsi, par exempl
les ailes des Ghauves-souris ont tous les caractères embryo
naires d’une main palmée comme l’est à l’origine
tous les Mammifères; en continuant à se développer
main est devenue chez la Chauve-souris un organe
au vol, de même que, dans d’autres familles (les Ba
les Tortues de mer), elle prend la forme d’une ne
parce que la liaison des doigts est poussée à l'extrême
traire.
Voilà assez de détails sur ce sujet, qui sera étudié ple
long dans un autre ouvrage. J'en ai dit suffisamment po
montrer que l’Intelligence Directrice, qui se révèle dans
succession des êtres organisés à travers les anciens ige
se manifeste encore, par des combinaisons nouvelles, dé
les phases évolutives des représentants actuels des dive
types. Cela dénote une fois de plus que le même E
créateur a agi dans toute la série des temps, et sur tout
surface actuelle du globe.
XXVII
Types prophétiques.
On vient de voir, dans le précédent paragraphe, que,
certains types, l'état embryonnaire des représentant
rieurs, appelés seulement plus tard à l'existence, é
figuré essentiellement, en quelque sorte, dans les im
de ces mêmes types qui vivaient à une époque anté
Maintenaut que celte corrélation est suffisamment €
on peut considérer les animaux divers d’une période ant
rieure comme manifestant, pour ainsi dire, le modéle s
lequel seront établies les phases de l’évolution d
animaux à une période ultérieure. C’est, dans ces t
reculés, comme la prophétie d'un ordre de choses impossible
- avecles combinaisons zoologiques prédominantes alors, mi
TYPES PROPHETIQUES. 183
qui, réalisé plus tard, attestera d’une manière frappante,
que, dans la gradation des animaux, chaque terme a été
conçu.
Et ce n’est pas là le seul cas, ce n’est pas même le cas
“plus remarquable d’un enchainement prophétique entre
eux faits de date différente.
«De récents travaux en Paléontologie ont fait découvrir,
entre les animaux des âges passés et ceux de l’époque ac-
tuelle, des rapports que n'avaient pas même soupçonnés les
fondateurs de la science. J'ai eu l’occasion de dire précé-
demment que, dans certains types, qui sont d'ordinaire les
plus remarquables parmi ceux des époques primitives, on
jaye, associées dans une combinaison commune, des
rlicularilés de structure qui, à une époque postérieure,
Mexistent plus que séparément et dans des types distinets,
est ainsi qu’on rencontre les Poissons Sauroides avant les
Reptiles, les Piérodactyles ayant les Oiseaux, les Ichthyo-
saures avant les Dauphins, etc.
Presque dans chaque classe, il y a, parmi les animaux des
enips anciens, des familles entières qui, arrivées à parfait
léeloppement, rendent bien patente cette relation prophé-
ique. Elles fournissent ainsi, dans les limites du règne
Wimal, au moins, la preuve la plus inattendue que le plan
le la création tout entière a été mûrement délibéré et
wrété longtemps avant d’être mis à exécution, C’est là ce
qui ; depuis quelques années, je me suis accoutumé à appe-
er types prophétiques, Les Poissons Sauroïdes en sont un
xemple (1). Ces Poissons, dont l'apparition a précédé celle
les Reptiles, réunissent les caractères propres au Poisson et
el x propres au Reptile, par une combinaison spéciale qu’on
Jbserve plus chez les êtres appartenant véritablement à
“lasse des Poissons, telle qu’elle est constituée de nos
irs. Les, Ptérodactyles (2), qui ont précédé sur le globe
asse des Oiseaux, et les Ichthyosaures (3), qui sont yenus
1} Agassiz, Poissons fossiles.
(2) Cuvier, Ossements fossiles, vol. V, p. 2+
Cuvier, [bid.
184 DE L "ESPÈCE.
avant les Cétacés, sont encore des types prophétiques. Ces
exemples suffisent, pour le moment, à rendre sensible la
différence qu’il y a entre les types embre yonnaires et les types
prophétiques. Les types embryonnaires sont, dans une cer:
taine mesure, des types prophétiques; mais ils ne représen-
tent que les particularités de développement des êtres qui
devront plus tard exprimer les degrés supérieurs du même
type général. Les types prophétiques, au contraire, sont le
représentation anticipée de combinaisons structurales qui
plus tard, s’observeront dans deux ou plusieurs types dis
tincts. Ils n’ont pas d’ailleurs, nécessairement, le caractèrt
embryonnaire (ainsi les Singes par rapport à l'Homme), bier
qu'ils puissent, en certains cas, être à la fois embryonnaire
et prophétiques comme on le voit chez les Carnivore;
(Phoques, Plantigrades et Digitigrades), ou mieux encor
chez les Crinoides pédonculés (1). 1
Une autre combinaison encore s’observe fréquemme
chez les animaux. C’est celle d’une série dont les nee
suivent de manière à former une gradation naturelle, mai:
sans rapport immédiat ou nécessaire, soit avec le dévelop
pement embryonnaire, soit avec la succession des types dan
le temps; c’est le cas des Céphalopodes à coquilles, et c’es
ce que j'appelle des types progressifs (2). » d
Enfin, il faut distinguer entre les types prophétiques &
ce que je nommerai les types synthétiques, quoique les un
et les autres soient plus ou moins confondus dans la nature
Les types prophétiques proprement dits sont ceux qui dan
les complications de leur structure présagent d’autres con
binaisons qui seront réalisées plus tard. Les types synthé-
tiques, au contraire, sont ceux qui combinent, avec une pon-
dération savante, les traits de plusieurs types qui n’auron
que plus tard une existence distincte. Les Poissons sau-
roïdes et les Ichthyosaures sont plutôt des types synthéti-
ques que des types prophétiques. Les Ptérodactyles ont à
(1) Voyez section xxvi. a
(2) L. Agassiz, On the Difference belween Progressive, Embryonic 7
Prophetic Types, etc. (Proc. Am. Ass. ag Sc. Cambridge, 1849, p. 132).
SÉRIE ORDINALE ET SERIE EMBRYOLOGIQUE. 485
un plus haut degré le caractére prophétique; il en est de
ce
5,
… même de l'Échinocrinus par rapport aux Echinus; des Pen-
P tremiles par rapport aux Astérioides, et du Pentacrinus par
LS rapport aux Comatules. De plus nombreux exemples sont
toutefois nécessaires pour rendre évidente l’importance des
comparaisons de ce genre, et j’ai donné dans un autre
ouvrage de plus amples détails sur ce sujet (1). J’en ai dit
… assez, je pense, pour faire voir que le caractère de cette
_ sorte de rapports, entre les animaux des âges anciens et ceux
_ de périodes postérieures ou même de l’époque actuelle, fait
ressortir, plus que tout autre grand trait du monde animal,
ef le lien intellectuel qui rattache tous les êtres vivants, à tra-
vers tous les âges, en un seul grand système étroitement
=. enchaîné, du commencement jusqu’à la fin.
XX VIII
- Parallélisme entre la gradation de la structure et l’évolution
embryonnaire.
… Rien ne frappe comme la ressemblance des jeunes des ani-
_ maux supérieurs avec les adultes des types inférieurs. Aussi
1 certains auteurs ont-ils admis que tous les animaux d’un
_ type plus élevé passent, durant les premiers temps de leur
_ développement, par des phases dont chacune correspond à
_ la forme définitive d’un type moins élevé. Cette supposition,
…. résultat d’une connaissance incomplète des faits, a même
… donné lieu à un système de Philosophie de la Nature, qui re-
présente tous les animaux comme des degrés divers du dé-
_ veloppement d’un petit nombre de types primitifs (2). Ces
2 vues ont été naguère propagées dans un ouvrage anonyme
intitulé : Vestiges of Creation, qui a été trop répandu pour
+ “qu il soit besoin de les reproduire ici. J’ai déjà, dans un
(1) Voy. Contributions to the Nat. Hist. of. U. S.
à (2) Lamarck, op. cit. — Teiliamed (De Maillet), Entretiens d’un philosophe
(M indien avec un missionnaire français. Amsterdam, 1748, 2 vol. in-8, —
a Lor. Oken, Lehrbuch der Natur-Philosophie, p, 24. — Vestiges of Creation, etc,
486 DE L’ESPECE.
précédent paragraphe (voy. sect. vin) fait voir que |
animaux ne forment pas une série simple, comme «
devrait résulter d’un développement graduel et succe
Il me reste donc à montrer seulement dans quelles limi
la gradation naturelle, qu’on-peut tracer parmi les différen
types du règne animal (4), correspond aux changeme
qu’ils subissent, avant d'arriver à l’âge adulte. J'ai, en ef
examiné plus haut quel rapport existe entre ces métam
phoses et l’ordre d'apparition des animaux sur la terre, ain
qu'entre cet ordre et la gradation structurale ou le rar
hiérarehique des animaux actuellement vivants. La com
cation de la structure, chez tous les animaux, nous est as
connue pour qu'il nous soit possible de choisir, dans tou
les classes où le développement embryonnaire a été suffisar
ment étudié, les exemples de cette corrélation entre la gras
dation de la structure et l’évolution de l'embryon. Mais il
importe qu'on apprécie combien les traits principaux
règne animal sont étroitement combinés, soit qu’on envisage |
ou la complication de la structure, ou la succession des”
types dans le i PENSER embryonnaire des type sa
types que j'ai Hp pb choisis pour la démonstrat
des autres rapports. |
Chez les Échinodermes, nous trouvons, dans l’ordre
Crinoïdes, les types pédonculés au plus bas degré de Pé-
chelle (2), les Comatules au plus haut, et nous savons que le.
jeune de la Comatule est un Crinoide pedonea qui ne.
devient libre qu'à un âge plus avancé (3), J. Müller a «
montré que, parmi les Echinoides, les représentants les f p
parfaits, les Spatangoides, ne différent que légèrement, di
le jeune age, des Échinoïdes, et pas un zoologiste ne m
tra en doute que ceux-ci ne soient inférieurs à ceux-là,
l'égard des Crustacés, Dana (4) a insisté particulièremer
(1) Voyez ouvr. cités p. 108, 109,133 et Milne Edwards, Considéralions sur
quelques principes relatifs à la classification. :
(2) J.Miiller, Ueber Pentacrinus Caput Meduse. Berlin, 1833, Akad, d, wiss.
(3) Ed. Forbes, Hist. of Brit. Starfishes. Londres, 1854, p. 40.
(4) Dana, op. cit, — Burmeister, Cirripèdes, note 2, p. 126.
SÉRIE ORDINALE ET SERIE EMBRYOLOGIQUE. 487
sur la gradation sériaire qu’on peut tracer entre les diffé-
rents types de Décapodes. L’ordre naturel descend des Bra-
chyures, en passant par les Anomoures, les Macroures, les
Tétradécapodes, etc., jusqu’aux Entomostracés. Or, le carac-
‘tre macrourien de l'embryon des Crabes a été pleinement
“établi par Rathke (1), dans ses admirables recherches sur
.l'embryogénie des Crustacés. J'ai moi-même démontré que
les jeunes des Macroures reproduisent les formes des En-
-tomosiracés, à ce point que certains d’entre eux ont été
écrits comme des espèces de ce dernier ordre (2). J'ai com-
ee expliqué, dans un mémoire spécial (3), la corréla-
lion existant entre la gradation des Insectes et leur évolution
et pimbryonnaire, Des parallèles de même nature ont été faits
dans la classe des Poissons (4). Chez les Reptiles, les Batra-
in fournissent un exemple remarquable du fait (5) (voy.
sect. xu). Parmi les Oiseaux (6), Lous les jeunes ont les pieds
uniformément palmés; c'est encore là une corrélation entre
les petits des ordres supérieurs et les adultes, aux caractères
permanents, des ordres inférieurs. Dans l’ordre des Car-
» nivores, les Phoques, les Plantigrades et les Digitigrades,
- montrent la même correspondance entre la hiérarchie des
représentants de plus en plus élevés d’un même type, et les
changements embryonnaires par lesquels passe successive-
ment le représentant qui occupe le degré supérieur.
Il serait superflu d'ajouter d’autres preuves pour faire voir
que, dans tout le règne animal, il existe la plus étroite cor-
rélation entre la gradation des types et les changements em-
bryonnaires subis par leurs représentants, EL cependant,
quel rapport génésique peut-il exister entre le Pentacrinus
Les Indes Occidentales et les Comatules qui sont de toutes les
ners? Entre les embryons des Spatangoides et ceux des
‘Behinoides ; entre les premiers ét l’Echinus adulte ; entre la
tk hai any hiaabas
(1) Rathke, cité p. 127, note 1.
(2) Twelve Lectures, etc., p. 67.
(3) Classif. of Insects, ete,
| 3 Poissons fossiles, etc.
_ (5) Twelve Lectures, ete., p. 8.
|
i
}
À
|
Vie Lake Superior, etc., p. 194.
188 DE L’ESPECE.
larve du Crabe et le Homard; entre la Chenille d’un Papil-.
Jon etune Teigne adulte ou un Sphynx adulte; entre le Té- :
tard d’un Crapaud et un Ménobranche; entre un jeune.
Chien et un Phoque, si ce n’est la commune subordination —
à un plan arrêté par une Intelligence créatrice ?
XXIX :
Rapports entre la structure, le développement embryonnaire, :
l’ordre de succession géologique et le mode de distribution :
géographique des animaux.
Il faut embrasser, d’un coup d’œil, un champ immense .
et des faits innombrables, pour apercevoir l’ordre qui,
règne dans la distribution géographique des animaux, —
On ne doit done pas s'étonner que cette branche de.
la Zoologie soit restée fort en arrière des autres divisions
de la science. On ne doit pas non plus être surpris que
la géographie des plantes soit beaucoup mieux connue
que celle des animaux. Le tapis de végétation qui re-.
couvre la surface du globe forme un dessin vigoureuse-.
ment accusé, tandis que les combinaisons produites par le
groupement des animaux ne sont guéres visibles. Malgré.
cela, peut-être, un jour, saisira-t-on plus aisément les rela-
tions qu’il y a entre la distribution géographique et les autres
grands rapports généraux du règne animal; car l’échelle des.
différences structurales est plus grande chez les animaux.
que chez les plantes. Dès aujourd'hui même, quelques coin
cidences curieuses tendent à prouver que la distribution géo
graphique des animaux est en rapport direct avec le rang.
qu’ils occupent dans leurs classes respectives, avec leur ordre .
de succession aux âges passés, et aussi, bien que d'une façon |
moins immédiate, avec leur évolution embryonnaire. |
Presque toutes les classes possèdent des familles tropi
cales, et celles-ci ont généralement dans la classe un rang
ieés-dlevé. Quand, au contraire, elles sont situées sur un ni- :
veau évidemment inférieur, il y a, entre elles et les types qui :
SUCCESSION, RANG, DEVELOPPEMENT, DISTRIBUTION. 189
_ ont prévalu aux temps passés, quelque rapport bien saillant.
La classe des Mammifères fournit des exemples remarquables
de ces deux sortes de connexions. En premier lieu, les Qua-
drumanes qui, après l'Homme, occupent le plus haut degré
: de la classe, sont tous des animaux des tropiques. Il est
même digne de remarque que les deux types les plus élevés
5 des Singes anthropomorphes, les Orangs-Outangs de l’Asie
- et les Chimpanzés de l'Afrique Occidentale, doivent à la co-
D ration de leur peau une ressemblance de plus avec les
hommes des races qui habitent les mêmes régions. Les Orangs
… sont cuivrés comme les Malais, et les dopage noirâtres
a
… espèces frugivores sont essentiellement tropicales, tandis
= que celles qui sont plutôt omnivores se rencontrent partout.
_ Parmi les Carnivores, les plus volumineux, les plus puissants
… qui sont aussi du type le plus élevé, les Digitigrades, prédo-
… minent sous les tropiques; mais les Plantigrades les plus
… redoutables, les Ours, vivent dans la zone tempérée ou dans
la zone arctique, et les Phoques, animaux du rang inférieur,
. sont des espèces marines des mers arctiques ou tempérées.
- Parmi les Ruminants, c'est dans les pays chauds que l’on
n trouve la Girafe et les Chameaux; les autres existent partout.
_ Dans la classe des Oiseaux, la gradation n’est pas si évi-
_ dente que dans les autres classes; cependant, c’est dans les
contrées tempérées ou froides que se confinent les représen-
_ tants les plus volumineux du type aquatique, et ce type est
… presque le seul dans la zone arctique, tandis que les Oiseaux
- de haut pays, qui sont d’un rang plus élevé, prédominent
dans les pays chauds.
- Chez les Reptiles, les Crocodiliens appartiennent exclusi-
| | vement à la zone tropicale, la seule aussi où l’on trouve les
| grosses Tortues de terre; les Cheloniens aquatiques, qui
… sont évidemment inférieurs à leurs congénères terrestres,
490 DE L’ESPECE.
s’étendent beaucoup plus haut vers le nord. Les Serperits à :
sonnettes etles Vipéres remontent bien plus, en latitude ou en —
altitude, que les Boas et les Serpents non venimeux. La même —
chose est vraie encore pour les Salamandres et les Tritons. —
Les Requins et les Raies offrent, sous les tropiques, plus |
de variété qu'ailleurs.
C’est également sous les tropiques qu’on trouve les Lépi- —
doptères diurnes les plus brillants; or, ils constituent l’ordre |
le plus élevé de la classe des Jnsectes.
L’ordre le plus haut parmi les Crustacés, celui des Bra-
chyures, a de trés-nombreux représentants dans la zone tor-
ride; mais Dana (4) a fait connaître ce fait, complétement |
inattendu, que les Brachyures n’atteignent, néanmoins, leur
plus haut degré de perfection que dans les contrées moyennes ~
de la région tempérée. Les Anomoures et les Macroures, au |
contraire, sont presque également répartis entre la 55ne.
torride et la zone tempérée. Les Tétradécapodes, type infé-
rieur, sont beaucoup plus nombreux sous les latitudes extra=
tropicales qu’en dedans des tropiques.
Les Céphalopodes sont plus variés dans cette dernière ré- .
gion, et le Nautile est une réminiscence des âges anciens.
Parmi les Gastéropodes, les Stromboïdes appartiennent aux
_tropiques; mais parmi les Acéphales lamellibranches, les —
Naïades, qui me paraissent occuper un rang élevé dans leur
classe, trouvent leur plus grand développement dans les.
eaux douces de l’Amérique du Nord.
Les Échinodermes supérieurs, les Holothuriens et les Spa-
tangoïdes, sont plus variés sous les tropiques, et Jes Echinus, .
les Étoiles de mer, les Ophiures s'étendent jusqu'aux mers
arctiques. La présence du Pentacrinus dans les Indes Occi-.
dentales se rattache, sans aucun doute, à la prédominance |
des Crinoïdes dans les anciens temps géologiques. Les Madré-
pores, qui, de tous les Polypes Actinoides, sont les plus élé-.
vés, sont exclusivement tropicaux; par contre, les Alcyo-.
noides du rang supérieur (Renilla, Veretillum, Pennatula) ©
(4) Dana, Crustacés, etc., p. 1501.
DEPENDANCE MUTUELLE DES ANIMAUX ET DES PLANTES. 491
épassent les tropiques et s'étendent sur la zone tempérée.
Un autre rapport intéressant à signaler entre la distribu-
tion géographique des animaux et leurs représentants aux
âges antérieurs, c'est l'absence de types embryonnaires dans
les régions chaudes. La zone torride ne possède aucun vrai
représentant des périodés géologiques primitives; elle a le
Pentacrinus, mais il ne se rencontre pas au-dessous du Lias;
‘elle à le Nautile, parmi les Céphalopodes, mais rien qui res-
semble à l'Orthocère; on y trouve les Limules, mais rien de
pareil aux Trilobites.
.. L'étude des rapports entre le rang des animaux et leur
distribution géographique rencontre une difficulté très-
_ grande, de l'obscurité même, à certains égards, dans ce fait
que des types tout entiers, caractérisés par une structure
particulière, ont un habitat singulièrement circonscrit. Et
… cependant cela est une nouvelle preuve de l’intime corréla-
tion qu’il y à entre les deux choses. Pourquoi l’Australie
_Wa-t-elle ni Singes, ni Carnivores, ni Rongeurs, ni Pachy-
…lermes, ni Édentés? C’est ce que je n'ai pas à expliquer ;
Mais tout zovlogiste sait qu’il en est ainsi; il n’ignore pas que
Jes Marsupiaux (1) de ce continent représentent en quelque
forte, par les modifications de leur structure spéciale, les
iutres ordres de Mammiféres. L'Australie apparaît donc
‘comme un continent qui aurait conservé les caractères des
Nieux âges géologiques. Dès lors il n’est personne qui ne
omprenne de quel haut intérêt pour la classification sera
‘ne connaissance plus étendue de la distribution générale
des animaux et des particularités de structure propres aux
; pes localisés.
XXX
k Foi savait fort bien depuis longtemps, par les expériences
tle De Saussure, que la respiration s’accomplit d’une manière
492 DE L'ESPÈCE.
différente chez les animaux et chez les plantes, et que, si les
premiers absorbent de l'air atmosphérique pour exhaler de
l'acide carbonique, les secondes s’approprient le carbone et
exhalent l'oxygène. Mais ce furent seulement les travaux de
Dumas et Boussingault (1) qui, en appelant d’une façon par-
ticulière l’attention des naturalistes sur ce sujet, firent bien
comprendre la mutuelle dépendance où sont l’un de l’autre,
à cet égard, le règne animal et le règne végétal. On sut
que l’un produit ce que l’autre consomme et vice versé, de
manière à rétablir l’équilibre que chacun d’eux isolément
ne manquerait pas de troubler, dans une certaine mesure.
La pratique agricole usuelle de la fumure des terres montre,
d’un autre côté, cette réciprocité d'action d’un règne sur
l'autre. Les parties non digérées de l’aliment des animaux
retournent au sol et le fertilisent pour une nouvelle pro-
duction végétale (2). De plus, directement ou indirectement,
le règne animal tout entier a un besoin absolu du règne.
végétal pour sa subsistance, car les Herbivores préparent.
l'aliment nécessaire aux Carnivores. Nous sommes bien loin
du temps où l’on croyait que les Vers étaient engendrés par
la pourriture des fruits ou d’autres substances végétales, et
il est inutile de répéter ici ce que l’on sait du mode de repro-
duction de ces animaux. Il n’est pas non plus nécessaire de:
montrer la grande absurdité de l'hypothèse suivant laquelle
les plantes auraient été produites, en premier lieu, par les
agents physiques, pour donner ensuite, elles-mêmes, nais-
sance aux animaux. Qui donc aurait inspiré aux agents phy=
siques de rendre le monde animal tout entier dépendant du
monde végétal?..
Non; des hits 9 aussi généraux prouvent, plus directement
qu’une masse de faits particuliers et sans liaison, l’établisse=
ment d’un ordre de choses parfaitement réglé et dont toutes!
les dispositions ont été prévues et combinées à l’avance. lls
dénotent, en effet, des conditions d’existence savamment
F
(1) Dumas, Leçons sur la stalique chimique des êtres organisés (Ann. se.
nalur., 2° série, vol. VI, p. 33 ; vol. XVII, p. 122). Te
(2) Liebig, Chimie agricole. — Chimie animale. =
pees st
PARASITISME. 193
équilibrées, préparées de longue main et telles que, seul, un
re Pniigent a pu les ordonner.
XXXI
Animaux et Plantes parasites.
Si indépendants que les animaux puissent paraître les uns
as autres, il en est cependant qui, pour vivre, ont besoin
être en connexion intime avec d autres créatures animées,
nt les Vers intestinaux et toute la vermine de la peau (1).
armi les plantes, de nombreuses Orchidées, des Bromé-
acées, le Gui, l’Orobranche, le Rafflesia, peuvent être cités
mme d’autres exemples remarquables de parasitisme.
Les parasites appartenant au règne animal présentent une
‘yariété trés-grande. Il faudrait des volumes pour les dé-
rire et en faire l’histoire, car leurs relations, avec les ani-
Maux ou les plantes dont leur existence dépend, sont aussi
Yariées que leurs formes mêmes et leur structure.
Or, un fait d’une importance extrême et à noter tout d’a-
‘De rd, c’est que, par eux-mêmes, ces parasites ne constituent
is une grande division du règne animal. Il y a des para-
Sites dans tous les embranchements, il y en a dans presque
toutes les classes, et, dans aucune, ils ne constituent un
‘ordre naturel. De plus, le même tube intestinal est habité
ar des parasites différents. Ce sont là des faits significatifs.
ls prouvent que le parasitisme n’a point pour fondement
le ou telle combinaison particulière des traits essentiels
la structure des animaux, mais bien certaines corrélations
(1) Voyez les notes bibliographiques de la section xix, et K. A. Rudolphi,
Entozoorum sive Vermium, etc. — J. G. Bremser, Ueber lebende Wiirmer im
lebenden Menschen. Wien, 1819, in-4, — F, Dujardin, Hist. nat. des Hel-
i hinthes, etc. — C. M. Diesing, Historia Vermium, etc. — Fr. Kuchenmeister,
in und an dem Kürper des lebenden Menschen vorkommenden Parasiten,
pzig, in-8, 1855. — R. Leuckart, Parasiten in Parasitismus (Vierord’s
chiv, 1852). — Ch. Robin, Histoire naturelle des végélaux parasites qui
lissent sur l’homme et sur les animaux vivants. Paris, 1853, in 8.
_ AGASSIZ. 13
494 DE L’ESPECE.
d’un caractère principalement spécifique. Les parasites n
sont pas non plus, à l'égard des autres êtres organisés qu
les supportent, dans une dépendance toujours égalemen
étroite. Pour quelques-uns, tout se borne à vivre aux dé
pens d’un autre animal. Certains d’entre eux, au contraire
ont, avec l’être sur lequel ils se développent et se multi
plient, une connexion si intime qu’ils meurent bientôt si o1
les transporte sur un individu d’une autre espèce. Il n’y
pas, non plus, une catégorie spéciale d'animaux servant d
proie aux parasites, loin de là, chaque animal a les siens
On compte bien peu de parasites, à proprement parler
parmi les Vertébrés. Il n’y en a aucun qui soit Mammifère
Chez les Oiseaux, quelques espèces, peu nombreuses, dépen
dent des autres pour faire couver et éclore leurs œufs ; tel
sont le Coucou d'Europe et le « Cowbird » de l'Amérique di
Nord. Chez les Poissons, quelques petits Ophidiums (Fieras
fers) pénètrent dans la cavité du corps des grosses Holo
thuries et y font leur séjour (1). L'Echeneis s'attache |
d’autres Poissons, mais temporairement.
Parmi les Articulés, le nombre des parasites est trés-grand
Il semble que ce soit le vrai caractère de cette classe, s
remarquable par l'expansion extérieure de toute son organi
sation, de contenir la variété la plus considérable de para
sites. C’est en effet dans son sein que s’observent les combinai
sons les plus extraordinaires de ce singulier mode d'existence
Les Insectes, en général, sont bien plus étroitement que le
grands Herbivores dans la dépendance des plantes qui le
nourrissent. C’est à ce point que la plupart d’entre eux sont
pendant toute leur existence, astreints à vivre sur une espèc
végétale unique ; par exemple les Pucerons, les Cochenill
les Gallinsectes (Cynips). Chez quelques autres, la larve seul
est réduite à s’alimenter d’une plante spéciale, et, chez d’autré
encore, comme les Cistres, les larves se développent sous |
peau, ou dans l'intestin, ou à l’intérieur des cavités nasales ¢
certains animaux. Les Ichneumons déposent leurs œufs dam
(1) Voyez ci-dessus page 119, note 4, *
PARASITISME. 195
es larves d’autres Insectes, que leurs jeunes dévoreront jus-
d'à ce qu'ils se transforment. Parmi les Insectes parfaits, il
yena qui ne vivent qu'en communauté, tels sont les Four-
les Clavigères, les Clérus, les Abeilles. Quelques espèces
le Fourmis vivent, toutefois, sinon comme des parasites les
les sur les autres, au moins les unes aux dépens d’autres
duites à une sorte d’esclavage. Il y a enfin des Insectes qui
| sur le corps des animaux à sang chaud, comme les
, les Puces, et de ceux-là le nom est légion. Quelques
ly fdracnées sont parasites de Mollusques aquatiques (1).
‘Parmi les Crustacés, il est des Crabes qui vivent dans la
quille de certains Mollusques, par exemple Jes Pinno-
eg de l'Huître et de la Moule. J’en ai trouvé une autre
èce sur des Oursins (Pinnotheres Melitta, nouvelle espèce,
ir le Melitta quinguefora). Les Pagures prennent la co-
wille des Mollusques pour s’en faire un abri, et nombre
Amphipodes vivent sur les Poissons, attachés aux one
(la langue, à la peau, ou sur les Étoiles de mer (2). L
hjamus Ceti vit sur la Baleine. Quelques Cirripèdes sant
arasites des Baleines, d’autres le sont des Coraux. Dans la
mille des Lernéens, les femelles vivent principalement en
rasites sur les branchies, les nageoires ou le corps des
À vissons, tandis que les males sont ‘tadépendati,
Ce mode d'existence est encore plus fréquent chez les
ers. Tandis que quelques-uns d’entre eux se bornent à
wre au milieu des Coraux, il en est d’autres dont les familles
tières ne sont formées que de véritables parasites. Ici,
core, nous trouvons les relations les plus variées. Certains
ts, en effet, sont constamment parasites et d’autres ne le
Pr.
) Chr. L. Nitzsch, Darstellung der Familien und Gattungen der Thierin-
en. Halle, 1818, in-8. — C. v. Hayden, Versuch einer systematischen
ntheilung der Acariden, Isis, 1826, p. 608. — J. S. C. Ratzenburg, Die
iteumonen der Forstinsekten. Berlin, 4844-52, 3 vol. in-4, fig. — Br. Clark,
sé vations on ihe Genus Oestrus (Trans. Lin. Soc., lll, p. 289, fig.). —
Ai. Koch, Die Pflansen-Lüuse, Aphiden. Nürnberg, 1846, in-8, fig. —
ul | Dugés, Recherches sur l’ordre des Acariens (Ann. se. nat., 2° sér!, 1834,
PB. 5; 11, p. 18, fig.).
L j ai trouvé un nouveau genre de cette famille sur des Astéries Hélian-
8,
496 DE L’ESPECE.
sont que durant une certaine période de leur vie. Les jeune
du Gordius sont des animaux indépendants; à un cert
moment, ils s’insinuent dans le corps d’un Insecte, puis
l’abandonnent quand l’heure de la propagation est venue. |
jeune Distôme vit librement dans l’eau, à l’état de Gercaire
puis il passe le reste de sa vie dans le corps d’un autre ani
mal. Le Tænia, au contraire, ne cesse jamais d’être parasi
etiln’y a que ses œufs qui circulent d’un animal à un autre
mais chez lui, comme chez quelques autres Vers intestinaux
il se passe un fait remarquable. Les premières transfor
mations du parasite s’accomplissent dans le corps d’u
animal d’une certaine espèce, il ne pourra toutefois com
pléter son développement que dans le corps d’un autre an
mal, d’espéce différente et supérieure à la première. Il fat
qu’il soit avalé par ce second hôte, avec la chair de l’hÔ
précédent. C’est le cas de quelques Filaires, des Tzenias |
des Bothriocéphales. Ils habitent d’abord le corps de Poi
sons inférieurs qui sont avalés par des Requins ou des @
seaux aquatiques, ou celui de Souris qui sont à leur tot
dévorées par des Chats, et c’est dans l'intestin de son derni
nourricier que le parasite subit sa transformation définitiy
Quelques Vers effectuent des migrations étendues, à trave
les corps d’autres animaux, avant de rencontrer le mili
convenable à leur développement final (1). :
On compte peu de parasites parmi les Mollusques,
même il en est qu'on puisse véritablement appeler de
nom. On pourrait citer, comme exemples, les mâles de qui
ques Céphalopodes qui n’abandonnent jamais le corps.
leurs femelles (2), les Gastéropodes qui se développent
sein des Coraux (3), le Litholomus et une variété d’Ar
trouvée dans les Coraux. .
(1) Voyez, outre les ouvrages déjà cités, notamment section x1x, D. We
land, The Plan adopted by nature for the Preservation of the various s
of Helminthes (Proc. Bost. nat. Hist. Soc., 1858).
(2) Voy. ouvr. cit., sect: xix. +
(3) Ed. Rüppell, Mémoire sur le Magilus antiquus (Trans. Soc., Strasb.
4832, t. I, fig.) ‘à
PARASITISME. 497
_A proprement parler, il n’y a pas de Rayonnés parasites.
On notera cependant que plusieurs d’entre eux s’attachent
> préférence à certaines plantes et que les jeunes de quel-
nes autres demeurent en continuité avec leur parent (tous
s Coraux, par exemple, et méme quelques Crinoides,
comme la Comatule de Charleston).
Dans tous ces divers eas, la probabilité que des étres
issi singuliers soient, à un degré quelconque, le produit
s forces physiques, est moindre encore que dans le cas
animaux indépendants. Effectivement, ici, au fait de
xistence des animaux eux-mêmes s'ajoutent toutes les con-
tions si compliquées de leur manière de vivre et toute la
ariété de leurs rapports avec d’autres organismes. Or, si,
ss relations existant entre les êtres indépendants, on peut
\ conclure que les circonstances extérieures n’ont pas
1 devenir la cause de leur existence, combien moins encore
erait-on autorisé à attribuer aux parasites une origine
ussi simple! On a supposé, il est vrai, qu’ils avaient pris
ussance dans le corps des animaux aux dépens desquels
se nourrissent. Mais alors, que dire de ceux qui, comme
Gordius, ne s’introduisent dans le corps de leur victime qu’à
n degré déjà tant soit peu avancé de développement ? Et
i d’un animal supérieur, pour accomplir leurs méta-
orphoses, et chez lesquels cette succession de gîtes est la
ele?... Dira-t-on que cet arrangement a été imaginé par
pene victime, ou imposé par elle a la Fri ou
Le es. À moins, toutefois, qu'on ne considère les animaux
“ix-mêmes comme des forces physiques, par rapport aux
198 DE L ESPÈCE.
parasites qu’ils entretiennent. S'il en est ainsi, pourquoi
victime ne parvient-elle pas à s’én débarrasser aussi hier
qu’à les produire? Car il n’est pas supposable que tout cel
puisse avoir lieu sans qu’elle en ait conscience, puisque les
parasites sont, quant à la structure, en corrélation si intimt
avec les types divers auxquels ils sont spéciaux. =
L'existence de parasites particuliers à des types si nom:
breux et si variés, dans le règne animal aussi bien que dan
le règne végétal, est un fait d’une signification profonde
que l'Homme lui-même ne saurait trop sérieusement mi
diter. Admirons ces merveilles, mais comprenons le}
seignement qu’elles renferment et ne nous glorifions pa
trop d’une indépendance, d’ailleurs réelle, Tous les rapport
dans la nature sont réglés par une sagesse supérieure
Apprenons donc, enfin, à nous conformer, dans les limite
de notre sphère propre, aux lois assignées à chaque race! —
XXXII
Combinaison dans le temps et dans l’espace de divers rappor
qui s’observent chez les animaux. if
Pour peu que la pensée se concentre sur les rapports 1 m
tuels ou le parallélisme que présentent, les uns à l’éga
des autres, tous ces caractères du règne animal, tirés
structure, de Pembryologie, de la géologie, de la g
phie, on est saisi par l’évidence de cette conclusion :
ces choses ont été établies par un Esprit réfléchis
constituent en même temps le côté de la nature le plus:
sible à notre intelligence, dès que celle-ci s’efforce de
trer la relation des êtres finis avec leur cause.
Les phénomènes du monde inorganique, comparés i
du monde organique, sont tous très- simples. Pas un desg
agents physiques, électricité, magnétisme, caloriqu
miére , affinité chimique, ne présente, dans la sphère
tivité qui lui est propre, des phénomènes aussi compliqu
_ COINCIDENCES ENTRE LE MONDE ORG. ET LE MONDE INORG. 199
ceux dont le dernier des êtres organisés nous rend té-
ins. Au contraire, il n’est pas besoin de s’adresser au plus
vé de ces êtres pour retrouver, à côté des phénomènes
clusivement propres à la vie, les mêmes phénomènes
bysiques qui se produisent dans le monde purement ma-
iel. Puis, donc, que le corps organisé renferme tout ce
e contient le monde inanimé, plus une puissance qui lui
propre, comment aurait-il été produit par les agents
hysiques? Si les physiciens, familiers avec les lois du
nde inorganique, reconnaissent que ces lois doivent avoir
établies au commencement des choses, comment nie-
aient-ils que, à fortiori, les lois infiniment complexes du
onde vivant ont dû être établies après les autres, suc-
cessivement, et au fur et à mesure de la création des types
égétaux et animaux. En effet, pendant une longue période
n’y a pas trace, à la surface de la terre, de l'existence du
nonde organique.
Jusqu'à présent, ce sont les contrastes existant entre le
nonde organique et lé monde inorganique (1) que nous
avons toujours recherchés et examinés. Au point où nous
en sommes venus, il n’est peut-être pas hors dé propos de
a été établi conformément à des lois qui atteignent aussi les
de vivants. Ainsi, dans la sphère de chaque pill or-
ement des feuilles d’une Die (2) peut être représenté
jar une série trés-simple de fractions qui, toutes, sont ou
§ approximations graduelles vers la moyenne arithmé-
ique des quantités 1/2 et 1/3, ou cette moyenne elle-même.
intre ces deux limites, maximum et minimum, varie l’écar-
ent observé entre deux feuilles consécutives. La série
lormale exprimant les diverses combinaisons qu’on observe
1) Voy. sections xxv, XxVI, XXVII, XXVIII, XXIX, XXX ef XXXI.
# (2) Voy. les ouvrages cités p. 24, note 3, — Wright (C.), On fhe Phylla-
: Astr. Journ,, vol. V, déc, 1856.
el
a
200 DE L’ESPECE.
suivante :
Or, en comparant cet arrangement des feuilles sur Pa
qui les supporie, avec les révolutions des globes qui fo
partie de notre systéme solaire, Peirce a découvert la plus
parfaite identité entre les lois fondamentales qui réglent I’
et celles qui gouvernent les autres. C’est ce qu’on peut vo
d’un coup d’œil, au moyen du diagramme suivant. La pre-
miére colonne contient le nom des planètes; la deuxième
donne, exprimé en jours, les temps vrais de leur révolution
sidérale ; dans la troisième sont inscrites les durées de cette
même révolution, telles qu'elles seraient dans l’hypothè
où chacun des nombres qui les indiquent serait, avec celui
qui le précède ou celui qui le suit, dans le rapport exprimé |
par un des termes de la série phyllotaxique ; là quatrième
enfin est la suite des fractions qui représente la loi de l'ar- À
rangement des feuilles.
Noeptanes fo COMBI Ak. 62,000
Uranus, 6 320,687: 41; 34 0002 res
Saturne. sons 40,280 4 à 10,388 y 3
ABD ss RAR, Là 5 4432, Rees 2
Astéroïdes. . . 1,200 2,000. . 4,550..... 2
MU ri: GEL sue st à DIS
La. Terre". 6; | BOB. , 4. . . . 960, +0
wee ee ee 227. ‘Hs
Mercure. . . . PU a ae 87 43
.
.
.
.
.
wo
-
Dans cette série, la Terre forme une lacune; mais il
aisé d’expliquer cette irrégularité apparente. Les fracti
4/2, 1/3, 2/5, 3/8, 5/13, 8/21, 13/3h dont chacune faite
naitre, pour une plante, la place que prennent successivem
les feuilles en s’enroulant le long de la tige, par la voie
plus courte, sont identiques, quant à leur signification, ay
celles qui expriment ces mémes positions par la voie la p
longue : 1/2, 2/3, 3/5, 5/8, 8/13, 13/24, 24/34, etc.
Neptune, . 6: «F255», 02000... ...,. 60,429
2 BOUL sy. : “prie
Re ie US SION ca ps 30,687
; D sc — ——
POING. i. be ys, à + ROG 1 dr, 10,759
» Durs» 00,869 0
dopitér (cs BST RABI Css 4,333
> MA ob ete ——
Astéroides. . . 3 ... BRO woes 1,200
» Bie cire 968... di ie
Mars. sde HD ed à 687
La Terre. ..4. 4664 «4e 365
RENTE 227. 225
> Pak ue OR Susi.
Mercure, 55 5 2 4 : 87... « 88
que l’ordre normal des fractions effectives est réellement :
4, 1/3, 2/5, 3/8, 5/13, etc., c’est-à-dire celle de larran-
sement des feuilles par la voie la plus courte. La Terre est
exclue de cette série, tandis qu'elle forme un terme de la
série d’ascension par la voie la plus longue. L’explication
de ce fait proposée par Peirce est celle-ci : La tendance
4 la formation d’une planète n’est pas suffisante à la fin d’un
4 ntervalle simple, mais elle devient tellement forte, vers la
limite d’un second intervalle, que la planète ne se rencontre
qu’en dehors de cette limite. Ainsi Uranus est un peu trop
loin du Soleil, relativement à Neptune; de même, Saturne
| relativement à Uranus, et Jupiter relativement à Saturne.
Les planètes ainsi formées condensent autour de leur centre
| une quantité de matière proportionnellement trop considé-
/ rable; c’est notamment le cas pour Jupiter. A l'égard des
Astéroïdes, la force est suffisante à la fin d’un seul inter-
| valle. Aussi l’astéroïde le plus extérieur n’est-il que bien
Le
202 DE L’ESPECE.
juste dans la limite de cet intervalle et toute la matière d
ces corps est disséminée sur un espace immense, en masse
séparées, au lieu d’être concentrée en une seule planète.
conséquence de cette dispersion des forces plastiques, la pro
portion de matière absorbée par les Astéroïdes est petite
Mars, qui vient ensuite, est déjà, quand il se forme, tellemen
en dehors de sa vraie tilace qué, une fois l'intervalle suivant
franchi, la force qui reste est assez puissante pour donner
naissance à la Terre. Après quoi, la loi normale reprend son
cours, sans plus de perturbation. Suivant, cette loi, il ne peut
y avoir de planète extérieure à Neptune, mais il peut en.
exister une intérieure à Mercure. . PE
Et maintenant, jetons un coup. d’œil en arriére sur le
traits généraux du régne animal que nous avons passés e
revue. Laissons de côté les relations, plus simples, des être
organisés avec le monde ambiant et celles d’individu à ind
vidu. Considérons seulement les différentes séries parallèles:
dont la confrontation nous a montré, dans chacun des grands
types du règne, la mutuelle corrélation des phénomènes de
la vie animale. Nous avons comparé soit le rang, tel que le
détermine la complication de la structure, avec les phases des
l'accroissement ou avec la succession des êtres à travers les
âges; soit l’ordre de cette succession avec l’évolution €
_ bryonnaire; soit enfin toutes ces relations, entre elles
avec la distribution géographique des animaux. Partout c’e
la même série (1)! Les mêmes faits sont vrais dans tou
les grandes divisions du régne animal, aussi loin qu’on à
poussé les recherches. Et si, faute de matériaux, l’enchi
ment des témoignages est incomplet sur quelques poi
il n’en suffit pas moins à prouver qu’une loi a été étab.
el que, en vertu de cette loi, il existe, entre tous les tr
généraux, une correspondance universelle qui relie, par un
lien intellectuel et intelligible, tous les êtres organisés de tous
les temps en un seul grand système. Qu’importe si quelqu
(1) Cf. toutes les sections précédentes où chacun de ces points a été e
miné isolément.
LA PENSEE ECLATE DANS TOUS CES RAPPORTS. 203
“anneaux de la chaîne sont perdus! Mais une connaissance
intime et profonde du sujet peut seule permettre à l'esprit de
Saisir cette démonstration ; car, même confusément entrevue,
cette vérité constitue le siaaliat le plus brillant des i
“intellectuels combinés de centaines d’observateurs, pendant
un demi- siécle.
Je privilége, encore plus rare, d’un petit nombre d’esprits
supérieurs; — si la facullé de suivre à la fois plusieurs
enchainements d’idées distincts est un don assez extraor-
le petit nombre d’exemples (César dictant à la fois plusieurs
lettres à ses secrétaires), bien que cela dénote, en somme,
la simple capacité de passer rapidement d’un sujet à un
autre, sans perdre le fil de plusieurs idées parallèlement
“développées; — si tout cela n'appartient qu’au pouvoir in-
tellectuel le plus fort, par quelle aberration du jugement
| énier à une Intelligence Suprême l’œuvre de ces comhinal-
De cammes sont jeux d’enfant?
| Pour peu que j’aie réussi à montrer dans les rapports
divers observés entre les animaux et le monde physique,
oh entre les animaux eux-mémes, anane chose d intelli-
ent, il s’ensuit que le Tout est dû à un Auteur Intelligent.
ni n’est peut-être pas hors de propos, alors, de chercher à
ndiquer, autant que cela est possible, la différence qu'il y a
entre la Pensée Divine et la pensée humaine.
… | Prenant pour guide la nature, où la pensée se mani-
feste, je trouve que la pensée humaine est consécutive. Au
(4) L. Agassiz, Contemplations of God in the Kosmos (Christian Examiner.
= janv. 1851),
204 DE L’ESPECE.
contraire, la pensée divine est simultanée. Elle embrasse,
au même instant et pour toujours, dans le passé, dans 1e
présent et dans l'avenir, les rapports extrêmement diversi=.
fiés qui existent entre des millions d'êtres organisés d’une
complication telle, que, pour en étudier et en comprendre, —
même imparfaitement, un seul, l'Homme par exemple, l'Hu=«
manité a employé des milliers d'années. Oui; toutes ces
choses ont été faites par un Esprit; toutes sont nécessairement
l'œuvre d’un Esprit seul, de Celui devant lequel l'Homme
ne peut que s’humilier, pour reconnaître, avec une ineffable —
gratitude, les prérogatives dont, sans parler des pence
d’une vie future, il lui a été donné de jouir dans ce monde
Dans mon argumentation sur ces problèmes purement
métaphysiques, j'ai volontairement omis quelques points, —
afin de ne pas étendre outre mesure un débat qui, dans le
plan de cet ouvrage, n’est en définitive qu’accessoire. Je me
crois justifié de l'avoir fait, parce que, au point de vue où
j'ai traité mon sujet, ces questions trouvent une solution
ce que l'intelligence de l’homme peut produire; nous
connaissons sa puissance de création, sa puissance de
combinaison, de prévision, d’analyse, de synthèse. Nous
sommes, par conséquent, tout préparés à reconnaître une
d'une Intelligence Suprême. Il serait donc superflu de
vouloir démontrer qu'une telle Intelligence a pu crée
l'Univers et tout ce qu’il contient. Il suffit de prouver qu +
la constitution du monde physique et, plus particulièrement,
les rapports établis entre lui et les êtres vivants attestent,
en général, l'existence d'un Être Suprême, Auteur de
toutes choses. Le rôle de la science est d'étudier ce qui
a été fait, de rechercher, autant que cela est accessible,
comment les choses ont été faites, plutôt que de scruter
ce qui est possible à la Divinité. Car nous ne pouvons ~
connaître ce qui aurait pu être que par ce qui existe réelle-
ment. Pour détruire cette thèse, ceux qui nient linterven-
tion dans la nature d’une Intelligence Créatrice, devraient —
L'HOMME PRIMITIF. 205
ices finis est, de sa nature, une cause possible. Or, c’est ce
qu on ne peut pas nier d’un Être doué des attributs que
4
quand nous avons prouvé qu’il existe. Il serait cependant à
désirer que tout naturaliste, amené par l'étude à une con-
_ clusion semblable, reprit de nouveau le sujet au point de
vue particulier de ses recherches spéciales; alors, seulement,
al évidence se manifestera dans toute sa clarté.
_ Dès aujourd’hui, j’entrevois que des arguments d’une
grande valeur pourraient être empruntés à la morphologie
des plantes, spécialement au mode de succession et à la com-
“binaison systématique des différentes sortes de feuilles qui
; - produisent le feuillage et la fleur de ces végétaux innom-
… brables, dont le développement a pour terme une infinie va-
… riété de fruits. Le monde inorganique, envisagé à la même
3 lumière, ne manquerait pas de fournir, lui aussi, un témoi-
“ gnage inattendu en faveur d’une Cause Intelligente, dans le
- caractère des lois qui régissent les combinaisons chimiques,
M l’action des forces physiques, l'attraction universelle, etc.
_ L'histoire elle-même de la culture de l'humanité devrait
… être étudiée à ce même point de vue. Mais je laisse à de plus
_ capables le soin de discuter ces choses.
XXXIITI
L'Age primitif de l'Humanité.
A mesure que nos connaissances en Géologie se sont pré-
ae on a pu “ee Faire des hemes antérieurs a
s'est, alors, posée d’une manière x pressante. Depuis
quelques années, on s’occupe beaucoup de l Homme fossile.
Je n’aime pas cette expression, par la raison bien simple que
206 DE L’ESPECE.
fini. Dans l’enfance de la Paléontologie, on a appelé fossi
tous les débris laissés dans les couches de la terre, par ¢
êtres organisés dont on pensait que la disparition avait pré
cédé la venue de l'Homme. Le terme fossile, appliqué d’a-
bord au gisement et au mode de conservation, a pris ainsi
un sens chronologique; on en est venu à le considéret
comme synonyme de ces mots : antérieur à l'homme. Cette
interprétation remonte à l’époque où toutes les espèces ani
males éteintes étaient regardées comme ayant précédé l’exis
tence de l'Homme. L'apparition de l'humanité sur la terr
formait ainsi le point de démarcation entre les êtres fossiles
et les êtres vivants. Pendant longtemps, aucune autre distine
tion n’a été faite entre les animaux actuels et ceux qui ont
vécu autrefois à la surface du globe. On considérait comme
de notre époque ceux qui nous sont encore aujourd’hu
associés, et l’on rapportait au monde primitif ceux qui ont
existé antérieurement. Il fallut toutefois reconnaître que ce
monde primitif ne constitue pas une ère unique. On y dis=
tingua des périodes, des époques, des âges successifs. On
parvint à établir des coincidences entre les grands chan-
gements physiques survenus à la surface du globe et la
disparition d’ensembles, tout entiers, d'animaux plus ou
moins nombreux : on vérifia la contemporanéité de certains”
événements physiques avec certaines phases de la distribu
tion des êtres qui composent le règne animal. Cette étud
suivie constitue l’histoire de la science durant notre siècle
Elle a produit toutes ces vues de systèmes géologiques, 0
de périodes, d’époques, d’horizons géologiques, de syn-
chronisme entre le soulèvement des montagnes et l’appari-
tion ou la disparition des faunes successives, toutes ces idées
qui sont le domaine de la Géologie et de la Paléontologie:
Il n'entre point dans le plan de mon ouvrage de discut
la valeur de ces périodes ou le caractère de ces faunes, leur
enchainement, leur mode respectif de distribution. Il me,
suffit de constater un fait admis aujourd’hui par tous les.
géologues : c’est que, à différentes époques, le globe a pré-
senté une constitution physique différente et a été habité |
tL’ HOMME PRIMITIF. 207
jar des êtres différents et distincts. Or, à mesure que cette
notion devenait plus précise, à mesure que les divisions se
isaient plus nombreuses et plus restreintes, les époques
géologiques ont été resserrées entre des limites de temps
ilus étroites et les faunes circonscrites dans des aires plus
héduites. On a vu qu’il y avait des types d’animaux dont
istence se poursuivait pendant de longues périodes, et
d'autres dont la durée embrassait des espaces de temps plus
ourts. En dernier lieu, il a été démontré que nombre d’es-
péces, d’abord jugées antérieures à la présence de l'Homme,
avaient été contemporaines du genre humain. Cette décou-
jerte a suscité des questions d’un ordre tout à fait nouveau
lont la solution est difficile, d’autant plus que le problème
Ouche à certains côtés de l’histoire physique de l'Homme,
ur lesquels la lumière est loin d’être faite. Tous les pro-
lèmes auxquels avaient d’abord donné lieu les distinctions
faire entre les fossiles de différentes périodes, et l'époque
€ leur existence, toutes les difficultés nées de la diversité
is formes spécifiques à des âges géologiques différents, ont
6 soulevées de nouveau à propos de l'Homme lui-même.
Lorsqu'on a découvert les premières traces d’Éléphant
fossile, on a pu croire que c’étaient des débris d’Eléphant
T moderne. Il en a été de même pour tous les représentants
länciens des familles et des genres actuels. Il a fallu que les
Savantes comparaisons de G. Cuvier vinssent établir d’une
manière incontestable que certaines espèces sont, suivant
lexpression consacrée, des espèces perdues. On sait à pré-
se t que ces espèces-là, comparées à celles de nos jours,
ne sont pas, à proprement parler, perdues, car elles n’ont
pas vécu en même temps que les espèces rencontrées
Bpurd: hui sur les différents points du globe. Dans l’his-
e du développement du régne animal, elles appartien-
lent à des époques antérieures. Maintenant, donc, que lon
écouvre des preuves de la présence de l'Homme, parmi les
débris d'animaux dont le genre et l'espèce n’existent plus
ans les mêmes lieux, on se demande, à bon droit, si ces
estes de l'Homme peuvent être rapportés aux différents
D
ù
Fi
i
:
ee
FA
toi
vs
208 DE L’ESPECE. :
types de l'Humanité qui habitent encore à cette hema é
surface terrestre. On est forcément conduit à discuter, d
nouveau et à un autre point de vue, cette question de =
du genre humain, déjà si difficile en elle-même, et qui se
complique ainsi d’un élément chronologique, toujours né:
gligé jusqu'alors dans les études dont l'Homme avait été l’obje
Avant de pouvoir aborder la question de Homme fossile
au point de vue chronologique, il faut nécessairement si
faire une idée précise de la nature des rapports qui existen
entre les divers types de l'Humanité répandus sur le globe
Cest là que git la dificulté principale. Si toutes les forme
humaines, quelque diverses qu’elles soient, appartiennent à
une espèce unique; si le Nègre, le Hottentot, l’Abyssin, le
Cafre, le Mozambique, le Sénégalais sont des peuplades
d'une même race; si cette race n’est elle-même qu’une va
riété parmi les autres races qui peuplent d’autres conti-
nents; si l’Australien, le Négrillot, le Papou sont simplement
d’autres variétés et d’autres peuplades de la race nègre; si
les Japonais, les Chinois, les Tartares ne sont que des peuple
de la race Mongole ; si les Hindous, les Assyriens, les Persans
les Égyptiens, les Berbéres et toutes ces nationalités qu’0
appelle Indo-Germaniques sont de pures modifications d’un
seule et même race; si les Indiens de l'Amérique du Nord e
les Indiens de l'Amérique du Sud différent au même degré
seulement comme représentants d’une autre race; si le
Esquimaux, les Lapons, les Samoïèdes, les Tongouzes, le
Patagons; si, en un mot, tous les hommes, quelles qu
soient leurs différences physiques, doivent être envisagé
comme des représentants d’une seule et même espèce,
question de l'Homme fossile n’a plus qu'une importa
secondaire. La seule valeur de cette étude est d’aboutir a
cette constatation que l'Humanité apparut bien avant la date
fixée jusqu’à présent par la Chronologie. Tout ce vaste.
semble de connaissances, fruit des études archéologique
relatives à l'Homme, se réduit, dès lors, à démontrer la
fausseté des chronologies les plus accréditées, |’ inexactitude
des traditions, bref, l'insuffisance des données historiques
L'HOMME PRIMITIF, 209
pour nous apprendre quels furent les commencements du
genre humain.
… fl importe donc, avant tout, de bien préciser les termes
de comparaison qui doivent entrer dans l’investigation
dont l'Homme primitif est l'objet. Il ne faut pas se mé-
prendre sur le problème; la première chose à savoir n’est
pas quelle peut être l'origine du genre humain. Nous devons
dégager notre recherche des discussions qui se rattachent à
| l'hypothèse de la transformation des êtres organisés. Ce qu ‘il
faut, c’est prendre l'Homme tel qu’on le rencontre aujour-
md’hui sur la terre, et l'Homme tel qu’il se révèle par les
traces découvertes dans les gisements, plus ou moins an-
( iens, où il est accompagné d'animaux qui ne lui sont plus
a ssociés de nos jours. Que l'Homme provienne, ou non, de
| Quadrumanes anthropomorphes; qu’il descende de différents
| types de Singes ou d’une souche quadrumane unique ayant
“disparu, toujours est-il que les hommes d’aujourd’hui diffé-
rent essentiellement les uns des autres, et que chaque type
“a, incontestablement, un habitat spécial. Et, ici encore, il y
a lieu de distinguer. Il est, en effet, des formes du genre
_ humain ¢ que l’on trouve, à l'état sauvage, dans des conditions
qui paraissent n’avoir pas changé de temps immémorial. Elles
sont fixées, de nos jours encore, sur le sol qu’elles n’ont cessé
» d'occuper depuis qu’elles sont connues de la race blanche.
Il ne faut pas les confondre avec ces autres formes du genre
» humain dont le mélange a constitué, dans le cours des sié-
cles, des nationalités aux éléments hétérogénes, phénoméne
“qui s’est surtout produit parmi les branches diverses de la
L race blanche. Or, je le répète, peu importe l’origine de toutes
“ces différences; car, aussi loin que remontent nos rensei-
-gnements, nous trouvons toujours les types d'hommes les
* plus divers répartis sur des aires distinctes de la surface du
| globe, qu’ils semblent avoir occupées de tous temps. Jusqu’à
d ce qu'il soit prouvé que les différentes espèces d'animaux
appartenant à un même genre sont issues les unes des
autres ; tant que la science devra envisager toutes les es-
pèces animales comme des entités indépendantes (et cette
| AGASSIZ, 14
240 DE L’ESPECE.
nécessité n’en subsisterait pas moins, pour l’étude comp
rative, dans le cas où on les rattacherait génésiquement |
unes aux autres); tant que les êtres qui se sont succé a
travers les âges géologiques présenteront des caracté
spécifiques distincts, tels qu’on les reconnaît aujourd’hi
(et ces particularités aussi subsisteront alors qu’on en s
l'origine); — aussi longtemps, dis-je, que, dans le x
animal, on constatera des différences exprimant le caracté
des types dans le temps et dans l’espace, la science au :
devoir de tenir compte, au même titre, de toutes les diffé
rences vérifiées entre les hommes d’époques ou d’ha
différents. Or, après les études les plus judicieusés sur |
débris humains, découverts dans des gisements Pages di
vers et dans des localités plus ou moins distantes, le résullé
le plus caractéristique auquel on soit parvenu c’est la ¢ oT
statation d’une diversité inattendue et fort remarquable de
forme du crâne, chez tous ces peuples primitifs. Signaler i
ces variétés m’entrainerait hors du cadre de cet ouvrag
Mais il est de fait que si l’on examine les cranes +
plus anciens, trouvés sur des points de l'Europe fort d
rents, au milieu de débris d'animaux qui, tionssoulantil à
n’existent plus en Europe, mais n’appartiennent méme p
à la période contemporaine de l'Homme actuel, on obser
des dissemblances aussi grandes que celles qui disti nguent,
de nos jours, les diverses races humaines. C’est done el ”
acquise désormais à la science que l'Humanité a eu
terre ses phases de développement, tout comme les ‘ge ar
d’animaux. fl y a eu une différence entre les hommes #
trefois et les hommes d’aujourd’hui, comme il en a exi
une, à des époques géologiques diverses, entre les anin
de même genre. ad
Cette phase des découvertes ouvre, pour l’histoire del "H
manité, une ère aussi nouvelle que celle qui se déploya, po
I Histoire Naturelle tout entière, le jour où Cuvier signa
les différences spécifiques qui existent entre les Eléphants
Val d’Arno et ceux, amenés par Annibal en Italie, dont
avait cru d’abord retrouver les restes dans les débris
L’ HOMME PRIMITIF. 211
Elephas primigenius. A mesure que se compléteront ces dé-
vuvertes, la science établira, je n’en doute pas, dansla grande
poque géologique caractérisée par la présence de l'Homme,
és phases aussi distinctes que celles déjà tracées dans l’his-
ire de l’époque tertiaire. Alors on ne s’étonnera pas plus
de découvrir, à des époques différentes, des types humains
8 Rennes que de rencontrer, aux époques successives de
> tertiaire, des espèces non identiques de Mastodontes,
Rhinocéros, d'Éléphants, d’Hippopotames, ou de cette
nité d’autres animaux de toutes les classes, qui caracté-
Lu les époques géologiques antérieures à l'Homme. La
tésence d'hommes d’un type qui n’existe plus, au milieu
animaux de types non contemporains, entrera, tout natu-
lement, dans la catégorie des faits dont toutes les phases
sologiques de notre globe offrent l'exemple.
» Dès à présent, un résultat est assuré : existence du genre
humain remonte bien au delà des temps que la tradition
ssigne à son origine. L'histoire de l'Humanité se rattache
naturellement à celle des phénomènes qui ont modifié la
arface du globe. Et, si nous sommes forcés d'abandonner,
pour l’histoire de l'Homme, les chronologies à dates fixes,
nous la faisons rentrer sans peine dans une autre chrono-
Le Elle prend place dans cette série d’époques, d’une
ntiquité relative plus ou moins grande, à l’aide de laquelle
science détermine si heureusement l’ordre et la succession
K grands événements physiques ét organiques qui ont
À bouti à l’état de choses actuel. C’est un pas analogue à ce-
ui que fit la Géologie, le jour où elle constata que certains
sr ds changements dans la configuration de la terre avaient
vu lieu les uns après les autres. Il devint, dès lors, possible
Hablir une liaison entre les accidents du relief de la terre
le dépôt des couches qui forment son écorce. L'analyse
, ces faits a conduit, petit à petit, à une chronologie re-
tive qui relie entre elles toutes les révolutions subies par
re planète, tant dans son aspect physique que dans la
istitution et la distribution de ses habitants. Une étude
is minutieuse des dépôts les plus récents permettra seule
242 DE L’ESPECE.
de réunir dans leur véritable enchainement chronologiqu
toutes les phases de l’histoire de l'Homme. ‘
Mais ici les difficultés croissent. Tant que la surface
globe était peu accidentée, les dépôts stratifiés qui s'y sor
accumulés successivement occupaient des aires considé
rables, si bien que leur liaison a pu être suivie sur une éten
due extraordinaire. Dès lors, le synchronisme de leur fo
mation a pu être établi avec précision et sans trop d’effor
Mais, à des époques plus récentes, des chaînes de montagne
plus élevées, s’entrecoupant dans tous les sens à la surfe
du globe, ont formé des bassins plus ou moins indépendant
Au fond de chacun d’eux se sont effectués des dépôts isolé
dont le synchronisme n’a pu être démontré qu'au moyen ¢
recherches nombreuses et pénibles. Plus les continents acei
dentés ont acquis d’étendue, et plus l’étude est devenu
laborieuse. q
De tous les phénomènes géologiques récents, les plus con
sidérables, les plus importants, au point de vue de ce tre
vail, sont ceux qui se rapportent à l’époque glaciaire. De
puis qu’il est démontré que d'immenses nappes de glaces of
envahi la surface du globe; depuis que la dissémination 4
masses pierreuses détachées a pu servir à reconnaître lé
limites de l'extension de ces glaces; depuis que l'on a cor
mencé à tracer les bornes dans lesquelles furent conten
ces glaciers à différents moments de leur retrait, on posséd
les premiers jalons d’une chronologie moderne, et l’on
is sans doute, un jour, quelques-unes des phases :
mesure qu’on aura précisé l’ordre de succession des phéne
ménes glaciaires, on pourra, j'en suis convaincu, établir
niers changements subis par le Règne Animal. Mais cet
étude est fort délicate. On n’est pas d’accord sur la mani
dont s’est produit le grand hiver cosmique. Plusieurs ¢
logues pensent que les glaciers se sont étendus petit à p
et ont envahi peu à peu des régions inférieures à celles 0
se tenaient primitivement les neiges éternelles; puis, qi
RECGAPITULATION, 243
s tard, ils sont rentrés dans leurs limites actuelles. Sui-
ant d’autres, au contraire, et je suis de ceux-là, la terre,
ar suite de changements cosmiques, s’est couverte de
lasses énormes de neige, sur une étendue dont il est pour
} moment impossible de fixer les limites ; après s’être trans-
rmées en glaces, ces neiges ont persisté, sur ces vastes
endues, jusqu’à l’époque d’un retrait graduel, dont les
ases sont marquées par les différentes zones auxquelles
eignent les blocs erratiques de différente nature. Il ne faut
as se faire illusion sur l’état de nos connaissances relatives
terrains quaternaires. L'âge relatif de tous ces dépôts
st loin d’être déterminé d’une manière aussi rigoureuse que
ui des dépôts plus anciens, et, tant qu’il y aura du vague
cet égard, la même incertitude règnera dans la chrono-
wie des phases du développement zoologique postérieures
Ja formation des terrains tertiaires. Ainsi, j'ai vainement
ierché, en dépouillant les renseignements publiés jusqu’à
e jour sur l’histoire primitive du genre humain, à déter-
miner avec précision si l'Homme a existé, ou non, antérieu-
ment à l’époque glaciaire, si l'Elephas primigenius et le
astodonte des États-Unis sont, ou non, antérieurs à cette
époque. Je suis tenté de croire que ni les uns, ni les autres
XXXIV
Récapitulation.
2omme récapitulation de tout ce qu’on vient de lire, nous
jOuvons présenter les conclusions suivantes (1) :
1. L’enchainement, en un système, de toutes les particula-
ités de la nature manifeste de l'intelligence : — l'intelligence
la plus compréhensive, dépassant de bien loin les facultés les
lus hautes dont l'Homme s’enorgueillisse.
(1) Chaque paragraphe porte en tête le numéro de la section qu'il résume,
214 DE L’ESPECE.
sr. L’existence simultanée des types les plus divers, a
milieu de circonstances identiques, manifeste de intel}
gence ; — la capacité d'adapter une grande variété de dake
tures aux conditions les plus uniformes.
mi. La répétition de types semblables dans les circo
stances les plus diversifiées dénote, entre ces types, une lia
son immatérielle. Elle manifeste de l'intelligence et prow
directement l'indépendance absolue où se trouve l’Espr
créateur, à l’égard des influences du monde matériel.
tv. L'unité de plan, chez des types d’ailleurs profondéme
divers, manifeste de Vintelligence. Elle dénote plus imm
diatement encore la préméditation. Aucun plan n’aurait p
comprendre, en effet, une telle variété d’êtres, appelés:
l'existence à d’aussi longs intervalles, si, dès le commer
cement de l’exécution, il n’avait été tenu compte de la fin.
v. Ce que l’on appelle aujourd’hui du nom d’homologi
spéciales, cette correspondance entre les détails de la stru
ture qui s'étend aux particularités les plus infimes, ch:
des animaux d’ailleurs sans aucun lien, manifeste de Vi
telligence et, plus directement, la faculté d'exprimer w
proposition générale par un nombre indéfini de formule
dont chacune est aussi complète que les autres, quoiqu'el
en diffère dans tous les détails.
vi. Les degrés divers et les catégories différentes de rel
tions, existant entre des animaux qui ne peuvent pas ave
de lien généalogique, manifestent de l'intelligence : —
faculté de combiner des catégories différentes en un to
permanent et harmonique, alors même que la base mat
rielle de cette harmonie est constamment changeante.
vu. L'existence simultanée, dès que l’animalité appart
de représentants de tous les grands types du Règne anim
manifeste, d’une manière plus spéciale, de l’intelligenc
— une intelligence judicieuse, en laquelle se combinent
pouvoir, la préméditation, la prescience, l’omniscience. —
vit. La gradation. qu’on peut tracer, d’après les complic
lions de la structure, parmi les animaux construits sur
même plan, manifeste de l’intelligence et, en particulier,
RECAPITULATION. 215
juvoir de distribuer harmoniquement des dons inégaux.
1 La large distribution de certains types 4 la surface du
lobe, en opposition au confinement de certains autres dans
les Flocalités déterminées, et la variété des. combinaisons
‘des uns et des autres en provinces zoologiques inégalement
tendues, manifestent de l'intelligence : — un plein contrôle
a mode de répartition de la Terre entre ses habitants.
x. L'identité de la structure de ces types, en dépit d’une
rès rase dissémination géographique, manifeste de Vintel-
ence : — une intelligence si profonde que, plus on la
ate moins il semble possible d’en trouver le fond. Cepen-
Le l’idée qu’elle a voulu exprimer apparaît à la surface,
airement et intelligiblement pour tous.
x La structure commune, à certains égards, d'animaux
mt au reste tout à fait divers, mais qui vivent dans la même
; corn géographique, manifeste de l'intelligence,
t, surtout, la faculté d'adapter les types les plus divers,
oués de structures spéciales, à des conditions d'existence
antôt identiques et tantôt dissemblables.
xu. L’enchainement sériaire de structures spéciales, ob-
urvé chez des animaux largement disséminés sur la surface
lu globe, manifeste de l'intelligence : — une compréhension
sins limites et, directement, l’omniprésence de l'esprit ; sa
prescience même lorsqu'une série de ce genre s’étend à tra-
vers la suite des âges géologiques.
brxur. Le rapport qu’il y a entre le volume des animaux,
dur structure et leur forme, manifeste de l'intelligence; il
limoigne que, dans la nature, les différences quantitatives
sont aussi fixes et définies que les différences qualitatives.
| xtv. La dépendance où les animaux se trouvent, quant à
| taille, à l'égard des milieux ambiants, manifeste de lin-
Melligence ; car elle établit une connexion étroite entre les
éléments, doués d’une influence d’ailleurs si grande, et les
“ètres organisés, si peu affectés par la nature de ces élé-
" ants.
xy. La permanence des particularités spécifiques en dépit
p toutes les variétés d’influences extérieures, à toutes les
216 DE L’ESPECE.
périodes géologiques, passées et présente, manifeste de lin:
telligence ; elle prouve, en outre, que la limitation dans le
temps est un élément essentiel de tous les êtres finis, tandi:
que l'Éternité appartient à la Divinité seule.
xvi. Les rapports définis, qu’entretiennent les animaw
avec le monde ambiant, manifestent de l'intelligence ; car tou:
les animaux qui ont le même habitat se trouvent respective
ment, en raison même des différences qui les distinguent, er
rapport différent avec des conditions d’existence identiques
ce qui implique une appropriation réfléchie et judicieuse de
tous ces organismes divers à des circonstances uniformes.
xvi. Les relations entre individus de la même espèce ma
nifestent de l'intelligence, et attestent même qu’il existe
dans tous les êtres vivants, un principe immatériel, impéris
sable, de même nature que celui généralement attribué :
l'Homme, mais à l'Homme seul.
xvii. Le fait du dualisme sexuel et les rapports établi
entre individus de la même espèce et de sexe différent mani
festent de l'intelligence; — l'arbitraire, instituant, pow
l’accomplissement d’une même fin, les modes les plus variés
les plus dissemblables et les moins nécessaires, en dépit di
l'identité de la structure.
xix. Le cycle rigoureusement clos des changements qui
animal traverse, pour arriver à l’état adulte, manifeste d
l'intelligence ; c’est la preuve la plus frappante que ces chan
gements sont indépendants des influences physiques et ont da
de toute nécessité, être déterminés par un Pouvoir supérieur
xx. La limitation inégale de la vie moyenne individuelle
dans les différentes espèces animales, manifeste de l’intelli:
gence. En effet, si uniformes ou si diverses que soient le:
conditions de l'existence des animaux, la durée moyenne de
la vie est variable suivant les espèces. Cela implique la notior
de temps et d'espace, celle de la valeur du temps, puisque les
phases de la vie d'animaux différents sont mesurées d’après
le rôle que ces animaux ont à jouer sur la scène du monde.
xxI. Le retour constant 4 un type normal, des animaux
qui peuvent se multiplier par divers procédés, manifeste de
= RÉGAPITULATION. 217
intelligence. ll dénote que des modalités nombreuses peu-
“ent être comprises dans une conception unique, sans ce-
‘pendant qu'il soit dérogé à la loi exprimée, plus directe-
“ment, dans d’autres combinaisons.
xx. L'ordre de succession des différentes formes ani-
‘males et végétales, qui caractérisent les différentes époques
géologiques, manifeste de l'intelligence. Il prouve que, à
Yinverse du monde matériel toujours identique avec lui-
même dans tous les âges, les êtres organisés, appelés à
existence dans la série des temps, ont toujours été divers.
_ xx. La localisation de certains types animaux sur un
Lino point, durant plusieurs périodes géologiques succes-
sives, manifeste de |’intelligence. Il y a là une pensée suivie,
es opérations d’un esprit dont les actes sont conformes à un
plan tracé d'avance et maintenu durant une longue période.
# xxiv. La limitation à des périodes géologiques différentes
d espèces étroitement alliées, manifeste de l'intelligence ; elle
révèle la faculté de conserver des distinctions délicates, mal-
gré les grands bouleversements introduits par les révolu-
| tions physiques.
_ xxv. Le parallélisme entre l'ordre de succession des ani-
| maux et des plantes, dans les temps géologiques, et la gra-
dation offerte par les êtres organisés actuels, manifeste de
l'intelligence. On y reconnait un esprit de suite qui surveille
tout le développement de la nature, du commencement à la
fin, ¢ qui laisse lentement se produire un progrès graduel,
et finit par l'introduction de l'Homme, couronnement de la
création animale.
è xxvi. Le parallélisme entre l’ordre d'apparition des ani-
Mmaux et les phases du développement embryonnaire chez
leurs représentants actuels, manifeste de l’intelligence; c’est,
dans l’une et l’autre série la répétition du même enchaine-
ment de pensées.
_ xxv. La combinaison dans un même type paléozoique de
caractères qui, plus tard, sont disjoints et se montrent sé-
| parément dans des types distincts, manifeste de l’intelli-
‘gence, une intelligence prophétique, la prévision. Les com-
218 DE L’ESPECE.
binaisons préexistent dans la pensée avant de se manifested
sous une forme vivante. 4
xxv. Le parallélisme entre la gradation des animaux et
les phases de développement manifeste de l'intelligence
partout, dans les traits essentiels d’animaux qui n’ont au-
cun rapport physique nécessaire, il met en évidence la cons
nexion la plus intime, la moins explicable si elle n'est rs
l'œuvre d’un Être pensant.
xxix. Les rapports qui existent entre toutes ces séries et
la distribution géographique des animaux manifestent
l'intelligence ; elles prouvent ’omniprésence du Créateur:
xxx. La dépendance mutuelle où sont vis-à-vis les uns des
autres les animaux et les plantes, pour leur subsistance, mar
nifeste de l'intelligence. Elle dénote le soin avec leque
ont été équilibrées toutes les conditions d’existence néces-
saires au maintien des êtres organisés. |
xxxr. La dépendance où se trouvent certains animaux
pour leur existence même, à l'égard d’autres animaux ou
certaines plantes, manifeste de l’intelligence ; elle révèle 2
quel degré les combinaisons de structure et d'adaptation les
plus compliquées ont pu être soustraites à l’influence de
conditions physiques environnantes.
Nous pouvons résumer en moins de mots encore les ré
sultats de cette discussion jusqu’au point où nous &
sommes : |
Tous les êtres organisés présentent en eux-mêmes toute
ces catégories de la structure, tous ces modes d’existene
d'où résulte un système tellement naturel que, en le retra=
cant, l’esprit humain se borne à traduire, en son langage, |
pensées Divines exprimées, dans la nature, par les réalité és
vivantes. ae
Loin de devoir leur origine à l’action continue de at
physiques, tous ces êtres ont successivement fait apparition
sur la terre en vertu de l’intervention immédiate du Créa-
teur. :
C'est ce que je puis prouver encore en reprenant mon
argumentation de la maniére suivante :
RÉCAPITULATION. 219
siques sont partout les mêmes —sur toute la surface du
be — et ont oujours été les mêmes — durant toutes les
périodes géologiques. Au contraire, les êtres organisés sont
partout différents et ont toujours différé à tous les âges.
ntre deux séries de phénomènes aussi caractérisées, il ne
eut y avoir ni lien de causalité ni lien de filiation.
xxx. La combinaison dans le temps et dans l’espace de
utes ces conceptions profondes, non-seulement manifeste
e l'intelligence, mais, de plus, elle prouve la prémédi-
ation, la puissance, la sagesse, la grandeur, la prescience,
omniscience, la providence. En un mot, tous ces faits et
eur naturel enchaînement proclament le Seul Dieu que
‘Homme puisse connaître, adorer et aimer. L'Histoire Na-
« turelle deviendra, un jour, l'analyse des pensées du Créateur
ile l'Univers, manifestées dans le Règne Animal et le Règne
égétal, comme elles l'ont été dans le monde inorganique.
* Il peut sembler singulier que j'aie présenté la disquisi-
“lion qui précède sous le titre d'Essai sur la Classification.
“Pourtant, c’est de propos délibéré que je l'ai fait. En com-
“mençant ce livre, j'ai tout d’abord déclaré qu’on me semble
…lonner à la Classification une base trop étroite, en la fon-
_ lant sur la considération presque exclusive de la structure.
Le mode de développement des animaux, leur rang dans
eur classe respective, l'ordre dans lequel ils ont fait leur
apparition sur la terre, leur distribution géographique et,
en général, leurs rapports avec le monde ambiant, enchai-
“nent, aussi étroitement que Vanatomie, ces êtres les uns
aux autres. Toutes ces relations doivent donc se trouver
exprimées dans une classification naturelle. Si la structure
fournit en effet l'indication la plus directe de plusieurs d’entre
L ‘elles, il ne faut pas pour cela négliger les autres; elles peu-
| vent compléter notre intelligence du plan général de la
a création.
…. Pour caractériser les grands embranchements du Règne
Animal, ce n’est pas assez d’indiquer, avec toutes ses
“particularités, le plan de structure de ces groupes; il y a
Les produits de ce qu’on appelle communément les agents :
220 DE L'ESPÈCE.
telles possibilités d'exécution qui apparaissent immédiate:
ment à l'esprit, à l’exclusion des autres. Il conviendrait donc.
de les envisager et de les analyser si complétement que les
modes divers dont l'exécution de ce plan est susceptible
fussent tout d’abord mis en évidence. La portée et le carac-.
tère des homologies générales de chaque type devraient.
aussi être mis en lumière; de même les conditions générales
d'existence des êtres qui le représentent. Pour caractériser |
les classes, il importe de montrer pourquoi les groupes de.
cette nalure constituent des classes et non simplement des”
ordres ou des familles. C’est ce qu’on ne saurait faire, d’une.
manière satisfaisante, sans décrire les homologies spéciales.
de tous les systèmes d'organes développés dans ces groupes.
Il n’importe pas moins de déterminer quel est le fondement
de tous les groupes subordonnés à la classe; de connaître.
comment ils diffèrent, qu’est-ce qui constitue l’ordre, quoi.
la famille, quoi le genre, et sur quels caractères est fondée”
l’espèce, dans toute division naturelle. C’est ce que nous
allons examiner dans le chapitre suivant. f
Bs
BRS ta ur
pis ee
CHAPITRE DEUXIEME
GROUPES PRINCIPAUX DES SYSTÈMES ZOOLOGIQUES CONNUS.
I
Grands types ou embranchements du règne animal.
i Dans les systémes de Zoologie et de Botanique, Pemploi
des termes embranchements, classes, ordres, familles,
| genres et espèces, est tellement universel qu'on devrait en
|. supposer le sens et la portée bien déterminés et générale-
ment compris de la même manière. Il s’en faut pourtant
de beaucoup qu’il en soit ainsi. Tout au contraire, il n’y a
pas, à vrai dire, en Histoire naturelle, de sujet à l'égard
duquel l'incertitude soit plus grande et le défaut de préci-
iam plus absolu. Je n’ai pu trouver nulle part une définition
… nette du caractère même des divisions les plus compréhen-
Lives. Quant aux opinions ayant cours sur les genres et les
nn vspéces, elles sont tout à fait contradictoires. Dans de telles
circonstances, il m’a paru singulièrement désirable de re-
chercher quel est le fondement vrai de ces distinctions et de
| iléterminer, autant que possible, le degré de réalité qu'elles
nt dans la nature. J’espére que les résultats de ce travail
seront jugés satisfaisants et seront bien accueillis. J'avoue
trés-volontiers qu’il m'en a coûté des années d’étude, pour
| parvenir à une conception claire des caractères véritables
| de ces grandes divisions.
- C’est un fait universel, dans n’importe quelle sphère de
222 DE LA CLASSIFICATION.
l'activité intellectuelle, que la pratique devance la théorie.
Aussi pas un philosophe ne sera surpris d'apprendre que les
zoologistes avaient admis instinclivement des groupes na-
turels dans le monde organique, bien avant qu’on eût sou-
levé la question de savoir si ces groupes existent réellement
dans la nature, et quel en est le caractère. Les nations n’ont-
elles pas parlé, entendu et écrit le grec, le latin, l'allemand,
le sanscrit, avant qu’on eût seulement soupçonné la proche
parenté de toutes ces langues et de quelques autres ? Les
peintres n’ont-ils pas fait des merveilles avec les couleurs,
bien avant qu'on connût la nature de la lumière? Et les
hommes n’ont-ils pas raisonné, sur eux-mêmes et sur le
monde, longtemps avant que la logique et la métaphysique
fussent enseignées dans les écoles? Pourquoi, alors, les
observateurs de la nature n’auraient-ils pas apprécié à leur
exacte valeur les alliances existant soit entre les animaux;
soit entre les plantes, bien avant d’avoir découvert le lier
scientifique des classifications qu’ils avaient adoptées dans
la pratique?
Ces considérations m’encouragèrent, par dessus tout, el
me servirent de guide lorsque j’entrepris de rechercher ke
valeur de tous nos systèmes, si différents les uns des autres
dans les détails, et cependant si ressemblants par quelques:
uns de leurs traits généraux. L'histoire de notre scienct
prouve que plusieurs des principes qui la régissent aujour:
d’hui ont été connus de bonne heure, par tous les natura:
listes penseurs. Aristote, par exemple, connaît déjà les prin
cipales différences qui séparent les Vertébrés de tous les
autres animaux. Sa distinction des Enaima et des Anat.
ma (4) correspond exactement à celle des Vertébrés et de:
Invertébrés de Lamarck (2), ou à celle des Fletschthiere
et des Hingeweinthiere de Oken (3), ou encore à celle des
Myeloneura et des Ganglioneura d’Ehrenberg (4). Ur
(4) Histoire des animaux, liv. 1, chap. V et VI.
(2) Animauæ vertébrés, 2° édit., vol. I, p. 313. ;
(3) Naturphilosophie, 3° édit., p. 400, Voy. le chap. suiv.|
(4) Das Naturreich des Menschen, Diagramme, grand in-folio.
EMBRANCHEMENTS. 223
homme familier avec l’histoire des progrès de la science
ut-il s'empêcher de sourire quand il entend crier bien
ut à la nouveauté et à l'originalité, pour des idées qui
it depuis longtemps cours parmi les hommes? Ici, par
emple, il n’y a qu'un seul et même fait, présenté sous
aspects différents. Aristote, le premier, l’envisage au
int de vue des caractères de la liqueur plastique. Plus
ard, Lamarck le considère sous le rapport de la forme
énérale. — Je veux rendre, en effet, à Lamarck la justice
le croire qu’il n’a pas réuni ensemble tous les Invertébrés,
Seulement par ce motif qu’ils n’ont point de squelette; mais
en à cause d’un fait négligé, même encore aujourd'hui,
ae Owen (1) et néanmoins trés-positif. C’est que, chez les
vertébrés, une seule cavité du corps renferme tous les
rganes, tandis que chez les Vertébrés il y a deux cavités
istinctes, une pour les centres nerveux, et l’autre pour
8s systèmes de la vie végétative. Nous devons ce témoignage
| Lamarck; tout comme nous devrions ne plus accuser
Aristote d’avoir méconnu, chez les invertébrés, l'existence
Wun fluide qui remplit l'office du sang. Sans doute, il les a
ppelés Anaima ; mais il savait, presque aussi bien que nous,
Qu'un fluide nutritif se meut dans leur corps; et on lui re-
fuse bien à tort la notion de ce fait, sous prétexte qu'il
Wavait pas une connaissance exacte de la circulation du
sang.
Enfin, quand Oken parle de Fleischthiere, il ne veut pas
dire que les Vertébrés se composent seulement de muscles,
ù que les Invertébrés n’ont pas de fibres musculaires. Il
uit ressortir à nos yeux la présence, dans les premiers, de
hairs volumineuses, qui forment la masse principale du
‘corps. Celui-ci est fait de muscles et d’os tout aussi bien que
le sang et de nerfs; — mais les muscles constituent un des
principaux traits de nature à distinguer les Vertébrés des
Invertébrés. Ehrenberg présente les mêmes rapports entre
les mêmes êtres, mais c'est par le système nerveux qu'il les
4) Comparative Anatomy of Invertebrata, 2° édit., p. 14.
22h DE LA CLASSIFICATION.
exprime. Si donc, nous réunissons les expressions d’ Aristo
de Lamarck, d’Oken et d’Ehrenberg, n’aurons-nous pai
comme caractéristiques de leurs systémes, les mémes mo
que le vulgaire emploie, pour distinguer les traits les plu
saillants du corps des animaux supérieurs ? ne dit-on pas d'u
animal : il a du sang, il a du nerf; il est tout chair, ile
toul ventre, etc. ?
Aucun de ces observateurs n’a probablementeu cel
de l'identité de sa classification avec celle de ses prédéces
seurs. Mais on aurait grand tort de considérer l’une ¢
l’autre d’entre elles comme superflue. Chacune d’elles fa
ressortir des caractères qui diffèrent plus ou moins de ce
mis en lumière par les autres. Il ne faudrait pas davanta;
supposer que ces combinaisons ont épuisé le sujet, et qu
n'y a plus de place pour de nouveaux systèmes sur la tou
première distinction à établir entre les animaux (1). Ta
que les hommes étudieront, ils trouveront moyen d’
savoir plus, à cet égard, que ceux qui les auront précédé
La nature cache d’inépuisables richesses, dans l’infin
variété de ses trésors de beauté, d’ordre et (intelligence.
Ainsi, au lieu d’écarter tous les systèmes qui ont €
jusqu’à présent, peu ou point d'influence sur la marche ¢
la science, — les uns, parce qu’ils étaient basés sur des prit
cipes non généralement admis, les autres, parce qu'on 1
leur accordait aucune autorité, — je les ai tous étudiés aye
beaucoup de soin. J’ai voulu connaître ce qu’il pouvait
avoir de vrai dans chacun d’eux en se plaçant au point
vue de leurs auteurs, ct j'avoue que j'ai souvent tiré de
examen attentif plus de profit que je n’en espérais.
Mais si je suis parvenu à comprendre la valeur def |
STE es
(4) Pour en douner un exemple, je prendrai le mode de reproducti
La formation de l’œul chez les Vertébrés, son origine dans une vésie e
Graaf, plus ou moins compliquée, par laquelle il est nourri, la formation
le développement de l’embryon jusqu'à une cerlaine période, elc., €
différent si complétement - de ce qui s’observe chez les Invertébrés, que”
règne animal, classé d'après ces faits, devrait être encore divisé eu deux gran
groupes correspondant aux Vertébrés et Invertébrés de Lamarck ; ; Fleischthie
t Eingeweinthiere de Oken ; Enaima et Anaima d’Aristote, etc.
EMBRANCHEMENTS. 225
ivisions appelées embranchements, classes, ordres, familles
genres et espèces, je ne le dois pas à un heureux hasard, ou
une de ces illuminations subites qui jaillissent en nous,
mme une révélation, et rendent instantanément clair et
telligible ce qui jusqu'alors était obscur et presque inac-
ible. Bien que, depuis longtemps, elles fussent admises
en Histoire naturelle, on ne les considérait que comme
lingénieux artifices destinés à faciliter nos études. Pour
oi, pendant de longues années, j'ai été sous l’impres-
ion qu’elles étaient fondées dans la nature, et, enfin, j'ai
péussi à découvrir sur quel principe elles sont réellement
basées. Je compris de bonne heure que le plus grand
bstacle à la détermination de leur véritable sens, était le
banque d’accord sur l'emploi et l'application des termes.
Des naturalistes différents ne donnent pas le même nom
‘aux groupes de la même importance et de la même sorte.
Beux-ci appellent genre ce que ceux-là nomment sous-genre ;
s uns font des tribus ou des familles avec ce dont les
tres font des ordres; ces expressions de tribus et de
familles sont même appliquées par quelques- uns à ce que
d'autres appellent sous-genres; ce qui est famille pour
ux-ci est ordre pour ceux-là; les genres de quelques
iteurs sont parfois des classes pour certains autres. Finale-
ent, on retrouve la même diversité d'opinions dans le
nombre et la délimitation des classes, aussi bien que dans
la manière de les grouper ensemble sous un litre général.
| est néanmoins possible que, sous ces dénominations mul-
] tsitivement naturels, mais dont les vrais rapports, à | l'égard
les uns des autres, auront échappé jusqu'ici à notre atten-
au moins, sous quelque nom qu'ils les désignent d’ailleurs,
et quelque opposition qu’ils puissent faire à ce qu’on leur
lonne une autre appellation. Aussi, cela n’est plus douteux
pour moi, la controverse se renfermerait dans des ques-
AGASSIZ. ay
226 DE LA CLASSIFICATION.
tions définies, si les naturalistes pouvaient seulement s'ell
tendre sur la nature réelle de chaque sorte de groupes. J’
suis positivement convaincu, l'obstacle le plus insurmontal
à une appréciation exacte de ce point délicat c’est que, por
tous les naturalistes sans exception, ces divisions quel qu’
soit le titre sont strictement subordonnées l’une à l’autre
de sorte que la différence entre elles proviendrait simpl
ment de leur inégale portée. Les classes sont considéré
comme la division qui embrasse le plus; l’ordre vient apré
et il est un peu moins compréhensif; la famille a moins
parties encore; le genre est de plus en plus borné et l’espé
est le dernier degré, dans une coordination naturelle de
êtres vivants. Ainsi tous ces groupes différeraient seulemer
par la quantité des caractères et non pas par la qualit
Comme si les éléments de la structure des animaux étaien
tous de même valeur ! Comme si la forme, par exemple, éta
un élément organique de même sorte que la complicatic 01
de la structure, et comme si le degré de complication e}
geait nécessairement un certain plan de structure, à l’exel
sion des autres. Je me crois en mesure, à l'heure qu'il e
de démontrer que c’est pour avoir négligé ces considératio 1
que nous avons fait faire des progrès si lents à la phe hi
de la classification. 1
S'il était possible d'établir que ce n’est pas la quantit
plus ou moins de portée, qui fait l’essence de ces groupe
mais que, au contraire, ils ont pour base des catégori
distinctes de caractéres, il faudrait bien que tout le mo
appelat genre ce qui est un genre, famille ce qui est fam ii
ordre ce qui est ordre, etc., lors même que ces group
différeraient fort peu les uns des autres. Si, par exemp!
l'espèce avait pour base la grandeur absolue; le gen
structure de quelques parties extérieures du corps; la fa
la forme du corps; l’ordre, l’analogie ou l'identité de la
ture intérieure, il est évident qu'il ne pourrait pas y
deux opinions à l'égard de ces groupes, pris dans n’imp
_ quelle classe du règne animal. Mais le problème n’est
aussi simple. dans la nature; et il m’a fallu les investigat
EMBRANCHEMENTS. 227
plus profondes et les plus étendues pour trouver le fil
i devait me guider dans ce labyrinthe. J’ai reconnu, par
xemple, que, si les naturalistes discutaient et discutent
| en ore sur l'espèce et sur le genre, ils n’en distinguent pas
moins les objets eux-mêmes à peu près de la même manière.
Ge que A voudrait appeler espèce, B l’a inscrit seulement
“comme variété ou race; et alorsils ont fort bien pu désigner
‘Ja méme agrégation d'individus, B comme sous-genre et A
ümme espèce ; ou encore ce que À nomme un genre, B l’a
“regardé comme une famille ou comme un ordre. A mon
four, je me suis emparé de ce quelque chose ainsi marqué
é noms divers, et j'ai essayé de découvrir en lui des carac-
res qui dussent persuader à tous de lui donner la même
ppellation. J’ai voulu limiter la difficulté pratique de l’appli-
tion du nom à l'exactitude du fait, de sorte qu’une simple
ffaire de nomenclature cessât d’être un continuel sujet de
seussion.
bn Parvenu à ce point de ma recherche, j’observai que le
Caractère même des œuvres des naturalistes éminents jetait
ne certaine lumière sur la question. Il y a des auteurs, et
sont parfois les plus célèbres de tous, qui ne se sont jamais
occupés de la classification. Ils n’y ont prêté qu’une attention
légère ou n’en ont parlé qu’en passant, et néanmoins, du
Consentement universel, ils sont les biographes d'espèces
ayant le mieux réussi dans leurs descriptions. Tels sont
Buffon, Réaumur, Roesel, Trembley, Smeathman, les deux
über, Bewick, Wilson, Audubon, Naumann, etc. D’autres
se sont appliqués plus exclusivement à l'étude des genres, et
le zoologiste Latreille est le plus remarquable d’entre eux.
inné et Jussieu sont placés au premier rang parmi les
botanistes, pour avoir donné les caractères des genres ou,
jout au moins, pour avoir les premiers réussi à tracer les
limites naturelles de ces groupes. Jusqu’à présent, les bota-
listes sont parvenus, beaucoup mieux que les zoologistes, à
räactériser les familles naturelles. Cependant Cuvier et
L si eille ont beaucoup fait dans cette voie, en Zoologie. C’est
jinné qui, le premier, a introduit les ordres dans la classifi-
228 DE. LA’ CLASSIFICATION.
cation des animaux. Quant aux groupes tout à fait supé
rieurs, comme les classes et les embranchements, on pour.
rait méme dire les ordres, c’est Cuvier qui a montré |
chemin dans lequel se sont engagés après lui tous le
1
naturalistes de ce siècle.
Cherchons donc ce que ces hommes ont fait de particu
lier pour se distinguer d’une manière spéciale, soit comme
biographes d’espèces, soit comme révélateurs des caractère:
des genres, des familles, des ordres, des classes et de:
embranchements. Bien qu'il paraisse évident que chacui
d'eux a considéré le sujet à son point de vue particulie
une chose me frappe, et la voici : de l’aveu de tous, ma
sans qu’on en ait bien conscience, ce qui constitue l’émi
nence ou la distinction de ces maîtres, c’est justement |
découverte de faits qu'il conviendrait de proclamer, en e
comprenant bien l'importance, comme révélant le caractér
propre de la catégorie de groupes par eux étudiée ave
tant de succès. J’espère que tout naturaliste exempt de pré
vention ne manquera pas d’en tomber d’accord avec moi.
La plus haute des divisions du règne animal a été pot
la première fois introduite dans la science par Cuvier, sot
le nom d’embranchement. Ce maitre nous apprend que k
embranchements sont fondés sur la distinction de plan:
de structure divers, de formes ou de moules différents
dans lesquels les animaux auraient été, pour ainsi di
coulés (1). A coup sûr, aucune raison n'empêche que nol
nous accordions tous à désigner, par ces mots de type
ou dembranchements, les grandes divisions du règne ani
mal ainsi instituées, celles qui ont pour raison d’être lexi
stence d’un plan spécial et distinct (2), si, en effet, n
(4) L'examen des propriétés caractéristiques des différents règnes m
traînerait trop loin. Je renvoie à l’ouvrage d’Is. Geoffroy-Saint-Hilaire, Hist
nalurelle générale des règnes organiques, Paris, 1856, in-8, où ce s
été récemment discuté ; mais j’ai beaucoup d’objections à faire contre l’adoptio
d’un règne distinct pour l'Homme seul.
(2) Il est presque superflu de dire ici que les expressions de pian, voie
moyens ou mode suivant lequel un plan est réalisé, complication de la st
ture, forme, détails de la structure, structure dans ses derniers éléments, réi
EMBRANCHEMENTS, 229
“constatons, pratiquement, que ces grands groupes sont tra-
és dans la nature. Ceux qui ne les y aperçoivent pas peu-
ent nier qu'ils existent; ceux qui en reconnaissent la
réalité peuvent ne pas s’accorder sur leurs limites; mais
tous peuvent, au plus grand profit de la science, s’entendre
pour appeler tout groupe qui leur semblera fondé sur un
plan spécial de structure, du nom de type ou embranche-
dent du règne animal. S’il y a encore, parmi les naturalistes,
es divergences d'opinion sur leurs limites, que la discus-
Sion continue. Mais qu’il soit bien compris que les embran-
chements sont caractérisés par les différences dans le plan
“de la structure, et non par des particularités anatomiques
spéciales. Prenons d'autant plus garde de confondre l’idée
“de plan ivec celle de complication de la structure, que Cu-
| vier lui-même a commis, çà et là, cette erreur dans sa clas-
ificatio a.
» L'idée de plans distincts de structure est le vrai pivot sur
quel: loive, en dernier ressort, rouler la détermination des
“mbranchements du règne animal. Je crois pouvoir en donner
“une preuve excellente : Examinons les perfectionnements
“dont ces divisions primaires ont été l'objet, j’entends ceux
Que tout le monde admet comme tels. Tous ont consisté à
transporter, d’une division dans une autre, un groupe
qui y avait été introduit en vertu de considérations étran-
res à l’idée d’un plan particulier, ou par suite de notions
inexactes sur son vrai plan de structure. Vérifions cette
ons des individus, fréquemment employées dans les pages suivantes, sont
rises dans un sens quelque peu différent de leur signification usuelle. Cela
ë t toujours nécessaire, quand on veut introduire dans la science des vues
‘Nouvelles et que la conservation des anciens termes, un peu modifiés toutefois,
paraît préférable à la création d'expressions nouvelles. J'espère que la discussion
qui va suivre sera appréciée d’après son mérite intrinsèque, avec bienveil-
lance, avec le désir de comprendre quel a été mon but, et non pas d’après le
degré plus ou moins grand de précision et de clarté que présente mon langage.
AL est presque impossible, en effet, dans un premier essai de ce genre, de
isir, du premier coup, la forme la plus capable d'entraîner la conviction. On
Comprendra aussi pourquoi j’exprime mes vues en m’autorisant de préférence
la zoologie ; je ne me sens pas assez compétent pour étendre mon argumen-
tation au règne végétal; j'y ai fait parfois allusion quand mes connaissances
Je permettaient.
230 DE LA CLASSIFICATION.
assertion par l’examen de quelques faits sur lesquels il n'y à
plus de doute possible. Ni les Infusoires, ni les Vers intesti-
naux ne peuvent désormais être rangés, par les naturalistes
compétents, parmi les Rayonnés. On pourra voir ailleurs
pourquoi on les a retirés de ce groupe. Si Cuvier les y aval
placés, ce n’est certainement pas qu’il jugeat le plan de leu
structure identique avec celui des vrais Rayonnés; mais |
s'était permis d’être infidèle au principe qu’il avait lui-même
posé. À la considération du plan de la structure il en avait
ajouté une autre, comme caractéristique des Rayonnés : —
la prétendue absence de système nerveux et la grande sit h
plicité de structure de ces animaux. Comme si la simplicit
de l’exécution avait nécessairement un rapport ques [
avec le plan!
Un autre exemple remarquable d’une classe rejetée, à
l'approbation générale, d’un des embranchements institués s
par Cuvier dans un autre, c’est celui des Cirripèdes, trans-
portés de la division des Mollusques à celle des Articulés.
Une appréciation inexacte du plan de la structure de ces
animaux avait donné lieu à une erreur qui fut réparée,
sans opposition, dès que les Cirripèdes furent mieu
connus. 4
J’invite le lecteur à rapprocher ce qui vient d’ê tre établi à
l’égard de la diversité de plans, caractéristique des divisions
ntémiainos, de ce que je dirai plus loin sur les classes et les
ordres. Il en comprendra mieux l'importance de distingue
le plan de la structure d’avec son mode de réalisation exté
rieure, et son degré de complication d’avec sa perfection ou
sa simplicité relative. 4
Mais, ce n’est pas tout de constater que le plan de la struc
ture doit étre le fondement caractéristique des groupe
primaires. Il ne s’ensuit pas, en effet, sans autre exame
que les quatre grands embranchements du règne animé
distingués par Cuvier, doivent être considérés comme d
divisions primaires fondamentales, données par la natu
_elle-même. Il est encore indispensable de faire à cet ége
une recherche soigneuse et approfondie, et de détermin
_ EMBRANCHEMENTS. 231
que sont en elles-mêmes ces divisions primordiales.
ement, en ce qui concerne nos systèmes, un point de-
jure acquis : Quelles que puissent être, en réalité, les
visions primordiales naturelles, fondées sur la diversité
iz plan, ces divisions une fois définies, et admises comme
pression temporaire de l’état de nos connaissances, leur
om est embranchements du règne animal. Que ce soient
3s Vertébrés, les Articulés, les Mollusques et les Rayonnés
e Cuvier, ou les Artiozoaires, les Actinozoaires et les Amor-
hozoaires de Blainville ou les Vertébrés et les Invertébrés de
amarck, c’est,l4 un point que je me réserve de traiter dans
n mémoire spécial. Je me borne à ajouter ceci : chaque
yur devient chez moi plus forte la conviction que les divi-
ions primaires de Cuvier, au moins dans leurs grands traits
Reipaux, sont la représentation vraie de la nature. À mon
, aucun naturaliste n’a jamais eu, des rapports généraux
es rs une vue plus nette et plus profonde que
uvier, le jour où il aperçut non-seulement que ces groupes
rimordiaux sont fondés sur les différences du plan struc-
ural, mais encore de quelle manière ils se rattachent l’un
autre.
Bien que le mot éype soit généralement employé pour dé-
Signer les grandes divisions fondamentales du Règne, je
Wen ferai plus usage à l’avenir. Je préfère pour cela l’ex-
pression d’embranchement. Le mot type a, en effet, trop
| hcceptions diverses; il désigne indifféremment un groupe
Lie elconque d’une nature quelconque, ou telle ou telle modi-
| fic: on particulière de la structure, dont le caractère est net
Be pistinct, aussi bien que les divisions primaires de la Zoolo-
le, C’est ainsi qu'on dit le type spécifique, le type géné-
jue, le type de la famille, le type de l’ordre, le type de la
e et même le type de Ja structure. L’emploi de ce mot,
d = ce sens, est tellement fréquent qu’on le trouve presque
ra L haque page des traités systématiques de Zoologie et des
Guvrages d’Anatomie comparée, Il me semble donc trés-
Opportun, pour éviter toute équivoque, de désigner par
xpression d’embranchements du règne animal, plutôt que
232 DE LA CLASSIFICATION.
par celle de types, les grandes divisions primaires, les plus
importantes, établies dans l’ensemble des animaux. 4
Cependant, nos systèmes sont plus conformes à la natur!
qu’on ne le suppose la plupart du temps. La preuve en est, i
mon sens, dans le rapprochement qui peu à peu s’opére
entre les savants, soit par les résultats auxquels ils arrivent
soit par les formules qui expriment ces résultats. L'idée su
laquelle repose l’institution des grandes divisions primaire
du règne animal, c’est une conception, la plus générale po
sible, adéquate au plan d’une création définie. Ces divisions
sont, par conséquent, les plus compréhensives de toutes. !
proprement parler, elles priment dans une classification na.
inrelle ; en ce sens qu’elles représentent les rapports les plu
importants et les plus larges des divers groupes naturel
du Règne, la formule générale d’où dépend chacun d’eux
En définitive, ce que nous appelons embranchement, ex
prime, entre les animaux, une connexion purement idéale
la conception intellectuelle qui les embrasse tous dans |
Pensée créatrice. Il me semble que, plus on étudie la sign
fication vraie de cette sorte de groupes, plus on se convaim
qu'ils ne sont pas fondés sur des relations matérielles. Le
divisions plus restreintes qui viennent immédiatement aprè
ont pour fondement des qualifications spéciales du plan €
différent l’une de l’autre par le caractère de ces qualific
tions. Si observation faisait voir que, après le plan de k
structure, les traits généraux offerts par un plus gran
nombre de groupes sont ceux qui déterminent le rang ou
place respective des animaux entre eux, il semblerait nature
de considérer les ordres comme la seconde des catégorie
principales de l’organisation. Mais l'expérience prouve qui
n’en est pas ainsi; et la manière dont le plan de la structure
est mis à exécution conduit à distinguer des divisions plu
extensives (les classes) que celles basées sur la complies
tion de structure (les ordres). Or, pour être naturelle, ume
classification doit exprimer des relations réelles obser
vées dans la nature. Il s’ensuit foreément que les clase
ont, dans un systéme, la seconde place et viennent im
if]
CLASSES. 233
tement au-dessous des embranchements. Nous le verrons
us tard; aprés les classes viennent les ordres, qui consti-
ent en effet des groupes naturellement plus compréhensifs
que les familles. Il ne nous est pas loisible d’intervertir
“tte hiérarchie, non plus que de donner à l’une de ces
divisions le nom de l’autre, suivant notre fantaisie, comme
le font constamment beaucoup de naturalistes.
E
? II
Glasses.
_ Avant que Cuvier n’eût fait voir que le règne animal tout
mtier est construit sur quatre plans différents de structure,
les classes étaient le groupe le plus élevé qu’on connût dans
es systèmes de Zoologie. De bonne heure, les naturalistes
mprirent sur quoi les divisions de cette sorte devaient être
londées, pour rester naturelles. Mais ils ne surent pas tou-
jours apprécier la valeur vraie des caractères d’après lesquels
is avaient établi le prototype de ce degré d’alliance. Linné,
le premier, exposa le système des animaux, et, quoique très-
mparfaitement, il distinguait déjà, par des caractères anato-
niques, les classes qu’il avait instituées. Aprés lui, tous les
Zoologistes systématisateurs se sont proposé de dresser un
tableau, de plus en plus complet, des classes du régne animal,
d'aprés les indications, de plus en plus nombreuses, fournies
par l'étude de la structure.
» La structure donc, voila, pour reconnaître les classes, le
grand critère. Le plus sûr moyen de découvrir les limites
e ces groupes, c’est une connaissance approfondie de l’ana-
mie des animaux. Et cependant, avec ce prototype sous les
yeux, les naturalistes n’ont pas pu s’entendre. Ils ne s’en-
tendent pas encore, ni sur les limites à assigner aux classes,
“ni sur le nombre qu’il en faut admettre. Il est vraiment
étrange que, appliquant aux mêmes objets la même mesure,
les résultats de leur estimation aient pu varier de quantités
si grandes. Cette réflexion m’a conduit à y regarder de plus
28. DE LA CLASSIFICATION,
près et à rechercher si, au fond, cette apparente unité de
mesure n’était pas plus imaginaire que réelle. La structuré
peut être envisagée de plusieurs points de vue. On y peut
considérer : 1° le plan adopté par son auteur; 2° l’œuvre
qu’elle a à accomplir et les voies et moyens employés pout
l’édifier ; 3° son degré de perfection ou sa complication qui
peut différer grandement, bien que le plan reste le même ef
que les voies et moyens employés pour l’exécution n’aien'
pas la moindre différence ; 4° la forme de ensemble et celle
des parties, qui n’ont aucune relation nécessaire, en tout cas
aucune relation étroite, soit avec le degré de perfection de
structure, soit avec la manière dont le plan est exécuté, 0 ou
avec le plan lui-méme; comme on peut aisément s’en con:
vaincre par une comparaison entre les Chauves-souris et k
Oiseaux, les Baleines et les Poissons, les Holothuries et |
Vers; — enfin 5° le fini même, I’exécution des détails ial
les parties individuelles. a
Il ne serait pas difficile de prouver que le désaccont
entre les naturalistes, quand il s’agit de la limitation de:
classes, provient de ce qu’ils considérent indifféremment la
structure à tous ces points de vue divers, sans distinction
Ils appliquent avec insouciance et sans le moindre discernes
ment, les résultats ainsi obtenus à la définition des caractères
des animaux. Ceux qui n’ont pas fait, entre le plan de la
structure et le mode de réalisation de ce plan, cette opposi=
tion nécessaire, ont méconnu l’importance des grandes dia
sions fondamentales du règne animal. Ou bien, ils ont |
tiplié indûment le nombre de ces divisions, en se base
sur des considérations purement anatomiques; o'out-bdl
en s'appuyant, non sur la variété dans les modes du p. al
général de la structure, mais sur le développement maté
donné à ce plan. D’un autre côté, ceux qui ont cond lé
complication de la structure avec les voies et moyens f
lesquels une combinaison donnée de systèmes organique
entretient la vie, n’ont pas pu établir une différence co 7
venable entre les caractères des classes ét ceux des ordress
Aussi ont-ils maintes fois élevé les ordres au rang des classes.
CLASSES. 235
n va voir, en effet, que les ordres naturels doivent être
sés sur les degrés de complication présentés par la struc-
dans les limites de la classe. Quant aux classes, elles
Sont caractérisées par la façon dont le plan est poursuivi,
‘Cest-a-dire par les combinaisons diverses des systèmes orga-
miques constituant le corps des représentants d’un embran-
lement quelconque. Peut-être même faudrait-il dire que
S classes sont caractérisées, plus nettement encore, par la
flérence des voies suivant lesquelles la vie est entretenue
t par la diversité des moyens employés pour établir ces
gies. Un exemple suffira pour montrer que cette distinction
hplique une différence marquée entre les caractéres de
ordre et ceux de la classe.
Comparons les Polypes aux Acaléphes, en les considérant
omme deux classes, et sans nous préoccuper autrement des
mites qui peuvent leur être assignées par les auteurs.
‘outes deux sont construites sur le même plan et appartien-
ent pour cette raison à l’embranchement des Rayonnés,
_ Pour établir ce fait, nous n’avons pas à considérer la struc-
ture véritable de ces animaux. Qu’ils aient un systéme ner-
yeux ou non, des organes des sens ou non, que leurs
Muscles soient lisses ou striés, qu’ils possèdent une char-
pente solide ou n'aient qu'un corps entièrement mou, que
leur cavité digestive n’ait qu’un orifice ou qu’elle en ait deux
opposés, qu’il y ait à cette cavité des appendices glandulaires
uw non, que l'aliment digéré soit distribué dans le corps
dune façon ou d’une autre, que les résidus de la digestion
ient ou non rejetés par la bouche, que les sexes soient
éunis ou séparés, que la reproduction se fasse par des œufs
u bien par des bourgeons, que ces êtres enfin soient
inples ou composés; c’est ce dont nous n'avons pas à nous
Xeuper actuellement. Tout ce que nous avons besoin de
Savoir, pour rapporter ces animaux à l’'embranchement des
Riyonnés, c'est que le plan de leur structure présente en
général la disposition rayonnée.
Mais, quand nous voudrons distinguer, comme classes, las
pes, les Acaléphes et les Echinodermes, ou plutôt quand
236 DE LA CLASSIFICATION.
nous voudrons déterminer exactement ce que sont les classes
parmi les Rayonnés, et combien il y en a, ce qu’il faudi
chercher c’est la manière dont l’idée de rayonnement, foi
damentale dans le plan de leur structure, est réalisée e1
acte, exprimée, dans tous les animaux qui la présentent
Voici alors ce qu’il est facile d’ observer : Chez quelques-u
(les Polypes), il existe dans le corps une vaste cavité, divisés
par des cloisons rayonnées, en un certain nombre de comp
timents. Dans cette cavité pend un sac (l’appareil digestif
ouvert inférieurement, de façon à verser le produit de
digestion dans la cavité principale, d’où l’action de cils vi
bratiles le fait circuler, de ci et de là, dans tous les compa
timents. Chez d’autres (les Acalèphes), le corps forme uné
masse compacte qu’ on peut comparer à un sac creux, tra
versé dans son épaisseur par des tubes rayonnés partant
vide central (la cavité digestive), et sans libre communicatiol
l'un avec l’autre dans toute leur longueur, etc. Chez d’autre
encore (les Echinodermes), le corps posséde une envelop
coriace ou rigide, qui renferme une vaste cavité dans la
quelle sont contenus une certaine variété de systémes di
tincts d’organes, etc. |
Sans entrer ici dans une description complète de ce
classes, je crois pouvoir démontrer que ce qui en fait
caractére positif, ce n’est pas la complication de la structun
(les Méduses Hydroides sont, en effet, d’une structure à pei
plus compliquée que celle des Polypes), c’est la mani
dont le plan des Rayonnés est réalisé, les voies par lesquelle
la vie est entretenue dans ces animaux, et les moyens appli
qués à cette fin; en un mot, ce sont les combinaisons de
éléments de la structure. j
Mais du moment où il s’agira de discerner ce que sor
les ordres, dans ces classes, ces considérations ne seront pl
suffisantes. Il faudra regarder la structure sous un autt
jour, et désormais c’est la complication des appareils qt
nous servira de guide. La différence des Actinaires et de
Halcyonaires, comme ordres, parmi les Polypes, c’est que
les premiers possèdent un nombre considérable, et le plus
“CLASSES, 257
juvent même indéfini, de tentacules simples, un nombre
‘alement considérable de divisions intestinales, etc., tandis
que les huit tentacules des Halcyonaires sont lobées et com-
liquées, que toutes les parties en sont combinées par paires,
‘nombre défini, etc. Ces différences obligent à leur attri-
ser une place à part dans leur classe et assignent aux der-
ers un rang plus élevé qu'aux premiers.
- Donc, en conséquence des observations qui précèdent,
s classes doivent être déterminées par la façon dont le
an typique est exécuté, par les voies et moyens suivant les-
Quels il se réalise ou, en d’autres termes, par les combinai-
sons des éléments de la structure, c’est-à-dire par les combi-
“haisons produites au moyen des systèmes organiques qui
“constituent l'être construit sur un plan donné. Nous n’avons
{ à considérer ici les formes variées sous lesquelles la
‘structure a pris corps, ni les détails extrémes, ni le degré
de fini que la structure elle-même peut offrir, car il ne fau-
dra qu’un instant de réflexion pour se convaincre que ni les
détails de la structure, ni la forme ne peuyent, en aucun
u règne animal, que la connaissance de leurs traits essen:
liels est à bon droit réputée l'objet primordial de toutes les
recherches d'anatomie comparée, — comme manifestant
quelque modification essentielle du type auquel elles ap-
“partiennent. Encore une fois, c’est là une manière de voir
erronée et, sans doute, le résultat d’une fausse appréciation
des faits. Déjà Cuvier avait appelé l'attention sur ce point,
‘thais ses avertissements sont passés inapergus (1). En réalité,
| n’y a aucune différence dans le plan des animaux qui ap-
“ment. Le plan de la structure des Polypes n’est pas plus une
Modification de celui des Acalèphes, que celui des Acaléphes
(1) Voy. Cuvier, Règne animal, 2° édit., p. 48,
238 DE LA CLASSIFICATION.
ou des Echinodermes n’en est une du plan des Polypes. Le
plan est exactement le même dans les trois groupes; il peu
être représenté par un simple diagramme, exprimé par ui
seul mot : rayonnement; c'est la manifestation d’une seule
idée distincte, d’une seule idée caractéristique. Seulemen
cette idée se présente dans la nature sous les formes les pla
nombreuses ; elle est exprimée de façons trés-diverses, pa
des combinaisons extrémement diversifiées de modification
dans la structure, et avec les relations les plus variées. Da
les innombrables représentants de chaque grand type
règne, ce n’est pas le plan qui diffère, mais bien la manièr
dont ce plan est exécuté. De même que les variations faite
par un habile artiste sur le thème le plus simple ne sont pa
des modifications du thème lui-même, mais seulement dé
expressions différentes d’un accord fondamental unique ; di
même les classes, les ordres, les familles, les espèces ne son
pas des modifications, mais seulement des expressions diffé
rentes du plan, les différentes manières dont la pensée fon
damentale, ou le plan, a pris corps et se manifeste dans 1
variété des êtres vivants. 4
Dans l'étude des caractères des classes, nous avons {
tenir compte des traits de la structure; mais quand not
recherchons quelle est la nature des élassés: par rapport au
embranchements, nous n’avons a considérer que le he a
la charpente, pour ainsi dire, de la structure. Cette distine
tion a, dans la pratique, un résultat d’une grande impor
tance. Au commencement de ce siécle, les naturalistes, sui-
vant l'exemple donné par les physiophilosophes allemands,
se mirent à comparer de plus près la structure des diffé
rentes classes du règne animal. Ils notérent entre elles beau
coup de points de ressemblance qui avaient échappé aw
observateurs précédents. Des modifications de la structur
qui, au premier abord, n’offraient aucune ressemblance,
furent reconnues identiques. Bref, peu à peu, ce genre d
comparaisons s’élant étendu au règne animal tout entier,
on en vint à affirmer que, malgré les diversités apparentes
de leur organisation, les animaux devaient être regardé
CLASSES. 239
omme composés de parties essentiellement les mêmes. Cette
rétendue identité recut le nom d’homologie (1). Mais les
mogrés de la science resserrérent graduellement ces com-
raisons dans des bornes de plus en plus restreintes, et il
‘pirait clairement, aujourd’hui, qu "il ne peut pas y avoir ho-
jologie dans la structure des animaux lorsque ceux-ci n’ap-
artiennent pas au même embranchement, C’est à ce point
ie l'étude des homologies fournit, à elle seule, un des
oyens les plus sûrs de vérifier les limites naturelles de
importe quel embranchement du règne animal. Les homo-
ies, donc, prouvent Vétroite parité qui existe entre des
ructures en apparence trés-différentes; elles indiquent la
faite identité du plan de ces structures dans un même
ubranchement. Mais, d’un autre côté, elles font ressortir,
lune manière chaque jour plus frappante, la différence
sistant, et dans le plan et dans la structure, entre les em-
inchements eux-mêmes. Elles font naître la pensée que
Ws systèmes d'organes, généralement considérés comme
Jentiques dans des embranchements différents, seront à la
il reconnus comme essentiellement divers; par exemple,
qu’on appelle les branchies chez les Poissons, chez les
ustacés et chez les Mollusques.
| Il ne faut pas une grande pénétration pour voir aujour-
‘hui que les branchies des Crustacés sont homologues aux
Trachées des Insectes et aux soi-disant poumons de certaines
araignées, de même que les branchies des Mollusques aqua-
(ques sont homologues aux soi-disant poumons des limaces
@t des limaçons à respiration aérienne. Donc, à moins qu'on
démontre que ces organes respiratoires différents sont
éritablement tous homologues, j'estime qu’il sera plus na-
rel de considérer le système des organes respiratoires des
ollusques, celui des Articulés et celui des Vertébrés, comme
ssentiellement divers par eux-mêmes, quoique homologues |
dans la sphère de chaque embranchement. J’étendrai même
bite observation à tous les systèmes d’organes de ces ani-
(1) Voy. chap. I, sect. v.
240 DE LA CLASSIFICATION. $
maux : à leur charpente solide, à leur système nerveux,“
leur système musculaire, à l’appareil digestif, à celui de k
circulation, aux organes reproducteurs, etc. Il n’est pi
difficile aujourd’hui de faire voir que le canal alimentair
avec ses appendices glandulaires est formé, chez les Verté
brés, d’une toute autre façon que chez les Articulés ou le
Mollusques, et qu’il est impossible de le considérer comm
homologue dans ces trois types. Or, si cela est vrai, on doi
s'attendre avant peu à une réforme complète des méthode
d'exposition de l’anatomie comparée. 4
Enfin, il importe de se rappeler, pour l’étude des classé
comme pour celle des autres groupes, que la somme dé
différences n’est pas toujours égale entre deux divisior
quelconques. Certains traits, dans la nature, semblent étr
plus tenaces, plus profondément gravés que d’autres, pl
fréquemment et plus largement répétés, imprimés à ul
plus grand nombre de représentants. Cette valeur inégal
des groupes divers, partout si évidente dans le règne anima
oblige à la plus grande prudence quand il s’agit d’en fixe
les limites naturelles. C’est un avertissement de ne pas ass
gner une importance indue aux différences observées ent
les êtres vivants, soit en surfaisant celles qui n’ont de grat
que l'apparence, soit en dépréciant des variations qui sem
blent légères. La vérité, en ce cas, ne peut être trouvée qu
force de recherches spécialement faites à ce point de vu
particulier.
Tout le monde sait que les mâles et les femelles de quelque
espèces différent entre eux, beaucoup plus que certaines eé§
pèces ne diffèrent l’une de l’autre. Or, c’est constamment
une séparation entre elles. Et pourtant, ces différences n
sont pas seulement quantitatives, elles sont aussi, et dan
une forte mesure, qualitatives. Dans la famille, la different
entre les genres est aussi plus ou moins grande. C’est cet
inégalité qui est la règle, et non pas l'uniformité de mesure
Pour les classes, la diversité ne se rencontre pas seulemen
ORDRES. 241
ans les formes, elle règne encore et à un degré extraordi-
naire dans l'abondance numérique. Comparez, sous ce rap-
ort, la classe des Insectes à celle des Vers ou des Crustacés.
éme inégalité de répartition entre les groupes primaires.
s Articulés sont de beaucoup l’embranchement le plus po-
uleux du règne animal, et le nombre des animaux de ce
type dépasse grandement celui de tous les autres animaux
réunis.
Voila des faits qui parlent d'eux-mêmes et suffisent à
montrer combien sont artificielles les classifications qui pré-
endent introduire invariablement, dans toutes les grandes
jupes du règne animal, le même nombre et la même sorte
divisions.
iL
Ordres.
‘
_ Si grandes que soient les divergences d'opinions à l'égard
à nombre et des limites des classes, le désaccord en ce
ui concerne les ordres et les familles est encore plus grand.
Mais toutes ces contradictions n’ébranleront point la con-
fiance où je suis qu'il existe entre les animaux des rapports
Kes, déterminés par des considérations intelligentes. Pas
plus que je ne cesserai de croire à l’existence d’un Dieu,
; } is le prétexte que les hommes ne lui rendent pas tous
le méme culte ou qu’ils adorent des dieux de leur façon, je
1 méconnaîtrai le propre témoignage de mes sens touchant
Wistence, dans la nature, d’un système préétabli, parfai-
went combiné et dont la coordination a précédé la créa-
ion de tout ce qui est.
la façon dont on caractérise les ordres en général, et à
ir comment on les introduit dans les systèmes zoologiques,
emblerait que cette sorte de groupe est indifféremment
orivertible en familles et réciproquement. La plupart des
jotanistes ne font aucune différence entre les uns et les.
GASSIZ, 16
242 DE LA CLASSIFICATION.
sions comme synonymes. Les zoologistes admettent plu
généralement une différence entre elles; mais les uns regar
dent les ordres comme supérieurs, tandis que les autre
mettent les familles au premier rang. D'autres admettent |
ordres sans distinguer en méme temps les familles ou,
versd, introduisent celles-ci dans leurs classifications s
y admettre ceux-là. Quelques-uns, enfin, intercalent |
tribus entre ces deux divisons. L'étudiant n’a besoin qi
de jeter un coup d’œil sur un traité général de Zoologie
de Botanique pour se convaincre de larbitraire absolu
prévaut à cet égard. Le Règne animal de Cuvier lui-mén
présente cette singularité inexplicable qu'on y trouve: ¢
certaines classes (1), des ordres et des familles; dans d'a
tres des ordres seulement (2); et enfin, dans quelque
unes, toute la série des genres sans les groupes interme
diaires (3). D’autres classifications présentent l’uniformi
la plus pédantesque. Il y a, dans chaque classe, une su
cession régulière de sous-classes, d’ordres et de sou
ordres, de familles et de sous-familles, de tribus et
sous-tribus, de genres et de sous-genres, de division
de subdivisions, de sections et de sous-sections, etc., 0
est impossible de ne pas lire, en toutes lettres, que ces
tèmes sont le produit d’une idée préconçue de régularit
de symétrie, et n’ont été, en aucune façon, étudiés dan
nature. 4
Dans le but de déduire légitimement les caractères ¢ ¢
ordres, de traits spéciaux réellement fournis par la natu
j'ai examiné très-attentivement les divers systèmes 200.
(4) Dans les classes des Mammifères, des Oiseaux, des Reptiles €
Poissons, Cuvier distingue ordinairement des familles aussi bien que des 0:
Dans la classe des Gastéropodes, dans celle des Annélides, dans celle des
intestinaux et dans celle des Polypes, quelques ordres seulement sont d
en familles ; le plus grand nombre ne l’est pas.
(2) Les classes des Echinodermes, des Acaléphes et des Infusoires sont
sées en ordres, mais il n’y a pas de familles.
(3) Telles sont les classes des Céphalopodes, des Ptéropodes, des Brad
podes et des Cirripèdes (Cirrhipodes). Il dit toutefois que les Céphalopo
constituent qu’un ordre (Regne animal, vol, IT, p. 14), puis (page 22) ilk
pelle une famille, Cependant à la page 8 il les distingue comme classe,
ORDRES. 243
ziques dans lesquels ce groupe a été admis et, en apparence,
udié avec plus de soin que partout ailleurs. Tels sont, en
particulier, le Systema nature de Linné, premier introduc-
ur de cette sorte d’agrégation dans la Zoologie, et l’œuvre
de Cuvier, dans lequel les ordres sont fréquemment carac-
térisés avec une précision rare. Or, à ce que j'ai cru voir,
pariout où le mot n’a pas été employé au hasard, l’idée
Principale et toujours dominante est celle d’un rang défini.
st l'intention de déterminer la place respective de ces
visions, de fixer leur infériorité ou leur supériorité rela-
jes, ainsi que le mot ordre, adopté pour les désigner, l’im-
ique par lui-même. Dans sa classification du règne animal,
naé donne au premier ordre de la première classe le nom
|« Primates». I veut ainsi, à n’en pas douter, exprimer
la conviction que ces êtres, du nombre desquels est l'Homme,
Mi le rang de beaucoup le plus élevé de leur classe. Blain-
ville emploie fréquemment l'expression de « degrés d'orga-
sation » pour désigner les ordres.
Ji est vrai que Lamark se sert des mêmes termes pour
signer les classes. Nous trouvons donc, ici encore, le
ème vague dans la définition des groupes adoptés. Mais,
i Yon veut faire disparaître entièrement l'arbitraire dans
einploi de ces termes et leur assigner une signification
Gientifique exacte, voici ce qui me semble le plus naturel :
Jest, d'accord avec la pratique des observateurs du règne
imimal qui ont le plus approché de la vérité, d'appeler or-
lres certaines agrégations ayant pour caractère d’expri-
jer les divers degrés de complication de la structure,
ms les limites de la classe. C’est ainsi que j'envisage, par
%emple, les Actinoïdes et les Halcyonoides, dans la classe
@s Polypes, telle qu’elle a été circonscrite par Dana; les
“lydroïdes, les Discophores et les Cténophores, dans celle
‘es Acalèphes ; les Crinoides, les Astérioïdes, les Echinoides
les Holothuries dans celle des Echinodermes; — les Bryo-
baires, les Brachiopodes, les Tuniciers, les Lamellibranches
ans la classe des Acéphales ; les Branchiféres et les Pulmonés
ins celle des Gastéropodes; — les Ophidiens, les Sauriens
2hh DE LA CLASSIFICATION.
et les Chéloniens dans celle des Reptiles; — les Ichthyoide Q
et les Anoures dans celle des Amphibiens, etc. 4
J'ai fait voir, dans le paragraphe précédent, que le
classes se rangent immédiatement au-dessous des embran:
chements; il conviendrait de démontrer ici que les ordre
doivent prendre place dans la classe immédiatement au
dessus des familles. Mais, pour des raisons qu’il est facili
d’imaginer, je renvoie cette discussion au paragraphe suivan
qui traite de ces dernières. Quand j'en aurai présenté le
caractères spéciaux sous le jour convenable, on comprendr
sans peine quels sont les rapports des deux sortes ¢
groupes. |
Après ces remarques, on pourrait conclure que je n
toute gradation entre les autres groupes et que, pour moi
les ordres constituent nécessairement une série simple dai
chaque classe. Loin d’affirmer rien de semblable, je croi
au contraire que ni l’une ni l’autre de ces deux propositiot
n’est nécessairement vraie. Pour rendre bien claire mt
opinion sur ce point, force m’est d’entrer ici dans quelque
autres considérations. Je ne veux, du reste, qu’établir dat
quelles limites mon assertion demeure incontestable. In
de soi, en effet, qu'il existe une hiérarchie entre les diff
rentes catégories de groupe admises dans nos systémes @
correspondantes aux diverses catégories d’affinité que
observe entre les animaux. Les embranchements sont Ie
divisions les plus compréhensives et renferment chact
plusieurs classes; les ordres sont des subdivisions @
classes; les familles, des subdivisions des ordres; —
geures, des subdivisions des familles ; les espèces, des sub
divisions des genres. Mais cela ne signifie point que chaq
embranchement doive nécessairement renfermer le mé
nombre de classes ou méme simplement plusieurs classes
cela dépend, en effet, absolument de la manière dont I
plan est exécuté. De plus, une classe peut fort bien |
pas contenir un seul ordre (1), si ses représentants
(1) Voy. chap. F, sect 1.
ORDRES. 245
yrment pas une échelle dont chaque degré exprime une
mplication plus ou moins grande de la structure. De fait,
e en contiendra beaucoup ou très-peu, suivant que ces
orés seront plus ou moins nombreux, plus ou moins tran-
és. Mais comme les représentants d’une classe quelconque
t, de toute nécessité, une forme définie, chaque classe
ympte au moins une famille, sinon plusieurs. En somme,
elle en comptera autant qu'il y a de systèmes de formes
Jarmi ses représentants, pour peu qu’il soit démontré que
a forme est caractéristique de la famille. Méme chose arri-
era pour les genres et pour les espèces. On aurait tort de
Croire que plus un genre renferme d’espéces et mieux il est
éfini, ou qu’il est nécessaire, avant de pouvoir affirmer
Existence d'un genre, d’en connaître plusieurs espèces.
Rien n’est plus éloigné de la vérité. Sans doute, un genre
peut être caractérisé d’une façon plus satisfaisante, les par-
dicularités peuvent en être plus complétement reconnues, la
limite mieux définie, quand on en connaît tous les représen-
fants. Je n’en suis pas moins convaincu que tout genre na-
tw rel peut étre au moins indiqué, si nombreuses qu’y soient
es espèces, par l’examen d’une seule d’entre elles. Au sur-
plus, dans les deux régnes organiques, le nombre de ceux
qu i contiennent seulement une espèce est tellement grand,
que force est bien, dans ce cas, de déterminer les caractères
ae nériques d’après l'espèce unique. Mais il n’en est pas
à oins nécessaire de caractériser cette espèce avec autant
précision, d’en décrire les particularités spécifiques
vec autant de minutie que s’il en existait, en outre, une
iltitude d’autres échappées à notre connaissance. C'est,
armi les zoologistes et les botanistes, une pratique très-
Ondamnable que de se contenter, en pareille occurrence,
le la diagnose du genre. En vain quelques auteurs ont
ines -positivement affirmé que, dans ce cas, les caractéres du
enre et ceux de l’espéce sont identiques. C'est une erreur
Complète.
a Voilà bien les relations naturelles et la subordination des
etabranchements, des classes, des ordres, des familles, des
À
gerer > © | 3 95
~_ or
a a ca ec
246 DE LA CLASSIFICATION.
genres et des espèces: Néanmoins, je crois que ni les em
branchements, ni les classes (pour les ordres, cela ne pet
pas faire de doute), ni les familles, ni les genres, ni le
espèces n’ont le même rang quand on les compare entre eu!
dans leur groupe respectif. Mais cela ne touche en rien à @
qui fait le trait saillant des ordres. En effet, la place relatiy
des embranchements ou des classes, des familles, des genres
des espèces, ne dépend en aucune façon du degré de com
plication de la structure, comme cela a lieu pour les ordres
elle est déterminée, comme je vais le faire voir, par des tre
entièrement différents.
Les quatre grands embranchements du règne tirant let
caractère de quatre plans différents de structure peuvent él
plus ou moins élevés, suivant la supériorité ou l’inférioril
des plans eux-mêmes; il suffit de comparer les Vertébré
aux Rayonnés pour voir que les choses peuvent en effet êt
ainsi (1). Les diverses classes d’un seul embranchemen
seront supérieures ou inférieures, suivant que les voies €
moyens à l’aide desquels le plan typique a été réalisé, seror
l'un ou l’autre. Dans une classe quelconque, ou dans tout
les classes, les ordres se rangeront tout naturellement d’apri
le degré de perfection des organismes qui les représenteni
c’est-à-dire suivant la complication ou la simplicité de let
structure. Les familles occuperont une place plus ou moi
haute; selon que les particularités de la forme y seront pro
duites par les modifications de systèmes organiques plus ©
moins importants. Les genres se placeront plus haut ou pl
bas, parce que les particularités de la structure, dans les pa
ties d’où l’on tire les caractères génériques, présenteront“
plus ou moins haut degré de développement. Enfin, lese
péces seront supérieures les unes aux autres, dans le mên
genre, selon le caractère de leurs relations avec le mom
ambiant ou celui des rapports de leurs représentants enti
eux. D’après ces remarques, il devient évident que le
(4) Je n’ai pas besoin dé faire cette comparaison dans ses détails; il sufl
d’en donner l’idée, les détails se présenteront d’eux-mémes; au surplu |
premier traité d’anatomie comparée fournira la preuve du fait. a
ORDRES. ‘Qh7
spectif des groupes de même catégorie, comparés entre
ux, doit être déterminé par la supériorité relative des traits
péciaux sur lesquels est basée leur propre constitution. Seuls,
is ordres sont strictement définis par le degré naturel de
omplication présenté, dans les limites de la classe, par la
iructure,
ela dépendra du caractère de la classe elle-même ; c’est-à-
ve de la manière dont le plan typique a été exécuté. Si la
asse est homogène, c'est-à-dire s’il n’y a pas lieu à la
iser dès le principe en sous-classes, les ordres formeront
ut naturellement une série simple. Mais si quelques sys-
‘mes d’organes sont développés d'une manière différente
eS autres, il pourra y avoir une ou plusieurs séries paral-
les, dont chacune aura des ordres pour éléments. Évidem-
ent, un pareil fait ne pourra être reconnu qu’au moyen
lune étude des caractères propres à la classe, beaucoup
| lus minutieuse que celle qu’on en a faite jusqu’ici. Les
enialives faites pour disposer intérieurement les classes en
éries, comme celles de Kaup ou de Fitzinger, ne sont guère
ue de pures conjectures ayant pour but d’estimer la valeur
Telative des divisions intermédiaires qui pourraient exister
entre les classes et leurs ordres.
: Oken et les physiophilosophes en général ont à l'égard
és ordres une manière de voir toute différente. L'idée qu’ils
én font est celle-ci : les ordres représentent, dans leurs
lasses respectives, les traits caractéristiques des autres types,
Qi embranchements, du Règne animal. Ainsi, les animaux
ytestinaux ou Gélatineux d'Oken n’étant caractérisés que
run seul système d’organes, l'intestin, ne contiennent
lun ordre distinct; mais chaque classe a trois tribus qui
c respondent aux trois classes du type, c’est-à-dire aux In-
| soires, aux Polypes et aux Acalèphes. Les tribus de la classe
des Infusoires sont : les Infusoires vrais, les Infusoires poly-
vides et les Infusoires acaléphoïdes ; celles de la classe des
j ypes : les Polypes infusoridés, les Polypes vrais et les Po-
248 DE LA CLASSIFICATION.
lypes acaléphoïdes ; et la classe des Acalèphes contient‘: les
Acalèphes infusoridés, les Acalèphes polypoides et les Aca:
lèphes vrais. Le type des Mollusques étant, suivant l’auteur
caractérisé par deux systèmes d’organes; l'intestin et laps
pareil vasculaire, les classes des Mollusques possèdent cha
cune deux ordres. L’un correspond aux Animaux intestinaux,
l’autre au type des Mollusques et, partant, les Acéphales
comprennent l’ordre des Acéphales gélatineux et celui des
Acéphales molluscoides; les Gastéropodes et les Céphalos
podes sont, de la même manière, scindés en deux. Les Arti-
culés sont considérés comme représentant trois systèmes
d'organes : appareil intestinal, appareil vasculaire, apparel
respiratoire ; par suite, chaque classe est divisée en tro
ordres et il y a, dans les Vers, l’ordre des Vers gélatineux,
celui des Vers molluscoides et celui des Vers annelés. Le
mêmes divisions sont adoptées pour les Crustacés et les In-
sectes. Les Vertébrés ont, d’aprés la théorie, cing systémes
trois inférieurs : l’intestinal, le vasculaire, le respiratoire
deux supérieurs : celui de la chair (os, muscles et nerfs) é
celui des organes des sens. En conséquence, chaque class
du type renferme cing ordres et il y a, par exemple, dé
Poissons gélatineux, des Poissons molluscoides, des Poisson
entomoides, des Poissons charnels et des Poissons sensuels
il en est de même pour les classes des Reptiles, des Oiseaux
et des Mammifères (1). 4
Je n’ai exposé si longuement ces divagations d’un philo:
sophe distingué que parce que ces idées, malgré toute leu
bizarrerie, sont néanmoins et sans aucun doute suggérée
par un trait du règne animal, jusqu'ici trop peu étudié. J
veux parler des analogies qui, à côté des affinités vraies
existent entre les animaux et résultent de ce que, au sein dl
structures rigoureusement homologues, certaines modifica
tions viennent mêler ou joindre d’autres caractères puremen
analogues. A mon avis, toutefois, ce sujet des analogies es
(1) Voy. pour plus de développement la Naturphilosophie d’Oken et 0!
Allgemeine Naturgeschichte, vol. IV, p. 582. Cf. encore le chapitre qui suit.
a +
FAMILLES. 249
sore trop peu connu, les faits qui portent sur cette sorte
rapprochement sont encore trop obscurs pour qu’on
isse en faire la base d’un groupe aussi important du
égne animal. Je persiste donc à considérer la complication
bu la gradation de stracture comme le trait qui doit ré-
ler la délimitation des ordres, si par ce mot l’on entend
les groupes naturels exprimant le rang, la place relative,
Ja supériorité ou l’infériorité des animaux dans leur classe
spective. Bien entendu, des groupes ainsi définis ne peu-
nt pas être regardés comme des modifications de la classe,
U ae ils sont fondés sur une catégorie de traits tout à fait
IV
Familles.
» Rien de moins bien défini que l’idée de forme telle que
Tes systématisateurs la font servir à caractériser les animaux.
ntôt cela signifie un système de figures extrêmement di-
verses, mais ayant toutes un caractère commun; c’est ainsi
qu’on dit des Zoophytes qu’ils ont la forme rayonnée. Tantôt,
c’est tout trait extérieur limitant le corps de l'animal, par
exemple, quand on dit : les formes animales en général, au
lieu de dire simplement : les animaux. Tantôt encore, on
¢ ntend par là la figure de quelque espèce individuelle. En
fait, il n’y a pas dans le Règne animal un seul groupe,
tendu ou restreint, depuis ’embranchement jusqu’à l’es-
péce, dans lequel il ne soit occasionnellement question de
a forme comme fournissant un caractère. C. E. von Baer,
barlant des Articulés, les caractérise d’un mot: le type à
formes allongées; les Mollusques sont le type à formes
i assives; les Rayonnés, le type à symétrie périphérique ;
es Vertébrés, le type à symétrie double. Évidemment Baer
prend ce mot dans l’acception la plus large, et comme ex-
| primant les relations les plus générales qu’ont entre elles les
dimensions du corps. Cuvier parle vaguement de la forme,
250 DE LA CLASSIFICATION.
à propos de ses quatre grands embranchmental comm
d’une sorte de moule pour ainsi dire, dans lequel les diffé
rents types auraient été coulés. Il en est aussi question po
caractériser les ordres; par exemple pour distinguer, parn
les Crustacés, les Brachyures des Macroures et pour distir
guer encore les Ophidiens, les Sauriens et les Chélonier
On la cite comme un trait distinctif dans plusieurs familles
les Cétacés, les Chauves-souris, etc. C’est par elle que de
une même famille sont établies les différences qui séparel
certains genres des autres ; et il n’y a peut-être pas une des
cription d'espèce, surtout lorsque l'espèce est considére é
isolément, où la forme ne soit indiquée par le menu. N'y ate
pas dans cet emploi indistinct d’un même terme une conft
sion d’idées, un défaut de précision dans la déterminatie
de ce qui doit être appelé forme et de ce qui pourrait rec ;
voir un autre nom? Il me semble que si. 4
Et d’abord, quand on considère la forme comme caraé
téristique des Rayonnés, des Articulés ou de quelque auti
des grands embranchements du Règne, il est évident qu’e
ne veut pas désigner par là un certain trait extérieur défin
une figure parfaitement déterminée, mais que celte expre es
sion est alors synonyme de plan. En effet, qui pourrait songe
à dire que le corps tubulaire d’une Holothurie offre, comm
caractère, une ressemblance de forme avec le corps de l'Ew
ryale. Comment établir Videntité, à cet égard, d’un Echin: :
et d’une Astérie? Qui ne voit que, pour ce qui est de |
forme, l Holothurie ressemble aux Vers plus qu'à n° import
quel Échinoderme, tandis que, en ce qui concerne la struc
ture, c’est bien véritablement un animal Rayonné, quia
rien de commun avec les Articulés ?
D'ailleurs, il suffit de jeter un coup d'œil, même superh
ciel, sur l’une ou l’autre des classes du Règne animal pou
s’apercevoir que chacune d’elles renferme des animaux d
formes extraordinairement diverses. Se peut-il quelque chos
de plus différent que-les Chauves-Souris et les Baleines
_ les Hérons et les Perroquets, les Grenouilles et les Sirénes
les Anguilles et les Turbots, les Papillons et les Punais
FAMILLES, 254
s Homards et les Bernacles, le Nautile et les Calmars, les
imaces et les Conchiféres, les Huitres et les Ascidies com-
osées, le Pentacrinus et le Spatange, le Réroé et la Physalie,
Actinie et la Gorgone? Et cependant tous ces animaux
ris comme je viens de les citer, deux à deux, appartiennent
la même classe. Il doit être évident, pour tout le monde,
ue la forme ne peut pas être un élément caractéristique
es classes, si, par là, on entend quelque chose de défini.
Mais la forme a une signification déterminée, partout
omprise, quand on applique le terme à des animaux bien
jonnus. Ainsi, l’on dit la forme humaine ; une allusion à la
orme du Cheval ou à celle du Bœuf fait naître à l'esprit une
‘idée distincte. Tout le monde reconnaît que la forme de
Ane est semblable à celle du Cheval, et sait distinguer, par
eur forme, ces animaux des Chiens ou des Chats, des
’hoques ou des Marsouins. Ainsi comprise et définie, la
rme correspond aussi à ce qu’on appelle /e port quand
on parle de l'Homme et de la Femme. C’est dans ce sens
exclusif que je vais maintenant examiner quelle est sa va-
leur comme caractéristique d'animaux différents. On vient
de voir qu’elle ne pouvait pas être mise au nombre des ca-
ractéres de l’embranchement ou de la classe, il faut exami-
her maintenant si elle peut en fournir un pour l'espèce.
ne rapide revue de quelques-uns des types les mieux con-
us du Règne animal, embrassant des genres bien définis
‘dont chacun compte plusieurs espèces, montrera de suite
que la chose est impossible, car ces espèces, en général, ne
“présentent pas la moindre différence à cet égard. Ni les
nombreux Écureuils, ni les vraies Souris, ni les Belettes,
“ii les Ours, ni les Aigles, ni les Faucons, ni les Éperviers,
ni les Passereaux, ni les vrais Pics, ni les vrais Lézards,
i les Grenouilles, ni les Crapauds, ni les Raies, ni les
equins proprement dits, ni les Turbots, ni les Soles, ni
8 Anguilles, ni les Maquereaux, ni les Chaboisseaux, ni
is vraies Crevettes, ni les Écrevisses, ni les Sphynx, ni les
Géométres, ni les Hannetons, ni les Taupins, ni les Ténias,
mi les Calmars, ni les Limaçons, ni les vraies Astéries, ni les
252 DE LA CLASSIFICATION,
Anémones de mer, ne peuvent être distingués l’un de l’autre
par la forme seulement. I] peut y avoir entre eux des diffé-
rences dans les proportions des parties, maisle patron de toutes
les espèces appartenant à un genre bien défini est si compléte-
ment identique que jamais on n’en peut tirer les caractères
spécifiques. Il y a, dans les systèmes zoologiques, des genres
qui, tels qu’ils sont maintenant établis, pourraient être cités
comme exemples du contraire. Mais ces genres sont fondés
sur des traits qui donnent encore lieu à discussion, et vrais
semblablement on finira par découvrir qu’ils ne sont qu’une
association forcée d’espéces hétérogènes. En tout cas, les
progrès récents de la Zoologie ont conduit graduellement à
limiter de plus en plus les groupes de cette catégorie. Les
espèces appartenant au même genre montrent de moins en
moins une différence de forme et doivent finir par présenté
à cet égard une même physionomie. 1
Les genres naturels se distinguent-ils davantage par ce
côté? Y a-t-il une certaine différence appréciable, dans la
forme générale, entre les genres des familles les plus natu-
relles? — je dis avec intention la forme générale, car un
museau plus ou moins saillant, des oreilles plus petites ov
plus grandes, des griffes plus courtes ou plus longues, ele
ne modifient pas essentiellement la forme. Est-ce que,
par exemple, les Ours, les Blaireaux, les Gloutons, les Re
tons, ces genres de la famille des Ursins, diffèrent par
forme ? Les Phocoïdés, les Delphinoïdés, les Falconidés, le
Turdinés, les Fringillinés, les Picinés, les Scolopacinés, le
Chélonioïdés, les Geckonins, les Colubrins, les Sparoides,
les Élatéridés, les Pyralidoïdés, les Échinoïdés, etc., pre
sentent-ils, entre eux, plus de diversité sous ce rappo
Assurément non. Il est bien vrai que, dans une certain
mesure, il y a des différences entre les représentants d'
genre comparés à ceux d’un autre genre, mais à bien ¢
sidérer, ce ne sont là, au fond, que des modifications d
modèle-type. Tout comme il y a des ellipses plus ou moi
allongées, nous voyons que les Blaireaux ont la forme plu
ramassée que les Ours, les Ratons, ou les Gloutons, que ¢e
FAMILLES. + 968:
niers sont plus allongés que les Ratons; mais chez les
et chez les autres il y a, dans l’ensemble des traits,
Ique chose d'aussi absolument typique que ce qui se
couvre chez les Viverrins, ou chez les Canins, les Brady-
»didés, les Delphinoidés, etc. On doit par conséquent ne
is comprendre la forme au nombre des traits caracté-
iques d’un genre naturel, ou tout au moins ne l’y intro-
lire qu’à titre de modification du type extérieur des familles
naturelles.
Ainsi, de tous les groupes naturels du Règne animal, il
reste plus que les familles et les ordres à la distinction
lesquels on puisse employer la forme comme critérium effi-
“ice. Mais ces deux sortes de groupe sont précisément
“ceux sur lesquels les zoologistes sont le moins d'accord, si
bien que difficilement trouverait-on une division que les
“naturalistes voulussent, d’une entente unanime, accepter
s ordres est bien fondé; que les ordres sont des groupes
maturels caractérisés par le degré de complication de la
ructure, et entre lesquels se manifeste, dans leurs classes
‘espectives, une hiérarchie. Dès lors, il nous sera plus
aisé d'en indiquer un petit nombre susceptibles d’être ac-
¢eptés par tous comme naturels. La plupart des natura-
h stes conviendront, je pense, que parmi les Reptiles, les
Chéloniens constituent un ordre naturel; de même les
Ruies et les Requins, parmi les Poissons. Que si quelqu'un
Soutient la nécessité de joindre à ces derniers les Cyclo-
slomes, ce n’en sera que mieux pour mon dessein. Les
lanoïdes, même circonscrits dans les limites plus étroites
que celles que je leur ai assignées, et peut-être en les rédui-
sant au groupe restreint proposé par J. Müller, pourront
€ncore nous servir d'exemple. J’y consens; quoique, en
réalité, il me reste plus d’une objection à faire contre cette
limitation; mais cela importe peu pour mon but actuel.
Tout le monde reconnaîtra, je crois, les Décapodes comme
254 DE LA CLASSIFICATION,
un ordre naturel de la classe des Crustacés et il m’est in-
différent que d’autres familles leur soient annexées pour
compléter l’ordre le plus élevé de la classe. On considérer:
comme tels, je n’en doute pas, les Bryozoaires, les Tuni- ‘
ciers, les Brachiopodes, les Lamellibranches, dans la classe
des Acéphales. On m’accordera non moins aisément ‘4
les Crinoides, les Astérioides, les Échinoïdes et les Holo-
thurioides sont, parmi les Hehinoderies, des groupes di
cette catégorie; de même, parmi les Acalèphes, les Bé-
roïdes et peut- -être les Discophores et les Hydroides, el
encore, parmi les Polypes, les Haleyonoides par oe
aux Actinoides.
Examinons ces ordres au point de vue des formes carac-
téristiques qu'ils comprennent. Les formes des Testudo
vrais, des Trionyx, des Chelonia sont trés-différentes, &
cependant peu d’ordres sont aussi bien circonscrits qué
celui des Chéloniens. La classe entiére des Poissons hed
rait difficilement des différences de forme plus grandes qu
celles qui s’observent entre les Requins ordinaires, les Scies
les Raies communes et les Torpilles, sans parler des Cyclo 6
stomes et des Myxinoides, à supposer qu’on veuille aussi ra
ger ces deux familles dans l’ordre des Placoïdes. Il est im
possible de restreindre les Ganoides dans des limites plu
étroites que celles proposées par J. Miiller. Cependant,
méme ainsi circonscrit, cet ordre contient des formes auss
disparates que celles des Esturgeons, des Lépidostées, de
Polyptéres, des Amies, et d’une légion de genres et de famille
éteints. Les familles que je leur ai associées et que le pro
fesseur Müller en sépare, si on les comprenait perl
Ganoides, augmenteraient encore les éléments hété
morphes de cet ordre. Parmi les Décapodes il suffit
rappeler les Homards et les Crabes, pour convaincre quel (
n’est pas la ressernblance des formes qui les réunit dans 1
méme groupe naturel. Et quelle disparité, sous ce rappor
chez les Bryozoaires, les Brachiopodes et les Tuniciers! Qu
conque a jamais accordé la moindre attention à ces animau
ena été frappé.
FAMILLES. 255
A moins, donc, que la forme ne soit chose trop vague
our pouvoir caractériser un groupe quelconque dans tout
gne animal, il faut bien qu'elle soit le trait saillant de
‘famille. Jai déjà fait remarquer que les ordres et les fa-
illes sont les groupes sur lesquels les zoologistes sont le
joins d'accord, à l’étude et à la caractérisation desquels ils
it donné le moins d’attention. Cela ne viendrait-il pas sim-
ement de ce que, d’une part, on n’a pas compris la diffé
nce qui existe entre les caractères de l'ordre et ceux de la
asse, n'y voyant qu’une question de degré, et, d’autre part,
i a méconnu l'importance de la forme comme caractère
rédominant des familles? En effet, trés-peu de familles
imales sont bien caractérisées ou même simplement
ractérisées ; néanmoins on ne peut pas ouvrir un ouvrage
joderne de zoologie consacré à une classe quelconque,
ns y trouver les genres rassemblés en plus ou moins
rand nombre sous le titre d’un nom générique à termi-
ison en idés ou inés, qui indique la distinction de familles
de sous-familles. Or la plupart de ces groupes, quoique
valeur inégale à un point de vue absolu, sont positive-
mt naturels, encore qu’ils soient bien loin de représenter
aj ours des familles, et constituent le plus souvent des
| rdres et des sous-ordres. Ils portent ainsi témoignage de la
silité qu’il y a à former, presque sans études, les groupes
ermédiaires entre les classes et les genres. Cela vient,
ins mon opinion, de ce que la ressemblance de famille
@st, dans le règne animal, exprimée d’une manière trés-
‘ippante par la forme, et de ce que la forme est un élément
qui tombe aisément sous les sens, même d’un observateur
l perficiel. Mais en même temps, c’est chose très difficile à
décrire exactement; c’est pourquoi la plupart des familles
ont mal caractérisées et l’on substitue constamment aux
Particularités spéciales et exclusives de ce groupe des traits
ui ne lui sont point essentiels. J’en appelle à l'expérience
ès naturalistes. Quand nous voyons un nouvel animal,
-ce que le premier coup d’œil, c’est-à-dire la première
FETES
elite a à mb
256 DE LA CLASSIFICATION.
immédiatement en nous une idée exacte de sa parenté la plu
proche? Avant tout examen de sa structure nous apercevon
si un Escarbot est un Carabicin, un Longicorne, un Éla zs
ridé, un Carculionide, un Chrysomélin ; si un Lépidoptèrt
est une Noctuélite, une Géométride, une Pyralide; si u
Oiseau est une Colombe, une Hirondelle, un Oiseau-Mouche
une Pie, une Bécasse, un Héron, etc. Tandis que, avant di
pouvoir déterminer le genre d’un de ces animaux, il not
faut étudier la structure de quelques parties caractéristiques!
avant de combiner les familles en groupes naturels, nou
avons à faire un examen approfondi de la structure tout en:
tière et à comparer sous ce rapport une famille avec toute
les autres. Ainsi c’est la forme qui caractérise les familles:
et, après une étude minutieuse de ce sujet durant plusieur
années, pendant lesquelles j’ai passé en revue le Règne an
mal tout entier à cette intention spéciale ainsi qu’à tous le
points de vue relatifs à la classification, je puis ajouter qu
c’est elle qui caractérise cstemÉ ble een les familles (4)
Je ne dis pas les contours extérieurs, mais la forme tell
qu’elle résulte de la structure; ce qui signifie que les famill e
ne peuvent pas être bien définies, ni circonscrites dans lew
limites naturelles, sans un examen approfondi de tous | ce
traits de la structure intérieure qui se combinent pour deter
miner la forme. %
La manière dont j'ai caractérisé les Chéloniens de ’Amé:
rique du Nord (2) pourra faire voir comment ce sujet doi
être traité. J’ajouterai seulement que si, tout d’abord et sang
difficulté, l'impression générale faite sur nous par la form
des animaux nous met sur la voie de ce que nous devons aps
peler leurs familles, on ne parvient que lentement à déter
miner la portée naturelle des modifications d’un type de
{1) Ces investigations, qui m'ont conduit aux plus intéressants résultats
ont retardé, jusqu'ici, la publication de la partie systématique des Principes
Zoologie, ouvrage entrepris en commun avec mon ami le docteur A. A. Goull :
Elle ne verra pas le jour avant que j’aie pu reviser le règne animal tout entier
à ce nouveau point de vue, afin d’introduire autant de précision que possib
dans sa classification. +
(2) Contributions à l’histoire naturelle des Etats-Unis, vol. 1, p. 347- -36
FAMILLES. 257
forme quelconque et les particularités de structure qui en
out le fondement. Peu d’études exigent d'aussi patientes
comparaisons. L’anatomie comparée a laissé trop complé-
tement de côté tout ce qui se rattache à la morphologie ; les
nvestigations des anatomistes tendent trop uniformément
une appréciation générale des connexions ou des homolo-
“gies présentées par les systèmes organiques. Aussi lorsqu'on
_ s'applique à bien saisir quelle est la valeur des formes, quel
en est le fondement véritable, cette science fournit à peine
un renseignement, si ce n’est, çà et là, quelque considération
sur les relations téléologiques des organes.
_ Admettons donc que les ordres sont des groupes natu-
tels caractérisés par la complication de la structure, et que
s différents ordres d’une classe expriment les degrés
e celte complication. Admettons encore que les familles
sont des groupes naturels caractérisés par la forme, telle
“qu'elle est déterminée par les particularités de la structure.
1 s'ensuit que les ordres sont une sorte de division supé-
ure; car nous avons vu que plusieurs divisions naturelles,
généralement considérées comme des ordres, contiennent
chacune plusieurs groupes naturels caractérisés par des dif-
Miérences de formes, c’est-à-dire constituant autant de fa-
milles distinctes.
4 Après cette discussion, il est à peine nécessaire d’ajouter
que les familles ne peuvent en aucune façon être regardées
Comme les modifications de l’ordre auquel elles appar-
nnent, puisque les ordres sont caractérisés par la compli-
‘cation de la structure et les familles par la forme. Je ferai
ré marquer d’ailleurs qu "il ya, à l'égard de la forme des ani-
aux, un point auquel je n'ai pas touché ici, et qu’il serait
Plus important encore d'examiner s’il s’agissait des plantes :
yest le mode d’association des individus faisant partie d’une
Communauté plus ou moins nombreuse, comme cela s’ob-
IServe, particulièrement, chez les Polyes et chez les Acalèphes.
des agrégations n’ont pas, au point de vue de la forme,
a même importance que les individus simples qui les com-
sent, et, par conséquent, elles peuvent rarement fournir
AGASSIZ, 17
258. DE LA CLASSIFICATION.
des caractères de famille dignes de confiance. Mais c’est un
question qu'il sera plus opportun de traiter dans l’ouvrag
spécial que je me propose de consacrer aux Hydroides ¢ d
l'Amérique du Nord (1). 4
J'ai déclaré plus haut que les Botanistes ont défini les fa
milles naturelles des végétaux avec plus de précision que le
Zoologistes n’ont su le faire pour celles des animaux; Je
fait remarquer en outre que la plupart d’entre eux ne fon
pas de distinction entre les ordres et les familles. Le carat
tére particulier du Règne végétal en est sans doute la cause
ce règne, en effet, n’est pas établi sur des plans de structur
aussi complétement différents que ceux des divers en
branchements zoologiques. Au contraire, il est possible d
tracer parmi les plantes une certaine gradation, et il est plu
facile que dans le Règne animal de s'élever pr ogressivemel
d’un type inférieur à un type supérieur bien distinct, quoiqu
les Végétaux, pas plus que les Animaux, ne constituent un
série simple. Il me paraît néanmoins que si les Cryptogames
les Gymnospermes, les Monocotylédonées et les Dicotylé ie
nées peuvent étre considérées comme des embranchemen
du Régne végétal, analogues aux Rayonnés, aux Mollusque:
aux Articulés et aux vertébrés parmi les animaux, des diWi
sions comme celles des Fungus, des Algues, des Lichen
des Mousses, des Hépatiques, des Fougères dans l’acception |
plus large, pourraient étre envisagées comme des classé
Les Diatomacées, les Conferves, les Fucus seraient des 61
dres; les Mousses et les Hépatiques des ordres ; les Equist
tacées, les Fougères proprement dites, les Hydroptérides —
les Lycopodiacées, des ordres encore. Toutes ces plantes pr
sentent en effet différents degrés de complication dans”
structure. C’est au contraire par la forme ou le port qu
se rapprochent le plus leurs subdivisions naturelles, q
peuvent être regardées comme des familles. Les famill
naturelles végétales se distinguent généralement par le pol
~ comme les familles animales par la forme. On n’a qu’a Vv
(1) Voy. 3° et 4° vol. des Contributions, etc.
F
LA
mF
|.
+
ie
GENRES. 259
s Palmer, les Coniféres, les Ombelliféres, les Composées,
Légumineuses, les Labiées, elc., pour avoir un exemple
à cette uniformité d'aspect.
V
Genres.
Linné savait déja fort bien que les genres existent dans
| rie Cependant il appelle genres des groupes à beau-
up desquels nous donnons un autre nom et dont quelques-
Sdoivent étreregardés comme des familles. I] n’en demeure
s moins prouvé, par ses œuvres même, qu'il était pleine-
nt convaincu de la réalité de cette sorte de groupe. Il
, en effet, nettement, dans sa Philosophia Botanica,
. 169 : « Scias characterem non constituere genus, sed
‘genus characterem. Characterem fluere e genere, non ge-
lus e charactere. Characterem non esse ut genus fiat,
eC ut genus noscatur. »
Un aphorisme aussi clair aurait di maintenir présente à
brit des naturalistes l’idée que les genres ont une base
le Mais cela n’a pas empéché les idées les plus vagues de
évaloir à ce sujet. Bien petit est le nombre des observa-
bis qui, de nos jours, croient positivement a la réalité des
tinctions génériques instituées par eux. Quant à ce que
les genres, la confusion est bien plus grande encore,
ax “qui n’ont point approfondi ce sujet semblent être
ivés à cette conclusion : les genres sont purement et sim-
lement des groupes où sont réunies un certain nombre
Æspèces possédant en commun quelques traits plus géné-
x que ceux qui distinguent chacune d’elles. Pour eux,
|e nulle différence essentielle entre les ca-
s génériques et les caractères spécifiques; une seule
peut former un genre, pour peu que ses carac-
is soient pas tous conformes 4 ceux d’autres espéces,
a lusieurs espèces en consutuent un lorsque leurs ca-
es spécifiques présentent entre eux une certaine con:
260 DE LA CLASSIFICATION.
formité (1). Loin d'admettre une semblable doctrine, i cro
pouvoir démontrer que, pour grande ou petite que soit |
différence observée ‘entre deux espéces, en tant qu’ espèces
elles peuvent fort bien constituer un genre naturel ; il suff
qu’elles aient des caractères génériques identiques. |
J’ai dit plus haut que, pour mieux connaître sur qu
étaient fondés les différents groupes adoptés dans les s
tèmes zoologiques, j'avais consulté les œuvres de certail
auteurs, célèbres dans les annales de la science à caused
bonheur particulier avec lequel ils avaient caractérisé ur
catégorie spéciale de groupe. J’ai cité Latreille comme s’éte
distingué, entre tous les zoologistes, par la précision avec k
quelle il avait défini les genres des Crustacés et des Insecte
Il nous a laissé en effet sur ces animaux l'ouvrage le pl
étendu qui existe (2). Un mot, que j'ai souvent entendu r
péter par des entomologistes qui avaient connu Latreil
fait très-exactement connaître la signification qu'il attac nai
à l'idée de genre. A l'époque où il préparait le travail do
je viens de parler, il ne perdait aucune occasion de se pr
curer des spécimens, afin de déterminer parfaitement l
près la nature les particularités génériques des anima
qu'il décrivait. Pour cela, il faisait appel à ses confrères
les priait de contribuer à sa collection. Mais ce n’était ]
=
pour accumuler des exemplaires qu’il mettait tant d'activités
|
w |
se procurer ces objets, car il avait coutume de dire qu’il m
avait besoin que « pour en examiner les parties ». N'y at
pas dans ce mot une suggestion du maître, qui nous ense
ce que sont les genres et comment nous devons les cara
riser. N’est-ce pas la structure spéciale de telle ou telle pal
tie qui caractérise les genres? N’est-ce pas le fini de l’or,
nisation, la perfection des derniers détails de la struel
(4) Spring, Ueber die naturhistorischen Begriffe von Gatlung, . Art
Abart. Leipzig, 1838, in-8. — H. Burmeister, Zoonomische Briefe. Le
1856, 2 vol. in-8. — T, V. Wollaston, On the Variation of Species.
1856, in-8.—J, D. Dana; Thoughts on Species (Amer. Journ. Sc. a
1857, n° 24, p. 305). 3
(2) Latreille, Genera Crustaceorum et Inseclorum. Paris et Argen
4806-1808, 4 vol. in-8. 4
ESPECES. 261
bi distingue un genre d’un autre genre ? Latreille, en indi-
uant ce dont il avait besoin pour l'étude des genres, nous
donné la clef des rapports harmoniques qu’il y a entre
ux. Les genres sont des groupes d’animaux très-étroitement
liés, qui différent, non _par la forme, non par les PRE
ela structure de quelques parties. C’est là, je crois, la
ieilleure définition qu’on en puisse donner. Ce qui les carac-
rise, ce ne sont pas certaines modifications des traits qui
mt propres à la famille, car nous avons vu que le trait
illant et différentiel des familles c’est la forme typique, et
Sgenres d’une même famille ne diffèrent pas du tout par la
jrme. Les genres ne sont pas non plus, tout simplement,
ne certaine formule plus compréhensive que l’espèce, em-
rassant des caractères plus nombreux ou d’une importance
lis grande. En effet, les espéces d’un méme genre natu-
el ne doivent présenter aucune différence de structure,
| jais quelque chose qui manifeste d’une façon plus spéciale
Tes relations que leurs représentants ont entre eux ou avec
Te monde ambiant. Les genres, en un mot, sont des groupes
haturels d’une sorte particulière, et leur distinction spéciale
épose sur les derniers détails de la structure.
VI .
Espèces.
On croit généralement que rien n’est plus aisé que la dé-
rmination des espèces, et que, de tous les degrés d'alliance
Qui peuvent exister entre les animaux, celui que constitue
“entité spécifique est le plus nettement défini. On s’ima-
gine même qu'un critérium infaillible de cette identité est
urni par le rapprochement sexuel qui réunit, si naturel-
ement, les individus de la même espèce dans la fonction
implète, tout au moins une pétition de principes impos-
ble à admettre dans une discussion philosophique sur ce
s
a
;
?
r
.
À
262 DE LA CLASSIFICATION.
- qui constitue véritablement les traits caractéristiques de
l'espèce. Je l’affirme même : bien des problèmes embrouillé
contenus dans la recherche des limites naturelles de ¢
groupe seraient depuis longtemps résolus, n’était l’insistane
avec laquelle on présente généralement la capacité et ]
disposition naturelle des individus à un rapprochemer
fécond, comme une preuve suffisante de leur identité spéci
fique. Je ne veux pas appuyer sur le fait que chaque now
veau cas d’hybridité constaté (1) proteste derechef contr
cette assertion. Je n’examinerai pas non plus s’il est possibl
ou praticable d’écarter cette difficulté, en introduisant dan
le débat la considération de la fécondité limitée du produi
d'espèces différentes. Je ne ferai qu’une simple observatior
Tant qu’on n’aura pas prouvé, pour toutes nos variétés d
chiens, pour toutes celles de nos animaux domestiques €
de nos plantes cultivées, qu'elles sont respectivement.déri
vées d’une espèce unique, pure et sans mélange; tant qu’un
doute pourra être conservé sur la communauté d’origine ¢
la descendance unique de toutes les races humaines, il se
illogique d'admettre que le rapprochement sexuel, mêm
donnant lieu à un produit fécond, soit un témoignage irré
cusable de l'identité spécifique. 4
Pour justifier cette affirmation, je me bornerai à deman-
der s’il est un naturaliste sans préjugés qui, de nos jou s,
ose soutenir : :
4° Qu'il est prouvé que toutes les variétés domestiques dé
moutons, de porcs, de bœufs, de lamas, de chevaux, d
chiens, de volailles, etc., sont respectivement dérivées d'u
tronc commun ; +
2° Que consid érer ces variétés comme le résultat d’un mi
(1) Wiegman, Gekrünte Preisschrift über die Bastarderzeugung im Pfu
zenreich. Brunswick, 1828, in-8. — Braun (A.), Ueber die Erscheinung dé
Verjiingung in der Natur. Fribourg, 1849, in-4, — Morton (J. G.), Essay
Hybridity (Amer. Journ., 1847). — Additional Observations on Hybrid
Animals and on some collateral subjects. Charleston, Med. Journ. , 1850.
De Selys Longchamps, Récapitulation des hybrides "observés dans la fam
des Anatidées (Bull. Acad. Bruxelles, 1845), et Additions (ibid., 1856), 2° pz
p. 6.
4
Le
ESPÈCES. 263
ange extrême de plusieurs espèces primitivement distinctes
est une hypothèse inadmissible ;
Que des variétés importées de contrées lointaines, et
e lesquelles il n’y a jamais eu accointance auparavant,
me les poules de Shanghaï et nos poules communes, par
iple, ne se mêlent pas complétement?
| Où est le physiologiste qui pourrait affirmer en conscience
que les limites de la fécondité entre espéces distinctes
font connues avec une suffisante rigueur, pour qu’on en
nisse faire la pierre de touche de l'identité spécifique?
ai pourrait dire que les caractères distinctifs des hybrides
conds et ceux des produits de sang non-mêlé sont telle-
vent évidents, qu'on puisse retracer les traits primitifs de
S nos animaux domestiques, ou bien ceux de toutes nos
Mantes cultivées? Or, aussi longtemps que cela demeurera
mpossible ; aussi longtemps que Ja communauté d’origine
aura pas été prouvée pour toutes les races humaines,
jour tous les animaux différents, pour toutes les plantes
diverses dont il vient d’être question, et qui, chaque jour,
Jepuis des milliers d'années, fournissent la preuve que
eurs unions sont fécondes ; aussi longtemps qu’il y aura un
7 re and nombre d'animaux hermaphrodites pouvant multiplier
| al ur espèce sans que le concours de deux individus soit né-
“tessaire ; aussi longtemps qu’il y en aura d’autres pouvant
ë multiplier par différents procédés sans l'intervention des
sexes, — on ne sera point autorisé à prétendre que ces ani-
aux ou ces plantes sont des espèces pures et sans mélange,
t que la fécondité sexuelle est le critérium de V’identité
SE pécifique. D'ailleurs, cette prétendue pierre de touche n’a
uere de valeur pratique dans beaucoup de cas offrant un
és-haut intérêt scientifique. On n’y a jamais recours, et,
ue je sache, on n’en a jamais fait l'application avec un
sultat satisfaisant, pour s’éclairer sur un cas douteux.
le n’a jamais été d’aucune utilité au naturaliste conscien-
eux et perplexe, en quête du degré de parenté pouvant
pxister entre des animaux ou des plantes étroitement alliés,
gui vivent dans des contrées éloignées ou sur des aires
[2
ie
Ju
t£
fey
la
5
be
t
264 DE LA CLASSIFICATION,
géographiques dépourvues de communication. Jamais elle
ne contribuera à la solution d’un problème où soient en
cause l’apparente différence, l’apparente identité, d'animaux
ou de végétaux disparus et trouvés dans des formations
géologiques diverses. Dans tous les cas critiques qui exi-
gent une exactitude et une précision minutieuses, il faut re-
jeter ce soi-disant critère, comme peu sûr et nécessairement
hypothétique. La science exacte doit se passer de lui, al
plus tot elle s’en sera débarrassée, mieux ‘ce sera. Mais, de
méme que d’autres reliques du vieux temps, c’est une ma-
niére d’épouvantail théorique que l’on garde dans sa boîte
pour le faire seulement surgir à certains jours, quand i
s’agit de donner le change et de fermer le débat sur la
question de l’unité d’origine des races humaines. 1
Il est une autre erreur qui se rattache aux idées en vogue
sur l’espèce et qu'il faut aussi que je signale; c’est cette
affirmation spécieuse que l’espèce n’existe pas dans la nature
de la même manière que les genres, les familles, les ordres,
les classes et les embranchements. Il y a des gens qui sou-
tiennent positivement (1) que l'espèce est fondée dans le
nature d’une tout autre manière que ces groupes ; que son
existence est en quelque sorte plus réelle; celle des autres
groupes étant regardée comme idéale, alors méme qu of
tout entière de l’individualité qui est en cause. On ne 8)
méprendra pas, je l'espère; j'apprécie à toute sa valeur
l'importance des rapports sexuels comme indice des liens
étroits qui unissent ou peuvent unir les individus de I
même espèce. Je sais, aussi bien que n’importe qui, dans
quelle étendue cesrelations se manifestent à l'état de nature,
Mais je prétends insister sur ce fait incontestable qu’elle
ne sont pas aussi exclusives que le prétendent les na
ralistes, aux yeux desquels elles constituent un critériun
infaillible de l'identité spécifique. Je rappellerai à ceux
(1) Burmeister (H.). Zoonomische Briefe, déjà cité, vol. I, p. 11. &
ESPECES. | 265
ui l’oublient constamment que certains animaux, bien
que d’espéces distinctes, s’unissent sexuellement et ont des
produits ; — inféconds le plus souvent, cela est vrai, dans
certaines espéces, mais jouissant d’une fécondité limitée
la $ quelques autres et même, dans plusieurs, féconds à un
degré qu'il n’a pas été jusqu’à présent possible de détermi-
ner. Le rapprochement sexuel est le résultat, ou plutôt il est
1 expression la plus frappante, de l'alliance étroite établie à
gine entre les individus de la même espèce; mais il n’est
en aucune façon la cause de leur identité dans la suite des
ge hérations qui se succèdent. Après la création, les ani-
maux de la même espèce se sont réunis par couple, parce
Wils étaient faits l’un pour l’autre; ils ne se sont pas re-
erchés dans le but de fonder leur espèce, car celle-ci exis-
ait pleinement avant que le premier individu provenant de
leur union fût venu au monde.
. Cette façon d'envisager le sujet acquiert d’autant plus
l'ont pas pris origine par couple unique, mais ont été créées
Yec un très-grand nombre d'individus, dans les proportions
numériques qui produisent l'harmonie naturelle entre les
êtres organisés. C’est la seule explication possible de la
Procréation des hybrides ; elle est alors basée, en effet, sur le
r approchement naturel d'individus appartenant à des espèces
trés-voisines et qui peuvent devenir fécondes, l’une avec
‘Tautre, d'autant plus facilement qu’elles différent moins
quant à la structure.
… Pour supposer que les relations sexuelles déterminent
lespece, il faudrait d’abord avoir démontré que la pro-
Mhiscuité absolue, parmi les individus de la même espèce,
Met le trait dominant du règne animal. Le fait est, au
contraire, qu’un trés-grand nombre d'animaux, sans par-
Ter de l'Homme, choisissent leur compagne pour la vie et
Ont rarement des rapports avec une autre. Les éleveurs
espéce ont moins de disposition à s’unir que les individus de
la même race. Pour ma part, je ne puis pas concevoir com-
266 DE LA CLASSIFICATION.
ment des moralistes, qui soutiennent l'unité d’origine de
races humaines comme un des principes fondamentaux €
quand de telles relations répugnent même aux sauvages. |
d’ailleurs, il y a d'innombrables espèces chez lesquelles 1
trés-grand nombre d'individus ne sont jamais dévelop
sexuellement; d’autres où les individus sexués Barna se
multiplication s'opère par hourgeonnament dans une pr
portion bien plus considérable que par génération sexuell
Je pourrais rappeler, enfin, les phénomènes de générali¢
alternante, aujourd’hui si ‘bien connus chez les Acalèphe
et les Vers, et le polymorphisme de plusieurs autres type
On ne peut pas méconnaître la signification de parel
faits, A moins d’aller jusqu’à la prétention absurde que Ie
distinctions et les définitions introduites en Histoire nat
relle, dans l’enfance de cette science, doivent continuer
nous servir de norme dans l'appréciation des phénomé a
naturels ; de nier qu'il y ait lieu de réformer et de modifi
nos régles, conformément aux lois de la nature, à mes 1
que notre connaissance fait des progrès! C’est par exem IP
s'unir, l’un avec la femelle de I’ autre, et de donner lieu au 1
produit qui diffère de celui que chacun deux eût obten
Jument, comme représentant de son espèce, de mettre a
monde un Mulet, ensuite de son union avec le Baudet, tand
que l'Étalon accouplé i à l’'Anesse procrée un Bardot. lle
encore pour eux caractéristique de produire des hybrid
d’autre sorte avec le Zèbre, avec le Daw, etc. Comment dot
croire que la fécondité ou tout au moins la promiscuil
entre représentants de la même espèce puisse être un crit
ESPECES. 267
im de Videntité spécifique ? Il y a cependant encore des
listes qui voudraient la représenter comme une pierre
\ touche infaillible, siinplement pour pouvoir soutenir
lte thèse : tous les hommes descendent d’un couple
uc ue.
Ces faits s’ajoutent à tant d’autres qui, chaque jour, font
ssortir davantage Ja probabilité que les individus d’une
ne espèce vivant sur des aires géographiques sans com-
mication entre elles aient eu une origine indépendante.
| nous obligent à écarter de la définition philosophique
l'espèce l’idée d’une communauté d’origine et, con-
quemment aussi, l’idée de la nécessité d’un lien généa-
rique. La preuve que tous les animaux ont été originelle-
ent créés en nombre immense est tellement forte, que
ypothèse de leur apparition première par couples sin-
iliers est, on peut le dire, presque _enti¢rement aban-
donnée par les naturalistes. Cela étant, Ja dérivation sexuelle | -
7 Donne pas le caractère essentiel et nécessaire des |
èces, encore bien que le rapprochement des sexes soit le
n. Si nous sommes conduits à admeltre, comme point de
départ, pour chaque espèce, l'apparition d'un très-grand
Nombre d'individus; si la même espèce a pu prendre origine
la fois dans des localités différentes, entre ces premiers
eprésentants de l'espèce, au moins, le lien provenant d'une
| ême filiation n'existait pas. Or, comme le même argu-
ment s’applique tout aussi rigoureusement à un premier
uple unique, ce fantastique critérium de l'identité spé-
ique doit être abandonné dans un cas comme dans l’autre.
Li pala des classes, des embranchements. Ce qui, en
1, possède la réalité de l’existence, ce sont les individus,
L: a ‘ne sont pas les espéces. Nous pouvons a la rigueur con-
érer les individus comme des représentants de l'espèce,
| ¢ ni un individu, ni un nombre quelconque d’ individus,
Teprésente simplement l’espéce sans représenter aussi en
ee tenet oe > es rs
rer
vec lui disparail à son tour la prétendue réalité de l'es- \
ice, opposée au mode d'existence des genres, des familles, |
procédé naturel de leur reproduction et de leur multiplica- )
|
268 DE LA CLASSIFICATION.
même temps, comme on l’a vu plus haut (sect. 1 à v), I
genre, la famille, l’ordre, la classe et l'embranchement. «
Avant d’ entreprendre de prouver tout ce que renferm
cette proposition, j'examinerai d'abord les caractères di
l'être individuel chez les animaux. L'existence des individu
est parcimonieusement mesurée dans le temps et dans l’&
pace ; elle a des bornes définies et appréciables. Ni l'individu
ni l’ensemble des individus à un moment donné, ne repré
sentent complétement l'espèce. Ils n’en sont jamais que le
représentants temporaires, et cela d’autant plus que l’espèt
a, dans la nature, une plus longue durée. Les individu
d'une espèce quelconque, ceux de toutes les espèces exis
tant à l'heure présente, succèdent à d’autres individus q
ont vécu antérieurement et précèdent des générations qu
leur survivront ; ils ne constituent pas l'espèce, ils la re:
présentent. L’espéce est une entité idéale, aussi bien qu
le genre, que la famille, que l'ordre, la classe, ou lem:
branchement; elle continue à exister, tandis que, géné
ration après génération, ses représentants meurent. M ui
ses représentants n’expriment pas simplement ce qu il
a de spécifique dans l'individu, ils manifestent et reprodut
sent de la même manière, de génération en génération, tou
ce qui en eux est générique, tout ce qui caractérise la as
mille, l’ordre, la classe, l'embranchement, avec la même
plénitude, la même constance, la même précision. L’espéc ce
donc, existe dans la nature au même titre que tout autre
groupe; elle est tout aussi idéale que le genre, la fa
mille, etc., ou tout aussi réelle. Mais les individus existen
véritablement d’une autre manière. Aucun d’eux ne prés
sente au même instant tout ce qui est caractéristique d
l'espèce, serait-il hermaphrodite ; aucun couple ne le peu
faire davantage, méme quand l espècé n’est pas polymorphes
Car les individus ont une croissance, une jeunesse, une m À
turité, une vieillesse, et ils ont durant leur vie un habitat
limité. L'espèce, il est vrai, ne jouit non plus que d'un
existence limitée; mais nous pouvons, pour notre desseit
considérer cette existence comme infinie, puisque nous
ESPÈCES. 269
vons aucun moyen d'en déterminer la durée, soit dans
temps géologiques antérieurs, soit dans la période ac-
‘Muelle, tandis que les cycles de la courte vie des individus
sont des quantités aisément mesurables. Done, autant il est
ai que les individus, pendant qu’ils existent, représentent
ur espèce au moment actuel, mais ne la constituent pas,
utant il est exact que ces mêmes individus représentent,
en même temps, leur genre, leur famille, leur ordre, leur
classe, leur embranchement. Ils en portent les caractères
“comme ceux de l'espèce et d’une façon tout aussi indélébile.
» Comme représentants de l'espèce, les individus entretien-
lent les uns avec les autres les relations les plus étroites; ils
ont avec le monde ambiant dans des rapports définis et
eur existence est bornée à une période définie.
« Comme représentants du genre, ces mêmes individus ont
certains détails d’une structure définie et spécifique, iden-
tiques avec ceux que possèdent les représentants d’autres
espèces.
…._ Comme représentants de la famille, ces mêmes individus
nt une figure définie et expriment par des formes sem-
bles à celles des représentants d’autres genres, ou par
es formes propres si la famille ne contient qu’un seul
enre, un modèle spécifique distinct.
… Comme représentants de l’ordre, ces individus se placent
i un rang défini, quand on les compare avec les représen-
ants d’autres familles.
_ Comme représentants de la classe, ces individus mani-
estent le plan de structure de leur embranchement d’une
aniére spéciale, exécutée à l'aide de moyens spéciaux et
ivant des voies spéciales.
Comme représentants de l embranchement, ces individus
nt tous organisés d’aprés un plan distinct qui différe du
lan des autres embranchements.
__ Les individus sont donc les supports, pour le moment pré-
sent, non-seulement des caractères spécifiques, mais encore
mile tous les traits naturels au moyen desquels la vie animale
Ke déploie dans toute sa diversité,
270 DE LA CLASSIFICATION.
Ainsi envisagés, les individus réassument toute leur dignité
ils cessent d’être absorbés dans l’espéce pour en constitue
simplement la représentation, sans être rien par eux-mêmes
Au contraire, il devient évident, à ce point de vue, que lim
dividu est, pour l'heure présente, le glorieux porteur de toute
les richesses que l'inépuisable fécondité de la nature pro
digue à la vie. Cette manière d’envisager les choses fa
comprendre ef outre comment on peut rechercher dan
l'individu non-seulement l'espèce, mais encore le genre, li
famille, l’ordre, ia classe et l’embranchement. De fait, ce:
ainsi que les naturalistes ont toujours opéré dans la prati
que, tout en niant, en théorie, que cela fat possible. 1
Maintenant que j'ai déblayé le terrain de tout ce qui lu
était étranger , il me reste à montrer quelle est la chose
qui constitue réellement l’espèce et comment on peut la "I
tinguer avec precision dans ses limites naturelles. |
Pour peu qu’on tienne à n’exclure de la définition aw
cun trait essentiel et à n’y rien faire entrer qui n’ait cett
qualité, il importe de reconnaître tout d’abord qu’un de
caractères de l'espèce est d’appartenir à une période don:
née de l’histoire du globe et d’être dans des rapports dé
finis avec les conditions physiques alors prédominantes, ains
qu’avec les animaux et les végétaux contemporains. Ce:
rapports sont nombreux et se montrent : 1° Dans la port
géographique naturelle à chaque espèce, aussi bien que dan
son aptitude à s’acclimater dans les contrées où elle né s€
rencontrait pas primitivement ; 2° dans les relations qu’elle
entretient avec les éléments ambiants, suivant qu’elle hab t
l’eau ou la terre, les mers profondes, les ruisseaux, lé
fleuves, les lacs, les bas-fonds, les bancs, les côtes sablons
neuses, limonetises, rocheuses, les bancs de calcaire, A
récifs coralins, les marais, les prairies, les jachéres, les
landes, les déserts salés, les déserts sablonneux, les terre
humides, les forêts, les vallées ombreuses, les coteaux expos
sés au soleil, les régions basses, les plaines, les steppes, les
hauts plateaux, les pics élevés ou les terres glacées des
poles, etc.; 3° dans la dépendance où elle est de tel ou tel
ESPECES. 271
iment pour subsister ; 4° dans la durée de la vie ; 5° dans
‘mode d'association des individus qui vivent en troupe, en
stites sociétés, ou isolément; 6° et la durée et le retour
la période de reproduction’ ° dans les changements
bis par les individus durant Pa psBiseath oti et la périodie |
é de ces changements pendant la ffiétainorphose : 8° dans
a ode d'association de ses représentants avec les autres
es, mode qui est plus ou moins intime et constitue chez
Diese une association constante, et chez d’autres le
rasitisme ; 9° dans toutes les particularités, vraiment spé-
fiques, qui résultent de la stature définitive, des propor-
ns des parties, de l’ornementation, etc., et de toutes les
Une fois bien et entièrement déterminés tous les faits
relatifs à ces considérations diverses, il ne peut plus rester
doute sur la délimitation naturelle de l'espèce. Un insa-
able désir de décrire des espèces nouvelles d’après des
yanées insuffisantes a pu seul faire introduire, dans les
systémes d'Histoire naturelle, tant d'espèces douteuses qui
ajoutent rien à notre connaissance et grossissent inutile-
me nt la nomenclature, déja si embrouillée, des animaux et
As être identifiées à première vue, et qu'il faut au
Onlraire beaucoup de temps, de recherches et de patience
i en fixer les limites naturelles; si l’on admet en
ire que l’énumération précédente rénferme bien ce qu’il
fade plus hautement caractéristique pour ce groupe, on
eut dire que l'espèce est basée sur l’exacte détermination
lés rapports entre les individus et le monde ambiant, de.
| ia parenté, des proportions et des rapports des parties
ssi bien que de l’ornementation spéciale des animaux.
Le bonne. description de l’espéce doit, par conséquent, être
Orûparative. Ce doit être, pour ainsi dire, une biographie
jui retrace l'origine et suive le développement du groupe
liant sa vie tout entière. De plus, tous les changements
ju¢ l'espèce peut subir dans le cours du temps, spéciale-
972 DE LA CLASSIFICATION. . 4
ment en vertu de l'intervention de l'Homme, à l’état «
domesticité ou de culture, appartiennent à son histoire. L
maladies elles-mêmes et les monstruosités auxquelles é
peut être sujette, font partie intégrante du cycle où elle €
renfermée aussi bien que ses variations naturelles. Ch
quelques-unes, les variations de couleur sont fréquente
d’autres ne changent jamais; d’autres changent périodiq d
ment; d’autres encore, accidentellement. Il en est qui se ¢
pouillent 2 à des époques régulières de certains appendi@
formant leur parure (les Cerfs, de leurs bois, quelques (
seaux du plumage dont ils sont ornés à la saison 4
amours, etc.). Tout cela doit être déterminé pour chacui
d'elles et aucune ne peut être regardée comme bien défi
et suffisamment caractérisée, tant que son histoire n’est p
complète, dans toute l'étendue que je viens de marquer.
pratique a prévalu, depuis Linné, d’en borner la définitic
à une simple diagnose. Aussi la confusion règne dans |
nomenclatures et il est souvent impossible de reconnait
quelles espéces avaient sous les yeux les auteurs de ¢
descriptions si concises. Sans la tradition qui, de génér
tion en génération, en a transmis la connaissance a
hommes qui cultivent les sciences en Europe, cette con!
sion serait plus grande encore; sans la conservation ¢
beaucoup de collections originales, elle serait inextricab
Dans les pays, comme l’Amérique, qui ne jouissent p
de semblables avantages, il est souvent tout à fait inut
de tenter l’examen critique des cas douteux de cette natur
Un observateur des plus capables et hautement doués
sens critique, le regrettable docteur Harris, a très-ju
cieusement fait ressortir les difficultés contre lesquelles
naturalistes américains ont à lutter à cet égard, dans.
Préface de son Rapport sur les Insectes nuisibles à la vég
tation.
GROUPES INTERMÉDIAIRES, 273
Vil
Autres divisions naturelles du Régne animal.
‘ve ne me suis occupé jusqu’ ici que des divisions tata
mites dans les systèmes modernes par presque tous les
aturalistes. Jai essayé de faire voir que ces groupes sont
ondés dans la nature et ne doivent pas étre considérés
pmme des procédés artificiels, inventés pour faciliter l'étude.
près un examen consciencieux et approfondi de la question,
> trouve que ces divisions comprennent toutes les catégories
Gliance qui existent entre les animaux, au point de vue de
Structure.
| Les embranchements sont caractérisés par le prio de la
iructure.
Les classes, par le mode d’exécution du plan, en ce qui
oncerne les voies et moyens.
4 Les ordres, par le degré de complication de la structure.
4 Les familles, par la forme telle qu’elle est déterminée par
Ja structure.
_ Les genres, par les détails de l'exécution des parties.
_ Les espèces, par les rapports des individus soit entre eux,
pit avec le monde ambiant, aussi bien que par les propor-
ons des parties, Yornementation, etc.
’ Cependant il y a lieu, dans le système naturel de la Zoo-
logie, de reconnaître d’autres divisions. Seulement ces
xnières ne se retrouvent pas toujours aussi uniformément
eles autres dans toutes les classes. Elles ne font, en réalité,
ie limiter les divers autres groupes.
“Une classe dans laquelle un système d’organes présente
in développement particulier chez un certain nombre d’êtres,
andis que tous les autres systèmes organiques sont identi-
jues, peut être divisée en sous-classes. C’est le cas des Mar-
Upiaux quand on les compare aux Mammiféres placentaires.
és caractères sur lesquels cette subdivision est basée sont
le même nature que ceux sur lesquels est fondée la classe
AGASSIZ. 48
27h DE LA CLASSIFICATION.
elle-même, mais ils ne s'étendent pas à son ensemble toi
entier. Un ordre peut embrasser des groupes naturels de vi
leur plus haute que les familles, fondés sur des caractères qi
sont bien ceux de l’ordre, mais qui ne déterminent ni une su
périorité ni une infériorité absolues. Partant ces groupes
peuvent pas, par éux-mêmes, constituer des ordres distine
Leurs caractères sont bien de nature ordinale, mais i
sont, pour ainsi dire, mélangés et indiquent la supériori
à certain égard et Pinfériorité par rapport à quelques aut
traits. Ce sont des sous-ordres. L’ordre des Testudinés €
fournit un exemple et contient deux sous-ordres naturels ( 7
Une famille naturelle peut présenter dans sa forme cara
ristique des modifications telles qu’ on puisse établir Wap
elles des subdivisions tranchées ; c’est ce que certains auteu
appelleront sous-familles, et d’autres, tribus où Le à
Dans un genre naturel, un certain nombre d’espècés aurc
entre elles, sous le rapport des particularités qui constitue
le genre, une conformité plus grande que d’autres espé
et l'on distinguera un sous-genre. Les individus d’uné e ne
qui occupent un champ spécial sur Vaire propre a ee
espéce, pourront différer quelque peu les uns des autres
constituer des variétés, etc. 4
Ces distinctions ont depuis longtemps été introduites da
les systèmes ; tout naturaliste praticien ayant fait l'étude ¢
ciale d’une classe queleonque du Règne animal, a nécessañ
ment été frappé de leur convenance. Ce grand nombre
subdivisions sert à bien exprimer tous les degrés .
d’affinité existant entre les différents membres d'un £
naturel supérieur. Mais je puis bien maintenir que es ¢
branchements, les classes, les ordres, les familles, les g
les espèces sont des groupes établis dans la nature, chat
d’après des catégories différentes; je puis bien me ‘abe cla
prêt à tracer les limites naturelles de ces groupes d'à
les traits caractéristiques sur lesquels ils sont rons: 1
m’en faut pas moins avouer que jé n’ai pas été capable
(1) Voy. Contributions, etc., vol. 1, p. 308.
GROUPES INTERMEDIAIRES. 275
écouvrir un principe de délimitation pour les groupes mi-
urs (1). Tout ce que je puis dire, c est que les catégories
récédemment envisagées et qui servent de base aux em-
ranchements, dances ordres, familles, genres, espéces,
it leurs degrés; de ces degrés résultent les sous-classes,
$ sous-orûres, les sous-familles et les sous-genres. Pour le
, il faut abandonner à l'arbitraire la fixation de ces
paivisions, et il faut s’en arranger aussi bien que possible
al que leur principe régulateur n’aura pas été déterminé.
sspére néanmoins que ces estimations arbitraires disparai-
mt à tout jamais de là science, pour ce qui concerne les
égories elles-mêmes.
Fusqw’ ici, l'inégalité dans la valeur intrinsèque de chaque
à de groupe semble la règle ; et cette inégalité s’étend à
is les groupes, car, même dans les embranchements, il y a
classes entre lesquelles le rapprochement est plus étroit
mire certaines autres. Les Polypes et les Acaléphes, par
2 sont bien plus voisins les uns des autres qu'ils ne le
it des Echinodermes; il y a moins de distance entre les
| ie et les Insectes qu'entre eux et les Vers, etc. Sur ce
ré d'alliance entre des classes, dans leur embranche-
nt respectif, on a fondé des sous-embranchements et
fois on a exagéré ces différences au point de créer des em-
chements distincts. Des rapprochements de même sorte
re les embranchements ont fait distinguer encore des
S-régiies. Je ne puis croire que des combinaisons aussi
tiles puissent être considérées comme naturelles. Elles
ppatssssene exprimer un rapport da à l'importance de
yanisation dans son ensemble, comparée dans des groupes
rents, plutôt qu’une affinité définie.
Le professeur J. D. Dana a émis à cet égard quelques idées utiles
son examen de mes Contributions, etc. Voy, Amer. Journ, sc. and arts,
ï vol. XXV, p. 333. — Voy. aussi D. Veinland, On Series in the Animal
m (Proc. Brit. Nat. Hist. Soc., t. VI, p. 119).
276 DE LA CLASSIFICATION,
Vill
Développement successif des caractères.
On a maintes fois répété que les caractères qui distingue
les différents tÿpes du règne animal se développent succe
sivement, chez l'embryon, dans l’ordre de leur importance
d’abord les grands traits de la structure de l’embranchemen
puis les caractères de la classe, puis ceux de l’ordre, ensui
ceux de la famille, ceux du genre, et finalement ceux de le
pèce. Cette assertion n’a point soulevé d’opposition direct
Au contraire, il semble qu’on l’ait approuvée presque sai
discussion et qu’elle soit généralement tenue pour inconte
table. L'importance du sujet exige cependant qu’on y rege
de plus près. Si, en effet, l'Embryologie est pour la Zoolog
la source de grands perfectionnements, il est, d’un aul
côté, nécessaire de bien déterminer de quelle nature so
les éclaircissements que celle-ci doit en attendre. Je dema
derai donc si les Zoologistes modernes savent, avec wi
précision suffisante, quels sont positivement les caractél
de l'embranchement, de la classe, de l’ordre, etc., et $i
sont autorisés à soutenir que, dans les progrès du dé
loppement de l'embryon, les traits qui s’accusent peu
peu correspondent 4 ces caractéres et se prononcent dai
l'ordre de leur subordination? J’en doute. Je dirai pl
Je suis certain que cette notion précise leur manque; 54
s'ils la possédaient, ils se seraient aperçus déjà que ce
prétendue coïncidence, entre la subordination des grou
zoologiques naturels et la succession des phases de lé
lution embryonnaire, n’existe pas dans la nature. Il y a,@
est vrai, dans le développement de l’embryon, certain
qui peuvent faire naître l’idée d’un progrès marcha
l’organisation typique la plus générale à la spécialisation .
plus extrême ; mais il ne procède pas suivant cet ordre ¢
succession stéréotypé, ni même, en général, de la.
qu’on suppose.
ORDRE D’APPARITION DES CARACTERES. 277
Voyons s’il ne serait pas possible d’introduire un peu
lus de précision dans le probléme. Si ce que j’ai dit des
xractères propres aux groupes naturels du Règne animal
st exact, on a: 1° quatre grands embranchements ou
pes, caractérisés par autant de plans différents de struc-
re; — 2° des classes, caractérisées par les voies suivies
‘les moyens employés pour l’exécution du plan; —
* des ordres, caractérisés par la simplicité ou la com-
ication de la structure ; — 4° des familles, caractérisées
r la différence des formes ou des particularités de la
ructure qui déterminent la forme; — 5° des genres,
caractérisés par les détails particuliers de la structure des
Parties; — 6° des espèces, caractérisées par les rapports
| les proportions des parties, les rapports des individus
it entre eux, soit avec le monde ambiant; — on trouve
fin les individus qui, pour le moment, représentent non-
julement l’espèce avec toutes ses variétés et toutes les va-
Hations d'âge, de sexe, de taille, etc., mais encore tous les
traits caractéristiques des groupes supérieurs. Voilà donc,
4 un bout de la série, les catégories de la structure animale
les plus compréhensives et, à l’autre bout, des individus.
Bindividualité d’un côté; de l’autre, le groupe du règne
animal qui embrasse davantage, Or, pour commencer par
extrêmes notre examen critique de la marche de la vie
ans ses manifestations successives, n’est-il pas évident,
griice à tout ce que l’Embryologie nous apprend, que l’in-
lividualisation est le vœu de toute multiplication ou repro-
I tion ? Un germe (ou un certain nombre de Nerden ceuf
rmé et rendu distinct, en tant qu’individu, du corps de
Son parent, avant d’avoir assumé soit le caractère de son
branchement, soit ceux de sa classe, etc. C’est là un fait
Dune grande signification et qui montre bien l'importance
ja l’individualité dans la nature. Après cela, il est vrai,
10us apercevons généralement les linéaments du plan struc-
Ural avant que la manière dont ce plan sera exécuté ne
levienne apparente. Le caractère de lembranchement est
|
278 DE LA CLASSIFICATION.
indiqué par les traits les plus généraux avant que ceux ¢
la classe puissent être reconnus avec quelqué précision
et l’on peut baser là-dessus une des généralisations tom a
importantes de l’Embryologie.
On a soutenu, dans les termes les plus généraux, que à
animaux supérieurs passent, durant leur développement,
travers toutes les phases qui caractérisent les classes inf
rieures, Ainsi formulée, cette proposition est tout à fait co
traire à la vérité; et cependant il y a, dans de certe
limites, une correspondance positive entre les phases em
bryonnaires du développement des animaux supérieurs
les caractères permanents d’autres animaux d’un degré in!
rieur. Eh bien! le fait signalé plus haut permet de marq
avec précision les limites dans lesquelles celte corres:
dance peut être circonscrite. En tant qu’ceufs, dans lei
condition primitive, tous les animaux se ressemblent. Mai
aussitôt que l'embryon commence à montrer quelques trai
caractéristiques, ceux-ci présentent des particularités tel
que le type peut se distinguer. On ne peut done pas di
qu'il y ait chez l’animal certaines phases de développeme
qui ne rentrent pas dans les limites de son propre
branchement. A aucun moment, un Vertébré n’est un Art
culé ou ne lui ressemble; jamais un Articulé n’est un Mo
lusque ; ni un Mollusque, un Rayonné ; et vice versé. Quelq
correspondance qu’on puisse noter entre le jeune d’un an
mal supérieur et l’état parfait d’un animal inférieur, @
est toujours contenue dans le cercle des représentants €
même embranchement. Par exemple, les Mammifères e
Oiseaux, aux premiers degrés de leur développement, pr
sentent certains traits propres aux classes inférieures 4
Vertébrés : Reptiles et Poissons ; les Insectes rappellent
Vers par quelques-unes de leurs phases primitive
Mais cela demande quelques explications, sur lesquell
nous aurons occasion de revenir un peu pilus loin. ju
qu ’il en soit, il est déjà bien évident qu’aucun animal su
rieur ne traverse une suite de phases rappelant tous |
types inférieurs du règne animal, mais qu’il subit sim
ORDRE D’APPARITION DES CARACTÈRES: 279
las une série de modifications, spéciales aux animaux de
fembranchement auquel il appartient, Ce qu'on a dit du
javactare infusorial des jeunes embryons de Vers, de Mol-
ques et de Rayonnés ne peut plus soutenir la critique;
car d'une part, il est impossible de considérer comme une
asse naturelle les animaux qu’on appelle Infusoires et,
utre part, les prétendus Infusoires qu’on citait sous ce
apport ne sont eux-mêmes que des embryons ayant la
aculté de se mouvoir (4).
| gs les progrès du développement et à mesure que le
général (embranchement) devient plus distinct chez
embryon, le plan de la structure est de plus en plus
etiement révélé par les particularités de la structure elle-
néme. En d’autres termes, les voies et les moyens d’exécu-
PA rendent bien saillant le plan d’abord esquissé à peine.
ar suite, les caractères de la classe deviennent visibles.
st ainsi qu'une larve d’Insecte, vermiforme, montre déja,
ses trachées, qu'elle sera un jour un Insecte et non pas
ia Ver comme elle en a, pour le moment, l'apparence. Mais
| lig de cette structure spéciale, qui sont le
ndement des ordres de la classe des Insectes, n’appa-
aissent point encore. Cela ne s’achèvera qu ’à une dernière
ériode de la vie embryonnaire. Au point où nous en sommes,
1 observe fréquemment une avance remarquable des ca-
actéres de la famille sur ceux de l’ordre. Par exemple, un
eune Hémiptère ou un jeune Orthoptére peuvent être
wement rapportés à leur famille respective d’après les
racléres quils présentent, bien avant de manifester les
articularités qui les caractériseront comme Hémiptère ou
[hope De même on peut reconnaitre que de jeunes
sons font partie d’une certaine famille, avant que les
ix de leur ordre soient apparents, etc.
raison de ce fait saute aux yeux. Au fur et à mesure
progrès de la structure, la forme générale s ébauche
U ua peu et elle a déja acquis quelques-uns des traits qui la
A) vor chap. I, sect, xix, p. 120,
280 DE LA CLASSIFICATION. :
distinguent, bien avant que toutes les complications de la
structure qui caractérisent l’ordre soient devenues visibles:
Et, comme la forme caractérise essentiellement les familles
on voit de suite pourquoi le type de la famille est nettement
marqué chez un animal avant que les caractères de l’ordre
soient développés. Les caractères spécifiques eux-même
— au moins ceux qui, dépendant de la proportion des
parties, ont pour cela une influence modificatrice sur ke
forme, — peuvent être reconnus bien longtemps avant qué
Jes caractères de l'ordre aient acquis leur pleine expres:
sion. La Tortue qui happe, par exemple, montre son petil
sternum en forme de croix, sa longue queue, ses habitudes
féroces, même avant de sortir de l’œuf, avant de respi el
par des poumons, avant que son derme se soit dur@
en une carapace osseuse, etc.; bien plus, elle happe, la
bouche béante, dès qu'on en approche quelque chose,
même alors qu’elle est encore entourée de son amnios &
de son allantoïde et que la masse du jaune est plus gross
que celle de son corps (1). Le Veau prend la forme bovin
bien avant d’avoir acquis les caractères d’un Ruminant,
_ cornes creuses ; le Faon présente toutes les particularités
de son espèce avant que celles de sa famille soient déw
loppées. 3
Quant ‘aux caractères du genre, on peut dire qu'il €
trés-rare qu’ils s’accentuent dans un type quelconque d
régne animal, avant que les traits spécifiques soient pout
la plupart entiérement dessinés, sinon complétement for-
més. Peut-il y avoir le moindre doute qu’un embryor
_ humain appartient au genre Homme, même avant qu’un
seule dent ait percé? Est-ce qu’un petit Chat, un petit Chie
ne sont pas reconnaissables comme Chat et comme Chie
avant que les griffes et les dents indiquent leur genre ? Cel
(1) Le prince Max von Neuwied cite comme un fait remarquable que!
Chelonura serpentina mord aussitôt qu’elle’sort de l’œuf. Je l’ai vue mord
avec autant de férocité que le fait l’adulte, alors qu’elle n’était encore qu
embryon pâle et presque incolore, enroulé dans ses enveloppes feetales, |
jaune, plus volumineux que le corps, pendant sous le sternum ; trois mois aval
l’éclosion. Le.
ORDRE D’ APPARITION DES CARACTÈRES. 281
est-il pas vrai encore de l’Agneau, du Chevreau, du Pou-
in, du Lapereau, du Souriceau, de beaucoup d’Oiseaux,
e Reptiles, de Poissons, d’Insectes, de Mollusques, de
ayonnés? Et pourquoi? Simplement parce que les propor-
ns des parties, qui constituent les caractères spécifiques,
ont reconnaissables avant l'achèvement des détails de la
tructure, qui caractérisent le genre.
Ces faits me paraissent de nature à avoir quelque influence
les progrès à venir de la Zoologie. Ils nous permettront
lésormais de déméler, de plus en plus nettement, les traits
sur lesquels se fondent les différences et la subordination
les groupes du Règne animal. Cette analyse de leur ordre
apparition contrôle, pour ainsi dire, mes précédentes
assertions sur la valeur respective et les caractères saillants
le ces divisions. L'épreuve est favorable et cette circonstance
“joutera, je pense, à la probabilité de leur exactitude.
= Mais cela a une autre portée trés-considérable et que j'ai
éja signalée en commençant ces remarques. Pour que
mbryologie puisse fournir les moyens de résoudre quel-
es-uns des difficiles problèmes de la Zoologie, il est indis-
nsable de bien déterminer d’abord ce que sont les carac-
éres de l’embranchement, de la classe, de l’ordre, de la
amille, du genre et de l’espéce. Or, si l’on suppose que ces
faractéres apparaissent nécessairement dans l’ordre de leur
Subordination, pendant le développement embryonnaire,
il n’y a rien à apprendre à cet égard dans les monographies
‘ernbryologiques. Il est bien rare que les embryologistes se
préoccupent d’un point si utile à connaître pour le zoologiste.
D'autre part, tant qu’on ignore qu’est-ce qui constitue posi-
ement les caractéres des groupes qui viennent d’étre
ommeés, il est impossible de découvrir les caractères d’un
lé possédant qu’un genre, etc. Par la même raison, on
prétendrait vainement arriver à un résultat légitime, en
ce qui concerne la limitation naturelle des genres, des
familles, des ordres, etc.; et, sans cela, pourtant, on ne
bit pas même songer à entreprendre une classification
282 DE LA CLASSIFICATION.
permanente du Régne animal. Encore moins pourealleg
espérer d’établir une base solide pour la comparaison ge
rale des animaux actuellement vivants avee ceux qui 0 of
peuplé la surface du globe, aux anciens âges géologiques.
Ce n’est pas le hasard qui m’a engagé dans cette étud
mais bien la nécessité. Chaque fois que j’ai voulu compar
par groupes plus ou moins compréhensifs, les anima
de la présente période avec ceux des âges sarin
les premiéres phases du développement d'animaux s
rieurs avec l’état adulte d'animaux inférieurs, j'ai constar
ment été arrêté dans ma marche par des doutes sur l’éga
valeur des mesures que j’em ployais. A la fin, j'ai fait de ¢
mesures elles-mêmes l'objet d’investigations nn
trés-étendues, qui ont embrassé un champ beaucoup
vaste qu’on ne le croirait en lisant ces observations. En ef
j'ai, pour la commodité de mes études, revu, à
principes, presque tout le Règne animal; et j'ai introdu
presque pour chaque classe des changements tout à fe
inattendus dans la classification. 4
J’ai déjà exprimé (4) la conviction où je suis qu’il w
qu'un système vrai: celui de la nature; et que, par à
séquent, personne ne doit avoir l'ambition d'élever
système à soi, Je n’essayerai pas même de présenter ici €
résultats sous la forme d’un diagramme. Je me borne“
exprimer la conviction que tout ce que nous pouvons véf
tablement faire de mieux, c’est de traduire, avec l'imper!
tion du langage humain, les pensées profondes, les relatio
sans nombre, la signification insondable, du plan que mai
festent et réalisent les objets naturels eux-mémes. Bur
plus haute récompense serait de constater, un jour, que j
contribué 4 maintenir les observateurs dans la voie de
vérité,
(4) Voy. chap. I, sect 1, p. 7-9,
ANALOGIES. : 283
IX
Catégories d'analogie.
be pus n'avons considéré jusqu’ici que les rapports ayant
ur fondement des traits de la structure rigoureusement
imologues. Nous allons maintenant procéder à l'examen
relations plus lointaines et moins définies, auxquelles on
> le nom d’Analogies.
7 ai déja expliqué en quoi les homologies différent des
Nh alogies (1). L’homologie est cette sorte de rapports qui
tissent de l'identité de la structure, entre animaux diffé-
mts appartenant à des divisions naturelles de même caté-
ie. L’analogie est la ressemblance produite par la combi-
1 iison des traits qui caractérisent un groupe naturel avec
x qui en caractérisent un autre (2).
Ainsi, nous avons vu qu'il y a homologie : entre tous les
aaux faisant partie d'un même embranchement, en tant
ie l’on considère le plan de leur structure ; entre tous les
»mbres d’une classe, pour ce qui est du mode d’exécution
(à ce plan; entre tous ceux d’un ordre, eu égard à la com-
cation de leur structure; entre tous les représentants de
da même famille, de par la forme ; entre les genres d’une
F amille unique, si l’on s’en tient aux particularités de détail
é leur structure. Méme dans les limites étroites de l'espèce,
peut encore trouver des homologies chez les genres qui
comptent de nombreux représentants; mais cela ne s’étend
pis aux espèces de deux genres voisins. Il est done évident
he catégories d’homologie sont aussi nombreuses et
aussi diverses que les catégories de différences dont la dis-
j notion est possible dans la structure des animaux; en
| (A) Voy. p. 26, sect. v.
(2) On a encore dit que Fhomologie résultait de l'identité de la structure
Bias saci de la fonction, et l’analogie, inversement, de la parité des
pictions quelle que fût la structure. La définition ci-dessus donnée est plus
‘ise, parce qu’elle embrasse toutes les catégories d'analogie et d’homologie,
284 DE LA GLASSIFICATION.
d’autres termes, il y a des homologies d’embranchement, de
homologies de classe, des homologies d’ordre, de famille,
de genre,-d’espéce. Il n’est pas un zoologiste pratique à les:
prit duquel ne se présentent de suite les exemples de ce
homologies des catégories les plus générales. Les homolo
gies spécifiques se découvrent plus particulièremement dan:
ces traits de la structure qui déterminent les proportions des
parties ; c’est le cas, par exemple, lorsque toutes les espèce
d’un même genre ont le cou long, la queue courte, les
jambes hautes, etc., tandis que celles d’un genre fort voisit
peuvent présenter des proportions inverses, etc. 4
Voyons maintenant quelles sont les catégories d’analogiee
jusqu’à quel point il est possible, dans n’importe quelle cir.
constance, de distinguer ce qui est homologie d’avec ce qui es
analogie. Si l’Analogie est la ressemblance produite park
combinaison des caractères d’un groupe avec ceux d'un autre
groupe (comme les caractères de classe d’une certain
classe avec les caractères équivalents d’un autre groupe dell
même sorte, ou avec ceux des familles d’une autre classe).
la recherche de ce genre de rapport se borne à ME
les différentes catégories de la structure qui ont fait précé
demment l’objet de notre considération embranch tel
classes, ordres, etc.), el à apprécier correctement la manière
dont elles sont combinées l’une avec l’autre. Il suffira, p al
exemple, de voir comment les traits qui résultent d’un
tain mode d’exécution des homologies d’un type sont com
binés avec la structure d’un autre type; en d’autres termes,
on tiendra compte de tous les traits qui se montreront, sans
se maintenir dans les limites où les structures sont rigou
reusement homologues. Etudier les analogies, c’est dom
rechercher les traits, d’ailleurs plus ou moins distincts, qui
sont le caractère naturel d’une sorte de groupe, au sein dt
leur combinaison avec ceux qui en caractérisent une autre
C’est ainsi que la parité établie entre l'aile d’un Insecte@
l'aile d’un oiseau a pour base l'analogie. L’entiére différence
qu'il y a dans la structure des organes du vol, chez les é6tr
de ces deux classes, ne nous permet pas de considérer |
ANALOGIES. 285
‘similitude entre ces organes comme une homologie; en
| ffet, ils ne sont pas de construction homologue. Mais il y a
-analogie entre eux ; car, malgré que la structure particuliére
caractéristique de l’un et de l’autre type ait été mise en
uvre pour l’exécution de ces organes, comme ils accom-
ssent la même fonction, ils semblent être de même nature.
Si l’on admet que ces distinctions soient fondées, les ca-
égories d’analogie seront. les mêmes que les catégories
lhomologie. Il y aura des analogies d’embranchement, de
lasse, d'ordre, de famille, de genre, d'espèce. Parfois cette
sorte de corrélation s’observera d’embranchement à embran-
shement, de classe à classe, d’ordre à ordre, etc., parfois aussi
ès traits caractéristiques d’un embranchement ou d’une
classe ne se retrouveront que dans certaines families ou
à méme dans quelques genres d’un autre embranchement ou
‘dune autre classe. L’étude des analogies devient ainsi fort
“difficile et extrêmement compliquée; de là, sans doute, les
erreurs et les inexactitudes qu'ont eues trop souvent pour
résultat les tentatives de classification du règne animal.
_ Analogies @embranchement. — ll ya “dans le plan de
‘slructure caractéristique de chaque embranchement quel-
que chose de si spécial, que les analogies de la catégorie
‘qui nous occupe ne s'étendent pas d'un embranchement à
tout un autre embranchement. Au contraire, elles n’attei-
gnent en général que les groupes mineurs d’une ou de plu-
Sieurs classes et embrassent rarement une classe entière.
Cependant parmi les Mollusques, il y a, pour tous les Cé-
phalopodes, analogie d’embranchement avec les Rayonnés,
‘dans la disposition des bras autour de la bouche. Tous
les Bryozoaires présentent. avec les Polypes une analo-
“aie frappante, par la couronne qui s’épanouit à leur partie
4 upérieure; il en est de même des tentacules d’un grand
nombre d’Annélides Dorsibranches. Il y a une analogie im-
possible à méconnaitre entre la structure de la charpente
solide des Echinodermes (spécialement chez les Étoiles de
mer) et le plan de structure des Articulés. C’est à ce point
e Oken n’hésite pas à rapporter les Echinodermes à l’em-
TO DÉS ETES BE
Es
286 DE LA CLASSIFICATION.
branchement des Articulés, et confond cette analogie «
une homologie véritable. — 4
Analogies de classe. = Les voies et moyens de réali
sation du plan structural, dans une classe, ont sou
des analogies frappantes avec ceux d’une autre cla
Ainsi, parmi les Vertébrés, une classe tout entière a de
ailes, celle des Oiseaux ; et dans aucune autre classe les aile
ne sont construites cothme dans celle-là. Toutefois, k
Chauves-Souris, aussi, sont ailées; et quelques poisson: Ê
capables de s'élever au-dessus de l'eau, sont décrits comm
ayant des ailes. Mais l'aile de la Chauve-Souris est homo
logue au membre antérieur d’un autre Mammifére ; elle es
analogue seulement à Vaile des Oiseaux (4). I en est «
même des soi-disant ailes des Poissons volants, véritable ns
geoire, homologue à la nageoire pectorale des autres po
sons osseux, et construite d’une autre manière que l'aile di
la Chauve-Souris ou de l'Oiseau. Les ailes des Insectes sont en
tiérement différentes et leur analogie avec celles des Oiseat
est encore plus lointaine que chez la Chauve-Souris ou |
Poisson volant, d'autant que ce n’est plus là une anal
entre animaux de deux classes du même embranchemen
mais entre les représentants de deux classes appartenaï
chacune à un embranchement divers. La différence p ort
done non pas seulement sur le mode d'exécution d’un p
commun, mais bien sur le plan lui-méme. 4
Analogies d'ordré. — Les ordres sont fondés car's
complications de la structure qui caractérise la classe; dt
lors, il n’est pas vraisemblable que les analogies de cett
catégorie puissent se présenter entre les ordres d’une mén
classe. Il faut plutôt s'attendre à les rencontrer entre le
ordres de deux classes voisines où entre les ordres d'a n
classe supérieure et les classes inférieures du méme emb
chement. Ainsi, il y a une corrélation remarquable ¢
les ordres de la classe des Batraciens et ceux de la classe 4
4
(1) En tant que membres de le Vertébés, ces deux sortes d'ailes sont À
Jogues ; en tant qu’ailes, elles ne sont qu’analogues, =
ANALOGIES. 987
sptiles vrais (1). On en peut dire autant, dans la classe des
Mammifères, de l’ordre des Cétacés comparé avec la classe
itiére des Poissons, ou de l’ordre inférieur des Insectes
os Myriapodes) comparé à la classe des Vers, et de l’ordre
férieur des Acaléphes (les Hydroïdes) comparé à la classe
es Polypes (2). Une connaissance bien nette de cette sorte
‘analogies est de la plus haute importance, pour l’étude des
finités véritables. Mainte et mainte fois, en se méprenant
iv la valeur réelle de ces traits de la structure, les zoolo-
stés ont fait fausse route et établi des groupes d’après une
lerprétation erronée de ces ressemblances. C’est ainsi que,
commencement du siécle dernier, on réunissait les Gé-
céS aux Poissons; et, de nos jours encore, nous voyons les
vdroïdes, qui sont de vrais Acaléphes d’un ordre inférieur,
onfondus en une seule classe avec les Polypes.
Analogies de famille. — n’est pas besoin d’une con-
issance trés-familiére du Règne animal pour savoir quelle
le ressemblance il existe parfois, quant à la forme, entre
i animaux qui appartiennent à des types absolument diffé-
sats. Mais, comme leur physionomie n’est pas déterminée
at des traits identiques de la structure, ces animaux ne
euvent cerlainement pas être considérés comme de formes
omologues. Quelque étroite que puisse être la ressemblance
exiéricure, il suffit d’un effort pour distinguer entre les
formes analogues et les formes homologues. Cela ne peut
Miunquer d’ajouter à la précision des recherches zoologiques.
Quand, par exemple, on compare la forme des Vers à celle
dés Holothuries, il faudrait avoir présent à l'esprit que, en
raison du plan de leur structure et de leur homologie avec
% autres Articulés, les Vers ont, pour plus long diamètre, _
> diamètre longitudinal. Au contraire, sur les Holothuries,
e les homologies identifient aux Rayonnés, le grand dia-
Mitre est le vertical. {1 n’en faut pas davantage pour prouver
Que, malgré la très-grande ressemblance des deux formes,
4 1) Voy. Contributions, elc., vol. 1, sect, M, p, 252.
2) Voy. Contributions, elc., t. HAL.
288 DE LA CLASSIFIGATION.
celle des Holothuries est seulement analogue à celle
Vers.
Les limites de l’homologie entre formes semblables s
largissent beaucoup et s’étendent au dela du cercle de
classe. Il y a certainement homologie de formes entre
Lézards et les Salamandres, qui appartiennent à deux clas
différentes. D’un autre côté des formes semblables, dans
même classe, ne sont pas nécessairement homologues : |
exemple, le long museau du Syngnathe et celui de la Fis
laire, la tête plate du Lophius et celle du Scaphirhyncus
présentent qu’une analogie lointaine ; il y a en effet une
férence complète dans la structure de ces organes. On
imparfaitement étudié les formes des animaux, on a tenu
peu compte des éléments de la structure qui les déter
nent, qu’essayer de préciser quelles sont les analogies
les homologies de forme, serait peut-être prématuré. Si 1
a égard à leur position, les six paires d’appendices arti
qui sont placés sur les côtés de la bouche du crabe pie
de-cheval (Limule) sont positivement homologues aux n
choires des Crustacés supérieurs ; mais si l’on considère
forme, c’est aux pattes thoraciques de ces animaux qu’el
ressemblent; d’un autre côté, en tant qu’appendices des &
neaux typiques d’un Articulé, toutes ces parties sont hom
logues. Ici, par conséquent, il faut se représenter que, en
qui concerne la forme, les appendices buccaux du Limu
sont simplement analogues aux pattes des Décapodes, tam
que les unes et les autres sont cependant homologues.
tant que parties du corps d’un Articulé. Ce cas et d’autre
semblables peuvent montrer quel large champ de recherche
offrent encore l’étude et la distinction des analogies et des
homologies de forme. é
Analogies de genre. — Ce qui caractérise les genres
sont certaines particularités de la structure, limitées à
ou telle partie de l'animal; les analogies de genre doi
donc se réduire à la ressemblance de certaines parties ¢
corps et ne pas s'étendre à l'aspect général. Les gent
doivent, sans doute, comme parties de la famille, présent
ANALOGIES D’ESPECE. 289
même forme, combinée à la complication de structure
ropre à leur ordre; mais lorsque des analogies de genre
7 produisent entre animaux de familles différentes, la forme
énérale de ces genres analogues peut se trouver fort dis-
mblable. De même, leur structure peut offrir, quant à
| complication, des combinaisons entièrement diverses,
es même sur un mode d’exécution tout à fait différent,
ces genres sont de classes ou d'ordres différents. Elle peut,
2 outre, être édifiée sur des plans absolument distincts,
i le cas où ils n’appartiennent pas au même embranche-
nt. Rien de tout cela n’empéche que des animaux aient
l PR ressemblance dans quelques-unes de leurs
rties, et ce sont là précisément les analogies de genre.
Donc, c’est entre animaux de familles trés-diverses, ap -
irtenant à des ordres, même à des classes et à des embran-
lements distincts, que les analogies de genre se manifes-
nt le plus souvent. C’est ainsi qu’il y a une analogie de
ore bien marquée entre la denture des Insectivores, qui
partiennent à la classe des Mammifères, et celle des Chara-
s qui font partie de la classe des Poissons. Même analogie
observe entre quelques genres de la famille des Sparoides,
de celle des Chromides; entre certains genres de la famille
Insectivores et d'autres de celle des Rongeurs; entre
ielques-uns de la famille des Bombyx et quelques-uns de
belle des Papillons, etc.
"Analogies d'espèce. — Si les caractères de l'espèce ont
hr réel fondement les rapports des individus, entre eux
avec le monde ambiant, et les proportions ou lornemen-
flion des parties, on ne peut manquer de découvrir des
ailogies spécifiques, résultat de ces relations diverses, chez
lés animaux de genres, de familles, d’ordres, de classes, ou
imbranchements différents. Par cela seul qu’ils sont aqua-
ies, des animaux qui appartiennent à des genres dans
@s(jucls on compte aussi des espèces terrestres ont les uns
Vee les autres une certaine analogie. Tous les animaux qui
Mont par couple, ou en troupe, ou isolément, peuvent être
| a comme ayant, de ce chef, de l’analogie; surtout
GASSIZ. 19
290 DE LA CLASSIFICATION.
s'ils appartiennent à des genres dont plusieurs espèces ot
entre elles ces divers rapports. Mais c’est dans les proportion
relatives des parties chez des espéces de genres différents
soit d’une même famille, soit de familles distinctes mais d’ in
seule classe, et dans l’ornementation extérieure, qu'on ob
serve les plus nombreuses analogies spécifiques. J'ai déja ¢
que des homologies d’espéce peuvent résulter de la longue
relative de la tête, du cou, de la queue, ete. Mais il ya seul
ment analogie spécifique entre le Zerda, espèce de Chie
qu’on rencontre dans l’intérieur de l'Afrique et que eara
térise la longueur extraordinaire des oreilles, et ces espéct
de lièvre, vivant aussi dans le désert, qui ont les oreill
plus longues et plus grosses que les lièvres de bois et «
marais. Cette analogie provient sans doute de ce que, dai
les circonstances ou sont placés ces animaux, une pli
grande acuité de l’ouie leur est nécessaire ; quoi qu'il
soit, ils appartiennent à des ordres différents de la mén
classe; voilà donc une analogie d’espèce. Le type du dess
et de la couleur peut aussi donner lieu à une analogie
même nature; c’est ce qui est produit par les bandes de.
dernier cas qu’elle a suggéré le nom de l'animal : — Can
lopard. 4
Il est inutile d'indiquer ces analogies d’un bout à Pau
du Règne animal. Les quelques exemples donnés suffise
pour appeler l'attention sur ce sujet et montrer linté
d’une recherche soigneuse de toutes les catégories d’ana
gie. Mais il y a peut-être utilité à placer ici quelques rem
ques encore pour bien établir la distinction entre les tr
homologues et les traits analogues. Etendues ou restreinl
Jes homologies sont rigoureusement circonscrites dans“
groupes de même sorte. Conséquemment, lorsqu'un | t
quelconque, observé sur un animal, n’est pas commun at
les représentants du groupe dans lequel on l’observe, 1
de bonnes raisons pour soupgonner que ce n’est point!
homologie véritable, mais plutôt une analogie quelconque
ANALOGIE ET HOMOLOGIE. 294
ar exemple, la corde dorsale étant un trait fondamental de
i corde dorsale, ne peut pas être l’homologue de cette
orde. Elle peut tout au plus en être l’analogue. C’est, par
xemple, le cas de la bande médiane qui apparaît lors du
éveloppement initial de l'embryon des Crustacés. Chez les
ertébrés, les progrés ultérieurs de la formation de l’épine
ont apparaître des arcs au-dessous et au-dessus de la corde
orsale ; tandis que, chez les Crustacés, il ne s’en développe
ue dans un sens. Nous devons donc considérer les arcs
olides des Crustacés comme une structure analogue seule-
nent et non pas homologue à celle des Vertébrés ; et encore
ut au plus, car ces arcs renferment non-seulement le sys-
sme nerveux comme chez les Vertébrés, mais aussi tous
as viscéres. Le système d’articulation chez les Articulés
mésente, par conséquent, une analogie d’embranchement
ec le système vertébral des Vertébrés, mais nulle homo-
jgie vraie. La classe des Poissons est éminemment carac-
srisée par Ja présence de branchies ; or, les Crustacés ont
àssi des branchies et de même les Céphalopodes, beau-
jup de Gastéropodes, la plupart des Acéphales. Mais la
ructure de ces branchies est extrêmement différente dans
ces différentes classes, La présence de ces organes ne con-
Shtue donc qu'une analogie et ne révèle aucune affinité réelle.
Au contraire, les soi-disant poumons des Gastéropodes ter-
restres ont, quant à la structure, la plus étroite ressemblance
avec les branchies des autres Mollusques et dénotent ainsi
ie affinité réelle entre les uns et les autres; mais la struc-
ire de ces poches à air, rappelant celle des branchies, n’éta-
| qu’ une analogie entre eux et les autres animaux à respi-
lion pulmonaire. On pourrait ainsi poursuivre, à tous les
Jegrés, sous toutes les combinaisons, à travers le Règne ani-
ni tout entier, les analogies et les homologies; on serait sûr
arriver à des résultats satisfaisants, pourvu qu’on se sou-
t toujours que les analogies sont les traits d’un groupe
mbinés aux caractères d’un autre groupe, et les homolo-
999 DE LA CLASSIFICATION.
gies des ressemblances circonscrites dans le cercle du mém
groupe. ‘3
X
Conclusions.
ét
L'importance d'une recherche comme celle dont je vie
de présenter les résultats ne peut étre méconnue de 06
sonne. Tous les groupes divers introduits dans le systén
naturel doivent avoir une signification définie; chacun d’eu
exprime, entre les étres vivants, un rapport défini, fon
dans la nature, et aussi peu susceptible d’étre modifié ark
trairement que n’importe quelle autre loi, forinulant Jes ph
nomènes naturels ; enfin les limites naturelles de ces group
peuvent être fixées à l’aide d’une recherche consciencieus
Si j'ai bien fait comprendre ces vérités, si je les ai rendu
évidentes, l'étude de la classification ou de la systématisatic
des affinités existant entre les étres organisés va reprend
un vif et nouvel intérêt, après avoir cessé d’exciter l’att@
tion des observateurs voués aux recherches sérieuses et 0
ginales. Les liens nombreux qui, rattachant en un gral
tout les animaux et les plantes, en font l’expression viva
d’une conception grandiose réalisée dans le cours du tem}
une sorte d’épopée immense qui a l'âme et la vie, ces lié
vont être examinés avec un soin nouveau, déterminés avi
une précision plus grande, exprimés avec une propriété
une clarté croissantes. Les classifications fantaisistes et at
ficielles perdront graduellement leur puissance sur une col
munauté mieux informée, et les travailleurs se garderont
mettre au jour des obser vations précipitées et insuffisantes
Le savant ne prétera aucune attention aux caractères d'u (
nouvelle espéce, si elle n’a pas été étudiée avec soin et co
parée à celles qui lui sont le plus étroitement alliées; aucut
genre ne sera admis que les particularités de sa stroël |
n’aient été clairement et distinctement exposées; nulle
mille ne sera considérée comme bien fondée, sans préser
un système distinct de formes intimement combinées
CONCLUSIONS. 293
Blerminges par | les rapports de la structure; pas un ordre
e sera accepté, s’il ne représente un degré bien marqué de
omplication dans la structure; aucune classe ne sera jugée
ligne de ce nom, à moins d’être l'expression, distincte et
idépendante, d'un certain plan général exécuté d’une façon
articuliére et par des moyens particuliers ; aucun embran-
hement ne prendra place parmi les groupes fondamentaux
u Règne animal, s’il n’est pas la manifestation nette d’un
an tout à fait spécial et non convertible en un autre. Enfin,
> naturaliste ne sera autorisé à introduire un groupe quel-
onque dans les systèmes, qu’aprés avoir prouvé : — 1° que
e groupe est naturel ; — 2° qu’il est de telle ou telle caté-
orie, évitant ainsi d'appeler famille ce qui serait genre ou
rdre, de nommer classe ou embranchement ce qui pourrait
ire ordre ou classe; — 3° que les caractères par lesquels il
yout être reconnu sont bien effectivement ou spécifiques, ou
lénériques, ou de famille, d'ordre, de classe, d’embranche-
nent, Ainsi nos livres cesseront de présenter cette confusion
Incommode et trop générale qui inscrit des caractères géné-
Tiques dans la diagnose des espèces, ceux de l’ordre ou de
Ta famille dans celle des classes ou celle des embranche-
‘ments (1).
On dira peut-être que tout cela ne rendra pas l'étude de
a Zoologie plus facile. Sans doute ; mais si l'examen attentif
le ce qui a été établi dans les pages précédentes, relative-
Ment à la classification, conduit à rechercher avec plus de
Soin tous les rapports divers existant soit entre les animaux,
Ment réussi dans l’objet que je me suis proposé en entre-
p ‘enant cette étude.
D ‘ailleurs, ilest bien temps que cer tains zoologistes quis'’in-
À il lent Wh inidiaats se souviennent que, pour étre compris,
a Ie Je ne veux rien dire de personnel, et, par con:équent, je m’abstiens de
fitations qui justifieraient ce que j’avance. Mais que ceux qui se piquent de soin
t d’exactitude, fassent l’examen critique de toutes les descriptions d'espèces,
toutes les déterminations de genres, de familles, d'ordres, de classes et
mbranchements, et ils se convaincront que des caractères de méme nature
it D npioyés indistinctement pour déterminer lous ces groupes,
29h DE LA CLASSIFICATION.
les objets naturels veulent quelque chose de plus qu’un couf
nomes qui ne se lassent pas d'observer le petit nombr
d’astres faisant partie de notre système solaire, afin d'a
déterminer, avec une précision de plus en plus grande, le
mouvements, la grandeur, la constitution physique; il
devraient ne pas perdre de vue que tout être organisé, s
simple qu’en soit la structure, présente à notre appréciatiol
des phénomènes bien plus compliqués, bien plus inacces
sibles, que tous les corps célestes réunis. Ils devraient songer
que, si les chefs-d’ceuvre littéraires de l'antiquité n’on
point cessé d'attirer l'attention des critiques, si nul
s’imagine avoir encore épuisé l’étude de leur grandeur €
de leur beauté à plus forte raison, les œuvres vivantes dt
Dieu, sphère spéciale de l’étude des zoologistes, ne cesse
ront jamais de leur offrir un intérêt nouveau tant qu’ellé
seront étudiées avec un sens juste. Cette étude, en effet, doi
inspirer à qui s’y livre une admiration et un respect pro
fonds pour ces productions merveilleuses.
En particulier, le sujet de la classification, qui sembl
tout d’abord n’être qu’un champ borné de la science des an
maux, ne peut être bien et pleinement compris qu’à l’aide
connaissances embrassant tous les points que j’ai signalé
dans les pages qui précédent.
(1) La simple indication de l'existence d’une espèce est une pauvre additic
à nos conna:ssances, lorsqu’on la met en parallèle avec les monographies où"
structure, le développement d’un seul animal sont mis en pleine lumièré
(l'anatomie du Cossus, par Lyonnet ; de la Tortue, par Bojanus; du Mélolo nth
par Strauss-Durckheim ; du Nautile, par Owen; les travaux d’embryogénie ¢
Baer, Bischoff, Rathke, Müller, Külliker, Herold et tant d’autres). Et cependa
ces documents précieux ne s’appliquent qu’à un petit nombre d’étres; ¢@
à peine s’il paraît chaque année un ouvrage de ce genre. Combien de millier
d'années faudrait-il, avec les allures actuelles du progrès, pour qu'on cont
convenablement, sous tous les rapports, les milliers d’étres vivants ou étein
dont l'existence est aujourd’hui constatée ! Cela devrait refroidir un peu c
esprits bouillants qui disputent de la découverte d’un brin de laine sur w
toison, Mais soupçonnent-ils seulement quelles riches moissons il y a encore
faire? ’ :
CHAPITRE TROISIÈME
| REMARQUES SUR LES PRINCIPAUX SYSTÈMES ZOOLOGIQUES.
oo
Observations générales sur les systèmes modernes.
Sans prétendre faire ici un exposé historique des traits
rincipaux qui distinguent tous les systèmes zoologiques, je
rois utile d'établir une comparaison critique entre l'œuvre
es naturalistes modernes et les principes que je viens de
iscuter. Pour cela il ne serait pas absolument nécessaire
¢ nous reporter au delà de la publication du Règne Animal,
était que Cuvier lui-même est représenté par quelques
sturalistes, spécialement par Ehrenberg (1) et d’autres
ologistes allemands, comme inclinant à diviser l’ensemble
u Règne animal en deux grands groupes : les Vertébrés
| les Invertébrés. Or, en réalité, c’est Cuvier qui, le pre-
| er, répudiant ses propres vues antérieures, a introduit
ans la classification du régne animal la division en quatre
ji branchements, devenue le point de départ de tous les
ogres de la Zoologie moderne. Le premier il a fait voir
que les animaux, loin de différer seulement par les modi-
1388 d’une structure même et unique, sont au contraire
construits sur quatre plans distincts d’où résultent les groupes
1 C. G. Ehrenberg, Les coraux de la mer Rouge. Berlin, 1834, in-4,
296 DE LA CLASSIFICATION.
naturels et distincts qu'il a nommés Rayonnés, ‘Artioulél
Mollusques et Vertébrés. q
Il est bien vrai que les subdivisions secondaires de ce
groupes principaux ont subi quelques changements dep :
Ja publication du « Règne Animal ». Plusieurs d’entre elles
des classes entières même, ont été reportées d’un embran
chement dans un autre; mais il est aussi très-vrai que lidé
caractéristique qui forme la base de ces grandes coupes.
été, pour la première fois, aperçue par ce maitre, le pli
grand zoologiste de tous les temps. 4
Ce que je me propose en ce moment ce n ’est pas d’exi
miner si la circonscription de ces grands groupes a ét
tracée par Cuvier avec une suffisante exactitude, et s’il y
lieu de leur assigner d’autres limites plus vraies; c’est d
décider s’il y a ou non, dans le Règne animal, quatt
groupes fondamentaux basés sur les différences de quatr
plans de structure distincts, et s’il n’y en a ni plus ni moi
que quatre. C’est un point qu'il est fort à propos de disev
ter, puisque les zoologistes modernes, et spécialemer
Sieboldt, Leuckart (1) et Vogt, ont proposé de combiner lé
classes en des groupes supérieurs qui différent essentielk
ment de ceux de Cuvier. Il n’est que juste de reconnait”
quant à Leuckart, qu’il a fait preuve, dans la discussion €
ce sujet, d’une connaissance profonde de toute la série de
Invertébrés et qu’il y a lieu de prendre en sérieuse considé
ration les changements qu’il indique. Ils sont fondés sur |
distinction critique de différences qui ont une grande w
leur; mais je pense néanmoins qu’il en a exagéré l’impol
tance. Quant aux modifications introduites par Vogt, ell
me semblent, aa contraire, basées sur des principes tout
fait anti-physiologiques quoique inspirées, en apparences i
un guide excellent, l'Embryologie. a
Les divisions adoptées par Leuckart sont celles-ci : Pre
tozoaires (groupe sur lequel il ne s’est pas livré à un ex
(1) R. Leuckart, Ueber die Morphologie und die Verwandlshafisverhalt
- nisse der wirbellosen Thiere, Brunswick, 1848, 4 vol, in-8, £
.
EXAMEN GENERAL DES PRINCIPAUX SYSTEMES. 297
bien approfondi), Cœlentérés, Echinodermes, Vers,
rthropodes, Mollusques, Vertébrés. La classification admise,
uelques années auparavant, par Sieboldt, dans son Traité
lanatomie comparée, est presque la même, à cela près que
ss Mollusques suivent les Vers, que les Cœlentérés et les
hinodermes sont réunis en un seul groupe et que les
ryozoaires restent avec les Polypes.
hés des Arthropodes. Mais ce qu’il y a d’utile dans ce per-
ectionnenjent avait déjà été réalisé par quelques naturalistes.
Je Blainville, en effet, et d’autres zoologistes avaient depuis
bngtemps senti l'inconvénient de laisser les Vers dans le
roupe des Rayonnés, et avaient été amenés à les associer
lus ou moins étroitement aux Articulés. Quant à la réunion
es Bryozoaires et des Rotiféres avec les Vers, proposée par
euckart, c’est, à mon avis, une grande erreur ; de même que
a séparation des Cœlentérés et des Echinodermes serait, à
hes yeux, une exagération de la différence qui existe entre
es Acaléphes et les Polypes, d’un côté, et les Echinodermes
& Pautre (1).
. (1). L’empressement avec lequel les naturalistes allemands ont acquiescé a
t classification de Leuckart, qui réunit en une seule classe les Polypes et les
taléphes, provient sans doute de ce que ces naturalistes n’ont guère pu étudier
Polypes que sur les Aclinies, S’ils avaient pu étendre leurs observations aux
Stréens, aux Madrépores et aux nombreux types d’ Halcyonoïdes qui caracté-
ent les formes tropicales, ils n'auraient pas manqué de reconnaître que les
pes constituent à eux seuls une classe distincte, un mode spécial d'exécution
| plan sur lequel les Rayonnés seuls ont été construits. Les recherches des
Hemands ont fourni la preuve positive de ce que plusieurs naturalistes français
tenaient depuis longtemps, a savoir que certaines familles des Rayonnés
nglemps rangées parmi les Polypes, les Hydroides entre autres, ne pouvaient
“ être séparées des Acaléphes, Mais cette démonstration les a ensuite
aînés à l'erreur en leur faisant exagérer les affinités des Polypes et des
Giléphes. Il y a entre ces deux sortes d'animaux une différence de la catégorie
la Classe. Les Polypes ont des cloisons rayonnées qui, de la face interne de la
roi extérieure du corps sont projelées dans la cavité principale ; ils possèdent
l cavité digestive produite par Vinvagination de la partie supérieure de
te paroi dans la partie supérieure de la cavité principale. Chez les Acalèphes,
b’y à pas de cloisons rayonnées, la cavité digestive est creusée dans la masse
du corps; le prolongement central du corps s'élève au-dessus de cette cavité
forme dappendices buccaux qui ne sont agir creux comme le sont les
298 DE LA CLASSIFICATION.
Les groupes fondamentaux institués par Vogt (1) sont |
suivants : Protozoaires, Rayonnés, Vers, Mollusques, Céph;
lopodes, Articulés et Vertébrés. Cet arrangement est b
exclusivement sur les rapports de l’embryon avec le ja
ou sur l’absence d’ceufs. Mais comme je lai déjà déclaré
c’est là un principe antiphysiologique ; car il suppose entr
le jaune et l’embryon une opposition qui n’existe pas rée
ment dans les limites où elle est admise. Les Mammifére
par exemple, qui sont placés comme tous les Vertébre
dans la catégorie des animaux chez lesquels il existe une 0}
position entre le jaune et l’embryon, sont aussi bien formé
de tout le jaune que les Échinodermes ou les Mollusques
Le jaune subit une segmentation complète chez les Mammt
féres, aussi bien que chez les Rayonnés, les Vers et beau
coup de Mollusques ; leur embryon, quand il paraît, ne
détache pas plus du jaune que la petite étoile de mer ne
détache du vitellus. Ce simple fait, connu depuis que Sar
et Bischoff ont publié leurs premières observations, il y”
trente ans, suffit à lui seul pour montrer que tout le prit
cipe de la classification de Vogt est radicalement faux.
A l’égard de l’assertion que ni les Infusoires ni les Rhi
podes ne donnent des œufs, j’y reviendrai tout à lheur
Quant à l’ordre des groupes principaux: Vertébrés, Artieulé
Céphalopodes, Mollusques, Vers, Rayonnés et Protozoaires
tout zoologiste qui connaît bien les aflinités naturelles de
Animaux voit de suite l’incorrection d’un système qui inte
pose toute la série des Mollusques entre le type des Artieu
tentacules des Polypes. Les tentacules buccaux du Cerianthus qui sont
ne sont pas homologues aux appendices buccaux des Acalèphes ; ils constitue
simplement une rangée intérieure de tentacules de la même espèce que
projetés sur le bord supérieur de la cavité principale. Ainsi les tentacules
ginaux des Acalèphes sont homologues à ceux des Polypes, tandis que
tentacules buccaux sont caractéristiques de leur classe. Je puis ajoute
les cloisons rayonnées des Rugosa, rapportés par moi aux Acalèphes all
que les Tabulés, ne sont pas homologues aux cloisons rayonnées des Actinoï
et des Halcyonoïdes, mais correspondent aux bourrelets de la tige de cert
_ Haleyonoides et sont, comme eux, une sécrétion du pied.
(4) Carl Vogt, Zoologische Briefe. Naturgeschichie der lebenden un
tergegangenen Thiere. Francfort-sur-Mein, 1854, vol. 1, p. 70.
EXAMEN GENERAL DES PRINCIPAUX SYSTEMES. 299
| celui des Vers. Une classification basée, comme celle-ci,
clusivement sur les changements que subit le jaune,
> peut vraisemblablement pas être l'expression naturelle
ss rapports multiples qui existent entre les animaux. De
ait, aucun système ne peut être conforme à la nature s’il
st fondé sur la considération d’une seule partie ou d’un
eul organe. |
Ces remarques générales une fois faites, il ne me reste
lus qu’à exposer sur quoi je fonde ma conviction qu’il n’y
dans le Règne animal, que quatre groupes fondamentaux,
plus, ni moins.
Et, d’abord, pour ce qui est des Protozoaires, on doit bien
connaître que, en dépit de l’étendue des recherches mo-
ernes sur les Infusoires et les Rhizopodes, la véritable nature
ë ces êtres reste encore fort indécise. On a fait voyager
Rhizopodes d’une extrémité à l’autre de la série des
ivertébrés sans pouvoir trouver une place qui, de l’aveu
> tous, exprimat bien leurs affinités vraies. La tentative
lite pour les séparer de toutes les autres classes avec les-
elles on les avait si longtemps associés et pour les ran-
er, avec les Infusoires, dans un embranchement distinct
le paraît aussi malencontreuse que tous les arrangements
piérieurs. Je ne crois même pas, en effet, que leur anima-
§ soit prouvée d’une façon incontestable, bien que j’aie moi-
méme suggéré autrefois l'idée qu’il serait possible d'établir
b rapport défini entre eux et les Gastéropodes inférieurs (1).
uisqu’il a été reconnu avec une suffisante rigueur que les
orallines et les Nullipores sont de véritables Algues conte-
ant plus ou moins de chaux dans leur structure, et puisqu'il
N a guére de groupe, parmi les plantes et les animaux
Mérieurs, qui ne renferme des individus simples doués de
locomotion aussi bien que des sociétés, soit libres, soit
adhérentes au sol, je ne vois pas qu’il soit impossible d’asso-
tier les Rhizopodes aux Algues. Cela semblerait presque
lälurel, quand on considère que les vésicules de quelques
(1) Cf, chap. I, sect. xix, p. 120,
360 DE LA CLASSIFICATION.
N
Fucus contiennent une substance visqueuse, filamenteuse
tellement semblable à celle qui s’échappe du corps. de
Rhizopodes que l'examen microscopique le plus minutieui
ne fait pas découvrir la plus légére différence de structur
entre elles. La découverte, par Schultze (1), de ce qu’
considère comme les granules germinaux de ces être
ne tranche pas la question, puisqu'il y a chez les Algu
des masses oyoides analogues et que, chez ces plantes, |
formes douées de locomotion sont aussi trés-nombre
ses (2).
A l'égard des Infusoires, j’ai depuis longtemps exprimé
conviction que c’est une combinaison des êtres les plu
disparates. Un grand nombre d’entre eux, les Desmidies
les Volvocines sont des Algues locomobiles, et des invest
gations récentes semblent avoir complétement mis hors di
question qu'il en est de même de tous les Infusoires anen
térés d’Ehrenberg (3). Les Entérodèles, toutefois, sont bi
des animaux, mais ils appartiennent à deux types fort dis
tincts, car les Vorticellidés différent entièrement de tou
les autres. Dans mon opinion, ce sont les seuls anima
indépendants de ce groupe, et ils sont si loin d’avoir
moindre affinité naturelle avec les autres Entérodéles, i
prouver. Les observations isolées que j'ai été à même.
faire sur le Paramecium, l’Opalina et autres semblable
m’autorisent à supposer que ces genres font connaître,
véritable nature de la généralité du groupe. J'ai vu, p
exemple, un Planaire pondre des œufs d’où sont nés d
paramécies qui ont passé par tous les changements par
Bre
culiers à ces animaux avant qu'ils se contractent en w
(1) M. S. Schultze, Polythalamien, elc., cité p. 24,
(2) Les recherches d’Ehrenberg et de Müller, citées, p. 120, n. 4,
quent une affinité trés-étroite entre les Thalassicoles, les Polycystines e
Rhizopodes. Plus j’examine ces corps énigmatiques, plus je suis porté a Ji
croire, avec les Algues inférieures et les Eponges, une affinité bien plus gr.
qu'avec n'importe quel type du Règne animal,
(3) Voy. les ouvrages cités, p. 120, n, 4,
EXAMEN GENERAL DES PRINCIPAUX SYSTEMES. 301
alide ; d’un autre côté, des opalines sont sorties d'œufs
le Distômes. Je publierai opportunément les détails de ces
bservations. Mais s’il est prouvé que deux types comme
elui du Paramecium et celui de l’Opalina, sont la progéni-
lure de certains vers, il s’ensuit, ce me semble, que tous les
Mntérodéles, à l’exception des Vorticellidés, doivent être
regardés comme la forme embryonnaire de cette légion de
ers, tantôt indépendants et tantôt parasites, dont les méta-
norphoses restent à étudier. A cet égard, je pourrais faire
emarquer encore que le temps n’est pas loin où les Gercaires
taient, eux aussi, regardés comme appartenant à la classe
es Infusoires, tandis qu’à présent il n’y a pas de doute qu'ils
eprésentent une des phases du cycle de la vie des Distômes.
e seul anneau de la chaîne des métamorphoses de ce
enre qui demeurât inconnu est maintenant découvert,
uisque, comme je viens de le déclarer, l'embryon qui sort
‘de l'œuf pondu par un Distôme parfait se trouve être une
porn.
‘La conclusion de tout cela c’est que la division du Règne
inimal à laquelle on a donné le nom de Protozoaires, et qui
ifférerait de toutesles autres en ce que les êtres qui la com-
Dosent ne pondent pas d’ceufs, n’existe pas dans la nature.
Des êtres qu’on y à rangés il faut maintenant faire deux
parts : l’une qu’on placera parmi les plantes, dans la classe
‘des Algues; l’autre qu'on distribuera parmi les animaux,
‘dans la classe des Acéphales (les Vorticelles), dans celle des
Vers (les Paramecium et les Opalina), et dans celle des
Crustacés (les Rotiféres). Les Vorticelles sont de vrais
Bryozoaires et par conséquent des Mollusques Acéphales,
@t les belles recherches de Dana et Leydig ont prouvé
que les Rotiféres sont de véritables Crustacés et non des
Le grand type des Rayonnés, à ne considérer que ses traits
@ssentiels, a été pour la première fois reconnu par Cuvier,
Guoiqu’il lui ait attribué plusieurs animaux qui ne lui appar-
liennent pas. L'erreur vint en partie de la connaissance
imparfaite qu’on avait de ces animaux, au temps du grand
302 DE LA CLASSIFICATION.
zoologiste, en partie aussi de ce que lui-même se laissa aller
dans cette occasion, à s'écarter du principe qu’il avait po:
pour sa propre classification et d’après lequel les embranc hi é
ments ont pour raison d’être un plan spécial de structure. I E
ce qui concerne les Rayonnés, Cuvier se départit de ce prin
cipe au point d’admettre, à côté de la considération du pla
particulier de leur structure, celle d’un autre élément, ie
plicité de cette structure, comme trait essentiel du caract
typique. En conséquence, il introduisit cing classes parti
les Rayonnés : les échinodermes, les vers intestinaux, |
acaléphes, les polypes et les iafasoives: Je n’ai pas beso
d’opposer à cette classification contre nature ce que j'ai déj
dit des infusoires, à à propos des Protozoaires ; il n’est pas ne
plus nécessaire d’insister sur les raisons qu’il y a d’élo
gner les vers des Rayonnés et de les rattacher aux Articulé
Il ne reste donc plus dans les Rayonnés que trois classes
les polypes, les acaléphes et les échinodermes ; et, dans m
manière de voir, ce sont bien réellement les trois class
naturelles de cette grande division, parce qu'ils manifeé
tent trois procédés différents au moyen desquels le pi
caractéristique du type, le rayonnement, est mis à exéculit
dans des structures distinctes. a
Une fois établi que les échinodermes sont, d’une manié
générale, homologues quant à la structure avec les acaléphi
etles polypes, on doit admettre que ces classes appartienn@
à un seul et même grand type et qu’elles seules représenté
l'embranchement des Rayonnés. Je suppose, bien entent
que les bryozoaires, les corallines, les éponges et tous |
autres mélanges étrangers ont été séparés d’avec les polypé
Or, c’est ce type des Rayonnés de Cuvier, ainsi débarras
de tous les éléments hétérogènes, que Leuckart entrepre!
de diviser en deux embranchements, équivalant Ia
l’autre, dans sa pensée, à ceux des Vers, des sr
Mollusques et des Vertébrés. Indubitablement, il a été co
duit à exagérer à ce point la différence qui existe entre |
échinodermes, d’un côté, et les acaléphes et les polypes,
l’autre, par la ressemblance, fort grande à première vue, d
GRANDES DIVISIONS NATURELLES. 303
‘méduses et des polypes (4). Peut-être a-t-il été influencé
jussi par ce fait que certains acaléphes vrais comme les hy-
roides, y compris les tubulaires, les sertulaires, les cam-
anulaires, etc., sont encore maintenus par beaucoup de
oologistes dans la classe des polypes.
_ Mais, depuis que les admirables recherches de J. Müller et
elles d’Alex. Agassiz nous ont rendu familiéres les métamor-
hoses extraordinaires des échinodermes; depuis que les
ténophores et les siphonophores ont été étudiés avec plus
le soin par Grube, Leuckart, Külliker, Vogt, Gegenbaur et
noi-méme, la distance qui semblait séparer les échinodermes
es acaléphes disparaît complétement. Car il n’y a pas
‘exagération à dire que, sil’apparence plutéiforme des échi-
odermes n’était pas connue pour être un premier degré de
ransformation, les animaux qui la présentent trouveraient
jaturellement leur place parmi les cténophores; comme les
larves des Insectes trouveraient la leur parmi les vers. Je
miintiens donc que les polypes, les acaléphes et les échino-
lermes constituent dans le Règne animal un groupe primaire
indivisible. Le caractère polypoide des jeunes méduses et
le caractère médusoïde des jeunes échinodermes en sont la
preuve évidente.
| Enfin, rien n’est plus contre nature que de transporter
les clénophores dans le type des Mollusques, comme le
joudrait Vogt; car ils offrent l’homologie la plus étroite avec
es autres méduses, ainsi que je lai fait voir dans mon
Mémoire sur les Méduses Béroïdes du Massachussets. Le
ractère clénophoroide des jeunes échinodermes établit,
entre les cténophores et les autres Rayonnés, une seconde
2onnexion d’aussi grande importance que la première. Nous
ive ns donc un lien anatomique pour les rattacher aux vraies
méduses et un lien embryologique pour les rattacher aux
Schinodermes.
“ (1) On voit ici clairement comment la considération des différences anato-
niques qui donnent le caractère de la classe a fait passer par-dessus le trait
Mrinordial de l’'embranchement, le plan, afin d'élever la classe au rang d’em-
raachement.
30% DE LA CLASSIFICATION.
Par conséquent, la classification des Raÿornés )
s'établir ainsi : a
1" classe : Polypes. Elle comprend deux ordres : les se
noides et les Halcyonoïdes, comme Dana les a limités (4
2° classe : Acaléphes avec les ordres suivants : Ij
droides (les Siphonophores inclus), Discophores et Ctén
phores. 4
3° classe : Echinodermes, et, comme ordres : les Cr
noides, les Ophiuroides, les Astérioides, les Échinoïdes et I
Holothuriatdes. 4
Les limites naturelles de l’embranchement des. Mollusqu
se déterminent aisément, Depuis que les Cirripédes ont 6
réunis aux Articulés, les naturalistes se sont généralemet
accordés à regarder, avec Cuvier, les Céphalopôdes, le
Ptéropodes, les Gastéropodes et les Acéphales, comme for
mant l’ensemble de cet embranchement. Les dissentimen
qui se sont produits entre les observateurs modernes ri
sultent des idées qu'ils se sont faites à l’égard des Bry c
zoaires. Quelques-uns les considérent encore comme di
Polypes, tandis que d’autres voudraient les réunir aux Vet
Cependant leur affinité avec les Mollusques me semble bi
clairement démontrée par les recherches de Milne Edward
Vogt est le seul qui regarde les Céphalopodes comme « co
struits sur un plan battiéolier (2) » ; mais il ne fait pas @ )
naître ces soi-disant particularités ; il se borne à mention
les différences anatomiques bien connues qui distinguent!
groupe des autres classes de l’embranchement des Mollusq 10
Or, ces différences constituent seulement des caractères
classe et ne manifestent en aucune façon un plan distin
Il n’est pas difficile de montrer l’homologic de tow
systèmes d'organes des Céphalopodes avec ceux des
Mollusques (5), et de ce témoignage résulte la prong
(4) Dans un charmant petit livre consacré à l'étude des animaux de lah
de Massachussets (Seasides Studies in Natural History. Boston, 1865, i
par Madame L. Agassiz et M. Alex. Agassiz, la classe des Polypes est div L
en trois ordres : Actinoïdes, Madréporiens, Halcyonoïdes. (N. du Tf.
(2) C. Vogt, Zoologische Briefe (citées plus haut), vol, I, p. 361.
(3) Leuckart, Ueber die Morphologie, etc., ché p. 24, n. 2. — Huxley,
GRANDES DIVISIONS NATURELLES. 305
Céphalopodes ne sont qu'une classe des Mollusques.
Quant aux différences, dans le mode de développement,
s Céphalopodes et peut-être des autres Mollusques, le type
les Vertébrés nous est un exemple que la segmentation du
jaune peut être partielle chez des animaux et totale chez
autres, dans un même embranchement, sans en détruire
unité. En effet, les œufs des Mammifères et des Cyclostomes
ibissent une segmentation totale, tandis que la marche de
segmentation est plus ou moins bornée dans les autres
asses. Chez les Oiseaux, les Reptiles et les Sélaciens, la
gmentation n’est que superficielle; chez les Batraciens et
upart des Poissons, elle est beaucoup plus profonde. Ce-
dant, personne ne se hasarderait à diviser, d’aprés cette
pas douteux que
¢ les Vers ne soit
plan de leur struc-
re n’est pas rayonné : il est au contraire distinctement et
ssentiellement bilatéral, et lorsque leur étroite affinité
ec les brachiopodes, signalée plus haut (1), aura été bien
imprise, il ne restera plus de doute sur leur vraie con-
xion avec les Mollusques. Comme il n’entre pas dans mon
an de décrire ici les caractères de toutes les classes du
gne animal, je me borne à déclarer que l’embranchement
8 Mollusques ne contient, suivant moi, que les trois classes
ivantes :
4°° Classe : Acéphales ; quatre ordres, les Bryozoaires
orticelles comprises), les Brachiopodes, les Tuniciers et les
mellibranches.
2° Classe : Gastéropodes ; trois ordres : Ptéropodes, Hété-
odes et Gastéropodes proprement dits.
® Classe : Céphalopodes ; deux ordres : Tétrabranches et
branches.
De toutes les modifications introduites dans la classifica -
Morphology of the Cephalous Mollusca. Tr.
‘J. — Carus, System, elc., cité p. 24, n. 2,
2) Chap. I, sect. xix.
_ AGASSIZ.
5,
Roy. Soc, London, 1853,
20
t
i
ë
306 DE LA CLASSIFICATION.
tion générale des Animaux, depuis l'apparition du Regi
animal de Cuvier, ce qui me paraît le moins justifié, c'e
l'institution d’un embranchement distinct, de nos jours gén
ralement admis sous la dénomination de VERS, pour y rel
fermer les Annelés, les Helminthes, les Rotifères et mém
si l'on en croyait Leuckart, les Bryozoaires. La séparation d
Helminthes d’avec le type des Rayonnés fut certainement 1
progrès sur le système de Cuvier, mais c'était faire en mé
temps un pas en arrière que d’enlever les Annélides à |
branchement des Articulés. La comparaison la plus minutie| |
ne fait rien découvrir qui ressemble à un plan distinat}
structure, commun à tous ces animaux et les rassemblant
un.groupe primaire naturel. Ce qui les réunit, et les. ti :
à distance (1) des autres groupes d’Articulés, ce n’est | |
la communauté de plan, mais la simplicité plus grar
de leur organisation (2). En les rapprochant les uns ¢
autres, les naturalistes tombent dans la même erreur ¢
Cuvier a commise, quand il a associé les Helminthes ¢
Rayonnés; seulement ils se trompent d’une autre façon e
une plus grande échelle (3). Les Bryozoaires sont, pour |
dire, des Mollusques appauvris, comme l’Aphanes et l |
milla sont des Rosacées appauvries. Les Rotifères sont il
le même sens, les plus humbles des Crustacés, et les Helm
thes et les Annélides constituent ensemble la plus basse ela
des Articulés. Gette classe se rattache par la plus
analogie à l'état larval des Insectes. Le plan est iden
et il n’y a que ces différences de structure qui oil
tuent la classe (4). Du reste, les Helminthes se relient :
Annélides de la même manière que les larves apades de 8
sectes se relient aux Chenilles les plus hautement orgai
Ilserait vrai de dire que la classe des Vers représe
l'état parfait, l'état embryonnaire des Articulés supé
Les deux autres classes de cet embranchement sont les
(4) Chap. If, sect. vu.
(2) Cf, plus haut, chap. I, sect. xix.
(3) Cf. chap, Il, sect. 1.
(4) Cf. chap. II, sect 11.
GRANDES DIVISIONS NATURELLES,
acés et les Insectes, et, à l'égard de leurs
léjà l’occasion de m’en expliquer précéde
qu'il est nécessaire.
La classification de l’embr
donc celle-ci :
=. 1" Classe : Vers; trois ordres : Trématodes (y compris les
Cestoides, les Planaires et les Sangsues), Nématoides (les
canthocéphales et les Gordiacés inclus) et Annélides.
» 2° Classe : Crustacés; quaire ordres : Rotifères, Entomos-
acés (Cirripédes compris), Tétradécapodes et Décapodes.
3° Classe : Insectes ; trois ordres: Myriapodes, Arachnides
t insectes propres.
307
limites, j'ai eu
mment (1) autant
anchement des Articulés est
eux cavités sont circonscrites par des arcs complexes appuyés
ar l'axe, et dans la composition desquels. entrent différents
Slèmes d'organes : le squelette, les muscles, les vaisseaux,
Snerfs. Elles renferment : la supérieure les centres nerveux,
‘linférieure les divers appareils d'organes par lesquels
eflectuent l'assimilation et la reproduction.
Le nombre et les limites des classes de cet embranchement
ont pas été encore déterminés d’une manière satisfaisante.
ut au moins, les naturalistes ne sont pas d'accord là-dessus.
ar ma part, je crois que les Marsupiaux ne peuvent pas
€ séparés des Mammifères placentaires, à titre de classe
incte; car sans franchir les limites d’un autre type de
tébrés, les Sélaciens, qu’on ne peut pas scinder en deux
8, On observe, dans le mode de développement, des
rences analogues à celles qui existent entre eux et les
es Mammifères, Mais je crois en même temps, avec
tres zoologistes, que les Batraciens doivent être séparés,
À
(Cf, chap. I, sect, xix.
308 DE LA CLASSIFICATION.
des vrais Reptiles, car les caractéres qui les distinguen
les uns des autres sont de la nature de ceux sur lesquel
sont fondées les classes. Je suis non moins convaincu qt
les différences existant entre les Sélaciens (Raies, Requinst
Chimères) et les Poissons sont de la même nature que cell
qui distinguent les Amphibiens des Reptiles propreme
dits. Elles autorisent par conséquent à les isoler des Pois 4
véritables. J’envisage aussi les Cyclostomes comme wi
classe à part, pour des raisons analogues ; je suis moins ce
tain que les Ganoides doivent étre séparés des Poiss
ordinaires. Cela ne pourra être décidé qu’ apres une étu
approfondie de leur embryogénie ; ; cependant jai déjà ré
des données favorables à cette manière de voir. Si dor
mes prévisions à cet égard se réalisent, l’'embranchem ‘
des Vertébrés comptera les classes suivantes : 1
1° Classe : Myzontes ; deux ordres : les a a
Cyclostomes.
2° Classe : Poissons proprement dite; deux ordres : (4
noides et Gycloïdes (1). A
3° Classe : Ganoides ; trois ordres : Cœlacanthes, Accip
seroides et Sauroides; douteux : Siluroïdes, Plectogag
et Lophobranches (2).
h° Ciasse : Sélaciens; trois ordres : Chiméres, Galéo
Batides.
5° Classe : Amphibiens ; trois ordres : Cécilies, Ichthyo
et Anoures. q
6° Classe : Reptiles ; quatre ordres : sep Saurie
Rhizodontes et Testudinés. a
a
(1) Je suis convaincu que cette subdivision des poissons propremen t
doit étre modifiée, mais une discussion des motifs qu’il y a d’y introdt luir
changements que je propose m’entrainerait trop loin.
(2) Jai observé un mode particulier et très-curieux de locomotion ch
les Lophobranches, les Sclérodermes et les Gymmodontes que j’ai vus Vil
Ils ne progressent pas par des mouvements latéraux de la colonne vertéb
comme les autres poissons ; ils avancent principalement grâce à un mouve
ondulatoire de leurs nageoires verticales, qui ressemble beaucoup oi
d’action des membranes vibratiles. Ils rappellent en cela le petit Lepidost
c’est là, à mes yeux, un argument de plus pour les associer aux Ganoïde:
aussi les remarques sur les limites des Ganoïdes, p, 254. |
PREMIERES TENTATIVES. — ARISTOTE. 309
7° Classe : Oiseaux, quatre ordres: Nageurs, Gallinacés,
;chassiers, Percheurs (y compris les Grimpeurs et les
apaces).
8° Classe : Mammiferes; trois ordres : Marsupiaux, Her-
ivores et Carnivores (1).
: Je profiterai de la première occasion pour rechercher plus
omplétement jusqu’à quel point ces groupes de Vertébrés
résentent des caractères qui permettent de les distinguer
omme classes. C’est plutôt comme de pures suggestions
estinées à faire naître de nouvelles recherches que comme
es résultats parfaitement élaborés, que j’expose ici mes
mpressions actuelles.
II
Premiers essais de classification des animaux.
Un si petit nombre de naturalistes ont consacré une
ttention spéciale à la classification du Règne animal en
général, que je crois nécessaire d'indiquer ici les différents
principes dont se sont inspirés, à différentes époques, les
zoologistes qui ont essayé de grouper les animaux d’après
les affinités naturelles. La chose paraîtra d'autant moins
seuse, je l'espère, que peu de bibliothèques (2) con-
iennent les ouvrages principaux de notre science et que les
étudiants zélés se trouvent ainsi empéchés de porter leurs
Z Budes sur ce quia été fait jusqu’ici.
Ë . La science a commencé par introduire certains termes
dans le langage pour désigner des groupes naturels de dif-
férente valeur, avec ce même vague qui prévaut encore dans
e langage ordinaire, lorsqu'on y emploie les mots de
_ (1) Le remarquable mémoire d’Owen sur la classification des Mammifères
Wfournit des données nouvelles et d'une extrême importance pour la discussion
des véritables affinités des Mammifères entre eux. Voy. R. Owen, On the
Characters, Principles of Division, and Primary Groups of the class Mamma-
lia ; Proc. Linn. Soc., 1857.
7 (2) L’auteur parle des États-Unis. (N. du T.)
310 DE LA CLASSIFICATION,
classe, ordre, genre, famille ou espèce. Tantôt on les prend
pour synonymes, et tantôt on les substitue les uns aus
autres, au hasard. Linné fut le premier à réclamer de la pri
cision dans l'emploi, en histoire naturelle, des quatre sorte
de groupes qu’il a appelés classes, ordres, genres et espèces
Aristote et les philosophes anciens ne distinguaient géné
ralement parmi les animaux que deux sortes de grouf es
yévos et etdoc, le genre et I’ espèce. Mais le terme yévo¢, genus
genre, ala signification la moins constante. Il sert à dés
gner indistinctement tout groupe d’espéces, quelle qu’en so
l'étendue, et même ce que nous appelons aujourd’hui ¢
nom de classe, aussi bien que d’autres groupes inférieurs
Il est pris dans le sens de classe, dans la phrase suivante ©
eyo dé yévos, otov OpurSa, rot y Sdy (Arist. Hist. Anim. Lib. 1
Cap. I). 4%, est au contraire généralement usité dans le sen
d’espéce, ainsi qu’on le voit dans cette proposition : xai %
eton teAciw ty Sow xa dpvidwy, mais le méme mot ne laisse pase d
recevoir à l’occasion un sens plus étendu. Le sixième che
pitre de ce livre [* est le plus important de tout le trai
d’Aristote à cet égard, car il montre comment le terme y
était appliqué à plusieurs sortes de groupes. Ici, le phil
sophe distingue entre VEN peyista, VEN peyaha et pevos É
court. Tévy dt peyista roy Cow, eis à drapeèr at ra) Cae, rad” tot
ty piv opviQwv, Evd” iyOduv, dAdo d «tou. Ado dt yévos tart to tay o¢tp
xodepuwy,+.. Toy dt dorr@v Coowy obx frre Te yen peyaha* od yap rest
atcohha etdy tv doc... Te déve pey, GAN? LVOVU Ae
- Plus loin, il insiste de nouveau : +05 de yévous tev repart
Cour xat Cowrérw efdy pty cice wohdd, dvovupe db. Ici edog a év
demment un sens plus large que notre terme espèce, et |
soigneux Scaliger le traduit par genus medium pour le di
NU de yévs qu’il rend par genus summum. Toutefoi
doc Signifie généralement espèce dans l’acception que I 0
lui donnerions, et déjà Aristote considère la fécondité co mi
un caractére spécifique. Il dit en effet quel’Hémione est ain
appelé à cause de sa ressemblance avec l’Ane, et non |
parce qu'il est de la même espèce que ce dernier ani nal
cependant, ajoute-t-il, ils s'unissent et propagent ensembl
i
“à
LINNÉ. 314
xadodvtat Mpiovor dt’ opordenta, ov» Odea re ro ord eldeg? xat
yee oycbovtar xat yewivrar tE yo, Dans un autre passage
éanmoins, il applique cette même expression à un groupe
etement identique avec notre moderne genre £quus : éme
Biv Gv tt yÉvog xat emt rois EyoUor yaitny, hopoupors xahoupevors, otov.
mew xal bv@ rat dpci nai yirve xat Grp xat rois tv Evpia xahonpeyauc
pivots.
Qn ne peut pas dire qu’Aristote ait proposé une classifi-
tion régulière, Il parle constamment de groupes plus ou
oins étendus en les désignant par la même appellation.
idemment, il les considère comme des divisions naturelles;
ais nulle part il n’exprime la conviction que ces groupes
ent susceptibles d’un arrangement méthodique de nature
exprimer les affinités réelles des animaux. Et pouriant,
place ses remarques sur les différents animaux dans une
nnexion et dans un ordre tels qu’il en résulte clairement
lil avait la connaissance de leurs rapports. En parlant
>s Poissons, par exemple, il n’y mêle jamais les Sélaciens.
Après Aristote, la classification zoologique ne fit aucun
ogrès durant deux mille ans. Enfin, Linné introduisit de
uvelles distinctions, il assigna une signification plus ri-
lureuse aux termes classe (genus summum), ordre (genus
ermedium), genre (genus proximum) et espèce dont les
x premiers furent introduits par lui, pour la première
s, comme dénominations de groupes distincts, dans le
tème de la zoologie.
III
Période de Linné.
Quand on jette les yeux sur le Systema Nature de
nié, même en prenant la douzième édition de ce livre, la
niére qui ait été revue par lui, on a peine, de nos jours,
se rendre compte de la grande influence exercée par cet
rage sur les progrès de la Zoologie (4). Et cependant, il
) Pour bien apprécier les perfectionnements successifs de la classification
312 DE LA CLASSIFICATION.
eut sur son époque une action magique, il suscita des effor
qui dépassérent de bien loin tout ce qui avait été fait dar
les siécles précédents. Un tel résultat doit étre attribué, e
partie, 4 la circonstance que Linné était le premier homm
qui eût jamais conçu distinctement l’idée d’exprimer sou:
une formule définie ce qu'il croyait être le système del
nature et, en partie aussi, à la clarté et à la simplicité de §
méthode si facile à comprendre. Écartant, dans son système
tout ce qui ne pourrait pas être déterminé facilement, il divisa
le Règne animal en deux classes distinctes, RARES pi
des traits définis. Pour la première fois aussi, à côté di
genres et des espèces, vaguement distingués sas uns dé
autres avant lui (1), il introduisit les ordres dans le systém
de la zoologie. Et quoiqu'il n’ait pas même essayé de défini
le caractère essentiel de ces différentes sortes de groupe,
appert bien évidemment de ses nombreux écrits qu'il |
considérait tous comme des subdivisions de valeur décrok
sante, embrassant un nombre, plus grand ou plus pet
d'animaux qui tous présentent en commun des attributs pl
ou moins généraux. 3
Il exprimait de la manière suivante l’idée qu'il se faisi
de ces rapports existant entre les classes, les ordres, |
genres, les espèces et les variétés (2). 1
CLASSIS, ORDO, GENUS. SPECIES. VARIETASN
Genus summum, Genus intermedium. Genus proximum, Species. Individuums. |
Provincie. Territoria, Parecie. Pagi. Domicilium.
Legiones. Cohortes. Manipuli. Contubernia, Miles.
Le diagramme ci-dessous, extrait de la 12° édition, p
de Linné, il suffit de comparer la 1° édition du Systema nature, publiées
1735, avec la 2°, publiée en 1740, la 6° qui date de 1748, la 10€ qui est
1758, et la 12°, publiée en 1766, car ce sont les seules éditions qu’il ait rey
lui-même, La 3° est une réimpression de la 1° ; la 4° et la 5° sont des ré
pressions de la 2° ; les 7°, 8° et 9°, des réimpressions de la 6°; la 11° repro
duit la 4'*, et la 13°, publiée par Gmelin après la mort de Linné, est u
compilation qui mérite peu de confiance. 4
(1) Voy. ci-dessus section 1. Les evn peyote, d’Aristote corresponde
cependant aux classes de Linné, et les Y£yn wéyaaa à ses ordres,
(2) Voy. Systema nature, 12 édit., p. 13.
LINNE. 343
4
bliée en 1766, figure arrangement qu’il donnait au Règne
nimal.
Classification de Linné.
Ci. 1. MAMMALIA. Ord. Primates, Bruta, Feræ, Glires, Pecora, Bel-
luæ, Cete.
Cl. 2. AVES, Ord. Accipitres, Picæ, Anseres, Grallæ, Gallinæ, Pas-
seres.
il. 3. AMPHIBIA. Ord. Reptiles, Serpentes, Nantes,
Cl. 4. PISCES. Ord. Apodes, Jugulares, Thoracici, Abdominales.
CI. 5. INSECTA. Ord, Coleoptera, Hemiptera, Lepidoptera, Neurop-
4 tera, Hymenoptera, Diptera, Aptera.
1. 6. VERMES. Ord. pains sans Testacea, Lithophyta, Zoo-
: phyta.
_ Dans les premières éditions et jusqu’à la dixième, la classe
Le Mammifères était appelée classe des Quadrupèdes, et
elle ne renfermait pas les Cétacés qui étaient encore rangés
“parmi les Poissons. Il ne paraît pas qu’il y ait jamais eu
désaccord entre les naturalistes sur les limites naturelles
de la classe des Oiseaux depuis que Linné l’a définie, pour
la première fois, en en retirant les Chauves-Souris rap-
portées à la classe des Mammifères. Dans Jes premières
éditions du Systema Nature, la classe des Reptiles em-
brasse les mêmes animaux que dans les systèmes des plus
récents observateurs ; mais depuis la dixième édition, elle a
été malencontreusement augmentée des poissons cartilagi-
ineux et semi-cartilagineux. Cette modification rétrograde fut
inspirée par quelques observations inexactes du docteur
Garden. La classe des Poissons est vraiment bien limitée
dans les premières éditions du Système, à l'exception des Cé-
tacés (Plagiures) qui furent remis à leur place, dans la classe
des Mammifères, à la dixième édition. Mais dans les éditions
postérieures, les Cyclostomes, les Plagiostomes, les Chi-
mères, les Esturgeons, les Lophioïdes, les Discoboles, les
Gymnodontes, les Sclérodermes et les Lophobranches sont
exclus de cette classe et reportés dans celle des Reptiles. La
3
314 DE LA CLASSIFICATION.
classe des Insectes (1), telle qu’elle est circonscrite par Linné,
embrasse non-seulement ce que nous considérons aujour-
d’hui comme les Insectes proprement dits, mais encore les
Myriapodes, les Arachnides et les Grustacés. Elle correspond
plus exactement à la division des Arthropodes des classifica-
teurs modernes. La classe des Vers, la plus disparate de toutes,
renferme pêle-mêle tous les Rayonnés ou Zoophytes et les
Mollusques des auteurs modernes, plus les Vers intestinaux
et les Vers libres, les Cirripédes et un poisson (le Myxine). I
était réservé 4 Cuvier d'introduire l’ordre dans ce chaos (2).
Telle est, avec ses qualités et ses défauts, cette classifica:
tion qui imprima à l'étude de la Zoologie l'impulsion la plus
inattendue et la moins préparée. Il faut se rappeler combien
il y a peu de temps que cette œuvre, même avec tant d’ims
perfections, est venue exercer son énergique influence sur
les progrès de la science, pour comprendre comment il se
peut qu’il reste tant à faire dans le domaine de la zoologie
systématique. Il n’y a certainement rien d’instructif, pout
celui qui étudie l’histoire naturelle, comme une rigoureust
et minutieuse comparaison des diverses éditions du Sys-
tema Nature de Linné avec les travaux de Cuvier et de
autres zoologistes éminents. L’étude des méthodes à laid
desquelles se sont accomplis les progrès réels de notre
science n’est pas moins féconde en enseignements. i
Depuis la publication du Systema Nature jusqu'à Vé
poque où Cuvier publia les résultats de ses recherches & Na
tomiques, tous les essais de classification nouvelle furent, et
définitive, de simples modifications des principes introduit
(1) Aristote divisé ce groupe plus correctement que Linné, ear il :
déjà deux classes (yévq éyioræ) parmi les Insectes : les Malacostraca \ té
cés) et les Entoma (Insectes) (Hist. anim., chap. VI). Il semble aussi s'être fai
une idée vraie des limites naturelles des Mammifères et des Reptiles,
distingue les Quadrupèdes vivipares des ovipares, et ne confond nulle pa
Poissons avec les Reptiles (1bid..). “à
(2) Il y aurait injustice pour Aristote à ne pas remarquer qu'il avait ¢
compris, mieux que le grand naturaliste suédois, les rapports existant entr
les animaux réunis par Linné en une seule classe, sous le nom de Vers.
parlant, par exemple, des grands genres ou classes, il sépare correctem
Céphalopodes des autres Mollusques, sous le nom de Malakia. (Hist. ani
lib. I, chap. VI.) es
is
4
2e
CONTINUATEURS DE LINNE. 345
Linné. Ses adversaires eux-mêmes étaient dominés par
a pensée du maître. L'examen critique des divers systèmes
droposés, soit pour l’arrangement d’une classe en particu-
ier, soit pour celui du Règne tout entier, démontre que
tous ont été conçus d’après un même principe, c’est-à-dire
d'aprés cette idée que les animaux doivent être groupés en
classes, ordres, genres et espèces suivant leur plus ou moins
grande ressemblance extérieure.
… Mais Cuvier n’eut pas plutôt fait connaître au monde savant
es vastes recherches sur la structure interne de tous les
tres du Règne animal que, à l’envi les uns des autres, les
aturalistes entreprirent de refondre la classification. On
tablit de nouvelles classes, de nouveaux ordres, de nouveaux
renres; on décrivit de nouvelles espèces; on introduisit
toutes sortes de divisions intermédiaires sous le nom de
milles, de tribus, de sections, etc. Cuvier lui-même, et après
Lamarck, allérent plus loin que pas un dans ces ten-
fatives. Il est, toutefois, arrivé souvent que les divisions
introduites par Lamarck avec des dénominations nouvelles
Pétaient, sous une forme plus systématique, que l’expres-
ion pure et simple des résultats obtenus par Cuvier -dans
es dissections et indiqués dans ses Leçons sur l’anatomie
ymparée, comme autant de divisions nouvelles auxquelles
ucun nom n’avait été donné. Cuvier a, lui-même, admirable-
nent exprimé Vinfluence que ses recherches anatomiques
rent sur la Zoologie, et expliqué comment les perfectionne-
nents de la classification contribuérent à faire avancer l’ana-
lornie comparée. Il dit, en effet, à la page vi de la préface du
Règne animal : « Je dus donc, et cette obligation me prit
) un temps considérable, je dus faire marcher de front
oh anatomie et la zoologie, les dissections et le classement;
) chercher dans mes premières remarques sur l’organisation
les distributions meilleures; m’en servir pour arriver à
bles remarques nouvelles ; employer encore ces remarques
à à perfectionner les distributions ; faire sortir enfin de cette
fécondation mutuelle des deux sciences l’une par l’autre,
“un système zoologique propre à servir d’introducteur et
316 DE LA CLASSIFICATION.
» de guide dans le champ de l'anatomie, et un corps de doe
» trine anatomique propre à servir de développement et d’ex
» plication au système zoologique. » |
Il est inutile de raconter en détail tout ce qui se fit, du:
rant cette période, dans le but de perfectionner le systém
de la Zoologie. Il suffit de dire que la première décade de ct
siècle ne s'était pas encore écoulée, et, déjà, l’on avait carac:
térisé d’après cette méthode un nombre de classes double d
celui qu’avait adopté Linné. Ce sont les classes des Mollus
ques, des Cirripédes, des Crustacés, des Arachnides, de
Annélides, des Entozoaires (Vers intestinaux), des Zoo
phytes, des Radiaires, des Polypes et des Infusoires. re
n’en avait d’abord admis que huit (1); Duméril en fi
neuf (2); ; Lamarck en porta successivement le nombre à onze
puis à quatorze (3). Les Céphalopodes, les Gastéropodes e
les Acéphales, pour la première fois nommés par Cuvier
n'avaient d’abord été considérés par lui que comme de
ordres de la classe des Mollusques. De même, les Echino
dermes, bien qu’il eût été le premier à les circonscrire dan
leurs limites naturelles, ne constituaient alors qu’un ordre di
la classe des Zoophytes. Ne parlons pas des animaux inf
rièurs dont la structure interne était alors inconnue et qu
demeuraient dans une grande confusion. Dans cette rapid
esquisse des premières subdivisions qui, sous l'influence 4
Cuvier, furent opérées dans les classes des Insectes et de
Vers inslituées par Linné, j'ai nécessairement laissé de cé
les travaux importants par lesquels des écrivains spécialiste
contribuérent à notre connaissance de certaines classes sépi
rées. J'ai borné mes observations à ceux des naturalistes qt
ont envisagé le sujet de plus haut et sur une plus larg
échelle. |
Jusque-là, aucune tentative n’a encore été faite pour con
(1) G. Cuvier, Tableau élémentaire de I’ Hist. nat. des anim., Paris, 174
in-8, -
(2) A. C. Duméril, Zoologie analytique, etc., Paris, 1806, in-8.
(3) J. B. de Lamarck, Système des animaux sans vertèbres, ou Table
général, etc., Paris, 1801, in-8. — Hist, nat. des anim. sans vertéb., ele
Paris, 1815-1822, 7 vol. in-8,
SYSTÈMES ANATOMIQUES, — CUVIER. 317
yiner les classes entre elles et en former, d’un point de vue
‘supérieur, des groupes plus généraux. On ne va pas au dela
“de la division de l’ensemble du Règne en Vertébrés et Inver-
ébrés, ce qui correspond aux Céa goa et AUX Cia ävarux
d'Aristote. Tous les efforts ont tendu bien plutôt à l’établis-
“sement d’une série naturelle remontant de l’Infusoire à
l'Homme. Bientôt cela va devenir, pour un grand nombre,
a tendance favorite et De Blainville finira par présenter cette
“idée comme une doctrine scientifique.
IV
Période de Cuvier. — Systèmes anatomiques.
La période la plus importante de l’histoire de la Zoologie
ne s’ouvrit véritablement qu’en 1812, le jour où Cuvier
déposa sur le bureau de l’Académie des Sciences, de Paris,
es résultats de ses recherches sur les rapports les plus
intimes de certaines classes du Règne animal entre elles (1).
en concluait que tous les animaux ont été construits sur
Yan ou l’autre de quatre plans différents ou, pour ainsi dire,
ont été coulés dans quatre moules. Jamais vue plus féconde
n'avait été soumise à l’appréciation des observateurs ; sans
doute, elle n’a pas encore produit toutes les conséquences
‘qui doivent immanquablement en découler plus tard, mais
on lui doit les plus solides progrès que la classification gé-
nérale ait faits, depuis Aristote. Et à moins que je ne me
trompe grandement, des changements proposés dans nos
systèmes par les écrivains modernes ceux-là seuls ont été
‘un progrès réel et non pas un pas en arrière, qui ont été
d'accord avec ce principe fondamental.
4 Ce grand principe, introduit par Cuvier dans la science,
voici en quels termes mémorables il l’a exprimé lui-même :
« Si l’on considère le Règne animal d’après les principes que
D nous venons de poser, en se débarrassant des préjugés
4. (1) Ann, du Muséum Whist. nat., XIX, Paris, 14812.
‘e
348 Fr, FADB-LA CLASSIFICATION.
établis sur les divisions anciennement admises, en n nil
égard qu’à l’organisation et à la nature des animaux, et
non pas à leur grandeur, à leur utilité, au plus où moins
de connaissance que nous en avons, ni à toutes les autres
circonstances accessoires, on trouvera qu’il existe quatre
formes principales, quatre plans généraux, si l’on peu
s’exprimer ainsi, d’après lesquels tous les animaux sem:
blent avoir été modelés et dont les divisions ultérieures
» de quelque titre que les naturalistes les aient tasotiet
» sont que des modifications assez légères, fondées sur le
> développement ou l'addition de quelques parties, qui né
» changent rien à l'essence du plan. »
Aussi me paraît-il incroyable que, en présence de parole
aussi explicites, on puisse encore, à l’occasion, nous repré:
senter Guvier comme favorable à la division du Règne anima
en Vertébrés et Invertébrés (1). Cuvier fut d’ailleurs le pre:
mier à reconnaître pratiquement que toutes les divisions
adoptées dans son système n’ont pas une égale valeur. C’es
là un point capital, encore bien que le grand anatomist
n'ait pas su trouver l’exacte mesure de chacun des groupe
institués par lui. Il faut se rappeler, en effet, que, au temps
où il écrivait, les naturalistes s’obstinaient à établir une série
uniforme et continue embrassant tous les animaux et à for:
mer une chaîne, entre les anneaux de laquelle ils n’admet-
taient pas qu’il pût y avoir d’intervalles inégaux. La devise
de l’école était Natura non facit saltum, et on appelait a
système : la chaîne des êtres.
Voici la classification du Règne animal à laquelle cared
fut conduit :
SUN y + v Vv ©
Classification de Cuvier (2). ' |
;
4er Embranchement. ANIMAUX VERTEBRES.
Cl. 4. Mamaurines. Ord. Bimanes, Quadrumanes, Carniyores,
(4) Ehrenberg (C. G.), Die Corallenthiere des rothen Meeres, Berlin, 1834
in-4, p. 30, note.- 1
(2) Le Règne animal distribué d'après son organisation. Paris, "1
4
SYSTÈMES ANATOMIQUES. — CUVIER. 319
Marsupiaux, Rongeurs, Édentés, Pachydermes, Ruminants,
Cétacés.
Cl, 2. Oiseaux. Ord. Rapaces, Passereaux, Grimpeurs, Gallinacés,
Echassiers, Palmipédes.
CI, 3. Reprites. Ord. Chéloniens, Sauriens, Ophidiens, Batra-
ciens.
Cl. 4. Poissons. 1°¢ série, Poissons proprement dits. Ord. Acan-
thoptérygiens, Abdominaux, Subbrachiens, Apodes ; — Lo-
phobranches, Plectognates, 2° série, Chondroptérygiens.
Ord. Sturioniens, Sélaciens, CyclostOmes (1).
Embranchement. ANIMAUX MOLLUSQUES.
CI. 4. Cipuatopopes. Pas de subdivisions en ordres ou familles.
Cl. 2. Préroronss. Ni ordres, ni familles.
_ Cl. 3, Gasréropones, Ord. Pulmonés, Nudibranches, Inféro-
branches, Tectibranches, Hétéropodes, Pectinibranches,
: Tubulibranches, Scutibranches, Cyclobranches.
Cl. 4. AcépraLes. Ord. Testacés, Tuniciers.
Cl. 5. Bracniopopes. Ni ordres, ni familles.
Cl. 6. Cinrmoropss. Ni ordres, ni familles.
7 Embranchement. ANIMAUX ARTICULÉS.
| (Ci. 1. Anxécines. Ord. Tubicoles, Dorsibranches, Abranches.
… CI. 2. Crusracts. 4° section. Malacostracés. Ord. Décapodes,
Stomapodes, Amphipodes, Leemodipodes, Isopodes. 2° sec-
tion, Emtomostracés. Ord. Branchiopodes, Pecilopodes,
Trilobites.
Cl. 3. Anacunipes. Ord. Pulmonées, Trachéennes.
Cl. 4. Insectes. Ord. Myriapodes, Thysanoures, Parasites, Su-
ceurs, Coléoptéres, Orthoptéres, Hémiptéres, Névroptères,
Hyménoptères, Lépidoptéres, Rhipiptères, Diptéres.
8 Embranchement. ANIMAUX RAYONNES.
Cl. 4. Ecutvopermes. Ord. Pédicellés, Apodes,
Cl. 2. Vers Inrestinavx. Ord. Nématoides (Entozoaires et Épi-
. zoaires), Parenchymateux. hd
., Cl. 8. Acarkpues. Ord. Simples, Hydrostatiques.
Cl. 4. Poryrgs. (Anthozoaires, Hydroides, Bryozoaires, Coral-
| lines et Éponges). Ord, Charnus, Gélatineux, à Polypiers,
* ddit., 5 vol. in-8, — Les classes des Crustacés, des Arachnides et des In-
ectes ont été élaborées par Latreille. — Pour les modifications successives
ipportées par Cuvier à cette classification, voyez le Tableau élémentaire et les
nnales du Muséum, vol. IX, cités dans la section précédente ; voyez aussi la
Fe édit. du Règne animal, 1817, 4 vol, in-8,
(1) Cf. Règne animal, 2° édit., t. Ul, p. 128 et 383.
320 DE LA CLASSIFICATION.
Cl. 5. Inrusorres. Ord. Rotifères, Homogènes (renfermant les
Polygastriques et quelques Algues).
Si l’on considère les systèmes zoologiques du siècle passé,
celui de Linné, par exemple, et si on les compare avec les
systèmes plus récents, comme celui de Cuvier, il est impos-
sible de méconnaître que, là même où les découvertes ont
peu ajouté à notre savoir, le sujet a été traité d’une manière
toute différente; c’est qu’on avait des données beaucoup
plus étendues, non-seulement sur la structure interne des
animaux, mais encore sur ce qui est relatif à la gradation
des groupes supérieurs. |
Linné n’a pas de divisions d’un ordre plus élevé que les
classes. Cuvier, pour la première fois, introduit quatre
grandes divisions qu’il appelle embranchements, et aux-
quelles il subordonne les classes, dont il admet trois fois plus
que Linné. De plus, celui-ci divise ses classes en ordres; au-
dessous des ordres il institue les genres, puis enfin les es=
péces. Et il fait cela systématiquement, admettant la même
gradation dans toutes les classes; si bien que chacune des
_ six classes du Suédois est subdivisée en ordres, et US
en genres avec leurs espèces. Des familles, comme on le
comprend aujourd’hui, Linné n’en a point idée. ;
La classification de Cuvier ne présente pas un cadre aussi
régulier. Dans certaines classes, après en avoir posé les ca:
ractéres, il passe immédiatement à l’énumération des genres
qu’elles contiennent, et il ne groupe ces derniers ni et
ordres, nien familles. Dans d’autres, il inscrit des ordre
sous le titre de la classe et alors il procède à la caractéri-
sation des genres; dans d’autres encore, il admet, au-
dessous de la classe, non-seulement des ordres et des famille
(subordonnant toujours, dans ce cas, la famille à l’ordre)
mais encore un certain nombre de divisions secondair
par lui appelées sections, divisions, tribus, etc., avant d’
arriver aux genres et aux espéces. A l'égard des genre:
mêmes on observe des dissemblances marquées dans le
différentes classes. Parfois le genre est, pour lui, un group
:
a
a
SYSTÈMES ANATOMIQUES. — CUVIER. 321
és-compréhensif d'espèces qui différent largement l’une
» l'autre; c’est ce qu’il appelle les « grands genres. »
autres fois le genre est d’étendue limitée et renferme des
pèces homogènes sans autre division; et, d’autres fois en-
re, les genres sont subdivisés en ce qu’il appelle « sous-
nres » ; ce qui est ordinairement le cas pour ses « grands
nres ».
La gradation, chez Cuvier, varie donc suivant les classes.
> unes ne contiennent que des genres et des espèces et
ont ni ordres, ni familles, ni subdivisions d’aucune sorte.
à autres renferment des ordres, des familles, des genres
, en outre, une variété de subdivisions d’inégale étendue
de signification diverse. Cette inégalité entre toutes les
visions de Cuvier est due, sans doute, à l’état de la Zoo-
ie et des Muséums à l’époque où il écrivait, ainsi qu’au
li pris de n’admettre, dans son ouvrage, que les repré-
tants du Règne animal dont il lui était possible d’étudier
us ou moins complétement, par lui-même, la structure
natomique. Mais elle doit être attribuée aussi à cette con-
Le souvent exprimée par lui, qu'il n’y a pas chez les
maux cette uniformité ou cette gradation sérielle, régu-
ére, que plusieurs naturalistes tentaient d'introduire dans
urs classifications.
à
i AGASSIZ. ; 21
322 DE LA GLASSIFICATION.
Classification de Lamarck.
Histoire naturelle des animaux sans vertèbres, etc., Paris, 1815-22, 7 w
in-8. — Deuxième édition, avec notes, publiée par MM, Deshayes
Milne-Edwards; Paris, 1835-43, 11 vol. in-8. — Pour les modificatio
successives de cette classification, voyez : Sysième des animaux sans ve
tèbres, eic., Paris, 1801, in-8. — Philosophie zoologique, etc., Paris, 180
2 vol. in-8. — Extrait du cours de zoologie du Muséum d'histoire nat
relle, etc., Paris, 1812, in-8. 4
L
q
INVERTEBRES.
I. ANIMAUX APATHIQUES.
Cl. 4. Inrusorres. Ord. Nus, Appendiculés.
Cl. 2. Potyprs. Ord. Ciliés (Rotifères). Nus
_ (Hydroides). A polypiers (Anthozoaires
et Bryozoaires). Flottants (Crinoides et
quelques Halcyonoides), PA aig co 1
CI. 3. Raprammes. Ord. Mollasses (Acalèphes). pen
Échinodermes (Holothuries et Actinies \masse médallaire -
3 longée; point de set
comprises). des formes variées;
Cl. 4. Tunicrers. Ord. Bothryllaires (AscidiensArement des artieu
composés). Ascidiens (Ascidiens simples). "à
Cl. 5. Vers. Ord. Mollasses et Rigidules (Vers
intestinaux et Gordius). Hispides (Nais). |
Épizoaires (Épizoaires, Lernéens).
IT. ANIMAUX SENSITIFS. ©
CI. 6. Insectes (Hexapodes). Ord. rot, He
Diptères, Hémiptères, Lépidoptères, Hy-
ménoptères, Névroptères, Orthoptères,
_ Coléoptères. 4
Cl. 7. Aracanines. Ord. Antennées-trachéales | sentent: mais 1
(Thysanoures et Myriapodes). Exanten- ftiennent de leurs sep
i sations que des percep
nées-trachéales. Exantennées-branchiales dies dobjets, une sot
(Arachnides propres). . sont incapables LS
C1. 8. Crusracés. Ord. Hétérobranches (Bran- Este aies
chiopodes, Isopodes, Amphipodes, Stoma- \ Pétat de colonne vé
podes). Homobranches (Décapodes). pice AE CIE
CL. 9. Annérioes. Ord. Apodes, Antennés, Sé-| médullaire allons
dentaires. des muscles att
Cl. 40. Crrriènes. Ord. Sessiles, Pédonculés. rs song
Cl. 44. Concuirkres. Ord. Dimyaires, Mono- parties paires. M
myaires.
CL 42. Mozzusques. Ord. Ptéropodes, Gastéro-
podes, Trachélipodes, Céphalopodes. Hé-
téropodes. ]
SYSTÈMES ANATOMIQUES. — LAMARCK. 323
VERTEBRES.
IL. ANIMAUX INTELLIGENTS.
| Cl. 148. Poissons. Sentent ; acquièrent des idées conservables, exécutent des
à ; ea opérations entre ces idées qui leur en fournissent d’autres ;
Cl. 44. Repriies. sont intelligents à différents degrés, Une colonne vertébrale,
4 un cerveau, une moelle épinière; des sens distincts; des
Ë Cl. 15. OrsEaux. muscles attachés à un squelette intérieur; la forme symé-
Ci. 16. MamuirÈRes. / tique, des parties paires.
;
_ Il n’est pas facile d’apprécier exactement le système de
Lamarck. C’est en effet un mélange de conceptions abstraites
et de considérations tirées de la structure, en méme temps
qu’un effort pénible pour ranger les animaux en séries con-
tinues. La division primaire du Règne animal en Invertébrés
et Vertébrés (1) correspond, comme je lai indiqué déjà, à
elle des Anaima et Enaima d’Aristote. Les trois prin-
cipaux groupes désignés par la qualification d’Apathiques,
Sensitifs, Intelligents sont imités des quatre embranche-
ments de Cuvier; mais, loin de reposer sur une idée
éfinie, comme les divisions de Cuvier qui impliquent
n plan spécial de structure, ils ont pour base la supposi-
tion que les facultés psychiques des animaux offrent une
radation sériaire; or cette supposition est certainement
nadmissible quand on veut en faire le principe d’une clas-
ification. Dire que ni les Infusoires, ni les Polypes, ni les
ayonnés, ni les Tuniciers, ni les Vers ne sentent, c’est cer-
ainement émettre une opinion erronée. Ces êtres mani-
estent des sensations, tout aussi distinctement que plusieurs
des animaux rapportés au second type et qui sont qualifiés
de sensitifs. Et quant à cette autre assertion qu’ils ne se
meuvent que lorsque leur irritabilité est excitée, il suffit
Pobserver les Étoiles de mer pour se convaincre que leurs
mouyements sont déterminés par des impulsions intérieures
non par les excitations du dehors. Des recherches ré-
fentes ont fait découvrir que la plupart de ces animaux ont
in systéme nerveux et que plusieurs possédent méme des
rganes des sens.
(1) Voy. plus haut, chap. II, sect. 1.
32h ; DE LA CLASSIFICATION.
Les animaux sensitifs sont distingués de ceux du troisiém
type, les animaux intelligents, par le caractére de leurs
sensations. L’auteur établit, a cet égard, que les sensatio
donnent simplement lieu chez les premiers 4 la perception
des objets, à une sorte d’idées simples qu’ils sont incapables
de combiner pour en faire dériver une idée complexe; tan-
dis que les seconds obtiennent, prétend-il, des idées quills
peuvent retenir, pour opérer sur elles et arriver par leur ins
termédiaire à des idées nouvelles, et.sont dits intelligents”
Je doute que, même de nos jours, cinquante ans après que
Lamarck a publié son système, il soit possible de distinguer
de cette manière entre les sensations des poissons, par
exemple, et celles des Céphalopodes. La structure, il est
vrai, diffère grandement chez les animaux que Lamarck: ap-
pelle Intelligents et chez ceux qu’il appelle Sensitifs, mais ut
grand nombre de ces derniers sont construits sur le mé me
plan que plusieurs de ceux qu’il range parmi les Apathiques.
Son type des Sensitifs embrasse done deux plans de str 1C=
ture, et la psychologie des animaux n’est certes pas assé
avancée pour offrir le moindre fondement a la distinction
introduite. q
Au point de vue méme de Lamarck, son arrangement de
classes est moins parfait qu’il n’aurait pu l’être, car les Ar
nélides sont plus voisins des Vers que les Insectes et leu
sont vraiment inférieurs. N’ ayant pas saisi la valeur de li
dée de plan et lui ayant substitué l’idée de la complicatio
de structure, Lamarck mêle, parmi les animaux apathiqué
des Rayonnés (les Polypes et les Radiaires) à des Mollu
ques (les Tuniciers) et à des Articulés (les Vers). Parmi
animaux sensitifs, il réunit des Articulés (Insectes, Arachn
des, Crustacés, Annélides, Cirripèdes) et des Mollusque
_ (Conchifères et Mollusques propres). Il assemble comme am
maux intelligents, les quatre anciennes classes de Vertébrés:
Poissons, Reptiles, Oiseaux et Mammifères. 7
SYSTÈMES ANATOMIQUES. — DE BLAINVILLE. 325
Classification de De Blainville.
(De Vorganisation des animaux, Paris, 1822, in-8.)
14
1°" Sous-Règne. ARTIOMORPHES ou ARTIOZOAIRES, Forme bilaté-
L'_ rale.
. 4er Type.. PSE (Vertébrés).
Sous-Type. Vivipares.
CL. 4. Picirères, ou arionifaned: 1° Monodelphes, 2° Didel-
phes.
Sous-Type. Ovipares.
CL. 2. Pennirères. Oiseaux.
Cl. 3. SquaumirÈres. Reptiles.
Cl. 4. Nupipettirires, Amphibies.
Cl. 5. Prières. Poissons.
ANOSTEOZOAIRES.
2° Type. Entomozoaires (Articulés).
Cl. 6. Hexarones (Insectes proprement dits).
Cl. 7. Ocropopes (Arachnides).
Cl. 8. Décaponss (Crustacés, Décapodes et Limule).
Cl, 9. Héréropones (Squille, Entomostracés, Épizoaires).
CI. 10. TérranÉcapones (Amphipodes et Isopodes).
Cl. 41. Mynrapopes.
Cl. 12. Cuféropones (Annélides).
Cl. 13. Apoprs (Sangsue, Cestoides, Ascaride).
Type. Malentozoaires.
Cl. 14. Nimatopopes (Cirripèdes).
Cl. 15. PorypLaxrenores (Chiton).
"ue Type. Malacozoaires (Mollusques),
C1.16. CéprArornones. Dioïques (Céphalopodes et Gastéropodes
en partie), Hermaphrodites et Monoïques (le reste des
Gastéropodes).
. CL 47. AcéruaLoruores. Palliobranches (Brachiopodes), Lamel-
libranches (Acéphales), Hétérobranches (Ascidies).
e Sous-Règne. ACTINOMORPHES ou ACTINOZOAIRES, Forme
. rayonnée.
CI. 48. AnNÉLIDAIRES ou Gastrophysaires (Siponcle, etc.).
Cl. 19. CéraronermarREs (Échinodermes).
326 DE LA CLASSIFICATION.
CI. 20. ARACHNODERMAIRES (Acaléphes).
Cl. 21. ZoaNTHAtRES (Actinies) .
CI. 22, Porvpiarres (Polypes à tentacules simples, Anthozoai
et Bryozoaires).
Cl. 23. Zoopuyraires (Polypes à tentacules composés, Hale
noides).
3° Sous-Régne. HETEROMORPHES ou HETEROZOAIRES. For
irréguliére. ‘
Cl. 24. Sponeraires (Éponges).
Cl. 25. Monapaires (Infusoires).
CI. 26. DenproitHaires (Corallines).
La classification de De Blainville ressemble à célles
Lamarck et de Cuvier beaucoup plus qu’un tableau syn
tique de ces trois systèmes ne le ferait supposer: Elle es
basée sur l’idée que le règne animal forme une série pro
gressive; seulement De Blainville intervertit l’ordre admi
par Lamarck et place les animaux supérieurs au comment
ment, les inférieurs à la fin. À cette idée mère s’ajoute, dar
une certaine mesure, la conception de Cuvier que les ani
maux sont construits d’après différents plans de structure
Mais cette conception est si loin de dominer De Blainyill
que, au lieu de reconnaître immédiatement et dès le princip
ces plans divers de structure, c’est dans la forme extérieut
qu’il découvre l’idée principale sur laquelle il va fonder
divisions primaires. En conséquence, il divise le Règne am
mal en trois Sous-Règnes : le premier est celui des Artic
zoaires dont la forme est bilatérale, le second, celui dt
Actinozoaires à forme rayonnée, et le troisième, cel
Hétérozoaires dont la forme n’est pas régulière (Épo
Infusoires, Corallines). Le plan de structure n’intervie
comme considération secondaire, pour permettre d’é
parmi les Artiozoaires quatre types : 1° les Ostéozoaire
correspondent aux Vertébrés de Cuvier ; 2° les Entomozoaires
qui sont les Articulés de Cuvier; 8° les Malentozoaire
groupe complétement: artificiel né de la nécessité d’é
une transition entre les Articulés et les Mollusques ; he
Malacozoaires, qui sont les Mollusques de Cuvier. :
En ar a :
: SYSTÈMES ANATOMIQUES. — DE BLAINVILLE. 327
Le second Sots-Régiié, celui des Actinozoaires, corres=
ond aux Rayotinés de Cuvier, tandis que le troisième, celui
is Hétérozoaires, est formé par des êtres organisés dont
8 plus grand fombre n'appartient pas au Règne anitial.
Pest le cas, du moins, pour les Spongiaires et les Den-
Hahithaires, tandis que les Monadaires répondent à cette
eille classe des Infusoires, sur la valeur de Taquelle jé me
is suffisamment profoncé dans les chapitres qui pré-
dent.
_ fl est évident que ce qu’il y a de correct dans cette coor-
im est emprunté à Guvier; mais, il n’est que juste de
reconnaître, De Blainville a introduit quelques perfection-
ménts d’une réelle valeur dans l’arrangement et la délimi-
ation des classes. Par exemple, il a pour la première fois
istingué, parmi les Vertébrés, les Amphibiens des Reptiles
rais; le premier aussi, il a reporté les Vers intestinaux du
groupe des Rayonnés à celui des Articulés, mais la création
ia type distinct pour les Cirripédes et les Chitons a été
ne grosse erreur. En dépit de quelques particularités de
ur structure, les Chitons sont construits essentiellement
1 le méme plan que les Mollusques de la classe des Gasté-
lopodes; quant aux Citripédes, les recherches faites peu de
emps aprés la publication du systéme de De Blainville ont
tubli d’une façon incontestable que ce sont de véritables
ustacés. La prétendue transition entre les Articulés et les
Mollusques que De Blainville croit établir, au moyen de
son type des ni n’existe certainement pas dans
a nature.
Si l’on applique à ses ages le critérium proposé dans
le chapitre précédent, il est clair que ses Décapodes, ses
Hétéropodes et ses Tétradécapodes participent bien plus du
läractère des ordres que de celui des classes; d’un autre
côté, sa classe des Céphalophores, chez les "Mollusques,
Biterme sûrement deux classes, d’ailleurs lui-même l’a
connu dans ses derniers ouvrages. Parmi les Rayonnés,
les. classes des Zoanthaires, des Polypiaires et des Zoophy-
faires tiennent du caractère de l’ordre et non pas de celui
. 828 * . DE LA CLASSIFICATION.
de la classe. Il y a enfin une grande objection à faire à @
système : on se demande à quoi bon introduire un nombri
considérable de dénominations nouvelles pour désigner d
groupes qui avaient déjà été très-bien limités et parfaite
ment nommés par les classificateurs précédents. En agissan
ainsi De Blainville poursuivait sans doute un but fort louable
celui de débarrasser la science de quelques dénomination
incorrectes, mais il a poussé la réforme trop loin en pré
tendant changer tous les noms qui ne cadraient pas “
son systéme. —
F
Classification d’ Ehrenberg. |
neuvième, établie pour l’homme seul, sont donnés plus complétement d
le travail cité plus haut et inséré parmi les Mémoires de l’Académie
Berlin pour 1836, p. 22.
Les caractères des vingt-huit classes d’animaux ci-dessous et ceux d’une ving
4er Cycle : NATIONS. L’Humanité, qui constitue une classe distinct
a pour caractére le développement uniforme de tou
les systèmes d’organes'; par opposition avec les
2e Cycle : ANIMAUX, que l’on considère comme caractérisés par |
prédominance de systèmes particuliers. Ceux-ci se div
sent en
A. MYÉLONEURÉS.
1. NOURRICIERS. Vertébrés à sang |I{. ORPHANOZOAIRES. Vertéb
chaud qui prennent soin de à sang froid qui ne prenn
leurs petits. pas soin de leurs petits.
Cl. 4. MAMMIFÈRES. Cl. 3. AMPHIBIES.
Cl. 2. Oiseaux. Cl. 4. Poissons. ©
B. GANGLIONEURÉS.
A. Sphygmozoaires , ayant un|B. Asphycto-vasculaires. Vaiss a
cœur. Circulation produite non pulsatiles.
par un cœur ou des vaisseaux 1
pulsatiles, V. TUBULES. Point d’artict
Ill. ARTICULÉS. Articulation ré- tion. L’intestin, un simple :
elle, indiquée par des chape- ou un tube. ;
100 te Span Onr et JEU Fe CI. 17. Bryozoaires.
AL VE Cl. 17. Dimorpnes (Hydroide
Cl. 5. INsecres, Cl. 19. TuRBELLARIÉS (Rh
SYSTEMES ANATOMIQUES. — EHRENBERG. 329
. Cl. 6. ARACHNOÏDES. _ cèles, Dérostomes, Tur-
CI. 7. Crusracés (y compris les belles, Vortex.
Entomostracés, les Cirri-| Cl. 20. Néwaroïnes (Entozoaires
} pédes et les Lernées). à intestin simple, Gordius,
. CI. 8. AnneLés. (Les vrais An- Anguillule).
. nélides, à l'exclusion des| Cl. 21. RorirÈres.
4 Nais.) Cl, 22. Écmvoïnes (Echinus ,
Cl. 9. Sowarotomés (Naidins). Holothurie, Siponcle).
VI. RACEMIFERES. Intestin divi-
sé, bifurqué, rayonné, den-
dritique, en grappe.
. MOLLUSQUES. Pas d’articula-
tion. Ganglions disséminés.
» Cl. 10. CÉPHALOPODES. Cl. 23. AsrÉRoÏDEs.
» CI. 11. PrÉROPODES. Cl. 24. ACALÈPHES,
» Cl. 12. GasTÉROPODES. Cl. 25. ANTHOZOAIRES,
Ci. 13. AcÉPHALES. Cl. 26. Trimatopes (Anthozoai-
Cl. 14. BRACHIOPODES. res à intestin ramifié, Cer-
à CI. 45. Tunicrers (Ascidies sim- caires).
i ples). Cl. 27. Pranaires (Dendrocéles,
Cl. 46. Accrécés (Ascidies com- Planaires, etc.).
posées). Cl. 28. POLYGASTRIQUES.
tion du principe que le type du développement des animaux
est un et identique, de Homme à la Monade. C’est la né-
gation complète de la thèse soutenue par Cuvier, que les
térisées par la différence des plans de structure. Après avoir
si complétement et si admirablement élucidé l'histoire
de certains êtres organisés considérés généralement comme
homogènes avant la publication de ses études ; après avoir
ÿ
ir térieure de plusieurs d’entre eux; après avoir prouvé la
fausseté des opinions généralement reçues sur leur origine,
il est tout naturel qu’Ehrenberg ait été amené à cette con-
330 DE LA CLASSIFICATION.
tétnes compliqués d’organes il y a à décrire dais le corps
microscopiquement petit d’un Rotifère ; il devait étre irré-
sistiblement entrainé 4 conclure que tous les animaux sont
également parfaits et, comme conséquente naturelle de la
preuve qu’il avait fournie, à supposer que tous les êtres
animés sont au même niveau, en tant qu’il s’agit de la com:
plication de leur structure. Cependant le diagramme du
système d’Ehrenberg montre que, lui non plus, n’a pu se
soustraire à l’idée que tous les animaux n’ont point été
également doués à ce point de vue. Comme tous les autres
naturalistes, il place l'Homme à une des extrémités du
Règne animal et relègüe à l’autre bout ces types qu’on
toujours considérés comme inférieurs.
L'Homme formé, suivant lui, un cycle indépendant, li
des Nations, par opposition au Cycle des Animaux qu’il divisé
en Myeloneurés ayant une moelle épinière (les Vertébrés), el
en Ganglioneurés n’ayañt que des ganglions (les Invertébrés)
Il subdivise les Vertébrés en Nourriciers qui prennent soif
de leurs petits ét en Orphanozoaires qui n’en prénfent pai
soin. Cépendant cette distinction n’est pas strictement vraie
car il y a certains Poissons et certains Reptiles qui pouf
voient avec beaucoup d’attention aux besoins de leur prog
niture, comme il y a des Oiseaux et des Mammiféres qu
n'en ont aucun souci. Les Invertébrés sont subdivisés ef
Sphygmozoaires, animaux qui ont un cœur ou des vaisseath
pulsatiles, et en Asphycto-Vasculaires dont les vaisseaux mi
sont pas pulsatiles. Ges deux sections sont à leur tour l’objé
d’une coupe qui donne, pour la première : les Articulés, avê
des articulations réelles et des ganglions efi chapelet, pu
les Mollusques, sans articulations et avec des ganglior
disséminés; pour la seconde: les Tubulés à intestin simpl
et les Racémifères, à intestins ramifiés. 1
Les caractères assignés par Ehrenberg à ses divisions
principales obligent nécessairement 4 admettre une grad
tion parmi les animaux. La forme sotis laquelle il expri m
les résultats de ses rcherches est par conséquent la nég:
tion de là vérité principale qu’il prétend mettre en lumiére,
SYSTÈMES ANATOMIQUES. — ÉHRENBERG. 334
1 moyen de son diagramme. Son idéé capitale, celle qué
organisation est chez tous lés anirnaux également parfaite,
ourrait être exacte; il faudrait pour cela qu’elle impliquat
im plement et clairement une perfection relative, c’est-à-dire
a chez tous, le mode d’existence est parfaitement adapté
fin, Comme aucun observateuf n’a plus contribué à faire
naître la structure compliquée d’une légion d'êtres regar
és par tout le monde, avant lui, comme ne consistant qu’en
ne masse gélatineuse homogène, c’est là une idée qu’on
uvait naturellement attendre d’Ehrenberg. Mais la perfec-
ion ainsi définie n’est pas du tout ce qu'il conçoit. Il ne
3 pas le moins du monde faire nattre l’idée que tous les
i
tax sont également parfaits, chacun à $4 manières il
blit au contraire nettement que: « les Infusoires ont la
me somme de systèmes organiques que l'Homme », et
fisemble de son système a pour but de faire ressortir éner-
uement cette manière de voir. C’est spécialement d’après
tte donnée fondaimentale qu’il place l'Homme à part et en
ehors des animaux, non pas simplement comme classé,
jais comme division du degré supérieur.
Le principe de classification adopté par Ehrenberg est pu-
ement anatomique. L’idée de type est laissée tout à fait de
ôté; on le voit à la façon dont l’auteur dispose ses classes.
ses Myeloneurés, il est vrai, correspondent à l’embranche-
nent des Vertébrés, et les Sphygmozoaires à ceux desArticulés
+ des Mollusques ; mais s’ils sont réunis, ce n’est pas à cause
u plan typique de leur structure, c’est seulement parce que les
uns et les autres ont un cœur ou des vaisseaux pulsatiles, le
Corps étant, ou non, articulé. La division des Tubulés rend
plus évident encore à quel point il est tenu peu compte du
plan structural, car cette section réunit des Rayonnés (les
Echinoides et les Dimorphes), des Mollusques (les Bryo-
Zoaires) et des Articulés (les Turbellariés, les Nématoïdes
et les Rolifères), combinés en un groupe unique en raison
e ce seul fait: qu’ils ont des vaisseaux privés de la fa-
lié de battre et un intestin en forme de sac ou de tube
imple. Les Racémiféres comptent, eux aussi, des animaux
332 DE LA CLASSIFICATION.
construits sur des plans différents et qui n’ont été rapproché
qu'à cause de la structure particulière de leur intestin bi
furqué, ou rayonné, ou dendritique, ou en grappe.
Les limites assignées par Ehrenberg à plusieurs de sé
classes sont tout à fait contestables, lorsqu’on les soumet a
contrôle des principes précédemment discutés. Un gran
nombre d’entre ces classes sont positivement fondées sur de
caractères d’ordre et non pas sur des caractères de classé
Cela est particulièrement évident pour les Rotiféres, les So
matotomés, les Turbellariés, les Nématoïdes, les Trématode
et les Planaires, qui tous appartiennent à l’embranchemer
des Articulés. Les Tuniciers, les Aggrégés, les Brachiopode
et les Bryozoaires ne sont non plus que des ordres de la class
des Acéphales. Avant que les Echinodermes n’eussent ét
étudiés aussi complétement qu’ils l'ont été depuis peu, la st
paration des Echinoïdes et des Astéroïdes pouvait semble
justifiable. Aujourd’hui elle est tout à fait inadmissible
Leuckart lui-même, qui considère les Echinodermes comm
un embranchement distinct du Règne animal, insiste sur |
nécessité de les réunir en un groupe naturel. Quant au
Dimorphes, ils constituent un ordre naturel de la classe de
Acalèphes, généralement connu sous le nom d’Hydroides. .
Classification de Burmeister.
Le diagramme qui suit a été formé d’après le Geschichte der Schonfng
de l’auteur, Leipzig, 1843, in-8
Type I. ANIMAUX IRRÉGULIERS.
1e sous-type. CI. 1. Imfusoria,
Type II. ANIMAUX REGULIERS.
2° sous-type. Cl. 2. Polypina. Ord. Bryozoa, Anthozoa.
3° sous-type. Cl. 3. Radiata. Ord, Acalephe, re
Scytodermata.
|
{
;
A° sous-type. Cl, 4. Mollusea. Ord. Perigymna (Tuniciers),
mopoda (Acéphales), Brachiopoda, Ceph
phora (Ptéropodes et Gastéropodes), ci
lopoda,
Type IL. ANIMAUX SYMETRIQUES. à
\
SYSTEMES ANATOMIQUES. — BURMEISTER. 333
5° sous-type. Arthrozoa.
CI. 5. Vermes. Ord. Helminthes, FROSROUSE et
Annulati.
Cl. 6. Crustacea : 4° Ostracoderma. Ord. Prothes-
mia (Cirripédes, Siphonostomes et Rotiféres) ;
Aspidostraca (Entomostracés, Lophyropodes,
Phyllopodes, Pæcilopodes, Trilobites). — 2° Ma-
lacostraca. Ord. Thoracostraca (Podophthalmes),
Arthrostraca (Edriophthalmes).
Cl. 7. Anacunova. Ord. Myriapoda, Arachnidæ.
Cl. 8. IxsecrA.Ord.Rhynchota, Synistata, Antliata,
Piezata, Glossata, Eleutherata.
_ 6° sous-type. Osteozoa (Vertébrés).
F Cl. 9. Prsces.
À CI. 10. AmPHIBIA.
| Cl. 44. Aves. -
Cl. 42. MamMAria.
| L'arrangement général de la classification de Burmeister
appelle celui du système de De Blainville, mais l’ordre est
nverse. Les trois types de notre auteur correspondent aux
rois Sous-Règnes de De Blainville : les Animaux Irréguliers
ont les Hétérozoaires, les Animaux Réguliers les Actino-
ouires, et les Animaux Symétriques les Artiozoaires. Quant
x Sous-Types des Animaux Symétriques, ils correspondent
ux types admis par De Blainville parmi ses Artiozoaires, avec
élle importante amélioration, toutefois, que les Malento-
oxires sont supprimés. Burmeister est moins heureux en ré-
uisant l’embranchement tout entier des Mollusques à une
Be unique. Les Arthrozoaires, au contraire, dans l’étude
squels il a rendu d’éminents services à la science, sont
jrésentés sous leur vrai jour. Dans les ouvrages spéciaux
le l’auteur (4), sa classification des Articulés est donnée avec
lus de détails. Je ne mets pas en doute que les idées
rés-justes qu’il manifeste, à l'égard de la place des Vers dans
(1) Beitrüge zur naturgeschichte der Rankenfüsser (Cirripédes). Berlin,
834, in-4. — Handbuch der Entomologie. Berlin, 1832-1847, 5 vol. in-8 ;
yersion anglaise, par W. E. Shuckard. Londres, 1836. — Die Organisation der
lobilen, aus ihren Verwandten Entwickelt. Berlin, 1843 ; version anglaise, par
a Roy, Society. Londres, 1847. — Zoonomische Briefe, allgemeine Darstellung
ler thierischen Organisation. Leipsig, 1856, 2 vol. in-8.
BETA DE LA CLASSIFICATION.
l’embranchement des Articulés, ne soient la conséquence
sa profonde connaissance des Crustacés, des Insectes et
leurs métamorphoses.
Classification d’ Owen.
Sena Er din des Ce
Le diagramme ci-dessous est tiré des Lectures on the Comparative Anatomy as
Physiology of the Invertebrate Animals, 2° édit., Londres, 1855, in-8, :
Proyince. VERTEBRATA. Myelencephala (Owen).
Cl. Mammatta.
Cl. Aves.
Cl. REPTILIA.
Cl. Pisces. Ord. Dermopteri, Malacopteri, Pharyngognathi, il
canthini, Anacanthopteri, Plectognathi, Lophobranchii, G
noidei, Protopteri, Holocephali, Plagiostomi.
Province. ARTICULATA. Homogangliata (Owen). i
Cl. Aracunipa. Ord. Dermophysa, Trachearia, Pulmotrachear
Pulmonaria.
Cl, Insecta. Sous-classe : Myrtapopa. Ord. Chilognatha et cul
poda. l
— Hexapopa. Ord. Aptera, Diptera, Le
doptera, Hymenoptera, Homopte
Strepsitera, Neuroptera, Orthoptet
Coleoptera. q
Cl. CrusracEA. Sous-classe : Enromosrraca. Ord. Trilobites, 2
phosura, Phyllopoda, Cladocera,
tracopoda, Copepoda. ‘4
aoe Matcacosrraca : 4° Edriophthalma. Of
Læmodipoda, Isof
da, Amphipoda. ©
2° Podophthalma. Or
Stomapoda,
poda.
Cl. Epizoa. Ord. Cephaluna, Brachiuna, Onchuna. |
Cl. AnxeLLaTA. Ord. Suctoria, Terricola, Errantia, Tubicola. 4
Cl. CrrrrpenrA. Ord. Thoracica, Abdominalia, Apoda. 1
Province. MOLLUSCA. Heterogangliata (Owen).
Cl. Cepaaropona. Ord. Tetrabranchiata et Dibranchiata. À
Cl. Gasrerorona. A. MonœciA : Ord. Apneusta (Kôll.), Nudib
chiata, Inferobranchiata, Tectibranchia
Pulmonala. a
B, Diæcra 4 Ord. Nucleobranchiata, Tubu
à
SYSTEMES ANATOMIQUES. — OWEN. 335
branchiata, Cyclobranchiata, Scutibran-
chiata, Pectinibranchiata. .
Cl. Preropopa. Ord. Thecosomata, Gymnosomata.
CI. LawgcriBRANCHIATA. Ord. Monomyaria et Dimyaria.
Cl, Bracuiopopa. Des familles et point d’ordres.
C1, Tunicara. Ord. Saccobranchiata, Tæniobranchiata.
_ Sous-province. RADIARIA (4).
_ Gl, Ecuinopenmara, Ord, Crinoidea, Asteroidea, Echinoidea, Ho-
lothurioidea, Sipunculoidea,
Cl. Bryozoa. Des familles seulement.
Cl. Anrnozoa. Des familles seulement.
Cl. AcaLepuz. Ord. Pulmograda, Ciliograda, Physograda.
Cl. Hyprozoa. Des familles seulement.
EL Sous-province. ENTOZOA. 3
Cl. Caretuintna. Ord. Gordiacea, Nematoidea, Onchophora.
Cl. Srerecmintua. Ord, Tænioidea, Trematoda, Acantocephala,
— Turbellaria.
_ Sous-province. INFUSORIA.
Cl. Rorirera. Rien que des familles.
Cl. Potyeastria. Ord. Astoma, Stomapoda. — Rhizopoda.
» La classification qui sert d’introduction aux « Lectures »
’Owen (2) sur l’anatomie comparée est trés-instructive.
ile fait, plus que les autres systèmes modernes, nettement
essortir la fâcheuse prépondérance que la considération
es complications de la structure a prise de nos jours sur
idée de plan. Les provinces d’Owen répondent bien, il est
rai, pour ce qui est essentiel, aux embranchements de
juvier, mais il y a cette différence bien marquée : Owen
_ {4) Dans la première édition de l’ouvrage (1843), les sous-provinces Radiaria,
ntozoa, Infusoria, ne forment qu’un seul sous-règne appelé Radiata, par
josition aux sous-règnes Mollusca, Articulata, Vertebrata, et ce sous-régne
t subdivisé en deux groupes, les Nemaloneura et les Acrila.
(2) J'ai donné à la classification d’Owen la priorité sur celles de von Siebold
Stannius, de Milne-Edwards, de Leuckart, etc., parce que la première édition
Lectures on comparative anatomy a été publiée en 1843. Mais en analysant
système tel qu’il est figuré dans le diagramme ci-dessus, il importe d’ayoir
sent à l'esprit que, dans sa première édition, Owen n'a considéré que les
asses seulement ; les ordres et les familles ont été ajoutés plus tard, en 1855,
is une seconde édition, Je fais cette remarque simplement pour qu'on ne
isse se méprendre et attribuer à Owen toutes les subdivisions de la classe
ises par Jui et qui ne figureraient pas dans les systèmes examinés ayant le
336 DE LA CLASSIFICATION.
ne veut pas reconnaitre pour les Rayonnés une province de
valeur égale a celle des Mollusyues, des Articulés et des
Vertébrés; il admet les Radiaires, mais comme sous-pro:
vince seulement et sur le même niveau que les Entozoaire:
et les Infusoires. Évidemment, ici, l’idée de la simplicité de
structure prévaut sur celle de plan, car les sous-province:
des Radiaires, des Entozoaires et des Infusoires contiennent
à côté des vrais Rayonnés, les types les plus humbles d
deux autres embranchements, celui des Mollusques et celu
des Articulés. D'un autre côté, ces trois sous-provinces cor:
respondent aux trois premiers types de Von Siebold; le
Infusoires d’Owen (1) comprennent les mêmes animaux qui
les Protozoaires de von Siebold ; les Entozoaires (2) de ce
lui-là sont les Vers de celui-ci; les Radiaires du premier son
les Zoophytes du second; à cette seule exception près qui
Owen rapporte les Annelés à la province des Articulés, tan
dis que Siebold les range parmi ses Vers. A part cela, le
types des Mollusques et des Articulés de ces deux anato
mistes distingués sont en parfaite conformité. La situatio
assignée par Owen aux provinces des Articulés et des Mol
lusques, l’une à côté de l’autre (3) et non pas l’une au-des
sus de l’autre, a sans doute pour but d’exprimer la convic
tion où il est que la complication de structure, chez ce
deux types, ne saurait étre une raison plausible de donne
soit à l’un, soit à l’autre, le rang inférieur ou le supérieur
Et cela est très-exact.
Plusieurs groupes dont les auteurs précédents ont fait de
ordres ou des familles sont, ici, considérés comme classes
Ainsi la classe des Epizoaires d’Owen, qu’il ne faut pas con
fondre avec celle que Nitzsch a instituée sous la méme dé
(1) Les Rhizopodes sont considérés comme un groupe de valeur égale à ceu
des Rotifères et des Polygastriques, à la page 16 des Lectures, mais, à la page as
ils sont placés comme un sous-ordre des Polygastriques.
(2) Les Turbellariés sont représentés comme un groupe indépendant à |
page 16, et rapportés aux Trématodes, comme sous-ordre, à la page 418.
(3) Faute d’espace, j’ai été forcé, en reproduisant la classification d’Owé
dans le diagramme qui précède, de placer les provinces des Articulés et di
Mollusques à la suite l’une de l’autre; mais conformément à ce point de vu
elles doivent être placées au même niveau et côte à côte.
SYSTÈMES ANATOMIQUES. — OWEN. 337
omination, répond exactement a la famille dite des Lernées
e Cuvier. Sa classe des Hydrozoaires équivaut à l’ordre des
[ydr oides de Johnston et est identique avec celle dite des
imorphes, d’Ehrenberg. Ses Coelelminthes sont le pendant
e l’ordre des Intestinaux Cavitaires institué par Cuvier,
n y ajoutant le Gordius; tandis que ses Sterelminthes ont
a même portée que l’ordre des Intestinaux Parenchyma-
eux de l’auteur français. Généralement parlant, le lecteur
e doit pas croire que les divisions secondaires mentionnées
ar les différents auteurs dont j'ai analysé ici les systèmes
ient été établies par eux. Elles sont fréquemment emprun-
ées aux résultats obtenus par les observateurs dont l'étude
“spécialement porté sur des classes isolées ; mais ce serait
le laisser entraîner trop loin que d’entrer ici dans la dis-
ussion de tous ces détails.
_ La ressemblance de plus en plus grande que présentent
es systèmes zoologiques modernes est d’un heureux augure.
serait, en effet, grandement se méprendre que de l’attri-
juer uniquement à l'influence des auteurs les uns sur les
utres. Loin de là, cette ressemblance provient en très-
tande partie de ce que la nature nous est mieux connue.
à observateurs qui sont parfaitement au niveau de l’état
Ctuel de la science possèdent nécessairement à peu près la
ème somme de connaissances; il est, dès lors, évident
e leurs manières de voir ne peuvent plus différer autant
le si chacun d’eux n’était familier qu’avec une partie
ulement de son sujet. Une connaissance approfondie du
égne animal doit, finalement, produire la conviction que la
Che des zoologistes n’est pas du tout d'introduire l’ordre
irmi les animaux, mais que le but le plus élevé qu'ils
lissent atteindre est tout simplement de /ire les affinités
relles existant entre les êtres; si bien que plus notre
Mnaissance embrassera étroitement le champ entier de la
Cherche scientifique, plus parfaite sera la coïncidence de
iS Opinions.
on à la valeur des classes adoptées par Owen, je ferai
22
338 DE LA CLASSIFICATION:
desquelles luismême est bon juge, ont prouvé que ses Ci
ripèdes et ses Épisoaires sont de vrais Crustacés, ét que |
Entozoaires ne peuvent pas être plus longtemps tenus à ui
aussi grande distance des Annelés que celle où les place st
système. Pour ce qui est des autres classes, je renvoie.
lecteur à mon examen critique des anciens sywicenes et à |
première séction de cé chapitre. |
M. Milne Edwards est l’auteur d'une classification qu’il
récemment présentée comme l’expression de ses vues a
tuelles sur les affinités naturelles des animaux} or, ce m’eé
une grande satisfaction de découvrir que la maniére de yo
que j’ai moi-même soutenue dans les précédentes pages ¢
ce livre, sur les rapports naturels des principaux grou
du Règne animal, est en parfait accord avec le système
ce zoologiste distingué. C’est le seul auteur original qui a
dans ces derniers temps, donné son approbation sans réser
aux divisions primaires d’abord proposées par Cuvier, to
en admettant, bien entendu, dans les groupes d’un rang §
condaire les rectifications rendues nécessaires par les pr
grès auxquels il a, pour sa part, si largement contribué.
Quant aux classes adoptées par M. Milne Edwards, j
peu de chose à ajouter à ce que j'ai déjà déclaré précéde
ment à propos des autres classifications. Bien que lidée
plan ait reconquis chez lui limportance qu’il convie
celle de la complication de structure exerce encore tf
d’influence sur l’auteur, C’est au point qu’elle l'amène à ct
sidérer comme classes des groupes d'animaux qui differ
seulement en degrés et ne constituent par conséquent ¢
des ordres. Telles sont, à n’en pas douter, ses classes |
Molluscoïdes et celles des Vers, ainsi que les Myriapode
les Arachnides. Pour ce qui est des poissons, je renvoi
mes remarques de la première section de ce chap!
(p. 308), 4
SYSTÈMES ANATOMIQUES. — MILNE EDWARDS. 339
Classification de Milne Edwards.
a nn
ediagramme qui suit est extrait du Cours élémentaire d'histoire naturelle,
Paris, 1855, in-12, 7° édit., où l’auteur a présenté les frésultats de ses
‘recherches surla classification des Vertébrés et des Articulés.;Voyez aussi sés
_ Mémoires sur les Polypes, les Mollusques et les Crustacés, dans les Annales
_ des Sciences naturelles.
|, OSTEOZOAIRES ou VERTÉBRÉS.
Sous-embranchement. Allantoïdiens.
Cl. Mammirires. 4° Monodelphiens, a. propres. Ord. Bimanes,
Quadrumanes, Cheiroptéres, Insectivores, Rongeurs,
Édentés, Carnivores, Amphibies, Pachydermes, Rumi-
nants. 6. pisciformes : Cétacés. — 2° Didelphiens. Ord.
Marsupiaux, Monotrèmes.
Cl. Orsraux. Ord. Rapaces, Passereaux, Grimpeurs, Gallinacés.
Échassiers, Palmipèdes.
Cl. Reprites. Ord. Chéloniens, Sauriens, Ophidiens.
Sous-embranchement : Anallantoidiens.
Cl. Barraciens. Ord. Anoures, Urodèles, Pérennibranches,
Cécilies.
Cl. Porssons. 4° Osseux. Ord. Acanthoptérygiens, Abdominaux,
Subbrachiens, Apodes, Lophobranches, Plectognates. —
2° Chondroptérygiens. Ord. Sturioniens, Sélaciens, Cy-
clostomes.
. ENTOMOZOAIRES ou ANNELES.
Sous-embranchement. Arthropodes.
Cl. Instcres. Ord. Coléoptères, Orthoptéres, Névroptères, “a
ménoptéres, Diptères, Rhipiptéres, Anopleures, Thysa-
noures.
Cl. Myriapopes. Ord, Chilognates, Chilopodes.
Cl. Aracuniwes. Ord. Pulmonaires, Trachéennes.
Cl. Crusracts. 1° Podophthalmes. Ord. Décapodes, vey
podes. 2° Édriophthalmes, Ord. Amphipodes, Lémodi-
podes, Isopodes. 3° Branchiopodes. Ord. Ostrapodes, Phyl-
lopodes, Trilobites. 4° Entomostracés. Ord. Copépodes;
Cladocères, Siphonostomes, Lernéides, Cirripèdes. 3° Xi-
phosures.
_ Sous-embranchement. Vers,
Cl. ANNÉLIDES.
340 DE LA CLASSIFICATION.
Cl. HELMINTHES.
Cl. TuRBELLARIES.
Cl. Cesroipes.
CI. ROTATEURS.
If]. MALACOZOAIRES ou MOLLUSQUES.
Sous-embranchement, Mollusques, p. d.
Cl, CÉPHALOPODES.
Cl. PréÉRorODES.
Cl. GASTÉROPODES.
Cl. ACÉPHALES.
Sous-embranchement, Molluscoïdes.
Cl. Tunicters.
Cl. BRYOZOAIRES.
IV. ZOOPHYTES.
Sous-embranchement. Radiaires OU Rayonnés.
Cl. ÉCHINODERMES.
Cl. ACALEPHES.
Cl. PoLYPEs.
Sous-embranchement. Sarcodaires,
Cl. INFUSOIRES.
Cl. SPONGIAIRES.
Classification de von Siebold et Stannius.
Cette classification est adoptée dans l’ouvrage de ces deux auteurs, Lehrbuc
der vergleichenden Anatomie, Berlin, 1845, 2 vol. in-8; une deuxièm
édition a été publiée en 1854-56.
EVERTEBRATA.
I. PROTOZOA.
Cl. 4. Inrusorra. Ord. Astoma et Somatoda.
Cl, 2. Rurzopopa, Ord. Monosomatia et Polysomatia.
Il. ZOOPHYTA.
Cl. 3. Potypr. Ord. Anthozoa et Bryozoa.
Cl. 4. Acatepu&, Ord. Siphonophora, Discophora, Ctenophora.
Cl. 5. Ecurnopermata. Ord. Crinoidea, Asterioidea, Echinoides
Holothurioidea et Sipunculoidea.
be
‘ SYSTÈMES ANATOMIQUES. ——- SIEBOLD ET STANNIUS. 344
I. VERMES.
| Cl. 6. Hetwintues. Ord. Cystici, Cestodes, Trematodes, Acantho-
B cephali, Gordiacei, Nematodes.
| Depuis la.publication du Lehrbuch, etc., Siebold a introduit de
très-importantes améliorations dans la classification des Vers et
4 beaucoup ajouté à ce que l’on savait de ces animaux.
LÀ CI. 7. Tunpeutanir. Ord. Rhabdoceeli, Dendroceeli.
Cl. 8. Roratori. Point d’ordres.
Cl. 9. AnnuLati. Ord. Apodes et Cheetopodes.
| MOLLUSCA.
Cl. 40. Acepnata. Ord. Tunicata, Brachiopoda, Lamellibran-
4 chiate.
. Cl. 44, Ceparopnora, Meck. (Gastéropodes). Ord. Pteropoda,
4 Heteropoda, Gasteropoda.
- Cl. 42. Cepnatopopa, Point d’ordres.
À ARTHROPODA.
CI. 13. Crustacea, Ord. Cirripedia, Siphonostoma, Lophyropoda,
Phyllopoda, Peecilopoda, Læmodipoda, Isopoda, Amphi-
poda, Stomapoda, Decapoda, Myriapoda.
Cl. 44. AracaniDA, Les ordres n’ont pas reçu de noms.
Cl. 15. Insecra. a. Ametabola. Ord. Aptera. -- b. Hemimetabola.
Ord. Hemiptera, Orthoptera. — c. Holometabola. Ord.
Diptera, Lepidoptera, Hymenoptera, Strepsitera, Neu-
roptera, Coleoptera.
ig
f VERTEBRATA.
|. VERTEBRATA.
4 cl. 16. Pisces. Sous-classes : 1'¢, Leptocardii; 2°, Marsipobran-
i chit; 3°, Elasmobranchii, Ord, Holocephali, Plagiostomi ;
a, Guiiotdes, Ord. Chondrostei, Holostei; 5°, Teleostei,
Ord. ‘Acanthopteri, Anacanthini, Pharyngognathi, Phy-
M sostomi, Plectognathi, Lophobranchii : 6°, Dipnoi.
‘a se 17, Repriia. Sous-classes : 1°, Dipnoa, Ord. Urodela, Ba-
à trachia, Gymnophiona ; 9e Monopona: a. Streptostylica,
Ord. Ophidia, Sauria; b. Monimostylica, Ord. Chelonia,
Crocodila (1).
M) Les subdivisions des classes des Poissons et des Reptiles ont été copiées
is la seconde édition (1854-1856), où le classement de Müller pour les Pois-
Ms est adopté. Celui des Reptiles est en partie l’œuvre de Stannius. (Les classes
bes et Mammalia n’avaient point encore été publiées quand parut la deuxième
ion de ce livre, — N. du T.)
342 DE LA CLASSIFICATION.
Cl. 18. Aves.
Cl. 19. MAMMALIA.
Le trait le plus original de la classification de von Siebold
c’est l’adoption des deux types: Protozoaires et Vers, défini
de la manière qu’ils le sont ici. Le type dés Vers est sorti de
investigations des helminthologistes qui, trop exclusivemen
engagés dans l'étude des Vers parasites, ont négligé les rap
ports de ces êtres avec les autres Articulés. D’un autre côté
l'isolement où beaucoup d’entomologistes sont demeurés
l'égard des zoologistes en général a contribué, sans aucu:
doute, à rendre tardive cette comparaison étroite entre le
Vers et l’état larval des Insectes, sans laquelle il est bie:
difficile d'apprécier véritablement l'identité typique des Vers
des Crustacés et des Insectes. Pour ce qui est des classe
adoptées par von Siebold (1) et Stannius, je n'ai à faire au
cune mips mer que je n’aie faite déjà.
Classification de R. Leuckart.
La classification de Leuckart est tirée de l’ouvrage suivant ; Ueber die Morph
logie und die Verwandtschaftsverhiltnisse der wirbellosen Thiere. Re
1848, 4 vol. in-8.
I. COELENTERATA, Lkt.
Cl. 1. Pozvrr. Ord, Anthozoa et Cylicozoa (Lucernaires).
Cl. 2. Acarepu. Ord. Discophoræ et Cténophoræ. $
Il. ECHINODERMATA, Lkt.
Cl. 3. PeLwarozoa, Lkt. Ord. Cystidea et Crinoidea. F3
CI. 4. Acrinozoa, Latr. Ord. Echinida et Asterida. 1
Cl. 5. Scyropermata, Brmst. Ord. Holothuriæ et Sipunclida. —
Ill. VERMES. q
Cl. 6. AnenrenaTt, Lkt. Ord. Cestodes et Acanthocephali ae
thintlies, Brmst).
(1) Les dénominations de ces types, Protozoaires, Vers, sont plus ancient
que leur délimitation dans la classification de Siebold. Le mot de Protozoa
que Goldfuss a, le premier, introduit dans le langage scientifique, a été em )
avec différentes acceptions pendant près d’un demi-siècle; celui de Vers a,
_ pour la première fois adopté par Linné pour désigner une grande divisio
règne animal, mais avec une signification tout à fait différente,
SYSTÈMES ANATOMIQUES. ~~ LEUCKART. 343
| Cl. 7, Apones, Lkt. Ord. Nomertini, Turbellarii, Tremätodes et
Hirudinei (Trematodes, Burm.),
CL 8. Ciciani, Lkt. Ord. Bryozoa et Rotiferi.
| Cl. 9. Annetipes. Ord. Nematodes, Lumbricini et Branchiati
(Annulati, Burm., à l'exclusion des Nemertini et Hiru-
* dinei).
ÿ, ARTHROPODA.
Cl. 10. Crustacea. Ord. Entomostraca (Neusticopoda, Car.) et
Malacostraca.
ql. 14, Insecra. Ord, Myriapoda, Arachnida (Acera, Latr.), Hexa-
È poda,
| MOLLUSCA, Guy. (Palliata, Nitzch).
Cl. 12. Tunicara. Ord. Ascidiæ (Tethyes, Sav.) et Salpæ (Thalides,
Say.) (1).
Cl, 13, AcepuaLa. Ord, Lamellibranchiata (Cormopoda, Nitzch.,
Pelecypoda, Car,) et Brachiopoda,
Cl. 44. Gasrehorona, Ord, Heterobranchia (Pléropodes, Inféro-
branches et Tectibranches), Dermatobranchia (Gymno-
branches et Phlébentérés), Heteropoda, Ctenobranchia,
Pulmonata et Cyclobranchia.
Cl. 15. CepHaLopopa,
1 |, VERTEBRATA (Leuckart ne s'en occupe point).
_ Je n’ai pas besoin de répéter ici ce que j'ai déjà dit, dans
à première section, à l'égard des divisions primaires adop-
os par Siebold et Leukart, Quant aux classes, je puis ajouter
jue les trois classes d’Echinodermes de Leuckart ne présen-
ent que des caractères d’ordre. A part les Oiseaux et les
éphalopodes, il n’y a pas une classe aussi bien définie que
elle des Echinodermes et aussi peu susceptible d’être frac-
lionnée en groupes mineurs présentant quelque chose de
ynblable aux caractères de classe, Les systèmes orga-
iques offrent chez ces êtres des homologies si étroites
(voy, p. 302) que, pour entreprendre de les subdiviser en
“ois classes, Leuckart a dû admettre comme classes des
roupes qui fournissent seulement les caractères de l’ordre,
(1) Leuckart incline tant soit peu à considérer les Tunicata non pas sim-
nent comme une classe, mais même comme un autre grand type ou em-
mchement intermédiaire entre les Echinodermes et les Vers.
344 DE LA CLASSIFICATION.
c’est-à-dire des degrés différents de complication dans
la structure. La méme observation est également fondée
a l’égard de ses classes de Vers. L’arrangement de ces
animaux proposé par Burmeister est certainement plus con-
forme aux faits que ceux de von Siebold et de Leuckart, d’au-
tant qu'il rapporte déjà et à bon droit les Rotiféres à la
classe des Crustacés et ne veut pas, comme Leuckart, réunir
les Bryozoaires et les Vers. Je suis d’accord avec Leuckart quant
4 la convenance de séparer les Nemertins et les Hirudinés
des vrais Annélides, mais Burmeister fait une appréciation
plus exacte de la position à attribuer au type tout entier des
Vers, puisqu’avec De Blainville il le reporte à l’embrançche-
ment des Articulés.
Le défaut commun à toutes les classifications qui ont été
proposées depuis Cuvier est, d’abord, d’avoir abandonné plu:
oumoins complétement l’idée du plan de structure, idée admi
rablement développée par Cuvier, et sur laquelle il n’a cesst
d’insister avec une confiance croissante et une conscience
de plus en plus nette de sa valeur, depuis 1812; ensuite
d’avoir fréquemment laissé l’idée de complication de struc
ture l’emporter sur tous les autres traits plus généraux dt
plan. Pour apprécier convenablement ces traits, il faut, iles
vrai, une connaissance de la structure du règne animal tou
entier, autrement profonde que celle qui suffit à l investiga
tion des caractères anatomiques de types particuliers.
Cependant, qu’on jette sur tous ces systèmes un coup d’œi
rétrospectif, qu’on examine avec attention les plus récent
d’entre eux et, pour peu qu’on soit bien au fait des vues qu
ont cours actuellement dans notre science, on ne manquer:
pas de reconnaître que, après un demi-siècle d'expérience
l’idée d’embranchements caractérisés par la différence de
plans de structure a prévalu, comme expression des vérita
bles rapports existant entre les animaux, sur celle de gra
dation réunissant tous les animaux en une seule série pro
gressive. Or, si l’on réfléchit que cette idée s’est fait jour:
travers les vues les plus contradictoires sur la classification, €
même en l'absence de tout principe régulateur, il faut bier
LES PHYSIOPHILOSOPHES. 345
convenir que cela ne peut être dû qu'à la vérité intrinsèque
du jugement pour la première fois émis par Cuvier. On
découvre dans les classifications de Siebold, de Leuckart et
des autres le triomphe de la grande conception du natura-
liste français, malgré toute la différence qu "il y a entre leurs
systèmes et le sien. La question de principe en effet n’est
as de savoir s’il y a quatre grands plans, s’il n’y en a que
trois ousilyena davantage, ni si ces plans sont circonscrits
de telle ou telle manière ; c’est là une simple affaire de soin
et de pénétration de la part de l'observateur. Aussi je main-
tiens que la première ébauche de Cuvier, avec toutes ses
imperfections de détail, offre un tableau des rapports essen-
iels existant entre les animaux plus conforme à la nature que
rs classifications en apparence plus correctes des écrivains
modernes.
. V
| | Systèmes physiophilosophiques.
_ Vers le temps où Cuvier et les naturalistes français décri-
Dent la structure du Règne animal et entreprenaient d’en
faire la base d’un système naturel de zoologie, il se formait
en Allemagne, sous la direction de Schelling, une école phi-
losophique qui étendait sa puissante influence sur toutes les
branches des sciences physiques. Oken, Kieser, Bojanus,
Spix, Huschke et Carus sont les plus remarquables parmi
les naturalistes qui appliquérent la philosophie nouvelle à
Pétude de Ja Zoologie. Mais aucun d’eux n’a, au même degré
qu'Oken, incorporé les vues de l'école aux résultats de
Pétude de l’histoire naturelle.
» Aujourd’hui, le courant repousse avec violence tout ce
Qui rappelle les physiophilosophes allemands et ce qu'ils
Ont fait; il est de bon ton d’en dire du mal. L'obligation
n’en est que plus i impérieuse, pour qui veut faire l’histoire
impartiale de la science, de montrer combien grande et
bienfaisante fut l'influence d’Oken sur les progrès de la
Science en général et sur ceux de la Zoologie en particulier.
at “a
346 DE LA CLASSIFICATION.
Il est d’ailleurs bien plus facile de lui emprunter ses idées,
tout en se moquant de son style et de sa nomenclature,
que de découvrir le sens véritable de ce que ses formules
presque toujours paradoxales, sentencieuses ou aphoristi-
ques laissent inexpliqué. Mais l’homme qui a changé du
tout au tout la méthode d'étude de l’ostéologie comparée,
l’homme qui a porté une investigation profonde dans l’em=
bryologie des animaux supérieurs, en un temps où un petit
nombre seulement de physiologistes prêtaient attention à
cette matière; celui qui a classé les trois régnes de la nature
d’après des principes qui n ‘appartiennent qu’à lui, qui a
aperçu chez les êtres organisés des milliers d’homologies et
d’analogies entiérement méconnues auparavant; l’homme
qui a publié sur l’histoire naturelle un traité considérable,
résumé substantiel de tout ce qu’on savait au jour de sa
publication; celui qui a dirigé pendant vingt-cinq ans le
journal des sciences naturelles le plus complet qui ait
jamais été publié, y enregistrant avec une scrupuleuse
fidélité toutes les découvertes faites pendant un quart de
siècle ; le savant qui a su inspirer à tous les étudiants qui
l'ont approché un ardent amour pour la science et une sin-
cére admiration pour le maitre; cet homme-là ne doit pas
être oublié, et les services qu AY arendus ne doivent pas étre
dédaignés, aussi longtemps du moins que l'intelligence et
l'observation seront réunies. ‘
Classification d’Oken.
Le tableau suivant de la classification d’Oken est extrait de son Allgemeine
Naturgeschichte für alle Sitinde, Stuttgardt, 1833-42, 44 vol. in-8, t. Ie,
p. 5. On peut se rendre compte des changements qui ont été introduits dan:
ce système en comparant le Lehrbuch der Naturphilosophie du même auteur,
léna, 1809-14; 2° édit., 1831; 3€ édit., Zurich, 1843 ; — version anglaise
par la Roy-Sociely, Londres, 1847; et aussi Lehrbuch der Naturgeschichte
Leipsig, 1813; Weimar, 1815 et 1825. — Handbuch der Naturgeschicht
zum Gebrauch bei Vorlesungen, Nuremberg, 1816-20. — Naturgeschichh
für Schulen, Leipsig, 1820, et divers mémoires dans I’ Isis,
1er Degré. ANIMAUX-INTESTIN, encore appelés Animaux-Corps, ou Ani-
maux-Tact. Une cavité seulement; point de tête garnie d’un cer.
- veau; rien que le sens le moins parfait; des intestins et des ors
PHYSIOPHILOSOPHES, — OKEN. . 3h7
ganes cutanés, mais point de chair ; c’est-à-dire ni os, ni museles,
ni moelle épinière. =INVERTEBRES, Caractérisés par le déve-
loppement des systèmes organiques de la vie végétative, qui sont
ceux de la digestion, de la circulation et de la respiration. De la :
À Cycle L Animaux-digestion.— RAYoNNÉs, Caractère essentiel : rien
À de développé que l’intestin.
Cl, 4. Inrusomes (animaux-estomac). Bouche simplement garnie
de cils vibratiles,
Cl. 2. Potyprs (animaux-intestin). Bouche munie de lèvres et de
tentacules pour la préhension.
Cl. 3. Acatkenes (animaux lactescents), Corps traversé par des
tubes semblables aux vaisseaux lymphatiques.
_ Cycle Il. Animaux-circulation. = mourusques. Caractère essentiel :
; intestins et vaisseaux.
CL 4. ACÉPHALES (animaux biauriculés). Cœur membraneux a
deux oreillettes. -
Cl. 5. Gasrénopopes (animaux uniauriculés), Cœur membraneux
a une seule oreillette,
Cl. 6, CépHaLopopes (Animaux bicardiés). Deux cœurs.
Cycle Il. Animaux-respiration. = arricucés. Caractère essentiel :
intestin, vaisseaux et pores respiratoires.
Cl. 7. Vers (animaux-peau). Respiration par la peau elle-même,
ou partie de la peau ; pas de pieds articulés.
Cl. 8. Crusracés (animaux-branchies). Branchies ou tubes aériens
partant d'une peau cornée.
Cl. 9. Insecres (animaux-trachées). Des trachées intérieurement ;
des branchies au dehors, servant d'ailes.
Degré. ANIMAUX-cHAm, encore appelés animaux-téte. = VERTE-
BRÉS. Le corps a deux cavités entourées de parois charnues (0s
- et muscles), qui renferment la moelle épinière et les intestins,
Tête contenant un cerveau; sens supérieurs développés. Carac-
térisés par le développement des systèmes de la vie animale,
* spécialement du squelette, des muscles, des nerfs et des sens.
1 “oye IV. Animaux charnels proprement dits. hs non perfec-
… tionnés,
QJ. 10. Porssons (animaux-os), Squelette prédominant et extré-
mement morcelé; muscles blancs; cerveau sans circonvo-
lutions; langue dénuée d’os; nez non perforé; oreilles ca-
chées ; yeux sans paupières.
Cl. 41. Repries (animaux-muscles), Muscles rouges, cerveau sans
circonvolutions, nez perforé, oreilles sans orifice extérieur,
yeux immobiles, à paupières imparfaites,
348 DE LA CLASSIFICATION.
CI 12. OrsEaux (animaux-nerfs). Cerveau avec des circonvolu-
tions, oreilles ouvertes, yeux immobiles, à paupières impar-
faites.
Cycle V. Animaux sensuels. Tous les systèmes anatomiques et tous
les sens perfectionnés.
Cl. 13. Mamuirkres (animaux-sens), Langue ‘el nez charnus,
oreilles ouvertes, le plus souvent munies d'une conque,
yeux mobiles, avec deux paupières distinctes.
Les principes posés par Oken et dont cette classification
est, en zoologie, le résultat pratique, peuvent se résumer
ainsi : les degrés ou grands embranchements sont déterminés
par les systèmes anatomiques, par exemple par la tête et
le corps, par l'intestin, par les chairs, par les sens. De là
deux degrés dans le Règne animal. Les animaux sont, pour
ainsi dire, des parties faites vivantes du corps humain dé-
membré. Les classes d'animaux sont la représentation spé-
ciale, par des formes vivantes, des systèmes anatomiques de
l'être le plus élevé de la création.
L'Homme, dans ce système, est considéré, non pas seule-
ment comme la clef du Règne, mais encore comme le pro-
totype et la mesure de l’organisation animale. Il n'existe
rien dans le Règne qui ne soit représenté, et par une
combinaison plus parfaite, dans l’homme même. L’exis-
tence de plusieurs plans distincts de structure est ainsi
niée virtuellement. Tous les animaux sont construits sur le
patron de l’homme. Les différences qu’il y a entre eux sont
purement et simplement dues à ce qu’ils présentent soil
un seul système, soit un plus petit ou un plus grand nombre
de systèmes d’organes, d’une importance physiologique ou.
moindre ou plus “considérable, et dont le développement,
dans le corps de chacun d’eux, est ou bien exclusif ou bien
lié à celui d’un ou de plusieurs autres systèmes. Les prin-
cipes sur lesquels se fondent la classification de Cuvier et
celle d’Ehrenberg sont les uns et les autres complétement
réduits à néant. Le principe de Cuvier, qui admet dans les
Règne animal quatre différents plans de structure, est, en
effet, contradictaire avec l’idée que tous les animaux ne re~
PHYSIOPHILOSOPHES. — FITZINGER. 349
présentent pas autre chose que les organes de l'Homme. Le
principe d’Ehrenberg, qui considère tous les animaux comme
également parfaits, n'est pas moins inconciliable avec la sup-
position que tous les animaux représentent une somme iné-
gale d’organes. Or, d’aprés Oken, le corps des animaux est,
en quelque sorte, le corps de l'homme analysé ; les organes
de celui-ci vivent soit isolément, soit sous diverses combinai-
sons, à l’état d'animaux indépendants. Chacune de ces com-
inaisons constitue une classe distincte. Le Principe sur le-
quel sont fondés les ordres a déjà été exposé précédemment
(chap. II, section 3, p. 247).
. Il y a quelque chose de séduisant dans l’idée que l'Homme
est le prototype d’après lequel on doit apprécier la structure
de tous les animaux. Mais toutes les tentatives qu’on a faites
jusqu'ici, pour appliquer ce principe au Règne animal tel
qu'il est, doivent être regardées comme ayant complétement
avorté. Dans ses différents ouvrages, Oken a successivement
identifié les systèmes d'organes de l'Homme avec des
groupes différents d'animaux ; à leur tour, divers auteurs
qui admettaient le même principe de classification ont iden-
tifié ces systèmes à d’autres groupes. L'impraticabilité d'un
semblable dessein saute aux yeux lorsqu'on s’est convaincu
par les faits de l'existence de plans distincts de structure.
Mais si insensé que soit le principe général des physio-
Heures nous ne devons pas méconnaitre tout ce qu'il
a de profitable dans leurs œuvres spéciales. Les ouvrages
d’Oken, en particulier, abondent en vues originales sur les
affinités naturelles des animaux, et sa connaissance profonde
de toutes les observations de ses prédécesseurs et de ses
contemporains prouve qu’il fut un des zoologistes les plus
instruits de ce siècle,
Classification de Fitzinger.
Le diagramme est extrait du Systema replilium, de Fitzinger, Vienne, 1843, in-8.
, Provincia, EVERTEBRATA.
Animalia systematum anatomicorum yegetativorum gradum
evolutionis exhibentia.
350 DE LA CLASSIFICATION.
A. Gradus evolutionis systematum physiologicorum vegetativorum:
1. Circulus, GAsTROZOA, Ft
Evolutio systematis nutritionis : 1
a. Evolutio prævalens b. Evolutio prævalens c. Evolutio prævalens —
systematis digestionis. systematis circulationis, systematis respirationis. |
;
Cl. 4. INevsorta. CL 2. Zoopuyra. Cl. 3. ACALEPEÆ, |
i. Circulus. Puystozoa. * |
Evolutio systematis generationis : oe |
Cl. 4. VERMES. Cl. 5. RADIATA. CI, 6. ANNULATA.
B. Gradus evolutionis systematum physiologicorum senate
m1. Circulus. DERMATOZOA. |
Evolutio systemalis sensibilitatis :
OL. 7. ACÉPHAIA. Cl. 8. CEPHALOPODA. Cl. 9. Motiusca.
tv. Circulus. ARTHROZOA. Aude
Evolutio systematis motis :
F
TA
Cl. 10. Crusracea. CL 11. ARACHNOIDEA. Cl, 12. INSECTA. .
Il. Provincia, VERTEBRATA, 4
'
Animalia systematum anatomicorum animalium gradum evo
- lutionis exhibentia, i 4
A. Gradus evolutionis systematum physiologicorum vegelalivoruim
a. Evolutio systematis nutritionis, si-
mulque ossium, ,:...,..,..:.... Cl. 48. Pisces,
b. Evolutio systematis generationis, si- La
mulque musculorum....,..,..... CL 44, Reprmia.
B. Gradus evolutionis systematum physiologicorum animalium.
ce. Evolutio systematis sensibilitatis, si- LM
mulque neryorum.... ...... vo» Cl 45, AVES. ÿ
d. Evolutio systematis motûs, simulque ae à
is. chic élan MER uEt Cl. 16. MamMALTA. 4
L'idée fondamentale de la classification de Fitzinger @
la même que celle sur laquelle Oken a basé son systèm
Les divisions supérieures qu’il appelle provinces, degrés.
cercles sont, aussi bien que les classes et les ordres, consid
_ rées comme la représentation soit d’une combinaison qué
conque de systèmes d'organes, soit d’un système particuli
PHYSIOPHILOSOPHES. —+ FITZINGER. 351
‘soit même simplement d’un organe spécial. Les deux groupes
primaires, les provinces, sont les Evertébrés et les Verté-
brés. Les Evertébrés représentent les systèmes de la vie
végétative, et Jes Vertébrés ceux de la vie animale, de la
même façon que les animaux-2ntestin et les animaux+chair
dOken. Toutefois, au lieu d'adopter comme Oken les déno-
‘minations de l'anatomie pour ses divisions, Fitzinger emploie
celles qui sont le plus généralement usitées. Ses subdivisions,
ou les degrés de ses deux groupes primaires, sont fondées
sur la répétition de cette même différence, dans les limites
qui leur sont propres. Les Evertébrés dans lesquels prédo-
-minent les systèmes végétatifs sont mis en opposition avec
-ceux chez lesquels les systèmes animaux l’emportent, et la
“même distinction est encore opérée parmi les Vertébrés.
Chacun de ces degrés embrasse deux cercles tracés d’après le
développement d’un système organique particulier, etc. On
“ne doit pas s’attendre à ce que les systèmes fondés sur de
els principes puissent présenter entre eux plus de concor-
lance que les classifications basées sur les différences
“anatomiques; je demanderai cependant ce que devient le
principe lui-même, si ses prôneurs ne sont pas d’accord
sur les systèmes anatomiques qu'ils doivent donner pour
hase à leurs classes? D’après Oken, les Mollusques (Acé-
“phales, Gastéropodes et Céphalopodes) représentent le
système de la circulation; c’est ainsi du moins qu’il les en-
fisage dans la dernière édition de son système, Fitzinger,
au contraire, voit en eux les représentants du système de la
ensibilité. Oken identifie les Articulés (Vers, Crustacés et
nsectes) avec le système de la respiration ; Fitzinger fait
d’eux l’équivalent du système locomoteur, en exceptant tou-
tefois les Vers qui, réunis aux Rayonnés, sont mis par lui
en parallèle avec le système de la reproduction, etc.
| Le résultat de divergences aussi grandes est nécessairement
de faire perdre à ces systèmes toute autorité; sans nous
empécher d’ailleurs de faire cas des comparaisons heureuses
et des vues ingénieuses auxquelles les tentatives diverses
faites pour établir une classification sur pareille base ont
352 DE LA CLASSIFICATION.
conduit leurs auteurs. Il est presque superflu d’ajouter que,
outre le désaccord existant entre les systémes des différents
physiophilosophes, on observe méme des divergences nota-
bles entre les idées du méme auteur dans deux éditions dif-
férentes de son systéme. |
Prenons pour exemple de la subdivision des classes, parmi
les Invertébrés du système de Fitzinger, les Radiata (Echi-
nodermes) ; chaque série contient trois ordres.
dre série. 2e série. 8° série.
Evolutio prævalens Evolutio prævalens Evolutio prævalens
systematis digestionis. systematis circulationis. systematis respirationis,
ASTEROIDEA, ECHINOIDEA. SCYTODERMATA
(Holothurioides).
1, Encrinoidea. 1. Aprocta. 1. Synaptoidea.
2. Comatulina. 2. Echinina. 2. Holothurioidea.
3. Asterina, 3. Spatangoidea. 3. Pentactoidea.
Chez les Vertébrés, chaque classe a cing séries et chaque
série trois ordres; par exemple, pour les Mammifères, il y a:
1'e série. 2e série. 3° série.
Evolutio prævalens Evolutio prævalens Evolutio prævalens
sensûüs tactüs : sensus gustüs : sensûs olfactüs :
CETACEA. PACHYDERMATA. EDENTATA.
4. Balanodea. 1. Phocina. 1. Monotremata.
2. Delphinodea. 2. Obesa. 2. Lipodonta.
3. Sirenia. 3. Ruminantia. 3. Tardigrada.
Ae série. 5° série. :
à Evolutio prævalens Evolutio prævalens
sensûs auditüs : sensûs visiis :
UNGuICULATA. PRIMATES.
1. Glires. 1. Chiropteri.
2. Bruta. 2. Hemipitheci.
3. Feræ. 3. Anthropomorphi.
Au lieu que la reproduction des caractères d’un groupe
plus élevé soit pour Fitzenger le fondement des ordres,
PHYSIOPHILOSOPHES. — M’ LEAY. — 255
omme le voulait Oken, ce sont les séries que notre auteur
onde sur ce fait; puis il les subdivise en ordres, comme.
yn vient de le voir. Ces séries ont, d’ailleurs, avec les
systémes d’organes qu’elles sont censées représenter, encore
joins de rapport que les classes et les divisions supérieures
u Règne. Ces tentatives pour disposer de petits groupes
sn séries naturelles ne sont, à bien regarder, qu’un effort
ik mettre les cadres de nos systèmes en harmonie avec
limpression que produit sur nous un examen trés- -appro-
ondi des rapports naturels des êtres organisés. Nous
marquons partout des séries de ce genre; elles ne vont
s plus loin que les groupes d’espèces, en certains cas;
lans d’autres, elles embrassent plusieurs genres, même
jes familles entières; enfin fréquemment elles s'étendent
üusqu'à plusieurs familles. Il n’est pas jusqu'aux classes
lun même embranchement qui ne puissent présenter,
lus ou moins dislinctément, une gradation sérielle de
élte nature. Mais je n'ai pu parverir, jusqu'ici, à décou-
vrir le principe auquel ces sortes “+ rapports peuvent être
amenés, à moins que ce ne soit là complication de struc-
ture (1), ou le degré de supériorité ou d'infériorité des
aractères sur lesquels les différentes sortes de groupes
Ont eux-mêmes fondés. L’analogie joue aussi un rôle dans
a formation des séries, mais tant qu’on n'aura pas étudié
és catégories d’analogie aussi profondément que les catégo-
ies d’affinité, il sera impossible de dire dans quelle limite
nalogie existe.
Classification de M Leay.
Le grand mérite du système de M Leay (2) et, dans mon
pinion son seul titre à notre examen, c’est d’avoir appelé
1 (1) Voyez chap. 11, sect, m1.
(2 2) J'ai placé la classification de M’ Leay dans cette section, non parce qu’elle
semble à celle des physiophilosophes allemands, mais à cause de son carac-
e général et parce qu’elle est basée sur une vue idéale des affinités des ani-
| al xX. ,
AGASSIZ. 23
a
354 DE LA CLASSIFICATION.
/ortement l’attention des naturalistes sur la différence qu'il
a entre deux sortes de rapports presque toujours confondu
auparavant, la/finité et l'analogie. Ila montré que Vanalogi
consiste dans la répétition de traits semblables chez de
groupes d’ailleurs éloignés quand on s’en tient à la compa
raison des caractères anatomiques, tandis que l’affinité es
basée sur la parité des rapports de la structure. Ainsi, le
Chauves-Souris, en raison de la similitude de leur mode d
locomotion peuvent être dits les analogues des Oiseaux; le
Cétacés sont les analogues des Poissons, à cause de leu
forme et de leur mode aquatique d’existence ; et, Chauves
Souris et Cétacés sont alliés entre eux et avec les autre
Mammifères par une certaine affinité, en raison de l’identit
des traits les plus caractéristiques de leur structure. Celt
distinction importante devait nécessairement conduire à d’in
téressants résultats; jusqu’ici cependant elle n’a produit qu
des compararaisons fantaisistes émanées de ceux qui l’avaier
les premiers indiquée. Par exemple, M’ Leay suppose pou
un instant que tous les animaux d’un groupe doivent êtr
analogues à ceux de chaque autre groupe, tout en formar
un cercle par eux-mêmes. Pour réaliser cette conception
il dispose tous les animaux en groupes circulaires, de maniéi
à mettre en évidence ces analogies et il écarte les affinités
plus sensibles qui pourraient contrarier cette idée précon¢
Mais, pour qu'on ne puisse pas me soupçonner de rabaiss
le mérite de ce système, le voici présenté d’après les prop
expressions de son plus zélé admirateur, l’érudit Wm. Sw
son qui s’est complu à en faire l’exposé (1):
« Les Hore Entomologice (2), malheureusement pour le
gens studieux, ne peuvent être parfaitement entendues qi
des adeptes. Les résultats et les observations sont expos
dans des parties différentes ; le style de l’auteur est tant s¢
(1) W. Swainson, A Treatise of the Geography and Classification of anime
Londres, 1835, in-12, p. 201-205.
(2) W. S. M’ Leay, Hore ‘Entomologice ; or Essays on the annulose ani
Londres, 1819-1821, 2 vol. in-8,
PHYSIOPHILOSOPHES. — M’ LEAY. 355
au décousu, et les groupes, pour la plupart, sont plutôt in-
qués que définis. L'ouvrage, en somme, est, comme l’auteur
dit de bonne foi, une grossière esquisse des particularités .
incipales des grandes divisions du Règne et du mode pro-
able de leurs connexions, plutôt qu’une détermination rigou-
“use de ces groupes eux-mêmes ou une démonstration dé
urs affinités réelles. On ne pouvait guère espérer -davan-
ige dans l’état de la science à cette époque, et avec les dif-
cultés herculéennes que l’auteur a eu à surmonter. Cet
uvrage est devenu excessivement rare et c’est une raison de
lus pour que j'en donne, à l’occasion, des extraits au lecteur.
n comprendra mieux la théorie de M. M’ Leay en consul-
nt le diagramme qui la figure; car, ainsi que je l’ai déjà
marqué, il n’a défini aucun des groupes des Vertébrés.
ais en condensant le résultat de ses remarques, nous pour-
ns les résoudre dans les propositions suivantes : — 1° La
ie naturelle des animaux est continue; elle forme pour
insi dire un cercle ; si bien que, en partant d’un premier point
melconque et en suivant dès lors toutes les modifications
le la structure, on est imperceptiblement ramené, en passant
ar des formes nombreuses, au point d’où l’on est parti. —
2 Les groupes qui ne présentent pas cette série circulaire
e sont pas naturels. — 3° Les divisions primaires de chaque
rand groupe sont au nombre de dix, dont cinq sont com-
osées de cercles relativement plus grands, et les cinq autres
e cercles plus petits; ces derniers sont appelés osculants et
nt intermédiaires entre les premiers, qu’ils rattachent les
ms aux autres. — 4° Il y a tendance, dans les groupes qui
nt placés aux points opposés d’un cercle d’affinités, à se
riger l’un vers l’autre, — 5° Un des cinq groupes majeurs
ins lesquels chaque cercle naturel est divisé rappelle par sa
hysionomie tous les autres groupes ; ou, pour parler plus
kactement, il se compose de types qui sont la représentation
2chacun des quatre autres groupes, tout en formant par eux-
356: _. DE LA CLASSIFICATION.
diagramme ou tableau du Règne animal et j’essayerai, à l’aid
de ce tableau, d’expliquer le système plus en détail. »
MOLLUSCA.
PTEBOPODA.
\ ACEPHALA.
PREPTILIA.
g à P. RUDES- LS
m1 * . BRA « \
2 . PR. VAGINATI. \ nées AVES. |
à à ACRITA. VERTEBRATA .
<3 AGASTRIA. MAMMALIA,
CAES P. NANTES, + AMPHIBIA.
À = k « ANIMALIA. i
2a INTESTINA. PISCES.
= a
eo
AMETABOLA .
ACALEPHIDCE . MANDIBULATA .
RADIATA. ANNULOSA.
ECHINIDOE.} GRUSTACEA.
HAUSTELLATA. |
ARACHNIDCE .
FISTULIDA.
MEDUSIDOE.
STELLERIDCE.
ce)
x
co
mn
Oo
>
:
« On voit, au premier coup d’œil jeté sur le tableau ¢
dessus, que tous les animaux y sont disposés de manière
former un grand cercle, qui lui-même touche ou se rattael
à un autre grand cercle composé des plantes, au moyen d
« Êtres les moins organisés du Règne végétal ». Qu’on ex
mine ensuile les grandes parties composantes de ce cercle g
néral: on y découvre, conformément à la 3° proposition, iu
grands cercles formés par les Mollusques, les Acrites ou P
lypes, les Rayonnés ou Étoiles de mer, les Annelés ou Insecte
et les Vertébrés. Chacun d'eux passe ou s’enchaine au suiy
au moyen d’un autre groupe, beaucoup plus petit comt
étendue, mais qui forme un anneau ou cercle osculant (!
(4) Dans le diagramme original, comme dans le nôtre, les cing cercles p
bois Nise doute art Si GS
PHYSIOPHILOSOPHES. — M’ LEAY. 357
4¢ nombre total des groupes n’est donc pas de cing, comme
jeaucoup de personnes l’ont supposé à tort, mais de dix.
iela est tout à fait évident, et mon opinion sur ce point est
Pailleurs confirmée par l’auteur lui-même qui, faisant allu-
ion à ses remarques. sur l’ensemble, dit textuellement : « Les
observations précédentes sont, je le sais, loin d’être assez
approfondies ; mais elles suffisent à prouver qu’il y a dans
le Règne animal cinq grands groupes circulaires dont cha-
} cun possède une structure spéciale, et que ces premiers
groupes sont reliés par d’autres groupes osculants plus
petits, l’ensemble formant toute la province de la Zoolo-
zie. » Or, ces plus petits groupes osculants doivent être
nsidérés comme des cercles, l'auteur ayant établi ailleurs
jue « chaque groupe naturel est un cercle plus ou moins
omplet ». De fait, c’est là le 3° principe du système de
WM Leay; il a d’ailleurs éclairci le sens de ces mots
roupe naturel par le diagramme ci-dessus, où tous les ani-
ux sont renfermés dans cing grands groupes ou cercles et
ans cing autres plus petits. Prenons un de ces groupes, les
eriébrés. Forme-t-il un cercle en lui-même ? Oui, car l'au-
Mur fait entendre que les Reptiles ménent aux Oiseaux, les
iseaux aux Quadrupédes (Mammifères); les Quadrupèdes se
Sunissent aux Poissons, ceux ci aux Reptiles amphibies, et,
3 départ. Ainsi la série du groupe Vertébré est décrite et
n voit qu'elle est circulaire; donc, c’est un groupe naturel.
dilà un cas où la série circulaire peut être tracée. Cher-
ions maintenant un groupe où la série soit imparfaite, mais
Lil y ait tendance décidée au cercle ; ce sera le cas des Mol-
Sques. L'auteur s'exprime ainsi sur ce groupe: « Je n’ai pas
du tout prouvé que la disposition circulaire se maintienne
chez les Mollusques; mais il est également certain que ce
groupe d’animaux est encore un des moins connus, et rien
n'autorise pour le moment a conclure qu'il fait exception
e sont pas représentés graphiquement, mais simplement indiqués par
hes placées entre les cing grands cercles,
358 DE LA CLASSIFICATION.
» à la régle. Il semblerait incontestable que les Gastéropode
» de Cuvier reviennent sur eux-mêmes de façon à former wi
» groupe circulaire; mais les Acéphales en forment-ils w
» seul ou bien deux, c’est ce qui n’est pas exactement déter
» miné. Tout ce qu’on sait des Mollusques me porte toute
» fois à soupçonner qu’ils ne sont pas moins soumis à la le
» du cercle que les quatre autres grands groupes. » Ains
notre auteur considère les Mollusques comme un de ce
groupes qui, sans former effectivement un cercle, montrer
néanmoins une tendance à prendre cette figure, et par con
séquent sont présumés devoir être naturels. Mais pour mieu
éclaircir ce principe, revenons au cercle des Vertébré:
Comme on le voit par le diagramme, ce cercle contient cin
groupes ou cercles moindres, dont chacun peut à son tov
se résoudre en cinq autres plas petits décrits suivant |
méme procédé, La classe des Oiseaux, par exemple, se d
visera en Rapaces, Percheurs, Gaillinrnaks, Echassiers \
Nageurs, et la preuve que cette classe est un groupe nature
c’est que toutes ces divisions se touchent les unes les autre
à leurs limites, de manière à former un cercle. Nous proc
derons de la même manière, en commençant par les grou
supérieurs et en descendant jusqu” aux inférieurs, tant qu
la fin nous arriverons à ce qu’on appelle les genres, pu
ensuite à ce qu’on nomme espèces, chaque groupe, grand
petit, formant de par lui-même un cercle. Ainsi il y a d
cercles dans des cercles « des roues dans des roues » —
nombre infini de relations complexes, mais toutes régl
par un principe uniforme : la cércularité de chaque group
L'écrivain qui peut découvrir que les Quadrupèdes s’uni
sent aux Poissons, etc., et dire que Cuvier « ignorait total
ment les vrais principes du système naturel » ne mé
guére qu’on l’étudie aujourd’hui. 4
Cette tentative de représenter graphiquement les rapp
compliqués qui existent entre les animaux a eu toutefois
bon résultat. Elle a ébranlé de plus en plus la croyance en
arrangement unisériel des animaux et elle a conduit 4
construction de beaucoup de tableaux fort précieux en
EMBRYOLOGISTES. — BAER. 359
¢ wils montrent les relations multiples qu’il y a entre tous les
groupes naturels, de quelque catégorie qu’ils soient.
VI
Systèmes embryologiques.
_ L’embryologie, dans la forme qu’elle a prise depuis cin-
‘quante ans, est une science aussi complétement allemande
ue la Naturphilosophie elle-même. Elle s’éveilla à son ac-
ivité nouvelle dans le même temps que se développait la
hilosophie de la Nature. Il ne serait guère possible de.
econnaitre, à la lecture seule de ses ouvrages, l’esprit qui
Jui imprima l'impulsion; mais l’homme que Pander et
K. E. von Baer ont proclamé leur maître doit être considéré
km l’âme de ce mouvement, et cet homme c'est Ignace
E our mon | propre compte, je me souviens de l'influence que
cet homme si bienveillant et si éclairé exerca sur mes études
et sur mes débuts, pendant les quatre années que je passai
Sous son toit à Munich, de 1827 41831. C’est à lui que je
dois d’avoir été initié à tout ce que l’on savait sur le déve-
Joppement des animaux, avant la publication du grand ou-
À rage de Baer ; c’est à ses cours que j'ai appris à apprécier
] importance de ’Embryologie pour la Physiologie et la Zoo-
ogie. Les observations de Pander (1) sur le développement
du poulet dans l'œuf, qui ouvrirent la série de ces études
aiment originales sur l’'Embryologie dont l'Allemagne a le
roit d’étre fiére, ont été faites sous la direction et avec le
concours de Dollinger. Elles furent bientôt suivies des tra-
vaux plus étendus de Rathke et de Baer, en qui le monde
Civilisé reconnait les fondateurs del’ HÉÉRES ” moderne.
Lo avoir passé inaperçus des écrivains ‘systématisa-
leurs. Cependant, non-seulement ils méritent la considé-
360 DE LA CLASSIFICATION.
ration la plus attentive, mais encore on peut dire que pas un
naturaliste, excepté Cuvier, n’a émis une vue aussi pro-
fonde des véritables caractères d’un système naturel que le
grand Embryologiste, dans ses Scholien und Corollarien zu
der Entwickelungsgeschichte des Hühnchens im Eie (1). Ces
principes sont présentés sous forme de propositions générales
et non sous forme de synopsis avec nomenclature rigoureu se
et systématique. C’est pour cela, sans doute, qu’ils ont été
négligés par ceux qui se payent plus volontiers de mots que
d'idées; mais il suffira de quelques extraits pour faire voit
combien est amplement récompensé quiconque prend le
.pêine de lire ce livre. k
Les résultats auxquels K. E. von Baer avait été conduit pe r
ses études embryologiques, touchant les rapports fonda-
mentaux des animaux entre eux, s’écartaient beaucoup det
idées alors dominantes. Aussi, pour être bien compris, i
commence avec son soin et sa clarté habituels, par résume
les opinions de ceux avec qui il n’est pas d'accord. |
« Il est, dit-il, peu de manières de voir touchant les rap-
ports qui existent dans le monde organique qu’on ail aé-
cueillies avec aulant d'approbation que celle-ci : — Le
formes animales supérieures, à diverses phases du dévelop
pement de l'individu, depuis le commencement de son exis
tence jusqu'à son achévement parfait, correspondent à des
formes permanentes de la série animale; le développement!
de quelques animaux suit les mêmes lois que la série tout en:
tière des animaux; conséquemment, l'animal de l’organisa
tion la plus élevée passe, durant son développement. indivi
duel et pour tout ce qui est essentiel, à travers des phase
qui, chez des êtres moins nobles, sont l’état permanent;
bien que les différences périodiques de l'individu peuvent étr
ramenées aux différences des formes permanentes des a
Maux. » À
Ensuite, afin d’avoir pour les résultats de l'an nelle [
4 Ueber Entwickkelungsgeschichte der Thiere Beobachtung und Reflex
von D. Karl Ernst von Baer. Koenigsberg, 1828, in-/, Voven aussi Acia nov
Acad. Leop. Cæsar., vol. XIII, et Archives de eae! 4826.
EMBRYOLOGISTES. — BAER. 361
un terme de comparaison, il discute la place relative des dif-
4 férents types permanents d'animaux, et il poursuit :
- « [l importe spécialement de distinguer entre le degré de
erection de la structure et le type d’organisation. Le degré
‘de perfection de la structure animale consiste dans l’hétéro-
énéilé plus ou moins grande des parties élémentaires et dans
» la netteté des divisions d’un appareil complexe, en un mot dans
la plus grande différenciation histologique et morphologique.
à la masse du corps est uniforme, moindre est le degré
de perfection; il y a supériorité quand les nerfs et les
“muscles, le sang et le tissu cellulaire sont nettement dis-
incts. A mesure que la différence croit entre ces parties, la
ie animale développe des tendances diverses ; ou, pour être
plus exact, plus le développement de la vie animale produit
de tendances diverses, et plus les parties élémentaires que
celle vie met en jeu sont hétérogènes. La même chose est
vraie des parties isolées d’un appareil quelconque: l’orga-
nisation dans laquelle les parties d’un système entier diffèrent
davantage entre elles, et dans laquelle chaque partie a une
‘individualité, est plus haute que celle où le tout est plus
-unilorme. J’appelle type le rapport qu'il y a, au point de
| vue de leur position, entre les éléments organiques et les
organes. Ce rapport de position ne fait qu’exprimer cer-
ituines connexions fondamentales entre les tendances que
manifestent individuellement les rapports de la vie; on en
peut donner pour exemple les pôles de réception et de dé-
charge du corps. Le type est d’ ailleurs distinct du degré de
perfection; si bien que le même type peut comprendre
plusieurs degrés de perfection et, vice versd, le méme degré
de perfection peut être atteint dans plusieurs types. ‘Le
Megré de perfection combiné au type détermine tout d’abord
hb es grands gr oupes du règne animal qu’on a appelés classes(1),
et c’est à la confusion de ces deux choses que sont dues sans
ute tant de classifications erronées ; par cela même que
à (1) Il est clair, par là, que Baer a une idée très-définie du plan de struc-
ture et qu’il y est parvenu par une tout autre route que Cuvier. Il est visible
Qu'il comprend la distinction entre le plan et le mode d’exécution. Mais ses
362 DE LA CLASSIFICATION.
ces deux rapports sont évidemment distincts, il est sufti-
samment prouvé que les diverses formes animales ne pré- |
sentent pas une série unique de développement, depuis la.
monade jusqu'à l'Homme. »
Les types reconnus par Baer, sont :
1° Le type péripherique. Dans ce type, c’est entre le
centre et la périphérie que se trouvent les contrastes essen—
tiels (1); les fonctions organiques s’exécutent, en rapport d’an-
tagonisme, du centre à la circonférence, et, par conformité.
avec ce fait, l’organisation tout entière rayonne autour d’un.
centre commun. En dehors de cela, il n’existe qu’ un con-.
traste : celui entre le dessus et le dessous, et encore faible-
ment marqué ; l'opposition entre la gauche et la droite ou.
entre le devant et le derrière n’est pas du tout perceptible, et, ‘
en conséquence, le mouvement a lieu dans cette direction
unique. Comme toute l'organisation rayonne autour d’un
foyer unique, de même les centres de tous les systèmes or
ganiques sont disposés en anneau autour de ce foyer; ainsi
sont placés, par exemple, l'estomac, les nerfs, les vaisseaux
(si ces parties sont développées) et leurs ramifications qui se«
prolongent dans les rayons; ce que l’on trouve dans un
rayon est répété dans tous les autres, le rayonnement ayant
toujours lieu du centre à la circonférence et tous les rayons
ayant avec le centre le même rapport. 1
2° Le type longitudinal, comme on l’observe dans le
Vibrion, la Filaire, le Gordius, la Naïs et dans toute la séries
des Articulés. Le contraste entre les organes de réception et
ceux de décharge, qui sont placés aux deux extrémités dun
corps, domine toute l’organisation; la bouche et lanus«
sont toujours à des extrémités opposées, et, le plus sou“
a
A
vent aussi, les organes sexuels sont placés à une extré-
idées à l’égard des différents trails de structure ne sont pas du tout aussi pré
cises. Il ne distingue pas, par exemple, entre la complication de structure, bas e
de la détermination du rang à assigner aux ordres, et les voies et moyens dif”
férents de réalisation du plan, par quoi la classe se caractérise. 4
_ (A) Sans traduire ici littéralement les descriptions que Baer fait de ses types
et que j’abrége d’ailleurs considérablement, je reproduis autant que possible ses
propres expressions, {
SRE eee OE nape Pee meow ye ee ee ee eT
EMBRYOLOGISTES. — BAER. 363
mité, quoique leur orifice soit cependant, parfois, un peu
plus en avant. (Cette derniére circonstance se produit plus
fréquemment chez les femelles, où ces organes ont une
double fonction, que chez les mâles; quand les organes
sexuels des deux sexes sont éloignés de l’extrémité posté-
rieure du corps, leur orifice est d'ordinaire plus en avant
chez la femelle que chez le mâle, il en est ainsi chez les my-
rene. et chez les Crabes; les Sangsues et les Vers de terre
ne sont, à cet égard, qu une exception peu commune.) Le
pole ‘one ayant ainsi une situation fixe et définie, les
organes des sens, intermédiaires du système nerveux pour
la réception, atteignent promptement un important degré
de perfection. Le canal intestinal, les troncs vasculaires et le
système nerveux s'étendent dans toute la longueur du
corps, et tout le mouvement organique a la même direction
dominante. Toutefois, des branches subordonnées de ces
organes se projettent latéralement, là surtout où le contraste
général manifesté dans toute la longueur est répété de telle
manière que, pour chaque segment séparé, la même opposi-
tion se reproduit de nouveau à l'égard des éléments essentiels
de l’organisme tout entier ; d’où la tendance, chez les ani-
maux de ce type, à une division en plusieurs segments dans
la direction de laxe longitudinal du corps. Dans les vrais
insectes qui subissent des métamorphoses, ces segments se
réunissent en trois sections principales; la vie des nerfs
prédomine dans la première, la locomotion dans la seconde,
la digestion dans la troisième, sans qu'aucune des trois soit
entièrement privée de l’une quelconque de ces fonctions.
Outre cette opposition entre l'avant et l'arrière, un contraste
moins marqué s’observe, à un plus haut degré de déve-
» Joppement, entre le dessus et le dessous. Une différence
entre la droite et la gauche est chose exceptionnellement
rare et qui fait généralement défaut. La sensibilité et lirri-
_ tabilité sont particulièrement développées dans cette série ;
. la locomotion est active et dirigée d’autant plus décidément
… en avant que l’axe longitudinal emporte davantage (quand
le corps est contracté, comme dans les Araignées et les
364 _ DE LA CLASSIFICATION.
Crabes, cette direction est plus indécise) ; les organes plas-
tiques sont peu développés ; les glandes, spécialement, sont
rares et remplacées le plus souvent par de simples tubes.
3° Le type massif. On peut donner ce nom au type des —
Mollusques, car ni la longueur ni la surface ne l’empertent —
chez eux; au contraire, tout le corps et toutes les parties «
distinctes ont à peu près la forme de masses arrondies
tantôt creuses, tantôt solides. Comme le contraste principal
de la structure n’est ni entre les extrémités du corps, ni
entre le centre et la périphérie, il y a absence de symétrie —
presque dans tout le type. Généralement le pôle de décharge
est à droite du pôle de réception. Le premier est d’ailleurs
tantôt plus voisin du second, tantôt plus rapproché de l’extré-
mité postérieure du corps. L'étendue occupée par l’appareil
digestif étant toujours déterminée par ces deux pôles, cet
appareil est plus ou moins courbe; sous sa forme la plus «
simple, dans la Plumatelle, par exemple, ce n’est qu’un
arc. Quand le canal est long, il est roulé en spirale au centre
et cette spirale a probablement ses lois; par exemple, la
partie antérieure parait étre toujours placée sous la posté-
rieure, Les principaux courants sanguins sont aussi curvi-
lignes et leurs méandres ne coincident pas avec la ligne
_ médiane du corps. Le système nerveux se compose de gan-
glions disséminés unis par des filets, et les plus gros en- .
tourent l’cesophage. Ce système et les organes des sens .
apparaissent tard; les mouvements sont lents et faibles.
h° Le type vertébré. Celui-ci est pour ainsi dire un com- —
posé des types précédents. On y distingue un système —
animal ct un système végétatif; et, quoique influant l’un sur «
l’autre dans leur développement, ces deux systèmes ont —
chacun une organisation typique particulière. Dans le sys: —
tème animal, l'articulation rappelle le second type et les —
organes de réception et de décharge sont aussi placés aux «
deux extrémités opposées du corps. Il ya cependant une dif- —
ference marquée entre les Articulés et les Vertébrés, car le —
système animal des Vertébrés est non-seulement double
par répétition latérale, mais double en même temps par 4
RP TAS A ee Pe POLE PO OER QE eee ne Se
EMBRYOLOGISTES. — BAER. 365
. répétition en haut et en bas; en sorte que les deux parois
latérales qui se réunissent inférieurement circonscrivent le
- système végétalif, tandis que les deux parois qui convergent
. supérieurement entourent un organe central de la vie ani-
. male: — le cerveau et la moelle épinière, qui manquent chez
les Invertébrés. La charpente solide est la représentation
très-complète de ce type. En effet, de l’axe médian, l’épine
. dorsale, s'élèvent supérieurement des ares qui se ferment et
constituent une arête supérieure ; tandis que, en bas, des-
cendent d’autres arcs, qui se réunissent plus ou moins
pour former une créte inférieure. En concordance avec ce
_ premier fait, on observe quatre rangées de filets nerveux le
. long de la moelle épinière, composée elle-même de quatre
» cordons et constituant une masse grise quadripartite. Les
muscles du tronc forment aussi quatre masses principales
qui sont particulièrement distinctes chez les poissons. Il y a
. donc, dans l’arrangement du système animal, une double
. symétrie. On montrerait sans peine que les systèmes végé-
. tatifs du corps correspondent au type des Mollusques, tout
en étant influencés par le système animal.
Quand on examine les figures qui accompagnent cette
. discussion des grands types ou embranchements du Règne
. Animal, et, mieux encore, quand on lit le mémoire publié
par K. E. von Baer dans les « Nova Acta » (1), il devient
évident qu’il avait découvert, plus clairement et plus tôt
qu'aucun autre naturaliste, les vrais rapports des animaux
. inférieurs avec leur embranchement respectif. Il ne met ni
_ les Bryozoaires ni les Vers intestinaux parmi les Rayonnés,
comme a fait Cuvier et comme ont fait après lui tant d’autres
_ écrivains modernes; il rapporte très-exactement les premiers
aux Mollusques et les seconds aux Articulés.
(1) Beitriige sur Kenntniss der niedern Thiere (Nova Acta Academiæ Na-
- ture Curiosorum, vol. XIE, part. 2, 1827), contenant sept mémoires sur l’4s-
_ pidogaster, le Distôme, etc., le Cercaire, le Nilzchia, le Polystome, le Planaire,
et les affinités générales de tous les animaux. Ces Beilrige et les mémoires
- dans lesquels Cuvier a caractérisé, pour la première fois, les quatre grands types
du Règne animal sont au nombre des plus intéressants travaux de zoologie
… générale, qu’on ait jamais publiés.
366 DE LA CLASSIFICATION.
En comparant ces quatre types avec le développement
embryonnaire, von Baer montre qu’il n’y a, entre les phases ©
embryonnaires des animaux supérieurs et l’état permanent —
des animaux inférieurs, qu’une ressemblance générale due
exclusivement à ce que la différenciation n’est pas faite
dans le corps, et non point à ce que les types soient sem-
blables.. L’embryon ne passe pas d’un type (embranchement)
à un autre type; au contraire, le type de chaque animal est
défini dés la premiére heure et domine tout le développe-
ment; l'embryon d’un Vertébré est un Vertébré dès le com- .
mencement et ne correspond, à aucun moment, à un Inver-
tébré. Les Vertébrés embryonnaires ne passent pas, pendant
qu'ils se développent, par d’autres types permanents d’ani-
maux; le type fondamental est d’abord développé; puis, dés
caractères de plus en plus subordonnés apparaissent; d’un .
type plus général se dégage la manifestation d’un type (classe, —
genre, etc.), plus spécial. Plus deux formes animales diffèrent, —
et plus leur développement doit être étudié de bonne heure «
pour qu’on puisse distinguer une ressemblance entre elles.
Il est simplement possible qu’au premier moment, tous les
animaux se ressemblent et ne représentent qu’une sphère
creuse ; mais le développement individuel des animaux supé- *
rieurs ne reproduit pas dans ses phases les formes perma- *
nentes d'animaux inférieurs; ce qu’il y a de commun dans un :
groupe supérieur d'animaux est toujours développé plus tôt
dans l'embryon que ce qu'il y a de spécial. De ce qu’il y a de «
plus général sort ce qu’il y a de moins général jusqu’à ce.
qu’enfin ce qu'il y a de plus spécial apparaisse. Chaque.
embryon d'un type donné, au lieu de traverser d’autres types
définis, devient au contraire de moins en moins semblable |
à ces types; un embryon de type supérieur n’est par con-.
séquent jamais identique avec un autre type animal; un.
embryon n’est identique qu’avec un autre embryon.
La thèse de Von Baer va jusque-là (1).
(1) Huxley rend inexactement compte des vues de Baer (voy. Baden Porvel’s
Essays, Appendice n° 7, p.495). Baer ne dit pas : « démontrent que la classifica-
» tion de Cuvier ne fit simplement, au fond, qu’exprimer le fait qu’il y a, dans le
oe
ere
EMBRYOLOGISTES. — BAER. 367
Pern es
_ Iladone, cela est bien clair, trés-nettement l’idée que les
_ divers modes de développement embryonnaires sont limités
aux embranchements respectifs du Règne Animal; mais il
est également certain que ses assertions sont trop générales;
elles ne fournissent pas, pour les comparaisons à faire, la clef
des changements successifs subis par les différents types
dans leurs limites respectives. Baer est encore vaguement
sous l'impression de celte pensée que, à mesure que l’indivi-
dualisation se prononce, le développement correspond aux
d degrés de complication de la structure. Il ne pouvait guère
en être autrement à une époque où les diverses catégories de
Ja structure n’avaient pas été clairement distinguées (1).
_ D’après les résultats de ses recherches sur l’'Embryologie,
K. E. von Baer propose la classification suivante :
À
i.
A
4 Classification de K. E. von Baer.
a
1. Type périphérique (RAYONNES). Evolutio radiata. Le développe-
ment procède d'un centre, et produit des parties identiques
dans un ordre rayonnant.
Il. Type massif (MOLLUSQUES). Evolutio contorta. Le développement
_ « Règne animal, certains plans de développement communs, etc. » Car Cuvier
avait reconnu ces plans dans la structure des animaux, avant que Baer eût retracé
. le développement de ceux-ci. Baer lui-même proteste contre toute identification
. de ses vues avec celles de Cuvier (Baer, Entwick., p. 7). Baer n’a pas non
plus démontré la «doctrine de Punité d’organisation chez tous les animaux »,
et il ne l’a pas assise sur un piédestal aussi inébranlable que celui de la loi de la
gravitation; il n'est pas arrivé jusqu’à « la plus grande loi », celle que, dans
une certaine mesure, le développement «suit un plan commun pour tous les
animaux». Au contraire, Baer admet quatre types d'animaux et quatre modes
de développement. Il se borne à ajouter : « Il est simplement possible, qu'au
premier moment, tous les animaux se ressemblent. » Huxley devait aussi avoir
oublié l'introduction au Règne animal de Cuvier (citée textuellement plus haut,
ap. 317), lorsqu'il avance que Cuvier « n’essaya pas de découvrir sur quel plan
les animaux sont construits,mais de déterminer de quelle manière les faits de
Yo rgauisation animale pourraient être exprimés dans le plus petit nombre pos-
“sible de propositions ». Au contraire, pendant plusieurs années, Cuvier s’attacha
_spécialement à faire ressortir ces plans et à montrer qu'ils sont caractérisés par
des structures particulières. Le mérite de Baer consiste dans la découverte de
“quatre modes de développement coincidant avec les quatre embranchements du
Règne animal, où Cuvier avait reconnu quatre différents plans de structure.
Huxley se trompe encore en disant que Cuvier adopta le système nouveau comme
/ « base de ses grandes divisions ».
- (A) Cf. Chap. Il, sect. 1 atx,
368 DE LA CLASSIFICATION.
produit des parties identiques, courbées autour d’un espace co
nique ou autre. 4
Ill. Type longitudinal (ARTICULÉS). Evolutio gemina. Le développe-
ment produit des parties identiques, partant des deux côtés d’un
axe et se refermant supérieurement le long d’une ligne oppor
a l’axe.
IV. Type à symétrie double (VERTÉBRÉS). Evolutio bigemina. Le dé-
veloppement produit des parties identiques qui partent des deux.
côtés d’un axe, se projettent en haut et en bas, et se closent le
long de deux lignes, de telle sorte que le feuillet interne du
germe se ferme en dessous et le feuillet supérieur en dessus.
L’embryon de ces animaux a une corde dorsale, des lames dor-
sales et des lames ventrales, un tube nerveux et des fissures
* branchiales. j
4° Il acquiert des franges branchiales ;
a. Mais il ne se développe point de vrais poumons :
a. Le squelette ne s’ossifie pas. PoIssoNs CARTILAGINEUX.
6. Le squelette s’ossifie. Poissons proprement dits.
b. Il se développe des poumons : AmPHIBIES.
a. Les franges branchiales persistent. SirèNes.
8. Les franges branchiales disparaissent. UronèLes et ANOURES.
eT
2° I] acquiert une allantoide,
a. et n’a point de cordon ombilical;
a, point d’ailes ni de sacs à air. REPTILES.
B. a des ailes et des sacs à air; Oiseaux.
-b. et a un cordon ombilical : MAMMIFÈRES.
a. qui disparait de bonne heure
4° sans avoir connexion avec la mère, Monornèues.
2° après courte connexion avec la mère. MArsuPrAUx.
B. qui persiste plus longtemps :
4
4° Le sac du jaune continue à croître pendant longtemps. .
L’allantoide s'accroît peu. Ronceurs.
L’allantoide s'accroît moyennement. Insecrivores,
L’allantoide s'accroît beaucoup. Carnivores.
2° Le sac du jaune ne s'accroît que légèrement. :
L’allantoide se développe peu. Le cordon ombilical es
très-long. — Les Sinces et l'Homme. 4
L’allantoide continue à se développer pendant long
temps. Le placenta est en masses simples. RUMINANTS.
L’allantoide continue à se développer pendant long*
temps. Le placenta est disséminé. Pacuypermes et
CÉracés.
EMBRYOLOGISTES. — VAN BENEDEN. 369
Classification de Van Beneden.
Nan Beneden a aussi proposé une classification basée sur l’Embryologie ; on en
_ trouve le premier essai dans ses Recherches sur !’anatomie, la physiologie
_ et Vembryogénie des Bryozoaires, Bruxelles, 1845, in-4, et le développe-
_ ment dans son Anatomie comparée, Bruxelles, sans date, mais probablement
- 4855, in-8.
I. HYPOCOTYLÉDONÉS ou HYPOVITELLIENS. (Vertébrés.) Le vitellus
pénètre dans le corps par la face ventrale :
Cl. 1. Mamurrires. (Primates, Cheiroptères, Insectivores, Ron-
geurs, Carnivores, Edentés, Proboscidiens, Ongulés, Sirénoides,
Cétacés.)
Cl. 2. Oiseaux. (Psittacés, Rapaces, Passereaux, Colombins, Gal-
linacés, Struthionés, Échassiers, Palmipèdes.)
Cl. 3. Reprices. (Crocodiles, Chéloniens, Ophidiens, Sauriens,
Plérodactyles, Simosaures, Plésiosaures, Ichthyosaures.)
CI. 4. Barraciens. (Labyrinthodontes, Péroméles, Anoures, Uro-
déles, Lépidosirénes.)
Cl. 5. Poissons, (Plagiostomes, Ganoides, Téléostés, Cyclostomes,
Leptocardiés.)
Ji. ÉPICOTYLÉDONÉS ou EPIVITELLIENS. (Articulés.) Le vitellus
È pénètre dans le corps par la face dorsale.
Cl, 6. Insectes. (Coléoptères, Névroptéres, Hyménoptères, Lépi-
doptères, Diptères, Orthoptères, Hémiptères, Thysanoures,
Parasites.) .
Cl. 7. Myriarones. (Diplopodes, Chilopodes.)
Cl. 8. Aracunipes. (Scorpions, Araignées, Acares, Tardigrades.}
Cl. 9. Crusracés. (Décapodes, Stomapodes, Amphipodes, Iso-
podes, Lémodipodes, Phyllopodes, Lophyropodes, Xiphosures,
Siphonostomes, Myzostomes, Cirripédes.)
. ALLOUOTYLÉDONÉS ou ALLOVITELLIENS. (Mollusco-Radiaires.)
Le vitellus ne pénètre dans le corps ni par la face ventrale ni
par la face dorsale :
Cl. 10. Mozrusques, y compris les Céphalopodes, les Gastéro-
_ podes et les Brachiopodes. (Acéphales, Tuniciers, Bryozoaires.)
Cl. 14. Vers. (Malacopodes, Annélides, Siponculides, Némertins,
Nématodes, Acanthocéphales, Scoléides, Hirudinés, Tréma-
à todes, Cestodes, Rotifères, Planaires.)
“ C1. 12. Ecurvopenmes. (Holothuries, Échinides, Stellérides, Cri-
f noides.)
Cl, 43. Potypgs, y compris les Tuniciers, les Bryozoaires, les
AGASSIZ. 24
370 DE LA CLASSIFICATION.
Anthozoaires, les Alcyonaires et les Méduses. (Clénophoradl
Siphonophores, Discophores, Hydroides, Anthophorides.) 5
Cl. 14. Ruizopopes. Des genres seulement. “
Cl. 45. Inrusomes. Des familles et des genres seulement.
Van Beneden croit la classification de Linné plus con
forme à la nature que celle de Cuvier ou de De Blainville.
En effet, la classe des Vers du naturaliste suédois correspon
à ses Allocotylédonés, celle des Insectes à ses mee
lédonés, et les quatre classes des Poissons, des Amphibies,
des Oiseaux et des Mammifères à sa classe des Hypoco-
a
tylédonés. Il compare ces divisions primaires aux Dico-
Le
a
tylédonées, Monocotylédonées et Acotylédonées du Règne
végétal. Mais il oublie que les Céphalopodes ne sont pas des
Allocotylédonés, et qu’aucun groupe d’animaux faisant des
Mollusques, des Vers et des Rayonnés un grand tout, ne
peut étre fondé sur des principes exacts. Quant a ses classes,
je n’ai qu'une chose à en dire: C’est que, s’il y à des classes
naturelles parmi les animaux, on n’a jamais proposé depuis
Linné une combinaison moins capable de répondre à l’idée
philosophique de classe que celle qui réunit les Tüniciers aux
Polypes et aux Acaléphes. Dans son dernier ouvrage, Van
Betieden a fait à sa classification des améliorations et des
additions importantes, au nombre desquelles il faut par*
ticuligrement remarquer l'indication des ordres (compri à
entre parenthèses dans le tableau qui précède); ces chan
gements se rapportent principalement aux groupes des Mo E
lusques et des Polypes, les Tuniciers et les Bryozoaires ayant
été transportés du second au premier. Les Acaléphes et les
Polypes sont d’ailleurs considérés encore commie ne for-
mant ensemble qu’une classe unique. |
La comparaison instituée par Van Beneden entre la clas:
sification du Règne animal et celle des plantes, telle qu’elle
est le plus généralement adoptée, m’améne de nouveau?
appeler l'attention sur la nécessité de réviser soigneusememl
le Règne végétal, afin de déterminer jusqu’à quel point le
résultats auxquels je suis parvenu, touchant la valeur dé
différentes sortes de groupes naturels chez les animaux,
EMBRYOLOGISTES. — KOLLIKER. 374
euvent s ‘appliquer aux plantes (1). Sans aucun doute, de ce
jue les embranchements du Règne animal sont fondés sur
es différences du plan de structure, il ne s'ensuit pas que le
Aegne végétal doive être nécessairement, lui aussi, construit
ur des plans différents. Il n’y a probablement pas autant de
nodes de développement parmi les plantes que parmi les
inimaux, à moins qu’on ne considère comme équivalent à
indication de plans de structure divers, le fait que la repro-
luction par des spores, par des graines nues polyembryo-
niques, pat des graines monocotylédonées ou dicotylédonées
ingiospermes, est dans une certaine corrélation avec les
lifférences de structure présentées par les Acotylédonées,
es Gymnospermes, les Monocotylédonées et les Dicotylédo-
Ges. Mais, méme dans ce cas, ces différences ne seraient
as si marquées que celles qui distinguent les quatre em-
pe du Règne animal. La limitation des classes et
les ordres, qui présente relativement peu de difficulté dans
e Règne animal, est moins avancée en Botanique. Au con-
raire, les botanistes ont mieux réussi jusqu’à présent à bien
ractériser les familles. C’est sans doute la conséquence
1 particularités que présente chacun des deux règnes
ganiques.
Il faut remarquer en outre que, dans la classification de
h Beneden, les animaux réunis sous la dénomination
PAllocotylédonés sont construits sur des plans de structure
i entiérement différents que, pour un observateur non
révenu, leur combinaison ést à elle seule une démonstra-
ion que tout principe les rattachant les uns aux autres ne
jeut pas être conforme à la nature.
diugramme du développement des animaux, par Kolliker.
| Entwickelungsgeschichte der Cephalopoden, Zurich, 4844, in-4, p. 175.)
L'embryon naît d’une partie primitive (Evolutio ex und parte),
q [1 se développe dans deux directions, avec symétrie bilatérale
5 (Evolutio bigemina).
(1) Voy. chap. Il.
372 DE LA CLASSIFICATION.
a. Les lames dorsales se ferment. Vertiprits.
b. Les lames dorsales demeurent ouvertes et se transforment €
membres. ARTICULÉS.
2° Il se développe uniformément dans toutes les directions (£
lutio radiata), et |
a. enveloppe entièrement la vésicule embryonale : 3
a. Ce qui a lieu de bonne heure ; GAsrÉROPODES et ACÉPHALES
. Ce qui a lieu tard (sac vitellin temporaire) ; Limace;
b. se resserre au-dessus de la vésicule embryonale (sac vitelli
véritable); CÉPHALOPODES.
B. Tout le corps de l’embryon fait saillie à la fois (Evolutio ex om 1
bus partibus).
4° Il se développe dans la direction de l’axe transversal.
a. par sa partie postérieure ; Rayonnis. (Echinodermes.)
b, par sa partie antérieure et
a, la partie postérieure ne se développe pas, AcaLÈPHES ;
6. la partie postérieure se développe longitudinalement;
LYPES.
2° Il se développe dans la direction de l’axe longitudinal. Vers. ;
J'ai déjà fait voir combien contraire à la nature est nt
cessairement un système zoologique fondé sur la distinctio
entre la segmentation totale et la segmentation partielle «
jaune (1). Un diagramme du développement des animau
où l’on adopte celte différence comme base fondamental
n’en est pas moins arlificiel pour s'appuyer sur des fai
positifs ; on ne doit jamais s’attacher exclusivement, comm
font beaucoup d’anatomistes, à certains traits isolés pi
lesquels les animaux peuvent étre réunis ou séparés; le b
doit étre de déterminer les relations générales des étre
comme ont si admirablement fait Cuvier et K. E. y
Baer. Je crois aussi que l’homologie entre les -‘membr
des Articulés et les lames dorsales des Vertébrés est che
plus que douteuse. La distinction introduite entre les P
lypes et les Acaléphes d’une part, ceux-ci et les aulr
Rayonnés d’autre part, n’est en aucune façon mie
fondée. Il me semble de même tout à fait impropre d’
(1) Chap, Il, sect. 1, p, 298.
EMBRYOLOGISTES. — vOGT. 373
peler le développement des Mollusques une evolutio radiata,
surtout après que Baer a désigné par la même expression le
mode de formation de l’embranchement des Rayonnés.
Classification de Vogt.
a Contraste entre l'embryon et le jaune.
4 VERTEBRATA. Jaune ventral,
CI. 4. Mammarra. 41° APLACENTARIA; Ord. Monotremata, Marsu-
pialia. 2° PLacenraria. Ser. 4. Ord. Cetacea, Pachydermata,
Solidungula, Ruminantia, Edentata. Ser. 2. Pinnipedia,
Carnivora, Ser. 3. Insectivora, Volitantia, Glires, Quadru-
mana, Bimana.
CI. 2. Aves. Ser. 1. Insessores. Ord. Columbe, Oscines, Clama-
tores, Scansores, Raptatores. Ser, 2, Autophagi. Ord. Nata-
tores, Grallatores, Gallinaceæ, Cursores.
Cl. 3. Reprivia. Ord. Ophidia, Sauria, Pterodactylia, Hydro-
sauria, Chelonia.
Cl. 4. Auputsia, Ord. Lepidota, Apoda, Caudata, Anura.
_ Cl. 5. Pisces. Ord. Leptocardia, Cyclostomata, Selachia, Ganoi-
à dea, Teleostia.
| ARTICULATA. Jaune dorsal.
Cl. 6. Ixsecra. Subclas. 4, AmeraboLa. Ord. Aptera. Subclas. 2.
HemimeTABOLA. Ord. Hemiptera et Orthoptera. Subclas. 3.
HoLOMETABOLA. Ord. Diptera, Lepidoptera, Strepsiptera, Neu-
roptera, Coleoptera, Hymenoptera.
Cl. 7. Myriaropa. Rien que des familles.
Cl. 8. Anacunipa. Ser. 1. Picnogonida et Tardigrada. Ord. Aca-
rina, Araneida. Ser. 2. Trois familles.
+ CI. 9. Crustacea. Subclas. 4. Enromosrraca. Ord. Cirripedia, Pa-
rasita, Copopeda, Phyllopoda, Trilobita, Ostracoda. Sub-
clas. 2, Xipnosura. Subclas. 3. Povopuruatma. Ord. Stomapoda,
Decapoda. Subclas. 4. Epriopuraatma. Ord. Læmipoda, Am-
phipoda, Isopoda.
a Shot ee OF ee Er. ES OP f
Transformation de tout le jaune en embryon.
|. CEPHALOPODA, Jaune céphalique.
Cl. 10. Cepnatopopa, Ord. Tetrabranchiata et Dibranchiala.
j MOLLUSCA. Disposition irréguliére des organes,
Cl, 41. Cepnaropnora. Subclas, 1, Prenopopa. Subclas, 2. Herrno-
374 DE LA CLASSIFICATION.
ropa. Subclas. 3. Gasreropona. Ord. Branchiata et Pulmo-
nata. — Chitonida. :
Cl. 12. AcepxarA. Subclas. 1. Bracntoropa. Ord. Rudista, Brachio-
poda. Subclas. 2. LAMELLIBRANCHIA. Ord, Bleuronanché, Ort
concha, Inclusa.
Cl. 13. Toxine Ord. Ascidiæ, Biphora. |
Cl. 14. Crenopnora. Rien que des familles. Molluscoidea.
Cl. 15. Bryozoa. Ord. Stelmatopoda, Lophopoda. | 1
V. VERMES. Organes bilatéraux.
Cl. 46. Annetipa. Ord. Hirudinea, Gephyrea, Scoleina, Tubicola
Errantia,
Cl, 17. Roratorta. Ord. Sessilia, Natantia.
Cl, 18. PcaryeLurA. 4° Ord. Cestoidea, Trematoda. 2° Ord. Plana-
rida, Nemertina.
Cl. 19. NemateLmra. Ord. Gregarinea, Acantocephala, Gardiace
Nematoidei.
VI. RADIATA. Disposition rayonnée des organes.
CI. 20. Ecutnovermata. Ord. Crinoidea, Stellerida, Echinida, H
lothurida.
Cl, 21. SrpponopHora, Rien que des familles.
Cl, 22. Hypromeousx. Point d’ordres bien distincis.
Cl. 23. Pozvpr. Ord. Hexactinia, Pentactinia, Octoctinia,
Pas d'œufs.
VIT. PROTOZOA.
Cl. 24. Inrusoria, Ord. Astoma, Stomatosa.
CI, 25. Rayzopona. Ord. Monosomatia, Polythalamia.
La classification de Vogt (Zoologische Briefe, citées p. 298)
présente plusieurs traits nouveaux dont un souléve plu
particulièrement l’objection. C’est la séparation des Cépha:
lopodes d’avec les autres Mollusques, comme division pri
maire distincte du Règne animal. Vogt adopte la distinctiot
fondamentale introduite par Kôlliker, entre les animaux don
l'embryon se développe du jaune tout entier et ceux che
lesquels il naît d’une partie du jaune. C’est là, sans doute, I
conséquence de ses intéressantes recherches sur l’Actéo
dans lequel il a découvert, entre le jaune et l'embryon, w
rapport trés-différent de celui observé par Külliker chez le
Céphalopodes. Mais, comme je l’ai déjà dit plus haut, cel
DARWINISME. — HÆCKEL. 379
-n’antorise pas plus à faire de ces groupes d'animaux deux
embranchements, que la segmentation totale du jaune chez
_les Mammifères ne justifierait une division de la même caté-
gorie entre eux et les autres Vertébrés. Si la distinction faite
- par Vogt entre les Céphalopodes et les Mollusques ayait la
4 valeur qu’il lui assigne, la limace aussi devrait être séparée
. des autres Gastéropodes, L’assertion que les Protozoaires ne
. produisent pas d'œufs ne mérite pas qu’on s’y arrête, après
ce qui a déjà été dit à l'égard de ces animaux dans les sec-
tions précédentes. Quant à rapporter. les Cténophores au
| au des Mollusques, je crois la chose absolument impossible,
POLE
Le Darwinisme. — Classification de Heckel (1).
Il est impossible de ne pas parler, dans un livre comme
celui-ci, de l'influence exercée par les théories de Darwin
sur les naturalistes systématisateurs, et c’est là ce qui m’en-
gage à consacrer un paragraphe spécial à la classification de
Heckel.
_ Jai pour Darwin toute l'estime qu’on doit avoir ; je connais
les travaux remarquables qu’il a accomplis, tant en Paléon-
_tologie qu'en Géologie, et les investigations sérieuses dont
notre science lui est redevable, Mais je considère comme un
devoir de persister dans l'opposition que j’ai toujours faite
à la doctrine qui porte aujourd'hui son nom. Je regarde en
effet celle doctrine comme contraire aux vraies méthodes
dont l'Histoire naturelle doit s'inspirer, comme pernicieuse
et fatale aux progrès de cette science. Ce n’est pas que je
“rende Darwin lui-même responsable de ces facheuses con-
séquences. Dans les différents ouvrages qui sont sortis (le sa
“plume, il n’a jamais fait allusion à l'importance que pou
_vaientavoir ses idées au point de vue de la classification. Ge
sont ses adeptes qui se sont emparés, pour transformer la
(1) Heckel, Generülle Morphologie des Organismen, 2 vol, in-8.
376 DE LA CLASSIFICATION.
Zootaxie, d’idées théoriquement présentées. A différentes re-
prises cette influence s’est fait sentir sur les conceptions gé-
nérales de la Paléontologie et plus directement encore sur |
celles de la Zoologie; c’est ainsi que Heckel a publié sur »
l'ensemble de cette science un ouvrage considérable, tout —
entier fondé sur les théories de Darwin. Avant donc de for- …
muler une analyse du système de Heckel, il est indispensable —
de présenter quelques considérations sur les caractères de —
la doctrine du naturaliste anglais.
De toutes les théories qui se sont fait jour sur l'Histoire —
naturelle, la sienne est la seule qui ait été aussi bruyam- —
ment acclamée sous le nom de son auteur. Presque tous les ©
écrivains qui l'ont discuiée la désignent sous le nom de
Darwinisme. Cest un fait significatif; il prouve que, tout «
d’abord et malgré un fond commun de bienveillance dans *
l’appréciation, on a reconnu qu’il y a dans la doctrine
quelque chose d’autre que ce que la masse y a généralement —
remarqué. Ce que Darwin a présenté comme la théorie de
l’origine des espèces, ce n’est pas le résultat graduellement «
conquis de recherches pénibles, s'appliquant à la solution.
de quelques points de détail pour s'élever ensuite à une”
synthèse générale et compréhensive; non, c’est une doc-
_trine qui de la conception descend aux faits, et cherche des.
faits pour soutenir une idée. Il n’est pas surprenant qu’un.
tel ensemble de vues ait été décoré du nom d’Unisme. Est-.
ce un éloge, est-ce un blame? Je ne sais, mais le fait reste.
Le Darwinisme sera une des phases par lesquelles l'Histoire"
naturelle aura passé dans le cours de ce siècle. Je reconnais.
dans le caractère et la portée de cet enseignement une cer-\
taine analogie avec ce qui s’est produit lorsque les physto-
philosophes, s'inspirant de Schelling, appliquérent sa phi-
losophie à l’histoire naturelle. Alors aussi, on vit acclamer.
une doctrine toute faite, embrassant la nature tout entiére, et
dont le point de départ était que l'Homme est le résumé et
la synthése individualisée de toute la création animale. On.
démembra le corps humain pour faire de chacun de ses frag=
ments le type idéal des différentes classes d’animaux. Nous»
mate
ee an
DARWINISME. — HÆCKEL, 377
4
devons 4Oken untraité de zoologie, entrepris exclusivement
dans le but de déterminer chacune des parties de ce dé-
‘membrement de l'Homme et de la création; mais il n’y eut
jamais, à ce groupement des divisions supérieures du Règne
animal, d'autre base que l’idée préconçue d’une soi-disant
- représentation des parties du corps humain par chacune des
formes générales de l’animalité. Toute la science acquise
jusqu’à cette époque-là, au prix des plus longues et des plus
_laborieuses recherches, fut mise de côté et remplacée par des
Brenceptions purement théoriques. L'infatuation alla si loin
que les travaux les plus spéciaux et les mieux faits de lépo-
que contemporaine n étaient accueillis, dans l’ Ecole, qu aprés
avoir été recouverts du vernis de la Doctrine. Je crois qu’il
4 sera de l’enseignement de Darwin comme de celui de cette
secte. Il y a toutefois une différence : le système des philo-
‘sophes de la Nature a pu contribuer aux progrès de la
science ; le Darwinisme exclut, lui, presque toute la masse
des connaissances acquises, pour s’assimiler et faire ressortir
exclusivement ce qui peut servir à la Doctrine. Ce ne sont
pas les faits qui déterminent pour les Darwinistes le carac-
tere des généralisations, c’est le système qui prétend dicter
les caractères de l’ordre de choses.
L'idée fondamentale sur laquelle repose le Darwinisme,
c'est que les êtres organisés qui se succèdent en descen-
dance directe, loin de reproduire nécessairement les ca-
racléres essentiels de leurs ancêtres, tendent à s’en éloi-
gner (1). Jusqu'à nos jours toute la Physiologie a admis,
comme un axiome basé sur l'expérience de tous les temps,
que les descendants d’étres vivants quelconques ayant la
faculté de se reproduire étaient l’image vivante des géni-
teurs, et que la fécondité même de ces êtres était la garan-
tie de la conservation des types. Cette notion est d’ailleurs
corroborée par cet autre fait que, dans les résultat du mé-
lange des espèces, on reconnaît la part afférente à chacun
des auteurs qui ont contribué à la production du nouvel
… (1) Rütimeyer (p. 10): « Gleiches niemals gleiches erzeugl; » « Le méme
ne produit jamais le méme».
Pe a oh
378 DE LA CLASSIFICATION,
étre. De ces deux faits, dont rien jusqu ‘aujourd’ hui n’a pu
ébranler la certitude, s’est formée la conviction qui a do--
miné la science jusqu’à l'heure actuelle: à savoir, que les
êtres organisés se sont reproduits, de génération en géné-
ration, avec des caractères identiques avec ceux qu'ils possé-
daient lors de leur apparition première, J’ignore où l'Ecole.
darwinienne a puisé les faits sur lesquels elle prétend se
fonder pour affirmer que, loin de se ressembler constam= |
ment, les êtres organisés de générations successives tendent
à se différencier de plus en plus les uns des autres. Je sais
fort bien que, à chaque époque géologique distincte, ap=
paraissent des organismes différents; mais pas plus que les
naturalistes d’autres écoles, Darwin et ses adeptes n’ont pré-
senté des faits d’où puisse ressortir la preuye que ces or-
ganismes descendent des types dissemblables qui ont vécu”
à une période antérieure. Toutes les observations relatives.
aux animaux domestiques, parmi lesquels il y a tant et de sis
nombreuses variations, n'ont encore abouti qu’à la démonsss
tration de l’amplitude assez grande de ces variations 1
jamais elles n’ont eu pour résultat rien qui exprimat las
tendance indéfinie à une variabilité sans limite, et surtout
une marche progressive vers une organisation supérieure.
Car c’est là un autre point rattaché par les darwinistes à lam
doctrine du maitre; non-seulement les générations succes=«
siyes d'un type donné peuvent, disent-ils, parvenir à ne plus
ressembler au primitif auteur, mais encore elles peuyent
avoir pour résultat l’abaissement ou l'élévation de ce type
dans l'échelle des organismes. Ce n’est donc pas faire tort a
l'idée darwinienne que de la représenter comme une con .
ception 4 priori, et de nier qu’elle soit le développement lé=
gilime des acquisitions de la science moderne. ;
Mais, en affirmant ne rien découvrir dans la nature qui
ait pu donner lieu à la doctrine des darwinistes, j'exagère M
il est un fait connu de tous, dont l'interprétation erronée a
sans contredit servi de point de départ à cette doctrines
Quelque semblables que soient entre eux les animaux ou les”
plantes d’une même espèce, il y a toujours chez tout in=«
QUE M size lh
DARWINISME. — HÆCKEL. 379
. dividu, même en dehors des différences sexuelles, des traits
- par liculiers plus ou moins prononcés par lesquels l'individua-
lité s’accuse plus nettement. Toutefois, si grandes que soient
ces différences, si tranchée que soit l’individualité, et quand
bien même, à raison de cette absence d’ uniformité parfaite,
il soit permis de dire jusqu’à certain point qu’aucun indi-
: vidu ne reproduit exactement son semblable, il n’en est pas
_ moins vrai que l'espèce, dans son essence, est représentée
par la somme de ces individus divers; que, dans les limites
de l'espèce, les différences ne dépassent pas ce que j'ai
appelé, en plus d’une occasion, les bornes de la flexibilité,
de la pliabilité de l'espèce. Jamais, enfin, dans la suc-
cession de ces individus non entièrement netnhlables nés
immédiatement ou médiatement les uns des autres, une
observation rigoureuse n’a constaté des différences de la
catégorie de celles qui, pour le naturaliste pratique, con-
stituent l'espèce animale ou végétale. Les extrêmes de dif-
férence remarqués parmi les individus d’une espèce bien
étudiée en font connaître l'amplitude, et, à mesure que les
espèces sont mieux connues, on définit avec plus de précision
ces limites. L'école de Darwin va au delà des faits lorsqu'elle
affirme que ces différences individuelles constituent des
transitions d’une espèce à l’autre. Elle oublie que dans
certaines familles les caractères spécifiques sont trés-
_tranchés, les espèces peu nombreuses, et, par conséquent, la
distinction facile, tandis que, dans d’autres, les différences
sont faibles, souvent difficiles à saisir et néanmoins con-
stantes. Pour reconnaître les limites des espèces, il faut ici
cette étude patiente et prolongée qui, à force de compa-
raisons répétées, aboutit finalement à nous enseigner la
fixité de ces petites différences; c’est ainsi que, dans le
+ monde minéral, certains métaux sont tellement semblables
que les maîtres seuls ont pu, par une étude longue et minu-
» tieuse, en saisir et nous en faire connaître les différences,
. tandis que d’autres diffèrent au point d’être distingués tout
_ d’abord l’un de l’autre par l’homme le moins exercé.
J'ai pris la peine de comparer entre eux des milliers d’in-
380 DE LA CLASSIFICATION.
dividus de la méme espéce; j’ai poussé dans un cas la
minulie jusqu’à placer les uns à côté des autres 27000 exem-
plaires d’une même coquille dont les espèces congénères (le
genre Veritina), sont fort voisines les unes des autres. Je puis
affirmer que sur ces 27 000 exemplaires, je n’en ai pas .
rencontré deux qui fussent parfaitement identiques; mais
sur ce grand nombre je n’en ai pas non plus trouvé un seul
qui déviât du type de l’espèce au point d’en laisser douteuses
les limites. Il y a donc lieu de reconnaitre que, dans le Règne
animal, lindividualité joue un rôle aussi considérable que
dans l’humanité même; et je ne doute pas que ce ne soit la
connaissance, plus ou moins avancée pour différentes es-
péces, de la variabilité des individus, qui a conduit à sup-
poser possible la transition d’un type spécifique à l’autre.
Mais tant que cette transition n’aura pas été vérifiée ; tant
que, de nos jours, on pourra reconnaître parmi les être:
vivants, et entre individus appartenant à la même espèce, des
affinités qui ne sont point les mêmes que celles présentées
par d’autres individus susceptibles d’être rapportés à une es-
péce différente, tant qu’on ne pourra pas démontrer qu’il y a
passage des premiers aux seconds; il faudra bien se résigner
à envisager l’origine des espèces comme chose inconnue,
quelque désirable que puisse en être la connaissance. Je
n’affirme pas que cette origine doive nous demeurer à tout —
jamais inconnue, mais je soutiens que l'explication fournie —
par Darwin et ses adeptes n’est pas conforme aux faits que la ©
nature met sous nos yeux. A l’égard des différences, souvent M
fort grandes, présentées par les animaux domestiques et les
plantes cultivées, et sur lesquelles la doctrine prétend fonder
un argument considérable, j'ai déjà dit et je répète que l’on ©
me paraît confondre deux choses trés-distintes; je renvoie —
à ce sujet aux observations que j'ai produites: ailleurs, dans
le but de montrer que les variélés ou races, domestiques
el cultivées, différent entre elles autrement que les espèces —
sauvages.
De cette doctrine de la transformation successive et par —
voie de génération est née l’idée suivante : l’affinité telle que
q
ea i di DS PR RE
PES PR a
DRASS) Oe se,
DARWINISMF. — HACKEL. 381
les zoologistes la reconnaissent et la définissent, c’est-à-dire
ce degré plus ou moins profond de ressemblance que ré-
vélent l’anatomie comparée et l’étude des similitudes les
plus générales chez des animaux différant par la forme,
la structure, etc., tous ces traits en un mot que l’on envisage
comme des points de rapprochement et sur lesquels on a
basé les classifications, sont le résultat et la preuve de la
communauté d’origine. Ainsi, toutes ces ressemblances,
toutes ces affinités existent précisément et seulement parce
que les animaux entre lesquels elles établissent un rappro-
chement quelconque sont sortis d’une même et commune
souche. Mais c’est justement ce qu’il faudrait démontrer et
ce qu'on ne peut pas démontrer. Au lieu de poser la
question dans ses véritables termes, les darwinistes s’em-
parent de tous les travaux de la Zoologie moderne par
lesquels nous avons été conduits à la connaissance des aff-
nités sensibles, évidentes, des animaux différents ;ils en font
autant de preuves d'une filiation généalogique et pré-
sentent ensuite ce prétendu enchainement des êtres, qui
sont censés remonter tous à une souche commune, comme
la conséquence des faits établis de notre temps par la
Zoologie et l’Anatomie comparée. C'est-à-dire que, loin
d'apporter pour preuves certaines données d’où sa doctrine
découle directement, le darwinisme travestit à son profit
les faits acquis en suivant la vraie méthode. Qu’on ne dise
pas que j’exagére; quand Hæckel a cherché à fonder un
système entier de classification sur l’idée de transformation
des êtres par changements successifs, de génération en
génération, il ne s’est pas attaché à prouver que tel de ces
êtres descend de tel autre; il n’a pas ajouté aux connaissances
que nous possédions avant lui sur les affinités des animaux ;
il s’est simplement emparé de ces affinités telles qu’on les
a constatées ; il en a fait autant d'indices d’une liaison géné-
sique entre les êtres qui les possèdent, et, suivant que ces
affinités étaient plus ou moins nettes, il a dressé des arbres
généalogiques qui ne sont, en définitive, que la formule
nouvelle de notions positives antérieurement acquises.
382 DE LA CLASSIFICATION.
Cependant, si ces affinités tellement évidentes, te q
nombreuses, qui établissent des connexions entre tous les «
animaux, avaient en effet pour cause la commune descen- «
dance dun même tronc, on devrait retrouver les mêmes ~
traits de ressemblance lorsqu'on met en paralléle l’ordre de M
succession dans la série géologique et le rang dans la série —
zoologique. Il devrait arriver que, partout, les types d’une .
classe inférieure fussent aussi les plus anciens dans l’histoire «
de la terre; que, partout, ceux qui ont apparu à une période —
postérieure fussent d’une organisation plus élevée ; que ©
partout, d’ époque en époque, il y eût une différenciation i
croissante. Il faudrait que, ni au point de départ, ni à aucun —
des points intermédiaires, on ne vit surgir des types nou-
veaux, entièrement étrangers à ceux qui ont précédé et sou- M
vent bien supérieurs à ceux qui suivent. Or, je répète que la —
succession chronologique n’est point en corrélation directe «
avec les affinités de la structure, et que les caractères suc- M
cessifs de lypes qui se suivent ne sont aucunement l'ex- :
pression de modifications progressives, régulières et con- «
stantes. .
Au début de ses recherches sur les fossiles, Cuvier }
s’est surtout appliqué à faire ressortir les différences qui.
distinguent les animaux des faunes antérieures à la nôtre «
d’avec ceux qui vivent maintenant. La science avait alors «
à établir ce qui est aujourd’hui reconnu de tous : que les 1
êtres composant la création animée à laquelle nous appar- «
tenons diffèrent de ceux qui, à une époque antérieure, ont M
représenté le Règne animal. En démontrant ce grand fait, «
Cuvier a fondé une science qui n’existait pas avant lui; il
a en même temps fondé les méthodes d’après lesquelles à
cette science pouvait se constituer. Il n’est donc pas sur-
prenant que les résultats par lui obtenus se soient présen- «
tés avec toutes les marques d’une critique différenciatrice «
très-prononcée. Depuis, il s’est fait une réaction. Le grand M
nombre de fossiles qu'on a découverts depuis un demi-
siècle a fait connaître des formes intermédiaires nom- —
breuses ; les différences d’abord tranchées qui se présen-
EE Be a ES
DARWINISME. — #&cKEL. 383
taient À Yobservatetir semblent s’étre en quelque sorte
be i el a alt
éffäcéés; non-seulement on a rapproché les espéces fos-
siles les unes des autres, mais on les à reliées d’une façon
plus intime aux espéces actuelles. Il en est résulté wn en-
_chainement plus étroit; les types des époques antérietires
- sé suit en quelqté sorte fondus avec les types dés époques
_thodernes, et c’est alors qu’on à cru voir, dans la succes-
sion des fauries passées, urie liaison génésique avec la faune
contemporaine. Étudiés d'abord séparémeñt, décrits dans
_ dés otivrages indépéñdants, envisagés comitie du domaine
de sciences distinctes, là Paléontologie d’uné part et la Zoo-
logie de l’aütré, tous les êtres vivants ont enfin élé recon-
nus comme rentrant, à quelque époque qu'ils appartitissent,
- dans un méme systénie, lequel émbrasäé la vie sous toutes
ses formes et dans tous les temps. Mais 4 y regarder dé près,
on n’a pas davañlage signalé, parmi les espéces différentes
frappées d’extinction, des transitions de l’une à l’autre.
Tout ati contraire on a reconnt, dans les limites actuellés
dé Vobservation, des caractères trañchés pour chacuneé
delles, reconnaissables même dans les fragments incom-
plets que l’on en posséde pour là plupart. Je crois par con-
‘séquent être dans le vrai en affirmant que Rütimeyér
a commis une erretr lorsque, dans ses travaux si éten-
dus et si bien faits sur les animatx des époques géolo-
-giques les plus récentes, après avoir signalé, entre les és-
:
|
pêces fossiles et les espèces vivantes qui s’en rapprochent
le plus, des ressemblances aussi étroites que celles existant
étitre les éspèces de l’époque actuelle le plus voisines, il à
‘mis l’idée physiologique de la famille 4 la place dé la no-
tion systématique des familles naturelles. Il n’est permis,
en physiologie, d’envisager comme membres d’une même
famille que les individus dont la filiation généalogique peut
.élre démontrée. Dès qu'il s’agit de ressemblances plus ou
‘moins étroites entre des êtres dont la commune dérivation
-d’tine méme souche reste en dehors des limites de l’obsér-
vätion, où soft de la question physiologique pour rentrer
dans le domaine des familles zoologiques naturelles, üni-
384 DE LA CLASSIFICATION.
quement constituées sur le fait des parités de la structure.
Pas plus que les espèces contemporaines, on n’aura droit —
d'envisager ces espêces comme descendant les unes des
autres, tant qu'on n’aura point découvert de faits démon-
trant que les analogies signalées dépassent les limites de
cette sorte de caractères appelés différences spécifiques.
Cette démonstration n’a pas encore été donnée; car je ne
pense pas qu'on puisse regarder comme des preuves à l'appui
d’une communauté d’origine entre certaines espèces , less
erreurs des zoologistes qui, par-ci par-là, et même pour
certains groupes assez fréquemment, se sont trompés en
basant la détermination des caractères spécifiques sur des.
faits trop peu nombreux ou mal observés. Autant vaudraitM
conclure d’une analyse chimique mal faite à l'identité des“
substances mal différenciées par l'opérateur. :
Il n’en est pas moins vrai que le travail de Heckel a la
prétention d’exprimer le développement du Règne animal —
tout entier, et de représenter les types qui se succèdent
comme ayant fait leur apparition dans l’ordre de supério
riié des classes ou des embranchements, etc., auxquels ils
appartiennent. Heckel a figuré le développement du régne
organique et la filiation des types au moyen d’une série
d’arbres généalogiques, dont il ne nous est pas possible de
présenter la copie, mais que nous essayerons de traduire
graphiquement, pour ainsi dire, à l’aide de diagrammes
qui en donneront au moins une idée. Le premier de ces
arbres retrace l’origine de tous les êtres organisés. Le point.
de départ est un être unique autogène (né de soi), donnant:
naissance à trois branches. La première représente l'arché=
phyte végétal, la troisième l'archéphyte animal, et linter-
médiaire le prototype ou archéphyte d'êtres que l’auteur
appelle Protistes et qui paraissent n’appartenir ni au Règne’
animal ni au Règne végétal. D’autres tableaux développent
ensuite, pour chaque rameau, la généalogie spéciale. A la
base du rameau végétal se trouvent les Fucoïdes et les Cha=
ragnes; à la base du rameau animal, les Coraliaires, les,
Échinodermes, les Mollusques et les Vertébrés. C'est-à-dire
DARWINISME. — HACKEL. 385
que, de prime abord, tout ce que l’on connaît de plus dif-
férent dans le Règne animal naitrait immédiatement l’un
de l’autre ou d'un type antérieur unique qui aurait disparu
immédiatement après, tandis que le type intermédiaire se-
rait représenté par les Diatomées. Qu’on jette maintenant
un coup d'œil sur les traités de Paléontologie les plus ré-
cents, et qu'on nous dise de quel droit les Charagnes. que
l’on connaît seulement dans les terrains tertiaires , figurent
au point de départ du Règne végétal; de quel droit on assi-
gncrail aux Coraliaires une priorité sur les Crinoides ou les
Trilobites? Sans nous livrer à l'analyse de chacun des ta-
bleaux, jetons un coup d’œil sur celui où est dessinée la
généaiogie des Échinodermes. On est frappé d’y voir, dans
un arbre qui doit être généalogique, c’est-à-dire représen-
ter la succession du développement des ¢tres dans le temps,
deux grandes périodes dont l’une, au point de départ de la
classe tout entière dans les terrains les plus anciens, con-
lient, à côté les uns des autres, une douzaine de types aussi
différents que les extrêmes de la classe à l'époque actuelle.
Bien plus, des types que l’on connaît seulement à l’époque
actuelle y sont représentés comme ayant existé à tous les
iges de la terre. D’un autre côté, vers les temps moyens de
a série géologique on voit surgir, également à côté les uns
Jes autres, des types tout aussi divers que les premiers,
tre lesquels la science ne saurait reconnaitre aucun lien
zénésique; ils n’en sont pas moins rattachés ensemble par
es rameaux constituant le prétendu arbre généalogique
uquel se relient tous les Echinodermes. Les autres grands
ypes du Règne, Articulés, Mollusques et Vertébrés, se trou-
yent reliés les uns aux autres d’une maniére tout aussi
irbitraire.
_ La science renoncerait aux droits qu’elle a possédés jusqu’à
Drésent à la confiance des esprits sérieux, si de pareilles
squisses étaient acceptées comme les indications d'un pro-
rés réel. Encore s’il y avait ici quelque principe qui nous
Mermit de perfectionner nos connaissances ou de les agrandir !
us aurions alors, malgré tout, quelque gratitude et quelque
AGASSIZ. 95
PLANTES. PROTISTES. ANIMAUX.
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CORMOPHYTES. ~ SPONGIAIRES, ARTICULÉS. VERT
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Archéphyte | Protistique.
Végétal archéphyte. Archéphyte | animal.
PROTISTES.
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Souche | Moneres
ou
commune autogone.
386 DE LA CLASSIFICATION.
Tableau généalogique des êtres organisés, d’après Heckel (4).
(1) Ce tableau et le suivant sont, non pas copiés dans l’ouvrage de Hæck el, mais tracés d’apré
arbres généalogiques dressés par lui. On essaye ainsi d'en donner une légè re idée à l’aide de sim
A oonammes sans due cela dispense de se reporter à l'original. ouvrage cité nlanches I et suival
1).
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IMPS nécenr. ......Col .. Lalistellés. Échinométridés. Échinonidés. Spatangoidés. Casidulidés. ..
Pliocéne.....
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: Antéoeene... ...... Rca Chie ed Oe cae cee: seeeeeedee Clypéastrides.
D Oe pie ee eee ee a ns osseuses.
Antéjurassiquilés. Latistellés. Echinométridés. Échinonidés, . . . . ..... ce. Clypéastrides,
DR
SECONDAIRE.
Grétacé.… ..à......|.. UE ARS ONE RP Dei Aavneae cake: 6s ca Peaes
Antécrétacé. |... Nevis . |... Spatangoïdés. Cassidulidés. . .|....
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Jurassique...). .,..
Triasique..... | bie ee
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Antétriasique ,
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PRIMAIRE.
Devonien. ..!..
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